Dîwân Traduit et présenté par Louis Massignon
Une première édition de
cette traduction a paru aux
Cahiers du Sud en 1955 précédée d’une perspective
transhistorique sur la vie de Hallâj.
EN COUVERTURE :
Calligraphie arabe
de Blandine Furet
La loi du 11 mars 1957
interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective.
Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite par quelque
procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause,
est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et
suivants du Code pénal.
Un diwân est une collection complète des
œuvres poétiques d’un auteur, établie, en suivant généralement l’ordre des rimes
(on sait que la rime est une découverte sémitique, simultanément effectuée en
arabe et en hébreu), par un critique littéraire.
Nous donnons ici en traduction française la
reconstitution du Diwân de Hallâj, telle que nous l’avons établie, dans
son texte, en 1931'. L’édition de 1931 contenait, non seulement les pièces
jugées authentiques, mais, placées à la suite, les pièces antérieures et
postérieures à lui attribuées, les fragments anonymes anciens et les poèmes
signés récents composés pour exprimer ses états d’âme.
La présente traduction ne donne que les pièces
jugées authentiques.
Précisons, d’abord, que Hallâj — mystique nourri
du Coran, qui condamne la prétention suspecte des poètes à une « inspiration »
mensongère — ne se considérait pas comme un poète. Il avait reçu une formation,
non seulement théologique, mais philosophique, sa terminologie apparentée à
celle des shi'ites ismaéliens le prouve, et les rares pièces de vers qui
parsèment ses écrits didactiques en prose sont des explications rimées,
mnémotechniques. Contrairement aux mystiques contemporains, il évite, avec
pudeur, de citer des vers d’amour profane pour les appliquer à l’amour divin,
et Celui qu’il aime n’a pas de visage. Il a fallu une crise de ravissements,
assez brève, pour lui arracher les poèmes extatiques qui commentent les
oraisons en prose assonancée, dans les Akhbâr al-Hallâj.
Hallâj, pourtant, classé parmi les poètes
répertoriés dans le Dictionnaire des poètes d’Ibn Jamâ’a (m.
767/1365), est reconnu
I Journal asiatique, Paris,
janvier-mars 1931.
DÎWÂN
comme tel par le grand
poète philosophe Ma’arrî, et son style poétique a été apprécié par Baqlî,
Jildakî, et Yâfi’î.
Et son Dîwân paraît avoir été compilé dès
le XIe siècle, ainsi que les témoignages de Qushayri, de Hujwirî, et
de Jawbarî nous induisent à le penser. Mais a-t-il jamais été complètement «
dissocié», comme un dîwân poétique normal, des textes en prose que ses
vers commentaient?
A part le ms. Fatih 2650 ' (f. 100 à 106 a) et le
ms. Koprülü 1620[1] [2] qui nous
donnent, et uniquement, 23 + 7 pièces de vers de Hallâj — les manuscrits qui
nous ont servi à reconstituer ce Dîwân al-Hallâj sont des textes mixtes,
sortes de «chante-fables», destinés à des «récitals» presque dramatiques, où.
dans chaque péri- cope, une oraison (ou un récit) en prose est «
psychologiquement » commentée par un court poème.
Ces manuscrits représentent, croyons-nous, des
refaçons successives d'un opuscule très ancien, rédigé, un an au plus après
l'exécution de Hallâj, par son disciple Shâkir-b-Ahmad Baghdâdî, avant de
répondre à son appel, et de se faire exécuter, pour lui, à son tour; pour
perpétuer le mémorial de son maître dont tous les traités avaient été condamnés
à être détruits. Cet opuscule, que Qushayri appelle Poèmes et Oraisons
extatiques, et qu’il aperçut, relié en rouge, dans la bibliothèque de
Sulamî à Nishapur, subit des retouches dogmatiques (pour les oraisons) et des
retranchements (pour les poèmes condamnés) de la main de Nasrabadhî, puis du
célèbre hanbalite Ibn Aqîl; pour être finalement édité par un traditionniste
connu, mort à Alexandrie: A.T. Silafî (m. 576/ I 180), de qui Fakhr Fârisî,
puis l’ordre des shàdhiliya le reçurent. Silafî était allé en Chirwan (Caucase)
pour l’auditionner chez un prédicateur connu, Ibn al-Qassâs Mufaddid, qui
l’avait croyons- nous «enrobé» de pièces non authentiques, désormais amalgamées
à l’opuscule original, sous forme romancée de « Visites», Ziyârât faites
par des amis à Hallâj en prison.
Ce récit d’encadrement, qualifié de Hikâyat
(al-Kirmanî) est utilisé à partir du XIIIe siècle par des
prédicateurs comme Fakhr
Fârisî (m.
622/1225) et Ibn Ghânim Maqdisî (m. 677/1278) en Égypte, à Jérusalem et
à La Mecque; et il est à la base des séances extatiques données à la Zaouïa de
Sidi Bono à Grenade, à proximité du Palais royal, à la fin de la dynastie des
Banu’l-Ahmar, parfois en présence de la Cour.
Nous avons enfin une
dernière refaçon, franchement populaire, de ce récit hallagien, dans une courte
Qissat Husayn al-Hallâj, vraisemblablement compilée au Qarâfa du
Caire, dans le couvent kurde yézidi, ultra-hanbalite, de l’ordre des 'adawiya,
sous Bibars l’Arbalétrier.
Voici donc le tableau
(conjectural) de la formation, par «alluvions» successives, de notre texte
hallagien fondamental : pour les quatre-vingt-trois pièces traduites ici :
Io [Abr. : Dîw.
(1914)] poèmes et oraisons extatiques — dîwân ash’âr wamunâjayât :
opuscule de Shâkir, selon l’hypothèse de P. Kraus, ap. Akhb., p. 64 sq;
retouché par Nasrabadhî, puis Ibn 'AqîL — Publié d’abord dans Quatre
Textes..., Paris, 1914, 4e partie; réédité en 1936, avec l’aide
de P. Kraus, sous le titre d'Akhbàr al-Hallâj. Ses 74 + 6 péricopes ont
fourni au présent ouvrage vingt et un poèmes: vers 1-2 de la qasîda X, qasîda
VI, muqatta’a nos 19, 20, 21, 22, 29, 30, 33, 37, 39, 42, 46, 49, 50, 55, 56,
58, 61, 65, 66, auxquels l’édition de 1936 a ajouté les n°s 61,44,
6, 68, et les vers 3-4 de la qasîda V. Il serait légitime d’y ajouter quatre
pièces très hardies (qasîda I, nos 12, 52-53 (connus de
Suhrawardî)), et quatre autres (qasîda II, III, IV, VII); total, trente-quatre
pièces.
2° [Abr.: Taq.] «récit
d’encadrement», Hikâya ou Taqyîd ( = «suite»), attribuable à Ibn
al-Qassâs Mufaddid. Ajoutant aux numéros fournis par le premier opuscule, les nos
(qasîda II, III, iv, v, vu, vin), ix; les muqatta’a nos 1-4, 5, 8,
9, 10, 11, (12), 15-16, 17, 25-27, 34, 35, 40, 41, 43, (44), 45, 47, 51,
(52-53), 54, 57, (61), 63, 67, (68), 69; Yatîma nos 2, 3; total:
vingt-huit pièceà.
3" [Abr. : Qissa]
légende de Husayn al-Hallâj (Qissat Husayn al-Hallâj), contenant
quarante-six poèmes hallagiens (dont quatre zajal populaires). La Qissa
a été publiée dans le Donum natalicum H. S. Nyberg oblatum, Uppsala,
1954, p. 102-117, contenant toutes les proses, mais seulement quinze poèmes sur
quarante-six
(la liste des
quarante-six[III] est donnée
p. 116-117). La Qissa conserve cinq pièces primitives des Akhbar.
cinq additions de la Hikâya; annexe la Qasîda de Musfir Sabtî, un zajal
connu de Jildaki. Analyse dans la Passion, t. Il, p. 467-76; extraits
dans Recueil..., p 61-64
4° Enfin, nous avons recueilli dix poèmes
de Hallâj incorporés dans les fragments en prose sauvés de la destruction;
d’abord dans \esTawâsîn (sept numéros: les nos 10, 13, 14,
28, 38, 59, yatîma n" 6), puis grâce au philosophe mystique Daylami (trois
numéros : qasîda vm bis, nos 16 bis. 42 bis). Et, en outre, des vers
isolés, dans des sources imprévues (dans la Geniza, puits rituel de la
synagogue caraïte du Vieux-Caire).
On remarquera, en comparant les nos 28
et 29, et les variantes du n" 57, que nous avons là une tradition
textuelle indépendante du texte de base fondamental.
Nous renvoyons à l’édition de 1931 les lecteurs
curieux des interférences de la pensée de Hallâj avec Sumnûn, Abû Firâs, 'A.Q.
Hamadhani, Musfir Sabti (cf. c. p. 1 17, 1 19, 122, 139)2.
La légende hallagienne a provoqué, dans tout
l’islam non arabe, en persan, en turc, en pashtu, en urdu, en bengali, la
floraison de grands poèmes célébrant le «martyr mystique de l'islam». Il y a
même, en persan, un Diwân de Mansûr Hallâj qui doit être, naturellement
restitué à un auteur bien postérieur, de langue persane: Husayn Khwârizmi (m.
839/1435). Nous n’avons pas donné de références ici3 à cette immense
et souvent magnifique littérature car elle est née de récits en prose, sur la
vie et le supplice de Hallâj, traduits de l'arabe en persan un peu avant la
«création», par Fariduddin 'Attâr et ses disciples, de l'étonnante œuvre hallagienne
centrée autour de la biographie de Hallâj qui clôt, de façon éblouissante, son Mémorial
des Saints, Tadhkirat al-Awliyâ: décrivant un martyre dont les scènes
pathétiques ont été représentées,
par le peintre de Herat,
Behzad, dans une série de miniatures dont nous ne sommes pas encore arrivés à
retrouver d’originaux. Le Mémorial de Attâr traduit de nombreuses
sentences de Hallâj, en prose, mais ne traduit qu'une pièce de vers, Nadimi
(n" 37). Quant à Rûzbehan Baqlî, son contemporain, il nous donne la
traduction en persan de seize pièces poétiques de Hallâj (les sept pièces des Tawâsin.
avec qasida III. 57 (v. 3), 15, n° 13 (p. 128), qasîda IX, 63, yatîma n° 8. 55,
5) — mais je n'ai retrouvé nulle part d’échos de cette traduction, par ailleurs
pleine d’intérêt pour qui veut saisir le fond de la pensée poétique
hallagienne, dégagée de la dure empreinte grammaticale arabe 1.
L. M.
1 Cf. La Vie et
les Œuvres de Ruzbehan. Baqlî. ap Stud Oneniaha I Pedersen du ata. Copenhague.
1953, p. 236-249. Un mot de Kishi. rapproché d'un passage d'Ibn Khaldoun.
permettrait de rattacher aux hallagiens du Khurâsàn l'origine du quatrain
persan.
ABRÉVIATIONS (références)
Cor. = Coran
Pour les œuvres
de Louis Massignon. reference est faite à la dernière édition :
Akhb. = Akhbàr al-Hallâj, 3' éd., Paris,
1957.
Dîw. = ici, p. 9,
1".
E. = Essai sur
les origines du lexique technique de la mystique musulmane. 2e
éd., Paris, 1954.
M.FK. = Mélanges
Fuad Koprülü, Istanbul, 1953, p. 351- 368.
P. = La Passion de
Hallâj. martyr mystique de l'Islam.
T éd. Gallimard,
Paris, 1975, 4 vol.
Qissa = ici, p. 9, 3°.
Cf. P., Il, p. 467-476.
QT = Quatre textes
inédits, relatifs a la biographie d'al-
Hallâj, Geuthner, Paris,
1914.
Recueil = Recueil
de textes inédits concernant 1’histoire de la mystique en pays d'Islam, Geuthner, Paris,
1929.
Riw. = Les Riwâyât
d'al-Hallâj, P, III, p. 294-295, 344- 352.
Taq = ici, p. 9, 2°.
Cf. P., Il, p. 464-467.
Taw. = Kitáb al-Tawasin d'al-Hallâj,
Paris, 1913. Cf. P.,
III, p. 297-344.
Perspective
transhistorique
sur la vie de Hallâj[IV]
Hallâj (= Husayn-Ibn-Mansûr) naît en 244/857
environ, et meurt en 309/922. Quand sa mère devint enceinte de lui, elle fit
vœu de l’offrir comme serviteur à des fuqarâ (religieux pauvres volontaires) (Qissa).
Et elle le nomma Husayn, en souvenir du fils martyrisé de Fâtima, la fille
bénie du Prophète. Il naît en Iran, en Fars, à Tûr, écart au N-E du bourg de
Beïza. Beïza était un centre très arabisé, le grand grammairien arabe Sîbawayh
y était né; c’était un petit camp sur la route militaire allant de Basra au
Khurâsân, peuplé de clients hârithiya yéménites. Le père de Hallâj,
probablement cardeur, s’en alla travailler dans le milieu textile s’étendant de
Tustar jusqu'à Wâsit (sur le Tigre), ville de fondation arabe, où l’enfant
acheva d'oublier la langue persane. Wâsit était une cité en majorité sunnite,
de rite hanbalite (avec une minorité shi’ite extrémiste dans les campagnes,
près des paysans araméens), centre d’une école renommée de lecteurs du Coran;
l’enfant, jusqu'à douze ans, y apprit le Coran par cœur, et devint un hâfiz;
mais, très vite, il rechercha le sens symbolique qui élève la prière de l’âme
vers Dieu.
L’arabe, langue dont on n’écrit que les
consonnes, où l’on ne peut vocaliser les finales tant qu’on n’a pas construit
la phrase, force l’écolier à raisonner, le rend apte à exprimer des idées
générales, et aussi à s’en persuader. Langue du Coran où Hallâj, dès l’enfance,
chercha à goûter les réalités de la foi; elle sera la langue de ses effusions
mystiques, quoique le parler de son terroir natal (sinon de ses parents) ait
été un dialecte iranien. Pour le
musulman, l’arabe exprime
la parole de Dieu sous une forme adéquate (le Coran est une récitation
«incréée», ses consonnes isolées signifient des idées divines). Le croyant doit
donc arriver à «intérioriser», à réaliser sa prière arabe. L’islam est avant
tout témoignage (shaháda) formulant adoration du Dieu unique d’Abraham,
du Miséricordieux ; Hallâj entrevit de bonne heure que le Tawhîd, la formule de
cette adoration n’est réelle que quand c'est celle que Dieu prononce Lui-méme (
- Lâïh min al-azal». d’Ansari), celle du Témoin Étemel (shâhid
al-qidam = l’Esprit). Il le dira bientôt: pour le croyant, l’invocation «
au Nom de Dieu » doit devenir «Fiat» (= kun); «l’amour, c’est se tenir
debout tout près du Bien-aimé, en se renonçant en entier et en se transformant
en Sa configuration •>. Il semble donc qu’en priant en arabe, il ait déjà
ressenti une première touche d’unification personnalisatrice, et ressenti, pour
en souffrir sourdement, la jalousie désirante de Dieu. « Personne n’est plus
jaloux que la Vérité Créatrice », dit un hadîth (là shakhs aghyar min
al-Haqq). «C’est l’archer qui, de suite, tend son arc en visant Dieu, sans
plus dévier qu’il ne L’ait atteint (de ses flèches). » «Celui qui considère ses
œuvres perd de vue Celui-là pour qui il les œuvrait ; et celui qui considère
Celui-là pour qui il les œuvrait perd de vue ses œuvres. »
Après avoir brusquement
choisi et écouté, puis quitté Sahl, de Tustar, son premier maître en mystique,
Hallâj, à vingt ans, s’en vient à Basra, où les hârithiya étaient liés avec les
B. Muhallab azdites, pour recevoir l’habit monastique de sûfî, de la main de
’Amr Makkî. La communauté musulmane primitive a été fondée à Médine sous forme
d’une fraternité spirituelle de croyants supplantant le clan et la famille.
Être sùfi, c’est retrouver cette vie commune de compagnonnage dont le bien
commun, la prière collective fait accéder ensemble à Dieu, par l’imitation de
Muhammad, et aussi des autres prophètes (tendance universaliste). En même
temps qu’il reçoit l’habit, Hallâj contracte mariage avec Umm al-Husayn, fille
d’Abû Ya'qûb Aqta’ Basrî, mariage monogame, foyer uni jusqu’au bout, d’au
moins quatre enfants, trois fils et une fille, dont Hallâj, durant ses
absences, assurera la subsistance grâce à son beau-frère, un Kamaba’î. Ce
mariage, dont ’Amr Makkî fut jaloux, établit Hallâj à Basra, dans le quartier
Tamim, clan B. Mujâshi’, dont les kamaba’iya, B. al’Amm, du Nahr Tira,
étaient <• clients- (majali);
politiquement ralliés à la rébellion zaydite des Zanj (c'était le temps de la
guerre servile), et particulièrement contaminés par l’hérésie shi'ite
extrémiste (secrète) des Mukhammisa. Son entrée dans ce clan parait être à
l'origine de sa réputation persistante de révolutionnaire (d'où sa première
arrestation à Dîri), voire de conspirateur shi'ite. Hallâj gardera, certes, de
ces accointances de clan de curieux ternies d'apparence shi'ite dans son apologétique,
mais il ne cessa de vivre à Basra, dans sa famille, d’une vie ascétique
fervente et toujours sunnite : il jeûnait chaque Ramadan intégralement, et le
jour de la Fête (de clôture du jeûne), il s'habillait de noir <• car c'est
l'habit qui convient à celui dont les œuvres sont réprouvées >• {Akhh.
24) : attitude d'âme bien curieuse, sorte de coquetterie d’humilité, avec Dieu.
Le conflit entre son directeur spirituel (Makki)
et son beau-père (Aqta’) persistant, Hallâj, après avoir patienté un bon moment
sur le conseil du célèbre sûfî Junayd qu’il était allé consulter à Bagdad, se
lasse, et part pour La Mecque. Ce départ paraît avoir coïncidé avec
l'écrasement de la rébellion zanj, confirmant Hallâj dans cette certitude que
ce n’est pas par une guerre temporelle qu’on rétablit l’unité de la Communauté
islamique, mais par les prières et sacrifices de la vie ascétique. Il arrive à
La Mecque pour son premierhajj (noter que le pèlerinage légal est la
seule prescription canonique effectuable pour autrui) ; là, il fait vœu de
demeurer un anf'umra) sur le parvis du temple, en état de jeûne et de
silence perpétuels, à l’exemple de Maryam qui, selon le Coran, se prépara ainsi
à la naissance du - Fiat - divin en elle. Attente savourée par une sorte de
goût intérieur, cette khalwa, solitude dans le silence, aide à la
formation d'une parole substantielle dans le cœur de l’ascète. « S'il était
jeté un atome de ce que j’ai dans le cœur sur des montagnes, elles fondraient.
» « Mon esprit s’est emmêlé à Son Esprit comme le musc avec l’ambre, comme le
vin avec l’eau pure. » «Tu infonds la conscience personnelle dans mon cœur,
comme les esprits s’in- fondent dans les corps.» «Nos consciences sont une
seule Vierge... » «où seul l'Esprit de vérité pénètre». Paroles extatiques,
locutions théopathiques, dont les sûfîs recherchaient la jouissance à part soi,
mais dont ils interdisaient la répétition «à jeun», en public. Car le vice des
sûfîs, c’est de garder close sur eux seuls la chambre de leur intimité avec
Dieu (Hallâj au gibet sera interpellé
par le sûfi Shiblî lui
criant le terrible verset coranique XV, 70, des gens de Sodome à Lot : « ne
t’avions-nous pas interdit d’accueillir aucun hôte?»); car la Loi islamique
maintient que la Déité reste inaccessible. Dès lors, ’Amr Makkî rompt avec son
ancien disciple. De son côté, Hallâj s’astreint à une rude discipline d’observance
rituelle, choisissant entre les rites le plus dur (as'ab; par talfîq);
des disciples viennent à lui, qu’il désigne en son poème - ashábí wakhillânî
» ; c’est peut-être pour eux qu’il écrit ses vingt- sept Riwâyât, destinées
à un public restreint d’ascètes, contenant des hadîth qudsî.
Revenu de La Mecque en Ahwâz, il commence sa
première prédication publique, au grand scandale des sûfîs ; il rejette alors
l'habit sûfi pour parler librement aux «gens du siècle», spécialement aux
scribes et publicains, public lettré, mais blasé et sceptique. Quelques-uns,
des sunnites d'origine araméenne et iranienne, ex-chrétiens sortis des écoles
nestonennes de Deïr Qunnâ, et promus vizirs à Bagdad (Qunna’iya: B. Wahb et B.
Jarrâh) deviennent et resteront prohallagiens ; d’autres, mu’tazilites et
shi’ites, ces derniers gros fonctionnaires fiscaux (B. al-Furât, B. Naw-
bakht), ameutent la foule contre Hallâj, l’accusent de truquages, de faux
miracles (distributions de vivres, de numéraire aux pauvres). Ce début de
l’apostolat hallagien auquel il devra son nom (Hallâj al-asrâr = cardeur du
plus intime secret dans les consciences) est une méthode d’introspection
mystique universaliste; il cherche et veut faire trouver Dieu par chacun au
fond de son âme, entrant en otage dans la nécessité confessionnelle d’autrui;
il s'abstient de critiquer les dénominations différenciant les groupes cultuels
monothéistes, par anti-qadansme (ce serait, dit-il, supposer que l’on se les
choisit; Akhb. 45); il fait remonter à une Base, source des idées
suprêmes, et de toute compréhension (préface • sayhûr » ) ; les formes
des ntes ne sont qu'intermédiaires, il faut passer outre pour en goûter la
réalité divine. Il use sans hésiter de la terminologie de ses adversaires,
mu'tazilites (shukr, adl) comme shi’ites salma- niens ('ayn, mim,
sin), pour la redresser et sublimer.
Rejeter le froc, déchirer le manteau rapiécé,
c'est rompre la discipline de l’arcane, c'est se livrer nu en spectacle au
soupçon et aux haines. «Quand Dieu prend un cœur, Il le vide de ce qui n’est
pas Lui; quand II aime un serviteur. Il incite les autres à le
persécuter, pour que ce serviteur
vienne se serrer contre Lui seul » (Akhb. 36). «Prétendre Le connaître,
c'est de l’ignorance; persister à Le servir, c'est de l'irrespect; s'interdire
de Le combattre, c'est folie; se laisser endormir par Sa paix, c'est sottise» (Akhb.
14). « Puisse mon âme T'épargner de passer pour un juge injuste» (ici, M. 34).
«Ne te laisse point surprendre par Dieu, et pourtant ne désespère pas de Lui ;
ne convoite pas Son amour, et pourtant ne te résigne point à ne pas L'aimer; ne
cherche point à L’affirmer, mais ne cède pas à Le nier (quand II disparaît); et
surtout garde-toi de proclamer (de toi-même) Son unité» (Akhb. 41).
Comme tant de Basriens, il part en Khurâsân
continuer sa prédication dans les colonies arabes de l'Iran oriental (Tâlaqân),
prêchant dans les cités, séjournant aux frontières, dans les couvents
fortifiés des volontaires pour la guerre sainte. Au bout de cinq ans, il
revient en Ahwâz, et grâce à des protections officielles (le secrétaire d'État
Hamd Qunna'î) il vient installer les siens à Bagdad, avec tout un groupe de
notables d’Ahwâz (transfert de l’atelier de tissage impérial, dâr al-tiràz,
tissant les voiles de la Ka’ba, de Tustar à Bagdad).
Puis c’est un second pèlerinage (avec quatre
cents disciples) à La Mecque; où d’anciens amis, des sûfîs, l'accusent, non
plus de charlatanisme, mais de sortilèges magiques, de magie blanche, de pactes
avec les djinns.
Il repart pour un second grand voyage, encore
plus loin, au-delà du domaine de l’intercession de Muhammad(shafa a),
infidèles de l'Inde, manichéens et bouddhistes du Turkestan; arrivé par mer, il
remonte l'Indus, va de Multan en Qashmir, et monte au N-E jusqu'à Turfan (Mâ
Sîn) avec les caravanes ahwaziennes portant jusque-là les brocarts tissés au
tirâz de Tustar, et rapportant à Bagdad le beau papier chine (dit de Ça-çéou)
sur lequel les disciples de Hallâj copieront ses œuvres. Au-delà de la
communauté musulmane, c'est à toute l'humanité qu'il pense, pour lui communiquer
ce curieux désir de Dieu, patient et pudique, qui dès lors le caractérise ;
entendant à Néhavend les trompettes du Jour de l’An, il avait dit : « Quand
donc viendra notre Jour de l'An ? quand, mis au pilori, je serai proche de
Dieu»; et treize ans plus tard, lors d’une mise au pilori qui dura trois jours,
un disciple lui rappela
PERSPECTIVE
TRANSHISTORIQUE SUR LA VIE DE HALLÂJ cette phrase, et ajouta ironiquement : «
As-tu reçu tes étrennes ? — Oui, et tant, que j 'en suis confus, car je n’avais
pas voulu me hâter vers ma joie» (Akhb. 22); on lui fera réciter en
croix le verset coranique XLI1, 17 :« Ils crient qu’elle se hâte, ceux qui ne
croient pas en l’Heure; mais ceux qui y croient l’attendent, avec une crainte
amoureuse, car ils savent qu'elle est la Vérité. »
Il revient alors à La Mecque, pour son troisième
et dernier pèlerinage. L’essentiel du hajj, c’est ’Arafât, et, là, l’offrande
du sacrifice d’Abraham. A son pèlerinage d’adieu, au moment de l’ikmâl, le
prophète Muhammad n’a pas épuisé en cette unique fête la signification
salvatrice du hajj, qui doit déborder de pardon sanctifiant, au-delà de
l’islam, sur tous. Les shi’ites, qui l’ont pressenti, placent, après et au-delà
de l’ikmâl, la cérémonie du Ghadîr, où Muhammad aurait transféré le symbole
d'intercession de la Ka’ba, cette Pierre Noire et muette, à une Pierre vivante,
l’Imâm. Hallâj comprend que notre désir de Dieu doit détruire mentalement en
nous l’image du Temple, pour trouver Celui qui l’a fondé, et détruire le temple
de notre corps, pour rejoindre Celui qui y est venu parler aux hommes. Durant
ce dernier pèlerinage, à Arafât (vers l’an 290/902), au moment de la Waqfa, où
l'on crie les noms de tous ceux qu’on aime, pour qu’ils soient pardonnés,
Hallâj, reprenant le cri rituel de la foule, >• labbayk ■■ (à Tes
ordres), demande à Dieu qu'il l’appauvrisse encore davantage, le fasse
méconnaître et exclure ; afin que ce soit Dieu seul qui Se remercie Lui-même à
travers ses lèvres. On sait l'importance de la Waqfa, et de ses deux rak'a
pour les pèlerins; selon le proverbe maghrébin, ces deux brèves oraisons sont
«ces deux colombes jumelles qui boivent une fois l'an et restent assoiffées
toute l’année», car elles sont la prière d'offrande du sacrifice (tarif)
pour tous les chers absents dont on prononce alors le nom. «On mène les
victimes (— les agneaux) au sacrifice, mais moi, j’apporte le sacrifice de mes
veines et de mon sang» (ici, M. 51).
Revenu de La Mecque à Bagdad, Hallâj va exprimer
le désir étonnant de mourir anathème, frappé par la Loi de l'islam, pour tous (
■< malâmati« qui devient «fatà »), 11 installe chez lui une
Ka’ba en réduction, il prie de nuit près des tombeaux (Ibn Hanbal), de jour, il
commence, en pleine rue, dans la capitale, une séné de
discours inouïs: «Ô musulmans»,
crie-t-il dans les souks, durant une sorte d'extase jubilante, mais lucide,
■< sauvez-moi de Dieu... Il ne me reprend pas à moi-même, et il ne me rend
pas non plus mon âme ; quelle coquetterie : c’est plus que je n’en puis supporter»
(Akhb. 38). Puis, voulant provoquer les fidèles à faire cesser ce
scandale d’un homme qui ose se dire uni à la Déité, en le tuant, il leur crie,
dans la mosquée-cathédrale d'al-Mansûr : « Dieu vous a rendu mon sang licite:
tuez-moi... Il n'est pas au monde pour les musulmans de devoir plus urgent que
ma mise à mort... (on ajoutera : soyez donc combattants pour la foi, et que je
meure (de vous) martyr)» (Akhb. 50). «C’est dans la confession de la
Croix que je mourrai... Tuez donc cette maudite (= sa personne)» (Akhb.
52).
L’émotion populaire causée par cette prédication
ébranle également les milieux lettrés, du fait des opuscules à portée
théologique que Hallâj devait avoir déjà écrits sur des sujets brûlants,
discutés entre shi’ites, comme la prédestination de Muhammad et le caractère
inachevé de sa mission prophétique. D’autre part, un juriste sunnite zahirite,
Muhammad Ibn Dâwûd, qui était aussi un poète, théoricien du pur amour uraniste,
et disait s’interdire toute satisfaction chamelle «afin de perpétuer le
désir», ne pouvait tolérer les prétentions de Hallâj à une union mystique
consommée avec Dieu; usant de ses fonctions d'assesseur au tribunal du
grand-cadi de Bagdad, il dénonça Hallâj à la Cour, demandant pour lui
condamnation à mort. Sa proposition, contresignée par d’autres, se heurta à
l’opposition de l’autre assesseur, un canoniste shâfi’ite, Ibn Surayj, qui
soutint qu'une telle inspiration mystique surclassait la juridiction des
tribunaux de droit canon, ce qui sauva Hallâj. C’est à cette époque que l'école
des grammairiens de Basra (Sirafî, et Fasawî), dans un récit hostile, fait
prononcer par Hallâj une réplique célèbre, qui a suscité d'innombrables
commentaires : arrivant à la mosquée d’al-Mansûr, il fut interpellé par son ami
Shiblî, mystique et poète, qui avait son cercle d’auditeurs sous la «coupole
des poètes», et aurait répliqué, cachant à demi ses yeux sous sa manche, «
Ana'l Haqq» = je suis la Vérité Créatrice = «mon je, c’est Dieu » :
déclaration frôlant le blasphème, et commentée de suite par son beau quatrain :
« vô sirra sirri... ô secret de mon âme. Toi qui sais tant T’amenuiser
que Tu échappes à la prise de toute
imagination pour tout
être...» Et voici un fragment d'oraison : « le parfum de Ton approche suffit à
me faire mépriser toute la création, et l'enfer n’est rien au prix de mon vide
quand Tu me désertes, pardonne aux créatures et non pas à moi, je ne conteste
pas avec Toi pour moi-même, et ne Te réclame pas mon dû » (Akhb. 44).
Hallâj, par sa véhémence paradoxale, ravivait en
bien des cœurs le désir d'une réforme morale de la Communauté musulmane, dans
son chef et dans ses membres; et persuadait beaucoup de croyants de
l’efficacité sociale des prières et conseils des saints, des Abdâi (piliers
spirituels du monde) et de leur chef invisible du moment, le Témoin actuel, le
Pôle. Nombre de hautes personnalités, selon Istakhri, virent alors en Hallâj ce
chef invisible et inspiré; des secrétaires d’État, parents ou alliés de ’Alî
Ibn Isa et de Hamd Qunna’î (comme Nu’mân, Dawlâbî, Ibn Abî’l Baghl, M. Ibn
’Abdalhamîd), des émirs (Hy. Ibn Hamdân, Nasr Qushûrî), des walis des amsâr
(comme A.B. Mâdhara’yî, qui installera une petite Ka’ba au Qarâfâ du Caire en
303), Nujh Tulûnî; et des samanides (Akh Su'lûk, Sîmjûr, Hy. Marrûdhî, Bal’amî,
Qaraté- kin), des «mulûk» (= dahàqin : Sâwî, Madâ’inî), et des ashrâf
hachémites (A.B. Rab’î, Haykal, Ahmad-b-’Abbâs Zaynabi). Ils entretenaient avec
lui une correspondance de direction spirituelle lui ménageant sur la politique
générale une incidence; c'est alors que Hallâj dut dédier à Hy. Ibn Hamdân,
Nasr, et Ibn ’Isa ses opuscules sur la politique et les devoirs des vizirs. Il
y avait alors, même parmi les ulémas, un désir général d'assainissement des
rouages administratifs; on demandart un gouvernement sincèrement musulman : un
vizirat rendant la justice, surtout en matière fiscale (contre les abus pervers
de fermiers généraux shi'ites, antidynastiques) ; et un khalifat conscient des
responsabilités de sa charge devant Dieu; qui fasse agréer par Dieu les actes
liturgiques de la Communauté muhammadienne (prière, hajj, jihâd). On espérait
qu’Hallâj s’y emploierait, alors que Hallâj, pressentant une confiscation, amie
ou ennemie, de sa liberté, aspirait à s’aller cacher au pays natal.
En 296/908, la conspiration réformatrice des
sunnites «bien pensants» éclate, avec l’essai, pendant un seul jour, du
khalifat «hanbalite barbahânte » d’Ibn al-Mu’tazz; et échoue, n’ayant pu se
faire créditer en numéraire par les banquiers juifs de la Cour, complices des
fermiers généraux shi'ites antidynastiques; Muqta- dir, le khalife enfant, est
rétabli, avec un nouveau vizir, un technicien fiscal, un shi’ite, Ibn
al-Furât. Les poursuites contre l'émir Hy. Ibn Hamdân, en fuite, découvrent
Hallâj, son conseiller intime : le vizir le fait surveiller, puis, à
l'avortement d'un projet de vizirat sunnite (parti des Qunna'iya), lance un
mandat d'arrêt contre les hallagiens; quatre sont arrêtés, Hallâj s'échappe,
avec Karnaba'î; ils vont se cacher, en Ahwâz à Suse, cité hanbalite : auprès de
la tombe du prophète Daniel, le supputateur des Derniers Temps. Au bout de
trois ans d'enquêtes policières, dirigées par un traître, et soutenues par la
haine d'un sunnite, Hâmid, fermier général de Wâsit, Hallâj est arrêté et
ramené à Bagdad où son procès final commence, qui durera neuf ans.
Cette période finale est aussi l'épreuve cruciale
de sa vocation. Voici sommairement l’enchaînement extérieur des faits; en 301/
913, un nouveau vizir, Ibn 'Isa, un Qunna'î, dont un des secrétaires d'État,
Hamd Qunna’î, son cousin, est hallagien déclaré, fait avorter momentanément le
procès, et soustrait le cas de Hallâj à la compétence du cadi conformément à la
fatwâ shâfi ite d'Ibn Su- rayj ; ses disciples sont relâchés, et tout ce qu’obtiennent
ses ennemis, c'est trois jours d'exposition au pilori, sous un écriteau
mensonger •< agent qarmate » (imaginé par le préfet de police Mu nis Fahi,
pour faire pièce au vizir). Interné au Palais, Hallâj est autorisé à prêcher
aux détenus de droit commun, est introduit aussi près du khalife (il le guérit,
fin 303, d'une crise fébrile, et >• ressuscite » en 305 le perroquet
omanien du prince héritier Râdî) ; jaloux, les mu'tazilites font circuler à la
Cour un pamphlet d'Awârijî décrivant ses trucs et son «charlatanisme
Mais durant son second vizirat (304-306) le
shi'ite Ibn al-Furât n'ose pas, à cause de la Reine Mère, rouvrir le procès.
Hallâj peut rédiger en prison ses derniers ouvrages; un d'entre eux, sauvé en
309 par Ibn ' Atâ, le Tá Sin al-Azal, nous montre en son dernier état la
pensée de Hallâj, réalisant petit à petit son offrande et son sacrifice. Son
désir fondamental d'unifier les modes de l’adoration des hommes, en esprit et
en vérité, se heurte, à travers la rivalité de Shalmaghâni à la Cour, à
l'obstacle primordial, à l’hypocrite malice des hommes dont il sonde l’origine
angélique dans cet
PERSPECTIVE
TRANSHISTORIQUE SUR LA VIE DE HALLÀJ opuscule dont le titre complet est « La
pureté préétemelle et la légitimité des prédications (de l'CJnité divine) quand
on les retourne selon leurs significations réelles».
Deux êtres, dit-il, ont été prédestinés à
témoigner que l’essence du Dieu Unique est inaccessible, Satan (= Iblîs) devant
les anges au ciel, Muhammad devant les hommes sur terre ; hérauts, l’un de la
pure nature angélique, l’autre de la pure nature humaine; et, ce faisant, l’un
et l’autre se sont arrêtés à mi-chemin: leur attachement jaloux à l’idée pure
d’une Déité simple, leur proclamation de la shahâda n’a pas pu indiquer qu’il
fallait l’outrepasser pour s’unir pleinement à l’unifiante volonté de Dieu. Au
covenant, Iblîs n’a pas voulu tolérer la pensée qu'un Dieu adorable assumerait
la forme humiliée et matérielle d'Adam (préfigure, alors, du Juge). Au Mi’râj,
à son ascension nocturne, Muhammad s’est arrêté au seuil de l’incendie divin
sans oser « devenir» le Buisson Ardent de Moïse; et Hallâj, qui se substitue à
lui par amour, l’exhorte à avancer, à pénétrer dans le feu du vouloir divin
jusqu'à en mourir, comme le papillon mystique, et à se «consommer en son Objet»
; Muhammad acceptera un jour, il a restauré le pèlerinage, mais il reste à
consommer l’islam, à ramener la qibla vers Jérusalem, à faire «rentrer la ’umra
dans le hajj » ; si Muhammad a trouvé et laissé la Flamme de l’unité divine
cernée, encerclée et défendue de toutes parts par la haie interdictive de la
Loi. ce n’est que pour un temps; en attendant qu'un jour vienne où les prières
et sacrifices des saints substitués à lui par amour l’outrepasseront angéliquement
à sa place, osant entrer en contestation avec le Miséricordieux pour obtenir
enfin que l’islam s'achève en un rassemblement intégral de l’humanité
pardonnée. En s'arrêtant ainsi, Iblîs a provoqué les péchés des hommes, et
Muhammad a retardé l’heure de leur Jugement transfigurant qu'il avait mission
d’annoncer. Et pourtant l'un, dans son dam de légalisme irrémissible, nous
incite à outrepasser ce seuil de la suprême déréliction pour trouver l'Amour;
et l'autre, par son retard à s'abandonner, mesure le temps de formation des
saints dont il attend qu’ils le dépassent. L’un et l'autre jalonnent, comme
deux bornes de la pure nature, le seuil que l'Esprit divin fait survoler aux
têtes sanctifiées qu’il introduit dans l'Un par une ruse imprévisible et
transnaturelle de l’amour.
Ce n’est pas que Hallâj
compare le destin final d’Iblîs avec celui du Prophète; l’exclusion du héraut
de la nature angélique (naturellement séparée de l’union mystique) doit
contraster avec l’élection finale du héraut de la nature humaine (réservée à
cette union). Satan, lui, à l’origine du monde, a refusé de s’unir à l’ordre
divin l’invitant à se prosterner devant la forme de sa préfigure (Adam);
obstiné dans sa volonté propre d’aimer telle quelle la Déité incommunicable,
dans le quiétisme de sa contemplation fermée; obstiné à témoigner cette Déité
selon sa nature angélique, sans oser consentir à la bonne nouvelle, à
l’effusion si simple de l’humilité divine, à cette extase de l'Un, quand elle lui
est préfigurée. «J’ai refusé, c’était pour Te proclamer saint. Mais voici
qu’Adam, c’est Toi; et que le seul qui vous sépare, c’est Satan. » Séparer Dieu
de la créature où II a dessein d’apparaître, c’est accepter en Dieu une
contradiction; Satan, qui a prêché la Loi aux Anges, prêchera le péché aux
hommes. Cette passion hautaine pour la splendeur de la Déité engendre en Satan
un orgueil d’amant, jaloux, envieux, lui fait dualiser l’être ’, et haïr la
nature humaine, devenant pour elle le prince de ce monde, le tentateur, qui lui
suggère que le bon et le mauvais se valent, dans l’indifférence souveraine de
la prescience divine, qu’il dit aimer pour Sa damnation. Ce paradoxe ainsi
offert à l’islam d’un Satan, pur croyant monothéiste, ange qui se damne par amour
pour l’honneur de la Déité incommunicable, n’était-ce pas précisément l’exemple
que Hallâj avait suivi, homme désirant mourir sacrifié, anathème, excommunié ?
Non, Hallâj resté fidèle à l’observance et à la morale, mourra anathème, se
livrant nu à [’Esprit saint, tandis que Satan s’est dupé, drapé dans une
attitude d’amant dédaigné, par un manque d'adhésion lucide et définitive au
précepte divin (Baqlî).
Hallâj semble avoir
publié le Tâ Sîn al-Azal à l'occasion d’une propagande qui se faisait
depuis 306 à la Cour, émanant d’un shi’ite extrémiste, Shalmaghânî, arrivé à
Bagdad avec le fermier général de Wâsit, Hâmid, qui, quoique sunnite, se
confiait à lui pour toutes ses affaires importantes, parce que son gendre A.
Hy. Ibn Bistârn, shi’ite, était le disciple inconditionné de
I N’v voulant pas être le
troisième, alors que l’Amour n’est pas deux, mais trois en un
■ je suis l’amour, je
suis ramant, je suis I aime (Ibn abi’l Khavr, quatrain n" 17, Ed Ethé)
Shalmaghânî. Ce dernier,
conspirateur sombre et cruel, enseignait que la foi et l’impiété, la vertu et
le vice, l'élection et la damnation formaient des paires antithétiques
nécessaires, dont les deux termes étaient également saints et agréables à
Dieu. Shalmaghânî, qui fit exécuter en 311/924 des notables Qunna’iya (donc
prohalla- giens), et fut forcément consulté par Hâmid lors de la condamnation
de Hallâj, semble avoir suggéré certaines aggravations curieuses à son
supplice.
Bagdad était alors,
probablement, la plus grande métropole du monde civilisé, et c'est là sur un
théâtre surexhaussé, comme pour Jeanne d’Arc, que le procès de l’amour divin
fut plaidé, dans le décor fastueux de la Cour abbâsside, de 308/921 à 309/922.
La crise financière avait
amené en 306/919 la formation d’un vizirat de coalition sunnite, où Hâmid,
exacteur fiscal cynique, était flanqué d’Ibn ’Isa, physiocrate vertueux. Ibn
’Isa. vainqueur au début, avait fait prévaloir, grâce à un inventaire
budgétaire de l’Empire resté justement célèbre, une détente des rigueurs
fiscales ; Hâmid, contre-attaquant, avait appâté le khalife avec une spéculation
odieuse sur les stocks de blé monopolisés; Ibn ’Isa riposte en fomentant une
sédition populaire contre ce « pacte de famine » (où Nasr laisse les hanbalites
agir). Les petits compagnonnages d’artisans, à Bagdad (comme à Basra, à La
Mecque et à Mossoul précédemment), s’attaquent aux grossistes et aux entrepôts,
ouvrent les prisons (Hallâj aurait refusé de s’évader); Hâmid s’en va
prudemment à Wâsit. Au bout de quelques semaines, il profite, pour rentrer à
Bagdad, du retour du généralissime Mu’nis. Mu nis, qui vient de sauver l’Empire
en Égypte, des fâtimites d’Occident, doit le défendre, en Iran, contre la
menace des deïlemites d’Orient qui partagent les terres féodales et sont entrés
dans Rayy : grâce à la défection du wali Akh Su’lûk, ex-adjoint de Mu’nis,
toujours protégé par Nasr et par Ibn ’Isa. Hâmid expose à Mu’nis qu’il faut
supprimer Akh Su’lûk, et, comme c’est un émir samanide, rompre avec le vizir
samanide Bal’amî, un shâfi’ite prohallagien (qui refusera d'extrader les
hallagiens en 309). Un tel revirement de politique exige un durcissement de la
fiscalité; le khalife ne l’accordera que s’il perd confiance en Ibn 'Isa et en
Nasr.
Pour les ruiner tous deux
et atteindre son but, Hâmid décide de faire rouvrir le procès de Hâllaj, leur
protégé ; il réussit, grâce à un tiers: A.B. Ibn Mujâhid, chef respecté de la
corporation des Lecteurs du Coran, ami des sûfîs Ibn Sâlim et Shiblî, mais
antihallagien : exaspéré par le « polythéisme » de la théorie de la déification
des saints, il somme Ibn Isa, qu’il « dirige », de ne plus protéger Hallâj. Ibn
’Isa est dessaisi du procès de Hallâj ; et Nasr de la garde de sa personne;
tous deux au profit de Hâmid.
Imprudemment, les hanbalites manifestent contre
Hâmid, « prient contre » ce vizir dans les rues de Bagdad, tant pour protester
contre sa politique fiscale que pour sauver Hallâj (à l’instigation d’un des
leurs, le hallagien Ibn ’Atâ). Puis, quand Ibn 'Isa, et son ami le vieil
historien Tabarî désapprouvent le recours à l’émeute, les hanbalites s’en
prennent à Tabarî, dont ils cernent la maison.
Le vizir Hâmid a gagné la partie; préposé au
maintien de l'ordre, il lui est loisible de faire comparaître Ibn 'Atâ devant
le tribunal qui n’arrivait pas à trouver de témoignage décisif contre Hallâj;
Ibn 'Atâ dénie publiquement au vizir, vu ses exactions, le droit de juger la
conduite d’«hommes vénérés», dont il approuve d’ailleurs la profession de foi ;
Ibn ’Atâ, malmené, meurt des coups reçus; Hâmid peut combiner avec le cadi
malikite, Abû ’Umar Hammâdî, connu pour ses complaisances envers les puissants
de l’heure, le scénario de la sentence vouant Hallâj à la mort; en tirant
argument des documents livrés par les Sulahâ, contenant notamment une «Lettre
à Shàkir » (où Hallâj lui écrivait: «détruis la Ka’ba [V] pour la rebâtir
(spirituellement) vivante et priante parmi les anges»), et de sa doctrine sur
le remplacement votif du hajj pour l'assimiler aux insurgés Qarmates qui
voulaient détruire le Temple de La Mecque. Le cadi hanafite Ibn Buhlûl
refusant, son adjoint A. Hy. Ushnânî, homme de mœurs décriées, accepte de
seconder Abû ’Umar.
En séance, le cadi Abû’Umar, pressé par le vizir,
prononce la formule «il est licite de verser ton sang» (aucun shâfi'ite n’était
venu à la séance); le syndic des témoins professionnels, 'A.A. Ibn Mukram,
trouve parmi eux un nombre imposant de cosignataires, quatre-vingt-quatre,
dit-on, en ajoutant aux membres du tribunal des canonistes et des qurrâ ; Ibn
Mukram y gagnera la riche judicature in partibus du Caire.
Les deux jours suivants, le grand chambellan Nasr
et la Reine Mère réagissent auprès du khalife, qui, pris de fièvre, contremande
l’exécution; Hâmid agite alors devant Muqtadir le spectre d’une révolution
sociale hallagienne, puis va s'entendre avec le généralissime Mu’nis pour
perdre les deux protégés de son vieil ami Nasr: Akh Su’lûk et Hallâj.
Le lendemain, au sortir d’un grand festin offert
à ses commensaux en l’honneur de Mu’nis et de Nasr, le khalife Muqtadir signe,
à la fois, la mise à mort de Hallâj, et la grâce de l’émir Yf. Ibn Abî’l Sâj,
désigné (pour remplacer Akh Su’lûk, révoqué) comme wali de Rayy. A la requête
de Mu’nis, qui s’acquitte ainsi, envers Ibn Abî’l Sâj, de la même dette
d’honneur militaire qui tenait Nasr engagé (depuis dix-huit ans) envers Akh
Su’lûk; envers deux rebelles qui, vainqueurs magnanimes, les avaient relâchés,
l’un Nasr, l’autre Mu’nis, après les avoir capturés. Akh Su’lûk vaincu et tué
en 311, Ibn Abî’l Sâj enverra sa tête au khalife, par l’intermédiaire de
Muflih, et à l’insu de Nasr, «pour ne pas contrister Nasr».
Le 23 dhû-l-qa’ada, des sonneries de trompettes
annoncent que le vizir procède à une exécution capitale (dispositif aggravé
sous une influence shi’ite) : il va remettre la personne de Hallâj au préfet de
police Ibn 'Abdalsamad; des mesures policières sont concertées pour parer à
l’émeute. Le soir, dans sa cellule, Hallâj s’exhorte au martyre, et prévoit sa
résurrection glorieuse (prière notée par Ibr. Ibn Fâtik, et transmise l’année
suivante au cadi Ibn al- Haddâd).
Le 24, à Bâb Khurâsân, sur le seuil de la
préfecture de police de la rive ouest, « devant une foule innombrable, » Hallâj
coiffé d’une tiare, est flagellé, intercis, exhibé, encore vivant, sur un
gibet. Amis et ennemis ont le temps de l’y interpeller, tandis que des
émeutiers incendient quelques boutiques. Ce n’est qu’à la venue de la nuit que
l’autorisation khalifale (de règle) arriva, pour le coup de grâce ; on remit la
décapitation au lendemain matin afin que le vizir assiste de jour à la lecture
de la sentence. Hâmid, pour emporter l’adhésion du khalife à l'exécution, avait
bien dit à Muqtadir: «si tu t’en trouves mal, après, tue-moi» ; mais des récits
merveilleux s'étaient déjà propagés durant cette nuit dramatique; et il se peut
très bien que Hâmid ait jugé prudent de dégager sa responsabilité (avec celle
du khalife) et ait invité à haute voix les shuhûd, témoins cosignataires,
massés devant le gibet, autour d’Ibn Mukram, représentants qualifiés de la Communauté
musulmane, à crier; « C’est pour le salut de l'islam; que son sang retombe sur
nos cous» (Tûzarî). Et la tête tomba, le tronc fut arrosé de pétrole et
incinéré, les cendres jetées, du haut d'un minaret, dans le Tigre (27 mars
922). Allah akbar - , cria la foule, tandis qu'on suspendait sa tête à
un écriteau.
De suite, des témoins
rapportèrent avoir entendu du supplicié des paroles, novissima verba : «
O mon Dieu, si Tu témoignes Ton amour à ceux qui Te font tort, pourquoi n'en
témoignes-Tu pas à ceux à qui il est fait tort en Toi ? ■■ ; et, consommant le
rite légal du Tawhîd islamique : « C'en est assez pour l'extatique, quand en
lui son Unique est le seul à Se témoigner» (mot à mot: «ce qui compte, pour
l'extatique, c'est que l'Unique le réduise à l'unité ■•). Ces mots, et
d’autres, ressentis par des cœurs amis comme des réponses explicatrices, sont
probablement de la plus stricte historicité ; elles réalisent le pressentiment
de la prière de la dernière veillée; «Nous voici, nous Tes témoins...»
Cette exécution projette,
tout autour de cette flambée finale, une clarté axiale sur les mobiles
véritables des divers acteurs du procès, fixés par des incidents révélateurs
des mentalités intimes.
Dans le groupe des
ennemis, en tête, le vieux vizir Hàmid; sa longue carrière de fermier general
l'avait habitué à considérer le versement de l'impôt au Trésor comme une
ristourne arbitrairement prelevée par la Cour sur son propre fermage qu'il
collectait avec une astuce joviale, pour en dépenser une bonne partie dans des
festivités peu raffinées, avec une suite d'affranchis chamarrés qu'il rudoyait
à l'occasion; aussi sa foi sunnite sommaire de gendarme goguenard l'avait
braqué depuis longtemps contre Hal- làj, sa spiritualité, son ascétisme, ses
sermons sur l'au-delà, et ses prétendus charismes; il ne voyait en lui qu'un
affreux sorcier à abattre à tout prix ; et il y était précisément poussé par un
confident que son gendre shi'itc lui avait procuré, Shalmaghâni, ce gnostique
étrange et sombre, dissimulé et cruel, amoral, qui devait périr à son tour,
treize ans plus tard, pour avoir osé assigner un rival
PERSPECTIVE
TRANSHISTORIQUE SUR LA VIE DE HALLAJ encore pire, Ibn Rawh Nawbakhtî, à une
ordalie. Mais une fois Hallâj abattu, sa sorcellerie pouvait encore nuire, et
Hâmid, méfiant, entendait n’endosser que la mise à mort d’un rebelle, laissant
les cadis seuls responsables, avec les shuhûd, de la légalité de la
condamnation pour hérésie.
Puis le généralissime,
Mu’nis, un eunuque grec d’origine, à peine moins âgé; il ne s'était pas
prononcé jusque-là contre Hallâj protégé de son fils adoptif Hy. Ibn Hamdân, et
de son ami le grand chambellan Nasr; mais ce vieux chef de guerre, avant tout
prétorien et mercenaire, voyait de plus en plus dans l’allégeance qu’il avait
jurée au khalife Mu’tadid et à ses fils, donc à Muqtadir, une priorité de
prébendier validant à l’avance toute extorsion de «dons gracieux» pour
compléter sa solde et celle de ses officiers; il se mettait maintenant d’accord
avec le vizir Hâmid, contre la politique d’Ibn ’Isa, contre ses ménagements
financiers et diplomatiques qu'il avait jusque-là secondés ; puisqu’il fallait,
contre Nasr, substituer Ibn Abî'l Sâj à Akh Su’lûk comme émir militaire de
Rayy, Mu’nis, d'ailleurs lié à Ibn Abî’l Sâj par sa parole, montre durement sa
force à Nasr et à la Reine Mère en abandonnant leur ami Hallâj à la haine
féroce du vizir; c’est le début de sa rupture avec la Reine Mère, qui aboutira
au coup d’État prétorien de 317/930; où, l’année même du sac de La Mecque par
les Qarmates, il videra le Trésor.
Puis le cadi Abû 'Umar,
ambitieux patient, élégant et subtil, qui arrivera lors de ce coup d’État au
poste de grand cadi, son désir suprême; courtisan accompli, d’une aisance de
manières magnifiques, qui restera légendaire, et curieusement épris de
parfums, il savait se déjuger avec le plus déconcertant cynisme; il compensait
l'imparfait outillage de son rite malikite en hadith et en qiyâs par le souci
raffiné de la forme en casuistique canonique; il dut être très fier d’avoir
enfin réussi, pour le «bien commun», à clore un procès aussi ardu par une
solution aussi ingénieuse; servant, par surcroît, une fois de plus, une
vengeance hiérarchique.
Enfin le faible et
versatile souverain, Muqtadir, lassé de s’entendre rappeler ses
responsabilités de khalife envers Dieu et envers son peuple, se détourne d’Ibn
"Isa et de Hallâj ; incliné à douter de sa propre légitimité par des
agents légitimistes shi’ites maîtres en imposture comme Husayn Ibn Rawh
Nawbakhtî, ressaisi et en-
voûté par son ancien
tuteur, son ex-vizir shi'ite, Ibn al-Furât, et par les pièces d’or qu’il fait
miroiter devant lui dans une véritable séance de magnétisme, Muqtadir préfère
céder aux instances d’un nègre vénal, l’eunuque-chef du harem, Abû Sâlih
Muflih, un hanbalite comparse précisément payé par Muhassin, fils d’Ibn
al-Furât, travaillant au troisième vizirat de son père; et rejeter les
supplications maternelles, de la Reine Mère, l’adjurant de sauver Hallâj.
Dans le groupe des amis, le vice-vizir Ibn ’Isa,
honnête, mais prudent opportuniste, veille à sa situation personnelle en
cessant de protéger la vie de Hallâj; mais il lui garde sa sympathie, puisqu'il
conserve un de ses opuscules dans une cassette, fait bon accueil à un
hallagien, le chef des shuhûd du Caire, Ibn al-Haddâd, en 310, et brise en 312
la carrière d’Ibn Mukram, cadi du Caire, hostile à Ibn al-Haddâd, et ancien
chef des shuhûd bagdadiens qui ont sur eux le sang de Hallâj.
Ensuite quelques personnages de second plan,
spectateurs plus ou moins apitoyés des phases du supplice; 'Isâ Dinawarî
(peut-être le père du hallagien Fâris), Abû’l ’Abbâs-b-’Abdal’azîz, le qârî
"Atûfî, Qalânisî, le mu’tazilite Qannâd et surtout Ibrahim Ibn Fâtik
Maqdisi, qui paraît bien avoir été incarcéré avec Hallâj, mais est présenté,
dans la plus ancienne tradition sûfie, comme une sorte de sténographe
impersonnel du martyr.
Un Hachémite, Haykal, dont on sait seulement
qu’il aurait été supplicié aux côtés de Hallâj.
Enfin, trois témoins insignes de la sincérité
religieuse de Hallâj dont l’influence historique sera capitale; d’abord deux
amis intimes, Ibn 'Atâ et Shiblî, puis un disciple de la dernière heure, Ibn
Khafîf.
D’Ibn ’Atâ, dont le désir d’être éprouvé, comme
les prophètes, dans le creuset des souffrances avait été naguère exaucé, nous
savons qu’il s'enhardit pour partager le sort de son ami qui lui avait écrit
deux admirables lettres; le visitant en son cachot clandestinement, acceptant
en dépôt ses manuscrits (qu'il dut confier à son propre légataire ' Alî
Anmâtî), s'efforçant d’ameuter en sa faveur le petit peuple hanbalite,
témoignant audacieusement devant le tribunal de leur commune foi en l’union
mystique directe avec Dieu, source de tout charisme ; brutalisé alors par les
gardes du vizir irrité de ses reproches, Ibn 'Atâ meurt des suites des coups
reçus, quinze jours avant Hallâj, ayant ainsi précipité, et peut-être aggravé
son supplice.
De Shiblî, noble Turc, ex-chambellan adjoint de
Muwaffaq, nous savons que sa conversion à la règle de vie sûfîe l'avait amené
(avec une crise politique en Égypte) à renoncer non seulement à son fief de
Demawend, mais à ses études de droit malikite commencées dans sa jeunesse à
Alexandrie — lorsque Hallâj lui apparut, à la grande mosquée de Bagdad, sous la
- coupole des poètes ■> comme le héraut de la splendeur divine qui
transfigure le visage et la voix. Dès lors, il s'était attaché à lui. non sans
s'adonner à des comportements publics volontairement excentriques (<■ folie
clairvoyante, mais chronique, tandis que celle d'Ibn 'Atà, momentanée, avait
été inconsciente) qui lui permirent de ne pas être inculpé avec Hallâj; il le
renia à demi aux deux procès, puis vint, le cœur bouleversé, assister à son
supplice, entraîné par ceux qui le lapidaient (il lui aurait jeté une rose en
signe de défi jaloux) ; cherchant à le comprendre au-delà de la mort, où il
n'osait pas le rejoindre, il médita le mystère du sacrifice amoureux, et y
initia désormais les novices sûfîs, à sa manière: leur confiant le martyre de
Hallâj comme un joyau de beauté interdite — à cacher —, non comme un viatique
d'immortalité à distribuer à tous.
D’Ibn Khafîf, encore un converti, d'une famille
très en vue à Shiraz, on sait qu’il ne vit Hallâj qu’une fois, tout à la fin,
dans sa prison, dans un état d'adhésion si plénière à la volonté divine qu'il
revint convaincu pour toujours, en dépit des objections théologiques de ses
confrères ash'arites (Bundâr). d'avoir vu là un « homme de Dieu •>.
Au palais, le grand chambellan Nasr Qushûrî, Grec
converti devenu hanbalite, loyal et courageux serviteur de la famille impériale,
était devenu hallagien avec toute sa maison; il le resta après la mort, osa
prendre le deuil de ce supplicié, obtint du vizir, contre les conséquences
légales d’une mise hors la loi, le maintien en leur qualité de musulmans et la
mise en liberté de ses disciples, de son fils et de sa fille (qui put se
marier). Et au fond du harem impérial, prenant jour sur les colonnades de
dattiers dont elle avait fait incruster les troncs de teck et de cuivre, autour
de l'étang d'étain massif de son jardin clos, le silence où se tut la Reine
Mère Shaghab, d'origine grecque, elle aussi; c’est elle qui fit garder, durant
toute une année, la tête de Hallâj au «trésor des têtes - du Palais, avant son
envoi en Khurâsân; à elle doit remonter aussi, d'accord avec le shâhid Da'laj,
le waqf permettant les visites pieuses au « maslib al-Hallâj ■, tout proche de
la tombe de son frère, l’émir Gharîb al-Khâl.
Et au centre, suspendu et
hors de soi, Hallâj lui-même, manifestant à tous de sur le gibet cette
nuit-là. dans une extase prolongée de son corps surpassant la mort,
l’immortelle personnalité du Christ coranique, l’expressive effigie de l’«
Esprit de Dieu », insaisissable, « celui-là qu'ils n'ont pas tué, qu'ils n'ont
pas crucifié... » (Cor. IV, 156); selon la riposte qui cingla dans l'obscurité
le mu’tazilite A.H. Balkhî, et sera reprise, non sans choix, par Abû Hâmid
Ghazâlî.
Plusieurs eurent des
visions de guerre sainte : entre autres Zâhir Sarakhsi qui le vit passer dans
une rue de Bagdad, à cheval; le visage voilé; chevalier tenant en main sa
lance. Et Shâkir put assister, à Tâlaqân, à une insurrection pour la Justice;
avant de rentrer à Bagdad, pour se faire tuer comme son ami.
Cette courbe de vie, que
nous venons d’esquisser, avec les nœuds essentiels de ses péripéties
dramatiques, jusqu'à la mort, nous pouvons en dresser un résumé schématique en
recourant aux procédés graphiques de Galton et de Poyer. Déjà la vie familiale
de Hallâj au foyer trois fois déplacé, d'Ahwâz, Wâsit, Basra, à Bagdad, monte
droit, sans incurvation, avec la fidélité indémentie de sa femme unique et de
ses quatre enfants, Sulaymân, Mansûr, Hamd, et une fille. Quant à sa vocation religieuse,
ses trois pèlerinages, qui en sont les points de condensation, forment alignement
avec ses deux grands voyages apostoliques, et préparent la grande prédication
bagdadienne, suivie des deux procès (avec le long entre-deux en prison) et du
martyre. Des trois défaillances apparentes, le rejet du froc, après le premier
pèlerinage, et la fuite à Suse (avant le premier procès) sont clairement axés
sur sa ligne de vie, « ne dévient pas » dans sa passion pour l'unité et pour
l’Un ; quant au cri anticipé révélant, bien au-dessus de tous les balbutiements
sublimes de Bayézid Bistamî, l'union, (Ana'l Haqq). Suhrawardi d'Alep,
suivi en cela par Nasir Tûsî, a admirablement montré qu’en le criant, Hallâj
donnait volontairement à autrui « dispense plénière de verser son sang » ; et
que ce cri attestait que Dieu avait exaucé sa fameuse prière : « Entre moi et
Toi, il traîne un “ c’est moi ” qui me tourmente — ah, enlève, par Ton “ c’est
Moi ”, mon “c’est moi ” (’inniyî) hors d’entre nous deux. »
Nous savons, par Bêrûnî, qu’il y eut des
musulmans pour qui le jour de la mort de Hallâj se projeta de suite en ère sur
le cycle liturgique; ils notèrent la durée de sa prison (huit ans, sept mois,
huit jours), la valeur alphabétique (Maryam = Fâtir) de l'année 290/902 qui
marqua sa vocation définitive; et la valeur (Tâ sîn) de l’année 309/922 qui
marqua sa mort, et qui est le nombre coranique du sommeil extatique des Sept
Dormants. Mais s’il est vrai qu’un homme saint («tel qu’en lui-même enfin
l’éternité le change») n’acquiert son visage définitif que posthume, nous devons
essayer maintenant de résumer les étapes lentes et difficiles de la
réincorporation graduelle, dans la conscience religieuse de la Communauté
musulmane, de cet homme passionné de l’Unique, qui avait voulu mourir anathème
pour que l’islam se consomme dans l’unité adoratrice de tous les hommes;
réincorporation moins avancée que celle de Jeanne d’Arc à la France;
réincorporation plus avancée que celle du Fils de Marie en Israël; dont elle
est, toutes proportions gardées, la préfigure.
Les musulmans n’attribuent de validité qu'au
témoignage oral, et ils se représentent précisément l’histoire vraie de leur
Communauté comme un tissu, où les chaînes parallèles et séparées des
générations succédant aux Compagnons du prophète, sont traversées par des
trames continues et perdurables, les lignes de transmission (isnûd) de
la Tradition prophétique, dont ses témoins transmetteurs constituent de
génération en génération les nœuds numérotés (depuis Muhammad). En particulier,
la vie islamique d’une ville est caractérisée par la succession chronologique
des témoins de la Tradition qui y enseignèrent. Nous pouvons donc figurer la «
ré incorporation » graduelle de Hallâj dans la conscience que les cités de la
Communauté islamique ont prise de son unité, par les lignes de transmission, de
génération à génération, de ses maximes et de ses exemples; transmission que
son excommunication et son exécution rendaient spécifiquement interdite. Ces
lignes, maintenues aux premiers siècles, non sans péril de mort, et
enregistrées dans des textes, dessinent, pour Hallâj une survie culturelle
profonde; bien plus réelle, socialement, que la célébrité littéraire de types
comme « Alexandre» ou «César» (cf. Gundolf) chez nous, car le simple attrait
esthétique n'y est presque pas intervenu (sauf chez Qannâd, Ma'arrî et Zahâwî).
La première ligne de
transmission est celle de la sentence juridique d’Ibn Surayj; ce grand
canoniste shâfi'ite avait fait avorter le premier procès de Hallâj par un
déclinatoire de compétence, déclarant que son inspiration mystique (ilhàm)
échappait à la juridiction des cadis à qui le discernement des esprits faisait
défaut. Cette sentence fut enseignée au waqf Da'laj à Bagdad, et fidèlement
transmise, de disciple en disciple, d’Ibn al-Haddâd (qui recueillit l'oraison
hallagienne de la dernière veillée) à A.B. Quaffâl et à d’autres, notamment à
l'historien Khatîb et à son ami (et protecteur) le vizir Ibn al-Muslima, qui,
en 437/1046, le jour même de son investiture par le khalife Qâyim, vint, à la
tête du cortège officiel le conduisant à la mosquée-cathédrale de Mansùr,
s'arrêter pour prier sur le tertre du gibet de Hallâj ; ex-shahid au tribunal
canonique, le vizir attestait ainsi l’innocence d'un martyr dont ses confrères,
cent vingt-quatre ans plus tôt, avaient réclamé la tête. Cette sentence d'ibn
Surayj est encore classique aujourd'hui, pour la majorité, dans le rite
shâfi’ite.
Une seconde ligne est
celle des auteurs de «commentaires- (tafsîr) du Coran, qui acceptèrent
d’expliquer des versets sacrés au moyen de maximes mystiques de Hallâj; depuis
son ami Ibn 'Atâ, traditionniste, maître admis par les hanbalites, qui protesta
publiquement en faveur de Hallâj. infirmant ainsi l'unanimité fijma) que
ses adversaires essayaient d'obtenir contre lui, parmi tous les ulémas
musulmans du temps. Après Ibn'Atâ, cette «ligne - passe par Sulami, dont le tafsîr
admis à Nishapur, fut mis au programme de l'université Nizamiya de Bagdad (Ibr.
Nufaylî), et réédité par R. Baqli, qui se réimprime encore aux Indes; Hallâj y
est discrètement désigne par son préSom seul, « al-Husayn .
Une troisième ligne
formée à Bagdad, est celle des sùfis, amis secrets de Hallâj ; ils n'avouaient
le vénérer qu'à des initiés, car ils le considéraient comme un saint damné par
amour (damné sine die. selon les rêves d'Abbâsa Tûsi et d'Azâz; et dont
la damnation durait encore, après trois cents ans, quand Ibn 'Arabi, et
Shâdhili
PERSPECTIVE
TRANSHISTORIQUE SUR LA VIE DE HALLÂJ s’aviseront de prier pour son pardon), et
considéraient que « la Loi muhammadienne met à mort les saints», que la victime
et le bourreau sont musulmans à égalité. Après Shiblî, Nasrabadhî, Ibn
Abî’l-Khayr et Shaydhala, A.T. Silafî s’enhardit, publie \a.Hikâya de
Sharwânî (où Shihâb Tûsî relèvera le miracle du sang); Khâjé Abdallah Ansari à
Hérat, Yf. Hamadhanî et Hakîm Sana’î préparent l’éclosion de l’épopée
hallagienne du grand poète iranien ’Attâr.
’Attâr, dans sa grande épopée hallagienne, donne
sa forme définitive à la sainteté musulmane de Hallâj, consommée dans un
sacrifice guerrier, militant et mâle; Ibn Abî’l-Khayr avait déjà dit «mourir
sur le gibet de Hallâj est le privilège des héros» ; ’Attâr montre avec quelle
véhémence passionnée cet amant audacieux a «joué sa tête » pour conquérir le
joyau de la Beauté divine de haute lutte; ce combattant héroïque que Dieu finit
par tuer en combat singulier, à la guerre sainte, s’enduit le visage avec le
sang qui goutte de ses membres mutilés, pour ne pas sembler pâlir. Et le cri
suprême «je suis la Vérité», qu’il avait proféré, se répand hors de lui avec
son sang qui coule, ruisselle sur le monde où tous les éléments libérés se
déchaînent et entrent en tumulte, déchire le voile des idées, ressuscite les
morts, et « carde l’univers » comme à la venue du Jugement dernier (cf. Cor.
CI, 4).
Tel est le type de sainteté qu’exaltèrent alors,
dans le peuple turc nouvellement converti, les poèmes de Yesewî, puis de
Nesîmî, et la ritualisation symbolique du « gibet de Mansûr Hallâj » dans
l’initiation à l’ordre des Bektâshis, diffusée chez les janissaires ottomans.
En poésie turque, Hallâj reste le «saint par excellence», le crucifié (ou
pendu) au visage incliné «comme la rose qui se penche». (Qasîda de
Lâmi’î, dédiée à Soliman le Grand.) ’Attâr est aussi, avec ’A.Q. Hamadhanî, à
l’origine de la dévotion des poètes de l’Iran, et des mystiques de l’Inde, pour
Hallâj ; du sultan Hy. Bayqarâ, de Hérat, qui fit peindre toute sa vie par le
célèbre Behzâd, et du sultan Husayn Shâh, du Bengale, qui autorisa le culte
hallagien de « Satya Pir», au mystique Sèrmèd Qashanî, qui se fit martyriser
comme lui, à Delhi, sous Aurengzeb. Cette lignée de témoignages passionnés,
prise dans le dilemme sainteté-damnation, d'un romantisme intense, a engendré
des légendes populaires sur le témoignage du sang, sur la fécondité des
cendres de
DÍ WAV
Haliâj, jetées au fleuve,
sanctifiant les novices qui s’y désaltèrent, faisant concevoir les vierges qui
en boivent (la sœur de Haliâj, chez les kurdes yézidis, pour qui Haliâj est le
saint du Jugement; l’origine des clans Qaraqirghiz, telle qu’elle se conte à
Osh; la naissance du poète hallagien Nesîmî, d’Alep, telle qu’on la chante à
Bukhara; Satya Pir en Bengale, Siti Jenar à Java). Déformation chamelle de
cette vérité : que le sang des témoins est une semence spirituelle de
confesseurs de la foi, qui assurent la résurgence perpétuelle du témoignage.
Úne quatrième ligne
remonte à Ibn Khafîf, qui avait visité Haliâj en sa dernière prison; rentré à
Shiraz, il constitua un dossier du pour et du contre, sur Haliâj, qu'lbn Bâkûyé
et Mas’ûd Sijzî, grâce à une présentation apparemment réticente, réussirent à
publier, et à faire transmettre régulièrement parmi les traditionnistes musulmans
(notamment les hanbalites de Damas) et parmi les historiens de l’islam
(notamment Khatîb et Dhahabî). Par ailleurs, les disciples sûfîs d’Ibn Khafîf,
dès Murshidî, vénéraient en secret Haliâj; ce qui aboutit, au XIIIe
siècle, dans les milieux shiraziens, à la formulation d’un dhikr
hallagien spécial (entraînement devenant machinal à l’extase artificielle)
transmis de couvent à couvent, dans toutes les initiations mystiques depuis
Tawusî, ’Ujaymî et S.M. Zabidî jusqu'aux Senoussis actuels.
Les premières écoles de
théologiens qui posèrent explicitement le problème de la réincorporation
possible de Haliâj à l'islam furent : les Sâlimiyas de Basra, qui admirent la
légitimité de sa condamnation pour révélation (dans l'ivresse de l'extase) du
secret même du Tawhîd islamique. Vint ensuite l’école ash'arite (dès Qushayri)
qui posa qu’en faisant cela Haliâj s'était exprimé en pleine lucidité, s’était
damné volontairement, attestant, par sa mélancolie d’amant délaissé, que la
Déité est inaccessible; comme Satan, son modèle (Ahmad Ghazâlî). Ou que l’Etre
du Créateur et l’être des créatures ne font qu’un, ce qui rend aussi dérisoire
son dialogue d’amour avec Dieu (école Wujûdiya: Jbn ’Arabî).
Quelques années après sa
mort, des philosophes musulmans indépendants, A. Z. Balkhî, A. S. Mantiqî, et
Abû Hayyân Tawhîdî dégagèrent de la mystique hallagienne des percées métaphysiques
valables; et A. H. Daylamî publia ses grands textes sur
PERSPECTIVE TRANSHISTORIQUE
SUR LA VIE DE HALLÀJ l’Essentiel Désir (qui est Dieu), signala
l'originalité de cette notion de 'Ishq, voisine, dit-il, de la
philosophie présocratique (Empédo- cle, Héraclite), qui «lui valut un grand
nombre de disciples». Après Ibn Sina, qui utilisa aussi la notion de Ishq,
deux autres philosophes musulmans. Suhrawardî d’Alep, et Ibn Sab’în de Murcie
(suivi par A. H. Shushtari) virent dans Hallâj un saint intercesseur, non
contradictoire, du monothéisme primitif et universel, supramusulman; à leur
suite, méditant ses prières d'offrande pour ses ennemis, pour tous les hommes,
plusieurs virent en Hallâj un Pôle spirituel attirant l’islam vers l’unité
finale: Najm Razî. N. Kîshî (professeur à la Nizamiya), Jalâl Rûmî, le philosophe
Nasîr Tûsî, le vizir Rashid al-Dîn; tous contemporains de la désastreuse
invasion mongole, et du sac de Bagdad. Le sac de Bagdad, pressenti par les
shi’ites ismaéliens (cf. Lettre de Hasan Sabbah) comme une double
vengeance divine, contre les ’Abbâs- sides, persécuteurs des Alides et
bourreaux de Hallâj (un muqtadâ, lui, un témoin «donné », prédicateur du secret
de l’année 290, où les fatimides avaient fondé leur Refuge à Ikjan, près de
Sétif, sous le signe des Sept Dormants d’Éphèse : les sept piliers y sont encore
en place; et mis à mort en l'année 309, celle de la «sortie de la Caverne
d’Éphèse pour le Mahdî fâtimite instauré à Mahdiya), amena aussi les shi’ites duodecimals
à associer Hallâj comme un annonciateur du Mahdî avec leurs imams, rejoignant
ainsi leurs philosophes (Ishkavérî, Beha ’Amilî, Nûr Shûshtarî, Sadr Shirazî,
Amir Damad); E. Cerulli (avec Arcadi Hannibal) a recueilli à Recht un ta’ziyé
moderne sur Hallâj; cet Husayn substitué à Hu- sayn, à la « grande victime »
offerte par Abraham sous la figure du bélier.
Enfin, il y eut à chaque époque, de façon isolée
et sporadique, des musulmans convaincus que le supplice de Hallâj avait
consommé sa sainteté par une grâce de salut, applicable à toute la Communauté
et qu’il leur fallait la prêcher aux autres: Shâkir-b- Ahmad, auteur probable
des Akhbar al-Hallâj, Fâris, Ibn ’Aqîl, ’A.Q. Kîlânî, le saint patron
hanbalite de Bagdad, Rûzbehan Baqlî, le fervent commentateur de l’œuvre
hallagienne; Fakhr Fârisî (l'adversaire de saint François d’Assise à Damiette
devant Malik Kamil), certains shadhiliya, Mursî, Qûsî, Ghamrî, Sha’râwi,
l'école des shuhûdiya, Semnânî; Makhdûmé Jahâniyân,
Gîsudirâz, A. Serhindî,
Bêdil, tous cinq influents dans l'Inde; et même l’égyptien Khafâjî1.
En pays arabe, une
légende populaire (Qissa), diffusée dès le XIIIe siècle en
Syrie et en Égypte par l'ordre éphémère des 'Ada- wiya, prêchée alors à Damas
et à La Mecque par le hanbalite Izz Ghânim Maqdisi, chantée à l’Albaycin de
Grenade au XIVe siècle (Ibn Sîd Bono) perpétue humblement cette
conviction. Hallâj est invoqué dans la dévotion privée, surtout en pays turc;
notamment pour faire cesser les pleurs des petits enfants. Le cénotaphe qui lui
a été érigé dès le XIe siècle à Bagdad est visité principalement par
des hindous.
La flûte principale des
concerts spirituels des Mewlewis, en Anatolie, nèy-è-Mansûr, lui est
dédiée.
Dans les Futuwwetnamé,
livres corporatifs initiatiques retouchés au XIVe siècle, d'origine
selmanienne, Hallâj prit place, sous le nom de Mansûr, comme patron des
cardeurs; qui l’invoquent encore aujourd'hui en pays turc [6] [7]. Où le • gibet de Mansûr» est
le rite d'initiation des Qyzylbash; et des Bektashis (issus des Yese- wiya) :
surtout en Albanie. Actuellement, quatre centres hallagiens subsistent: Osh (en
Kirghizie); Maij Bhandar (Chittagong) et Shureshwara (Faridpur) en Pakistan
oriental; chez les Ghudf (en Mauritanie).
Dans son Jiïwid Ncime,
le poète philosophe Iqbâl (m. 1938). l’éponyme du Pakistan, a célébré,
sous forme prométhéenne paradoxale et nietzschéenne, l’accès de Hallâj à la
Suprême Personnalité, en se damnant par amour. Hâfiz, le célèbre poète
iranien, qui admirait en Hallâj - l'amoureux que la croix a tant attaché à son
désir, lui devenant une telle consolation qu'il ne s'en détachera plus» a écrit
aussi «jamais ne mourra celui-là dont le cœur vit de désir». La survie posthume
de Hallâj en islam témoigne assez que Ide façon positive, l'amour crucifié est
vie et résurrection. Hallâj professait qu’un seul coup d’œil amoureux de Dieu vers
cette terre, et il y en aurait «trois par vingt minutes», attire plus près de
Lui l’esprit d'un ami d’entre Ses amis ; que par cela même. Il élève à la place
ainsi devenue vacante, un de Ses intimes, et fait miséricorde à soixante-dix
mille de ceux qui professent de l’amitié pour l’ami qu'il a regardé en premier
(Riw. 27). Sans insister sur l'aspect < apotropéen » de cet enchaînement
d'assomptions, redisons-le, c’est par l’amitié sainte nouée entre des personnes
déterminées, prédestinées, que se construit l’étemelle Communauté: pour qu'y
apparaissent, modalisées en toute beauté et vérité, projetées des lignes de nos
vies sur le cycle liturgique fondamental, les diverses formes d’intimité
divinatrice réalisées dans le «grand dérangement» de nos souffrances et de nos
œuvres — en union avec la volonté créatrice.
Il y aura une apparition
divine axiale autour de laquelle clivera l’humanité comme un cristal selon ses
axes: celle du Guide des croyants militants, celle du Juge du dernier jugement
(en termes d’islam, du Qâyim, du Malik yawm al-dfn); suivant le hadîth
de Shâfi’î («pas de Mahdî, si ce n’est Jésus»), Hallâj professe que Jésus sera
aussi ce Juge ’, souverainement, qu’il édictera la Loi définitive en une
irradiation divine, avec double intronisation, terrestre et céleste (Riw. 23).
De telles âmes
amoureuses, qui ont reçu vocation de prier et souffrir pour tous (cf. la prière
musulmane des abdâl, du'â bi'l salâh, inspirée par Khadir-Elias),
continuent de grandir, et de faire grandir, en intercédant, après leur mort. Ni
l’échec, ni la mort ne flétrissent pour toujours le bon vouloir inachevé d’âmes
immortelles, et l’avortement prétendu de leur passé défleuri ne les prive pas
de pouvoir refleurir et fructifier enfin, chez les autres comme chez
nous-mêmes. Notre finalité est plus que notre origine, Hallâj l'avait déjà
remarqué (Sh. 177 : « Quoi de meilleur, l'origine, ou la fin? puisqu'elles ne
confluent point, comment choisir entre elles deux? La fin n’est pas saveur, de
préférence, mais réalisation»; Sh. 175 : « Ô mon Dieu, s’il me vient de la
tristesse à considérer la préétemité, combien me console le Témoin de la Fin» =
l'Esprit
1 Mais
il paraît jumeler avec Jésus un mahdî mystique.
DÍWÁN
de sainteté); et Ibn
’Arabi a constate, sous forme paradoxale, en ses tajalliyàt, que nos
prières ravivées par nos vœux, peuvent parfaire les œuvres abandonnées,
l’immortalité inachevée de nos anciens, tout autant que celle de nos
contemporains.
« Hallâj a réalisé le mythe du Calvaire . disait
à une chrétienne, non sans ironie, un homme d’état turc. Mahmoud Mokhtar Katir-
joglu, pour qui, comme pour la majorité de l'opinion musulmane, Jésus n'a pas
pu souffrir, ni mourir en croix. Mais déjà, pour le chrétien, n'est-ce pas
encore un mythe que le Calvaire, tant qu'il n'y devient pas, par la compassion,
un assistant, un participant, un substitué.
Louis Massignon.
QASAI’D
labbayka, labbayka!...
ma’nâ’î
[l’invocation du pèlerin
au seuil du territoire sacré]
(1) Me voici, me voici! ô
mon secret, et ma confidence! Me voici, me voici ! ô mon but, et mon sens ! (2)
Je T’appelle, ... non, c’est Toi qui m'appelles à Toi! Comment T’aurais-je
invoqué « c’est Toi » (Cor. I, 4), si Tu ne m’avais susurré « c’est Moi »? (3)
Ô essence de l'essence de mon existence, ô terme de mon dessein, ô Toi mon
élocution, et mes énonciations, et mes balbutiements! (4) Ô tout de mon tout,
ô mon ouïe et ma vue, ô ma totalité, ma composition et mes parts ! (5) Ô tout
de mon tout, mais le tout d'un tout est une énigme, et c’est le tout de mon
tout que j’obscurcis en voulant l'exprimer! (6) O Toi en qui s’était suspendu
mon esprit, déjà mourant d'extase. Te voici devenu son gage dans ma détresse !
(7) Je pleure ma peine, sevré de ma patrie, par obéissance, et mes ennemis
prennent part à mes lamentations. (8) M'approché-je, que ma crainte m'éloigne,
et je tremble d'un désir qui tient à fond mes entrailles. (9) Que ferai-je,
avec cet Amant dont je suis épris, mon Seigneur! ma maladie a lassé mes
médecins. (10) On me dit: « Guéris-t'en par Lui!» Mais je dis: «■Se guérit-on
d'un mal par ce mai?» (11) Mon amour pour mon Seigneur m’a miné et consumé,
comment me plaindrais-je à mon Seigneur de mon Seigneur? (12) Certes, je
l'entrevois, et mon cœur Le connaît, mais rien ne saurait l'exprimer que mes
clins d'œil. ( 13) Ah ! malheur à mon esprit à cause de mon esprit, hélas pour
moi à cause de moi, je suis l'origine même de mon infortune ! (14) Comme un
naufragé dont seuls les doigts surnagent pour appeler à l’aide, en vaste mer.
(15) Nul ne sait ce qui m’est advenu, sinon Celui qui s’est infondu dans mon
cœur. (16) Celui-là sait bien quel mal m'a atteint, et de Son vouloir il
dépend que
DÎWÂN
je meure et revive' (17)
Ó suprême demande, et espoir, ô mon Hôte, ô vie de mon esprit, ô ma foi et ma
part d'ici-bas! (18) Dis-moi : •• Je fai racheté . ô mon ouie. ô ma vue !
Jusqu'où tant de délai, dans mon éloignement, si loin .’ (19) Quoique Tu Te
caches à mes deux yeux dans l'invisible, mon cœur observe Ton lever, dans la
distance, de loin.
commi
M AIR I . Sur l'ensemble. voir P III. >0 5’ Celte pièce a
fori e !' admiration d'un des plus violents adversaires de Huilât, Ibn a!
Jasvzi. Le vers 2. tres past alien d'allure. a etc lommente par bukhr Fiïrisi.
en sa Salvvat al-musàtir tins Wiheddm 1828. f 142 b) Le saint,
immobilise par sa fonction d'obser- sarue. est pointant debout, dresse dans le
monde l supérieur) du temoii;nai;e. du début a la fin. il lui arrive d'entrer
dans des étals ambivalents. pris entre les des ou s traditionnels qu' il desire
luci omphri, et d'autres devoir l supérieurs l dont l'attrait P entraîne, doit
l'allusion de Huilât J1' T appelle... " Le sers 14 réfère u Cor
WIV . 40 — Le mot ma'na. ■ tern (v. I ) est pris au sens fort, du shi isme cslrcmiste signification
divine . Dieu en tant qu esphcation finale de toute those Piece irnitee par
Abulburukàt Umasvi (Shattanasvfi. hahja. 215).
Rime al if.
mètre : basît.
lil'ilmi ahlun...
tarâtîbu
[réponse sur la réalité
de la foi]
( I ) Pour la science, il
y a des vocations; pour la foi, une progression; et pour les sciences comme
pour les savants, il y a des expériences; (2) La science, c'est donc deux
sciences, celle qu'on rejette, et celle qu'on acquiert, et l'océan, c'est deux
mers, l’une maniable, l'autre dangereuse; (3) et le temps, c’est deux jours,
l'un néfaste, l'autre favorable; et le genre humain, c'est deux destins, l'un
comblé, l'autre dépouillé. (4) Recueille donc en ton cœur ce que te dit un
témoin probe, et considère, grâce à ton entendement, car le discernement est un
don. (5) Pour moi. j'ai escaladé une cime sans avoir à poser le pied, cime dont
la montée réserve, à d'autres qu'à moi, des périls. (6) Et j'ai traversé un
océan, sans que mon pied le sonde; c'est mon esprit qui l'a traversé, c'est mon
cœur qui l'a savouré. (7) Car son fond de gravier est de perle, inaccessible à
nos mains, mais que la prise de nos pensées peut ravir. (8) Je m'en suis
abreuvé sans bouche ouvrir, or c'est une eau (familière) dont les bouches ont
déjà bu; (9) car mon Esprit, dès l'origine, en a eu soif, lorsque mon corps y
trempa, avant que d'etre façonné. ( 10) Pour moi. l'orphe-
KA1MLNTAIRL Sur l'ensemble. i<»/r
P
III. 355-356. 362 l.e sers 3 a ete imite pur (Jabus. roi de Jurfan. dans une
rá'iya celebre (W Jones. Poes.
as. comm.. 1777. p. 278. if aussi Makki. Qût.
/. 159).
et les sers 6 et 10 par Ibn al-Fàrid (Khamriya, v. 30:
Nazm al sulûk, v. 288-289).
H \ a plusieurs mots i oraniques :
fitya ¡Cor.
XVIII. 12: v. 12). ghirbîb iCor. A.Y.W.
25 . i. I3i
Rime : bà. mètre
: ba.sit.
DÎWÂN
lin, j'ai un Père, en qui
j’ai recours, et mon cœur, tant que ma vie durera, souffrira de ne pouvoir Le
voir. (Il) Aveugle, je suis voyant; simple d'esprit, je suis sagace; et ces
expressions miennes, si j'y tiens, peuvent s’intervertir. (12) Les preux (=
Ahl al Kahf) savent ce que je sais, ce sont mes compagnons, car celui qui est
doué de vertus s'associe des compagnons. ( 13) Leurs âmes ont été présentées
les unes aux autres à l'origine (= au covenant) de l'humanité, puis elles ont
lui, tomme le soleil ; alors que le temps, comme un sentier, s'enfonçait dans
l’ombre de la montagne (= la caverne).
yâ mawdi'al nâziri...
khâtiri
[réponse à shiblf]
(1)0 point de vue. d’où
part mon regard; ô lieu d'insertion (en moi) de mon inspiration! (2) Ô ensemble
du tout, dont le tout m'est plus cher que tout ou partie de moi-même ! (3) On
voudrait que Tu compatisses à celui dont le cœur est saisi aux deux serres de
l'oiseau; (4) épris, cperdu, assauvagi, il fuit d'un désert à un autre ; (5) il
erre sans savoir où. et ses idées errent, comme la lueur tracée d'un éclair.
(6) ou comme la brève conjecture, ténue, que l'on projette dans l'ombre du
futur; (7) dans le flux de l'océan de la pensée, où elle est entraînée, par des
grâces, de la toute-puissance divine
COMME.NTAIRh. Baqli l'a
traduite, à la fin d'une réponse à Shibli sur la structure mentale, dans ses
Shathiyât Ipubl. ap. £. 8B*. n" /68. teste
arabe ap. ms. Kazan, p. 78). Jildaki v a vu une
description alchimique. Le sixième hémistiche a etc repris par Ahmad Ibn
Shuhavd.
Au vers 7. allusion à Cor. XXIV. 40.
Rime : ni. mètre
: sari'.
sukûtun. thumma samtun..
ramsu
[sur les étapes,
dans la voie de l’ascèse]
(1) C’est le recueillement,
puis le silence; puis l'aphasie et la connaissance; puis la découverte; puis la
mise à nu. (2) Et c’est l’argile, puis le feu ; puis la clarté et le froid ;
puis l’ombre ; puis le soleil. (3) Et c’est la rocaille, puis la plaine; puis
le désert, et le fleuve; puis la crue; puis le dessèchement (passage de la mer
Rouge). (4) Et c’est l’ivresse, puis le dégrisement; puis le désir, et
l’approche; puis la jonction; puis la joie. (5) Et c'est l'étreinte, puis la
détente; puis la disparition et la séparation; puis l’union; puis la
calcination. (6) Et c’est la transe, puis le rappel; puis ¡’attraction et la
conformation; puis l’apparition (divine); puis l’investiture (de l'élection).
(7) Phrases (que tout cela), accessibles à ceux-là seuls pour qui tout ce bas
monde ne vaut pas plus qu’un sou. (8) Et voix de derrière la porte, mais l’on
sait que les conversations des hommes, dès que l’on se rapproche,
s’assourdissent en un murmure. (9) Et la dernière idée qui se présente au
fidèle, en arrivant à la barrière, c’est « mon lot > et ■■ mon moi •>.
(10) Car les créatures sont serves de leurs inclinations, et la vérité, sur
Dieu, quand on Le constate, c'est [qu’il est] saint[VIII]
man sârarûhu fa abdâ...
ghashshâshâ
[critique sarcastique
de la discipline de l'arcane]
(I) Qui a reçu d’eux
confidence, et puis a publié tout ce qu’ils tenaient caché, et n'a pas continué
à revenir chez eux, n’est qu’un trompeur. (2) Si les âmes annonçaient ce
qu'elles savent de secret, et tout ce qui a troublé leur raison, quelle perte!
(3) Quand quelqu’un viole le secret de son Maître et Seigneur, on ne lui confie
plus, sa vie durant, de secrets, (4) mais on le punit à cause de ses
négligences, et on l'exile, hors de la familiarité, dans l'isolement. (5) Ils
s’écartent de lui, messéant à leur voisinage, du moment qu’ils l’ont vu «
exhumant » des secrets. (6) Celui à qui on a découvert un secret et le
colporte, celui-là, comme moi, passe pour déséquilibré. (7) Eux, ce sont les
initiés, faits pour la discipline de ('arcane, ils ne souffrent pas qu’on
manque de pudeur. (8) Us ne tolèrent pas d’indiscrets dans leurs réunions, et
ils n’aiment pas. là où il y a un voile, qu'on le dérange. (9) Ils n’admettent
pas d'invité, étant jaloux de leur mystère; loin de vous, leur gloire, loin de
vos actes! (10) Montrez-leur donc, chez eux, désormais et à toujours, pour eux,
de la révérence.
COMMENTAIRE. C'est un des plus
anciens témoignages à ce sujet Icf. Abû ' l-'Atâ- hiya, 185). et Ibn al-Jaw;i
l'a critiquée pour cela. Sulami fvui Abu Ahmad b. Isa. Zakariyâ al-Hashasi.
Muhammad b. Husayn al- Alawi m. 28II8V4; cf. P. H. J6I. n. 2) n'en nomme pas
l'auteur (ba'dhum), dont Ibn 'Arabi
(Muh , //. 3/6) fait un disciple de Dhû '!-Nûn; les autres
sources la restituent a Hallâj : Ibn al-Sâ'i la lui fait dire en extase de
lévitation.
Rime : shin,
mètre : basit.
an’â ilaykâ nufûsan...
qidami
[chant de mort]
(symbole du regret après
l'extase)
( I ) Je Te crie : deuil
! pour les Ames, dont le témoin (temporaire = moi-même) s'en va, dans l'au-delà
du lieu, rejoindre le Témoin même de l'Étemel! (2) Je Te crie: deuil! pour les
Cœurs, si longtemps arrosés, en vain, des nuées de la révélation, où s'amasse
en océans la sagesse ! (3) Je Te crie : deuil ! pour la Parole de Dieu, depuis
le temps qu'elle se meurt, son souvenir n'est plus que néant dans notre
imagination ! (4) Je Te crie : deuil ! pour les Démonstrations (inspirées),
devant qui cèdent tous les discours d'orateurs, en fait de dialectique. (5) Je
Te crie: deuil! pour les Allusions convergentes insinuées par les
intelligences; d'elles toutes rien ne subsiste (dans les livres) que des
ruines. (6) Je Te crie : deuil ! au nom de Ton amour, pour les Vertus (var.
: les Mœurs) de la troupe, de ceux dont les montures furent dressées à
obéir. (7) Eux tous sont déjà passés, (traversant le désert, sans y
laisser) ni puits ni trace, passés comme la tribu de Ad et la cité, regrettée
d'eux, d'iram ! (8) Et derrière eux. la foule abandonnée divague à tâtons, plus
aveugle que les bêtes, plus aveugle même qu'un troupeau de chamelles.
COMMl
Nr AlRl- Sui l'ensemble. von P 1. 620 622 (Jannad en fait une eeuvie dt
Nûri. Sida mi
(tafsir. n" 160) et Harass i. ttès formellement, et tous les autres,
la restituent a Halla/. le cadi Ibn al-Haddad
atieste qu'il la récita la nuit qui preceda son supplice, pour commenter sa
deimeie prieie (Akhb 2), cf P 111. 562.
n
y — Fakhi
Fan si (nasl, 68 a) a commente ainsi le vers 2 ■■ Fe veritable dhikr
ne
se trouve que’ dans le c aui < onsume par la i eahsation de la proximité et
de Fexpatricment ou plus rien ne demeure que les attestations du Seigneur
Rime : mim. mètre
: basit.
ashâra lahzî bi'ayni. .
hammi
[l’envol de l'âme]
( I ) Mon regard, avec
l'œil de la science, a dégagé le pur secret de ma méditation; (2) une Lueur a
jailli, dans ma conscience, plus ténue que toute conception saisissable. (3) et
j'ai plongé sous la vague de la mer de ma réflexion, m’y glissant comme se
glisse une flèche. (4) Mon cœur voltigeait, emplumé de désir, juché sur les
ailes de mon dessein. (5) montant vers Celui que, si l'on m'interroge, je
masque sous des énigmes, sans Le nommer. (6) Au terme (de l'envol), ayant
outrepassé toute limite, j'errais dans les plaines de la Proximité, (7) et.
regardant alors dans un miroir d'eau, je ne pus voir au-delà des traits de mon
visage. (8) Je m'avançai, pour faire ma soumission, vers Lui. tenu en laisse au
poing de ma capitulation; (9) et déjà l'amour avait gravé de Lui, dans mon
cœur, au fer chaud du désir, quelle empreinte! (10) Et l'intuition de ma
personnalité me déserta, et je devenais si proche (de Lui) que j’oubliai mon
nom.
COMMENTAIRE. Un manuscrit de
Taq. II.)
en fait la conclusum d'un expose hallayien sur 1'infirâd.
Le
ternie /ethnique ~ Lâïh ■■ Iv. 2), repris par
Harawi. a etc condamne par Ihn Tasmiya. minhâj al-sunna, 3. p.
93-96 (</ Ihn al-qayim. madàrij. 3. p. 333 sq. )
< omme
hulúli i ■■ Lueur divine ■■). — Imitée ¡usque dans ses rimes par Ibn 'Arabi
(Diw., p. 2).
Rime: mint,
mètre: mukhalla' al-basïl.
iam yabqa baynî...
burhânu
[la preuve dérive de la
présence]
(I) [Désormais], il n’y a
plus, entre moi et Dieu, d’explication (intermédiaire), ni démonstration, ni
miracles, pour me convaincre. (2) Voici l’explicitation transfigurante des
feux divins flambant (en moi), chatoyant comme une perle irrécusable! (3) La
preuve est à Lui, de Lui, vers Lui, en Lui, le Témoin même du Réel dans une
révélation se formulant. (4) La preuve est à Lui, de Lui, en Lui et pour Lui;
en vérité, c'est Lui que nous y avons trouvé, comme une science en sa
démonstration. (5) Qu’on ne déduise plus le Créateur de Son œuvre créée, vous
tous, êtres contingents, vous n’attestez que les temps. (6) C’est là mon existence,
ma confession et ma conviction, c'est là l'unification (divine) de ma
profession de foi et de ma croyance. (7) Ainsi s'expriment ceux qu'il isole en
Lui-méme, les douant des dons de la sagesse, au-dedans et en public. (8) Telle
est l’existentialisation consumante de ceux qu’il extasie, fils de
l'apparentement, mes compagnons, mes amis !
COMMENTAIRE P IIP
72. [Ibn
Jahdam] la presente comme la conclusion d'une sentence de Hallâj sur la mission
prophétique de Muhammad. ■■ sans laquelle la preuve [du monothéisme] n aurait
pas etc administrée à tout l'univers. ou les infidèles auraient pu espérer être
preserves de P enfer -. Elle implique chez Hallâj une seríame formation
philosophique, car il enumere au cinquième hémistiche les quatre causes
aristotéliciennes (P. Kraus).
Rime : nùn, mètre
: basil.
al-’ishqu fî azali...
abdáhu
(1) Le Désir, dans la
prééternité des préétemités, est l’Absolu, — en Lui, à Lui, de Lui, Il
apparaît, en Lui, 11 a paru; (2) Le Désir n’est pas contingent, puisqu’il est
l'attribut d’entre les attributs pour celui qu’il a tué et qu’il ressuscite (3)
Ses attributs sont de Lui, en Lui, non pas choses créées, le créateur d’une
chose est celui qui projette ses choses (4) Quand II a déclenché le début, son
Désir a projeté un attribut dans ce qui commençait, et le Désir y a fait
chatoyer son chatoiement (5) Le Lam avec l’Alif adjoint s’est composé, tous
deux ont ainsi prédestiné « Un» (6) Par la différen-
COMMENTAIRE. Ce texte
poétique, qui appartient à la toute première période littéraire de Hallàj. est
précédé, dans Daylami. de la prose suivante qu'il a introduite ainsi : - Quant
à celui qui a approfondi la question de l'Amour en soi. et s'est séparé de ses
maîtres et de ses contemporains en l'exposant. c’est Husayn-b-Mansùr. Et voici
le texte : " Husayn-b-Mansùr Hallàj a dit : "le Désir est te feu de
la Lumière du Feu Primordial, comme la prééternité se colore de toute nuance,
le Désir manifeste tout attribut; son essence s'enflamme à son essence, ses
attributs scintillent de ses attributs. Il se réalise, traversant toutes les
traverses de la preéternité aux post-éternites; sa source est l'Hléité
(huwiya) surgie de THeccéité (anniya); F intérieur du
dehors de Son essence est la realite de T Etre. et l’extérieur de l'intérieur
de Ses attributs est la Forme parfaite, qui atteste la totalité en perfection.
" Et il recita a ce sujet. (Apres avoir donne le texte de notre qasida
VIII bis. Daylami ajoute ) : -En cette theorie. Husayn-b- Mansùr s’est isolé de
tous les autres maîtres en ce qu’il a montre que le Désir est lin d'entre les
attributs (divins) essentiels, de façon absolue. Tandis que tous les autres
maîtres placent T unification de l’amant et de l'aimé lorsque l’amour s'achève
par T extinction de l'amant dans l'aime, sans recourir (comme Hallàj) au couple
de termes lâhût-nâsût (nature divine, nature
humaine)...
Le mot final sur les ■■ humbles ■■ (
adhillâ) vient de Cor. III. //9
Rime : alif. mètre
: basit.
DÍWÁN
ciation, ils sont deux, par leur réunion, mais
leur seule différence c'est celle du serviteur et de son Seigneur. (7) Telles
sont les réalités, le feu du Désir les enflamme au Réel, qu'elles en soient
proches ou lointaines (8) Elles s'amenuisent, perdant leurs forces, plus elles
deviennent cperdues d'amour. — et les forts, à mesure qu’ils s'éprennent, se
font humbles
I. Ce dernier sers est comme une ebaushe de la
parabole du papillon s amenuisant dans le Feu où il est venu s'enflammer-
(Tuur/.r/n. II. 4).
de ¡'Etre, et ¡'extérieur de / intérieur de Ses attributs est la
Forme parfaite, qui atteste la totalité eu perfection. " - Fl il récita a
ce sujet.. (Après avoir donné le /< iZ< </< notie qusula \
III bis. Das lamí a/uutt I F n . < tic tluotic
Husasnh Mansur s < si tsol< ,/< tous It
s aunes
maîtres en < <■ </« il a moulu que le D< sir est un M'entre les
attributs Idivins) essentiels, de façon absolue. Tandis que tous les autres
maîtres placent l'unification de l'amant et de l'aime lorsque l'amour s
o< lu
i <• put I i stim non de ! amant dans I aime. sans t tl oio
o u omim Huilai i au couple île termes
làhût-nâsût Inature divine, nature humaine) Le mot final sur les humbles -
fadhillà) vient de Cor. 111. //9.
Rime : alif. mètre
: bash
'ajibtu minka wa minni
( 1 ) Je m’étonne, et de
Toi, et de moi, ó vœu de mon désir ! (2) Tu m'avais rapproché de Toi, au point
que j’ai cru que ton «c’est Moi» était le mien. (3) Puis Tu T’es éclipsé dans
l’extase, tant, qu’en Toi Tu m’as dispensé de moi-même, (4) ô mon bonheur, en
cette vie, ô mon repos dans ma sépulture! (5) 11 n’est plus pour moi, fors que
Toi, de liesse, car Tu es ma crainte comme ma confiance, (6) dans les jardins
de Tes emblèmes est embrassée toute science, (7) et si j'ai encore un désir,
c'est Toi qui es tout ce désir!
COMMENTAIRE. P ///, /84 h.!
première ébauche de cette píete est un distique anonsme donne par Daylami (Atf,
48 b; apres la qasida VIH bis). vers T’ r vert lJr-
waqqaftani fi maqâmin ■■ + vert 2b (ou
hasabtu remplace zanantu). C'est la < ont lusion
de remarques tur le voile qui tepare le C reateur de sa création, la recension
primitive est donnée par K et Ibn Zayhdun, et ton amplification II.) semble
bien postérieure. L'hémistiche /b derive de Fadl Raqqâshi ledit du Diwân
d'Abu
Nutvâs. .< ! ) ; /' hémistiche 2b a été repris par
Nâbulsi (Kasht i et Ben'Alloua
(Minah. J46). Imitée par Abu Madyan (tawaid sharita).
Rime : nûn. mètre
: mujtathth.
uqtulûnî. yâ thiqâtî...
marnât''
<■ tuez-moi donc,
mes féaux camarades... »
( I ) Tuez-moi donc, mes
féaux camarades, c'est dans mon meurtre qu'est ma Vie! (2) Ma mort, c’est de
(sur)vivre, et ma Vie, c'est de mourir! (3) Je sens que l’abolition de mon être
est le plus noble don à me faire, (4) et ma survie tel que je suis le pire des
torts. (5) Ma vie a dégoûté mon âme, parmi ces ruines croulantes. (6) tuez-moi
donc, et brûlez-moi, dans ces os périssables; (7) ensuite, quand vous passerez
près de mes restes, parmi les tombes abandonnées, (8) vous trouverez le secret
de mon Ami, dans les replis des [âmes] survivantes. (9) Je suis un patriarche,
et du plus haut rang, (10) puis je me suis fait petit enfant, dans des girons
de nourrices, (11) tout en reposant sous la dalle d’une tombe, dans des terres
salines. (12) Ma mère a enfanté son père, voilà bien une merveille mienne, (13)
et mes filles, que j’avais engendrées, sont devenues mes sœurs. ( 14) sans que
ce soit dans l’ordre du temps, ni par le fait des adultères. [(15) Réunissez
donc ensemble mes parcelles, les prélevant de corps cristallins, (16) d’air, de
feu et d’eau pure, (17) ensemencez du tout une terre non irriguée. (18) puis
irriguez-la en faisant circuler les coupes (19) des servantes verseuses, et des
ruisseaux courants; (20) alors, au bout de sept jours, une plante parfaite
germera.]
COMMENTAIRE. PI. 650-651 el
NI. 370. Les deux premiers vers. d'une pure et authentique véhémence, sont a
rétablir dans le texte primai] des Akhbâr al-Hallâj, nu 1,
p. 8 (du texte arabe), à la ligne /9 (apres
mâ turid), selon les témoignages convergents du ms. Pertsch 14138. du ms. M.
de Taq. In" 5). de Semnani (ms. Oxf. 1446. f. 60a).
de Kishi (ap. Nikpay. ms. P. afp. 61, f 424b • cf. Ibn Hindùshàh. p. 200). de
S. Farghâni (muntahâ. 2. 30. cf. 1. 356), et de Maybu- dhi
(fawâtih). Nikpay observe que Shams Kishi (m. 694/1294) -a fait une
risâla en persan commentant la prière de Mansur Hallaj. Dieu l'ait en Sa
miséricorde. qu'il a récitée lors de sa mise a mort — risâla
qui
est de toute beauté (der ghàyaté khôbi) ; et il (y)
rapporte ces deu\ vers Idô bayt = quatrain) qui sont dans
les Ash'âré Mansûr Hallâj..
Le calligraphe turc Hâjj Mehmet Nùr a exécuté, à
la demande du Pr Burhan Toprak. une très belle inscription du
premier vers (a Findikli).
Le mouvement stylise des vers 1-2 se retrouve
dans Makki (Qùt, 2. 76-77)', il peut s'être inspiré d'un
poème profane de Mu'ammal-b-Jamil Ibn Abi Hafsa (Sarrâj. masâri', 244, cf. Abu
Nuwâs, Dîw. 33). Rùmi les a repris dans son
Methnewi lliv. 3. 177. v. 10-12 : cf. Sari
'Abdallah, jassâhir. t. V. 433. 453). Fakhr Fârisi tjamha, 48b) remarque : «on
a dit : ils mettent a prix les sangs. je réponds : là est la générosité, mon
sang leur est licite, tant qu' il reste du sang dans mes veines , et c'est
pourquoi il (= Hallâj) dit : " Uqtulûnî... ” »
Le vers 12 - ma mère a enfanté son père -. dévie
ici dans un sens alchimique. est fort digne d'attention. H est peut-être de
Hallâj, dans son sens primitif ismaêlien. ou ma mère ■■ (quand le sujet parlant
porte le prénom de Husayn) c'est Fatima, la fille préférée du Prophète, dont le
laqab Umm abihâ i KM, 158) ( littéralement - mère de son père ■■ ) n'est pas
seulement une trace du matronymat (Robertson Smith), mais une prémonition que
le Mahdi fâtimile s'appellera ■ Muhammad . et que le Juge du Jugement dernier
rendra d'abord justice a Fatima mei onnue et douloureuse (cj.
'aqida halabiya des Nusayns. ms. Nieger. 23a). Ce vers 12 est commenté et amplifié
par bien des sunnites mystiques. Ibn {Ja.syi. Ibn al-'Arif, Minyari(ap.
Serhindi. t. 3. 48-49), Ibn Arabi. Sadr (Junau i. Mu'ayvad Janadi. Niyâzi
Misrî, jusqu'à l'émir algérien Abdelkader (mawàqif. III. 60-61 ). H a etc
attribue a Badr al-Din Ibn Si ma vena iNie holson.
Studies, 113. n. I).
Rime: ta. mètre'
majzu
'l-ramal.
yâ tâlamâ ghibna... qamar
[.sur l'invisibilité
magique]
( I ) Ah ! que de fois
nous nous sommes évades d'entre les formes visibles, grâce ¿i une simple
goutte, brillante comme la lune, (2) |goutte| de sésame d'huile de sésame, avec
des caractères (inscrits)
et
du jasmin (lié) sur notre front. (3) Vous marchez, nous marchons et nous
apercevons vos silhouettes, mais vous, vous ne nous voyez pas, gens arriérés.
I. Ct, Vard .sum.simi
d’Ibn ‘Arabii Futùhàt)
(OMMIMAIRl ( 'e texte.
sûrement apo<r\phe. nous tsf donne par Jawban. hsanî qm sur le se< reí
dt\m dt /’ invisibilité maniquí. d \ u une qasida
l'a/
Hallai dont /< < ommentaire ni'entraînerait trop loin, et dont voit i un
'melium l ai ipinii nhilion est longue. mais tel txtrati suffii a Íintelhxp ru
e
Rime: râ. mètre : raja:
MUQATTA'AT
wa’ayyu "1-ardi...
samâ’u
( I ) Quelle est donc la
terre si vide de Toi pour qu’ils se redressent. Te recherchant dans les cieux?
(2) Et Tu les vois, qui regardent vers Toi en apparence, mais ils ne
T'aperçoivent pas, dans leur aveuglement.
COMMENTAIRE. Ebauche, au
résumé, du vers 4 de la Tâ'iya (M.. n" 12). Imite
par Bûsîrî (ms. P. 3154, 54b).
Rime : al if.
mètre : wâfir.
ilâ kam anta... lâ tarâhu
( I ) Jusqu'à quand,
coulant dans la mer des péchés, te débattras-tu (en duel) contre Celui qui te
voit sans que tu le voies ? (2) Je t’avais signalé une route, de la continence
et de la piété, et ton acte est traîné à la remorque de ton penchant (3) Toi
qui passes la nuit t'enfermant seul avec tes fautes, l’œil de Dieu est un
témoin qui te regarde (4) désires-tu obtenir le pardon pour ce que tu as fauté,
quand tu ne cherches pas à Lui plaire ? (5) Demande pardon avant ta mort, avant
le Jour où le serviteur ira à la rencontre de ce que ses deux mains ont gagné
(6) comment restes-tu satisfait de tes chutes et de tes péchés, tout en
L'oubliant, Lui. le seul Unique'.’
COMMENTAIRE. Exhortation
morale de style post-hallagien.
Rime alif.
mètre : n'âfir.
kânat liqalbî ahwâun...
ahwâya
( I ) 11 y avait, en mon
cœur, bien des désirs, mais tous ont conflué, depuis que mon œil T'a vu. (2) Et
qui j’enviais, m’a envié, moi que voici maître des créatures, maintenant que Tu
es mon Maître. (3) Amis et ennemis, à cause de Toi, ne m’ont blâmé que par
méconnaissance de mon angoisse. (4) J’ai laissé aux autres leur ■< ici-bas
■> et leur dévotion, pour ne plus m’adonner qu’à Toi, ma dévotion et mon «
ici-bas ».
commentaire, fiac/li. fídhá
'Amili et Abdulbeha. seul.'., prensent I'attribution On peut comparer Abu
b/ion'o. Diwàn. .<48. Attribue a Sandal llbn al-Jamt).
Rime : alif.
mètre : basil.
idhâ dahamatka... rajâ
( I ) Si l'escadron des
séparations t'assaille, et si la déception te crie «plus d’espérance», (2)
prends de ta senestre le bouclier de la soumission, et de ta dextre serre
l'épée des larmes. (3) En garde, garde-toi, méfie-toi du danger de la
négligence cachée. (4) Et même si, dans l'ombre, l'abandon t'atteint, va de
l’avant, à la clarté de la paix du cœur. (5) Dis à l'Ami : Vois mon
abaissement; dispense-moi le pardon avant le jour de la Rencontre. (6) Au nom
de l'Amour, ne t'en retourne pas, loin de l'Aimé, avant que ton désir n’en ait
reçu le prix.
C0MM1NTAIR1-. Presentation
versifier d'un theme allégorique -l'armure du croyant •. qui remonte a saint
Paul tEph 6. 14-17, / Thess 5, fi) ; il a des
répliques dans de vieux hadîth (P. Ill, 242, n. 7).
Rime : alif.
mètre : mutaqârib.
subhâna man azhara...
al-thâqibi
(1) Los à Celui dont
l’Humanité à manifesté (aux Anges) le mystère de la gloire de Sa Divinité
radieuse! (2) Et qui, depuis, s’est montré à Sa créature (humaine), ouvertement,
sous la forme de quelqu’un « qui mange [IX] et qui boit >>. (3) Si
bien que Sa créature a pu Le considérer de face, comme le clin d’œil va de la
paupière à la paupière.
katabtu wa lam aktub...
kitâbi
( I ) Je t'ai
écrit, sans t'écrire. à toi. car j'ai écrit à mon Esprit, sans rédiger de
lettre. (2) Parce que, l’Esprit (divin), rien ne peut Le séparer d'avec ceux
qui L’aiment, comme le fait la conclusion qui clôt la missive. (3) Aussi toute
lettre émanant de toi ramène ainsi, vers toi, sans renvoi d'aucune réponse. Sa
réponse.
(
OMMtNTMRt. Con< lu.ston poétique d'une lettre a son ami Ibn Ata IP. III. 354)
sur un thème spiritualiste. a la fois hellénistique (Tasshidi.
sadâqa. 79-80. //’’, l-IVl et ismaelien tStrothmann. G I I
./943. /24) Imitee par A P Bush
et par Ismaïl-b Qulayya Maqdisi.
Rime : bâ. mètre
: tau
il.
urîduka, lâ urîduka...
'iqâbi
( I ) Je Te désire ; je ne Te désire pas pour la
liesse (des Élus), non, * mais je Te désire pour ma damnation. (2) Tous les
biens qui m’étaient nécessaires, oui, je les ai reçus, sauf Celui qui ferait
exulter mon extase, en plein supplice!
COMMENTAIRE. Cf. P III. 128 Publice et
commentée comme d'al-Hallâj par son ami Ibn 'Atü
(Recueil,/,. 80. rC 3}. Attribuée à Bistàmipar Ibn al-'Arif (de façon
hésitante: wa qîla), imite en cela par Ibn
'Arabi. Ibn al-Mar a l'attribuait a Râbi'a (Sharh
al-irshâd, III, s. v° Dârib).
Rime : bâ, mètre : wâfîr.
kafâ hazanan... ghâ'ibu
(1) C’est trop souffrir, pour moi, que devoir ainsi T’appeler sans
cesse, comme si j’étais loin de Toi, ou si Toi. Tu étais absent.
(2) Aussi je Te demande, à Toi, Ta grâce, sans plus de crainte, car je
ne connais pas, avant moi, d’ascète ayant eu désir, et de Toi.
Commi NTAlRf . /.es
deux
premiers mots sont une expression classique (Yàqia. //.
640. édit. Wùstenfeld).
Rime : bâ. mètre tawil.
tala’at shamsun...
ghurûbi
(1) L'aurore du bien-aimé
s’est levée, de nuit; elle resplendit, e't n’aura pas de couchant. (2) Si
l’aurore du jour se lève la nuit, l’aurore des cœurs ne saurait se coucher.
COMMENTAIRE. Commentaire d'une
sentence recueillie par Shiblî (Taq., ms M /7. K et L)', Ibn
'Ajiba en a fait takhmîs ('Iqâz, 414).
Rime : bâ. mètre : khafîf.
ra’aytu rabbî .. qâla:
anta!
(I) J’ai vu mon Seigneur avec l'œil du cœur, et
Lui dis: «Qui es-Tu ? » Il me dit : « Toi ! » (2) Mais, pour Toi, le « où » n’a
plus de lieu, le « où » n’est plus, quand il s’agit de Toi ! (3) Et il n’y a
pas pour l’imagination d’image venant de Toi, qui lui permette d'ap procher où
Tu es! (4) Puisque Tu es Celui qui embrasse tout lieu jusqu'au-delà du lieu, où
donc es-Tu, Toi ?
COMMENTAIRE. P III, 318.
Quatrain celebre, remanié ultérieurement au point d vue doctrinal (Kàshi.
Tafsir [attribue à Ibn 'Arabi], I. 379). Ibn 'Arabi a imité I vers 2. et
Ben'Alloua le vers 4b (Minah, 356) Un commentaire
judéo-arabe d Cantique des Cantiques donne les vers !. 4\
5b. Iraqi (lama'ât, ms. P. sp. 185i 7/b)
donne
le vers /a.
Rime: ta. mètre:
mukhalla'
al-basit.
lya habîbun azûru.
lahzâti
1) J’ai à moi un Ami, je
le visite dans les solitudes, présent, même ]uand il échappe aux regards. (2)
Tu ne me verras pas Lui prêter ’oreille, pour percevoir son langage par bruit
de paroles. (3) Ses paroles n’ont ni voyelles, ni élocution, ni rien de la
mélodie des /oix. (4) Mais c’est comme si j’étais devenu l’interlocuteur de
noi-même, communiquant par mon inspiration avec mon essence, m mon essence. (5)
Présent, absent, proche, éloigné, insaisissable lux descriptions par qualités.
(6) Il est plus proche que la conscience pour l’imagination, et plus intime que
l’étincelle des nspirations.
COMMENTAIRE. Pièce imitée par
Shushtarî (Ibn'Ajîba, 'Iqâz, 282) ; Qushayrî tarait
faire allusion au vers 4 en son Tartib (Recueil, p. 89, l. 14).
Trad, turque, ns P. sp. 188. 77a.
Rime tâ. mètre
: khafîf.
sirru ’1-sarâïri
matwîyun... bitiyyâti
(I) [Dieu], l’intime des
consciences, se cache, laissant des traces intelligibles, du côté de l’horizon,
sous des replis de lumière, (2) mais comment ? Le « comment » ne se devine que
du dehors, tandis que le dedans du mystère, c’est à l’Essence divine pour Elle-
même. (3) Les créatures s'égarent dans une nuit ténébreuse en (Te) cherchant,
et ne perçoivent que des allusions. (4) C’est par la conjecture et
l’imagination qu’elles se dirigent vers Dieu, et, tournées vers l’atmosphère,
elles interpellent les cieux. (5) Or, le Seigneur est parmi elles, en chaque
événement, dans tous leurs états, d’heure en heure. (6) Elles ne se
retireraient pas de Lui, l’espace d’un clin d’œil, si elles savaient! Car Lui
ne se retire pas d’elles, non, à aucun moment. (7) Et Son Type, parmi ses
créatures, est reconnaissable pour l’initié, grâce à des miracles et à des
signes [MS’],
COMMENTAIRE
Pièce
remarquable, empruntée par le missionnaire ismaeliet Mu ayyad Shiràzi en son
diwân (ms.
L. SOS), avec des variantes intentionnelle, (données ici entre crochets, et
marquees MS, cf. M. FK.. 355). et un sept nom vers, très
shi'ite. 3
Rime : tâ. mètre : basit.
famâ lî bu’dun... wâhidu
(1) Il n’est plus, pour
moi, d’éloignement de Toi, depuis que j’ai constaté que rapprochement et
éloignement (pour Toi) ne font qu’un. (2) Pour moi, si je suis délaissé, c’est
encore une société pour moi que Ton délaissement; d’ailleurs, comment ce
délaissement s'opérerait-il, puisque l’Amour fait trouver! (3) Gloire à Toi !
Qui as tout prévu, en Ta perfection pure, pour que ce serviteur pieux (= moi)
ne se prosterne devant nul autre que Toi !
COMMENTAIRE. Protestation -
satanique - de l'arrioureux délaissé. Avant wâjidu
il
faut peut-être ponctuer al-hibbu, au lieu de
al-hubbu, et traduire, audacieusement : - comment ce délaissement
s'opérerait-il. puisque l'Amant est maître du “Fiat"? •
(al-wàjid = al-Mutà’. selon Ibn Arabi, futûhat, 4. 321). Cf. Shibli (ap.
Nâmûs d’ibn al-Jawzî, 386. I. 11).
Rime : dâl. mètre
: tawîl.
la talumnî fa T-lawm...
wahîdu
(1) Ne me blâme donc pas, le souci d’un blâme ne me touche guère,
protège-moi plutôt, Seigneur, car me voici solitaire.
(2) Autant Ta promesse, comme telle, tient bon, autant ma vocation,
dès son principe, fut dure. (3) Que celui qui le veut note cette mienne
déclaration: Lisez-la, et sachez que je suis un martyr!
COMMENTAIRE P III 331 ; plaintes
d'Iblîs.
Rime : daï. mètre : khafîf.
qad tasabbartu... fûwâdî
(deux pièces)
(1) J’ai essayé de
prendre patience, mais mon cœur peut-il patienter, privé de son centre ? (2)
Ton Esprit s’est peu à peu mêlé à mon Esprit, faisant alterner rapprochements
et délaissements. (3) Et maintenant je suis Toi-même, Ton existence c’est la
mienne, et c’est aussi mon vouloir. — (4) Vous avez dominé mon cœur et j’ai
erré dans tous les ouadis (5) Mon cœur s’est serré, j’ai perdu le sommeil (6)
je suis exilé, seul : combien de temps durera ma solitude.
COMMENTAIRE V. 1-3 v 4-6: mujtathth
Rime : dâl, mètre : majzû ’l-ramal.
yâ shâhidan ghâïban...
mawjûdu
(1) Ô témoin splendide *,
quoique Tu Te caches en Ton invisibilité, si Ta personne s’est cachée, Ton
mémorial subsiste (2) Se priver de Toi a de funestes conséquences, quoique le
renoncement, en tout soit loué (3) quiconque s’approche de Toi reçoit tout
Bien, quiconque s’éloigne de Toi se sent attristé, vaincu.
I. Théorie du shàhid
(valeur testimoniale de la beauté) ■ cf Mél. Joseph Maréchal. I. c . 277,
289.
Rime : dâl, mètre
: basît.
haqîqatul-haqqi
mustanîr... khabîr
(1) La réalité de Dieu,
comme un éclaireur, sait pousser un cri d’alarme, présage d’un événement sûr.
(2) La réalité de Dieu s’est démasquée, et le sort de qui la recherchait est
d’être angoissé.
COMMENTAIRE. P. Ill, 194 (cf. aussi P
III. 361. n. 10. pour une imitation d'Abû Nuwâs au vers 2b). Vers 2
repris par M. b. 'Ali Sûdi.
Rime : râ, mètre : mukhalla’
al-basit.
anta ’1-muwallihu lî...
dhikarî
(1) C’est Toi, mon
ravisseur, ce n’est pas l’oraison qui m’a ravi! Loin de mon cœur l’idée de
tenir à mon oraison ! (2) L’oraison est la perle médiane (d’un gorgerin
orfévré) qui Te dérobe à mes yeux, dès que ma pensée s’en laisse ceindre par
mon attention.
COMMENTAIRE P. Ill, 129.
Commenté par Suhrawardi Halabi. Imité par Ibn nl-Fârid,
fa’iya, 4b.
Rime : râ, mètre
: basit.
mawâjîdu haqqin...
akâbiri
(1) Les états d’extase divine, c’est Dieu qui les provoque tout
entiers, quoique la sagacité des maîtres défaille à le comprendre.
(2) L’extase, c’est une incitation, puis un regard (de Dieu) qui croît
et flambe dans les consciences. (3) Lorsque Dieu, ainsi, vient habiter la
conscience, celle-ci, doublant d'acuité, permet alors aux voyants d’y observer
trois phases : (4) celle où la conscience est encore extérieure à l’essence de
l’extase; celle où elle devient spectatrice étonnée; (5) celle où la ligature
du sommet de la conscience s’opère; et alors elle se tourne vers une Face dont
le regard la ravit à tout autre spectacle.
COMMENTAIRE. P. III, 58, n. 4. Cf.
Q. 1 .
IV, p. 56*. Trud. turque (ms. P. sp. 188, I27b).
Rime : râ, mètre
: tawîl.
idhâ balagha ’1-sabbu...
dhikri
PREMIÈRE RECENSION. (1)
Quand l’amant arrive au plein élan de la générosité, et qu’il est distrait de
l’union avec l’Ami par l’ivresse (de prier), (2) alors il doit constater ce
dont sa passion le prend à témoin: prier devient, pour les amoureux, de l’impiété.
SECONDE RECENSION. ( 1)
Quand l’amant arrive au plein élan de la générosité, et qu'il oublie l’invoqué
à force d’invocations, (2) alors on a réalisé ce que la passion rend évident:
prier devient, pour les sages, de l’impiété.
commentaire.. P. Ill, 128-129.
Commentaire de Akhb. 48 (if. Q. T .
IV.
p. 77*). La seconde recension a été visiblement retouchée par l'école d'Ibn
'Arabi.
Rime : râ, mètre
: tawîl.
’aqdul nubuwwati...
tâmûri
(1) Le pacte de la
mission prophétique est comme un flambeau de la lumière (divine), dont le point
d'attache (fixe) est caché dans l’enfeu [au-dedans] du couvent (= du cœur). (2)
Par Dieu, le souffle de l’Esprit (incréé) insuffle, dans mon cœur (khaladî),
une pensée: celle-là qu'Israfîl soufflera dans la Trompette. (3) Dès qu’il se
transfigure ainsi devant ma nature pour me parler, j’aperçois Moïse, en
personne, sur le Sinaï.
COMMENTAIRE. P. /, 330. Commentaire de
Akhb. 10
(cf. Cor XXIV, 35).
Rime : râ, mètre : basît.
li anwâri núri ’1-dîni...
asrâru
(I) Pour les lueurs de la
lumière religieuse, il est, parmi la création, des foyers, et pour le Secret
(divin) se gardent, en l’intime des cœurs discrets, des consciences (vierges).
(2) Et pour leur existence, au fond des êtres, réside l’être d'un
Existentiateur, Qui s’est réservé mon cœur, l’avise et l’élit. (3) Considère,
avec l’œil de l’intellect, ce que je te décris, car l’intellect a ses
aptitudes, pour entendre, saisir et voir.
COMMENTAIRE. P
/. J3/. Commente Akhb. (cf. P II!. 26. n. 5).
Imité et dilue par Suhrawardi.
Rime : râ, mètre
: tawil.
sakanta qalbî wa fîhi...
’1-jâru
(1) Tu habites là, dans
mon cœur, où résident, venant de Toi, des secrets. Bienvenu sois-Tu, pour cette
demeure! Bienvenu, plus encore, pour qui l’avoisine! (2) Car, en dedans, nul
n’y est plus que Toi-même, suprême secret que j’y devine. Ah ! regarde de Tes
propres yeux, dans la maison y a-t-il encore un intrus[X] ? (3) Nuit du délaissement,
qu'elle tombe, maintenant, lente ou brève, qu’importe, si c’est bien lui, mon
Ami, l’espoir qu’elle y fait veiller, avec le ressouvenir! (4) Me voici
consentant, si Tu veux, à ma mort, désormais, cher meurtrier, ce que fixe Ton
choix, cela, je le choisis.
MI 'Q ATTA 'A 24
al-hubbu mâ dâma
maktuman... hazari
(1) L’amour, tant qu'il
se cache, se juge en grand péril, et tu ne prends confiance que si tu vas
frôler le risque (2) Et l’amour n’embaume-t-il pas davantage tant que le
souffle des calomnies le répand, tel le Feu : qui ne sert à rien, tant qu’il
couve dedans la pierre (3) Et maintenant que le geôlier arrive, que les
policiers s'attroupent et que le dénonciateur 1 leur a « donné » mon
nom (4) j’en viens à désirer que mon âme soit dispensée de Ton amour; comme si
je pouvais réussir à me dispenser de Toi, ô mon ouïe [11] [12], et ma vue.
ghibta wamâ ghibta...
surûri
(1) Tu m’as quitté? Non,
Tu n’as pas quitté ma conscience, dont Tu es devenu la joie et l'allégresse.
(2) Et la séparation tombe, d’elle-même, en lambeaux, et l’état d’abandon me
redevient présence, (3) et, dans le fond mystérieux de ma pensée. Tu
subsistes, plus avant que l’imagination dans ma conscience. (4) De jour Tu
m’es, en vérité, le compagnon, et dans l'obscurité, l’interlocuteur (ami).
COMMENTAIRE. Le dernier
hémistiche a été imité par Tawhidi (Sadàqa, p. 7).
Rime: râ. mètre:
mukhalla'
al-hasît.
yâ shamsa ! yâ badra !...
wa nâru !
( 1 ) Ô soleil, ô lune, ô
nycthémère ! Tu es, pour nous, et le paradis, et l’enfer! (2) [Placer] la
notion d’éviter le peché, en Toi, serait pécher, et la notion de la honte, en Toi,
serait avilir! (3) Puisque déjà, pour Toi, des amoureux ont perdu toute
retenue, que dire de Toi, qui n’en as aucune?
commentaire. Comparer P,
///. 255. Recueil./? /.<*< et 149. /. 9 sq.
Rime: râ. mètre:
mukhallii
al-basit.
ahruf un arba’a bihâ
hâma... wafikri
( 1) Il y a quatre
consonnes dont mon cœur est épris éperdument, et où s’abîment mes pensées et ma
réflexion : (2) un A, qui « attire » les créatures vers l’acte créateur; un L,
qui m’inflige le blâme [que je mérite], (3) un autre L, qui me blâme encore
plus; enfin un H ’, qui me fait divaguer; as-tu compris?
I. H = huwa
de Cor. CXII. I (abrégé en • hu » extatique, dans les dhikr
et les épitaphes).
COMMENTAIRE. Énigme sur le nom
divin ■’Allah-, imitée par Ahmad G hardi i, puis par Shushtarî. Ibn 'Ajîba y a
ajouté un quatrième vers.
Rime : râ, mètre
: khafîf.
juhûdî laka taqdîsu (deux
recensions)
[comment Satan
a refusé d'adorer Adam]
PREMIÈRE RECENSION. (1)
Je renie (Ton ordre), mais c’est afin que Ta sainteté soit proclamée, et ma
raison (désaxée) danse (en rond) autour de Toi! (2) Qu'est-ce, Adam? Rien,
sinon Toi-même. Il n’est d’Adam que Toi, et celui qui a posé (absurdement) une
différence entre vous deux, c’est Iblîs.
SECONDE RECENSION. (1) Ma
folie, c’est de vouloir Te proclamer saint, et ma pensée danse (en rond) autour
de Toi ! (2) Déjà l’Amant m’a fait délirer, avec Son œil qui s’arque de désir (yar.
: qui dévore). (3) Le guide de l’amour nous avait bien avertis ’, que
s'approcher de Dieu nous livre à l'équivoque. (4) Il n’est d’Adam que Toi, et
celui qui a posé (absurdement) une différence (entre vous deux), c’est Iblîs.
hawaytu bikullî... fî
nafsî
(1) J’ai étreint, de tout
mon être, tout Ton amour, ô ma Sainteté ! Tu me mets à nu, tant, que je sens
que c’est Toi en moi! (2) Je retourne mon cœur parmi tout ce qui n’est pas Toi,
mais je ne vois plus rien qu’effarouchement, de moi à eux, et familiarité, de
Toi en eux ! (3) Ah ! me voici, dans la prison de la vie, environné des
humains; arrache-moi donc, vers Toi, hors de la prison!
commentaire P I 331-332. Cf.
Psalm., CXL1 8.
Rime: sin, mètre: tawil.
wallahi ma tala’at... bi
anfâsî
(1)Ô Dieu, que le soleil
soit à l’aurore ou au couchant, Ton amour adhère à mon souffle. (2) M’isolant
avec des amis pour causer, c’est de Toi que je leur parle. (3) Te remémorant,
dans la tristesse ou la joie, c’est Toi, dans mon cœur, qui fais le lien de mes
phantasmes. (4) Quand je voulais m’abreuver pour étancher ma soif, c’est Toi
dont je voyais l’ombre dans la coupe. (5) Et si je pouvais aller à Toi, je
T’arriverais, rampant sur mon visage ou marchant sur la tête1
COMMENTAIRE, ¿e vers 5 provient d'un
distique d'Ibn Dâwûd (Zahra, XIII, p. 154). Les vers
6-7. rajoutes dans Haskafî, sont calqués sur Abu Nuwâs (Dîw. 375-376).
V. 5
imité par Ibn al-Fârid (Fâ’iya, v. 30).
Rime : sin. mètre : basît.
yâ nasîm al-rîhi... illâ
’atashâ
( I ) Ô souffle de la
brise, va, et dis au Faon : aller à l’aiguade ne fait que m’altérer! (2) (Qu’il
vienne), ce mien Ami, dont l’amour est dans mon cœur: et, s’il veut, qu’il
foule ma joue en marchant! (3) Son Esprit est mon esprit, et mon esprit Son
Esprit; qu’il veuille, et je veux ; que je veuille, Il veut !
COMMENTAIRE P. III. 370 (sur
l'exégèse alchimique de ces vers). Le vers 2baété imité par Ibn
al-Fârid (Fâ’iya, v. 32), et le vers 3 par le
poète profane Ahmad-b- Kulayb Anda lust.
Rime : shin,
mètre : ramal.
’ajibtu likullî .. ardí
( 1 ) Je me suis demandé
: comment mon tout pourrait-il porter ma Part, elle est si lourde, la terre ne
pourrait plus me porter; (2) Ah, dût-Elle s’étendre sur toute la largeur de la
création pour se reposer, — ma Part, avec toute l’étendue de la création,
restera prise dans mon étreinte [XIII] !
ma ziltu atfûw...
wa’nhattu
(1) Je ne cessais de
nager sur les mers de l’amour, montant avec la vague, puis redescendant; (2)
tantôt la vague me soutenait, et tantôt j’enfonçais; (3) enfin l’amour
m’emporta jusque-là (en haute mer) où il n’y a plus de rivage. (4) Alors je
criai : « Ô Toi, dont je ne saurais proférer le Nom, ni choquer jamais la
réserve, (5) puisse mon âme T’éviter que Tu deviennes un juge injuste, car ce
n’est pas cela que stipulait notre pacte ! »
COMMENTAIRE. «Ne pas nommer »
: règle de précaution shî'ite (pour /’imâm) et udhrite (pour l'aimé).
Cf. ici qasída n° VII ; et Cor. XII, 52.
Rime : tâ, mètre : sari'.
makânukâ min qalbî...
mawdi’u
(1) Ta place, dans mon
cœur, c’est mon cœur tout entier, rien d’autre que Toi n’y a de place; (2) mon
esprit Te retient entre ma peau et mes os, regarde, si je Te perdais, comment
ferais-je? (3) Quand j’essaye de cacher qui j’aime, mon subconscient le
manifeste par les larmes que je cachais.
Rime: 'ayn, mètre
: tawîl.
idhâ dhakartuka... awjâ'u
(I) Penser à Toi me
tourmente du désir de Te voir, T’oublier me fait pleurer et souffrir; (2) me
voici tout entier devenu cœurs T’implorant pour souffrir d’amour, et voici que
les douleurs s’annoncent !
Rime : 'ayn mètre : basit.
nadîmî ghayru mansûbin...
al-hayfi
(1) Celui qui me convie, et qui ne peut passer pour me léser,
(2) m'a fait boire à la coupe dont 11 a bu : tel l’Hôte traitant un
convive. (3) Puis, la coupe ayant circulé. Il a fait apporter le cuir (du
supplice) et le glaive. (4) Ainsi advient à qui boit le Vin, avec le Dragon
(zodiacal), en Été.
NB Trois des rimes reprises up.
Muhsin Amili, Lawà’tj al ashjân, p. 145.
COMMENTAIRE P. /. 632,
635-638 ; III, 36! ; Recueil, 65. Quatrain célèbre, que
Hulwûni (Akhb. /6) met dans la bouche
d'al-Hallàj. dansant, en extase de jubilation, sur le chemin du supplice. Des
critiques y ont vu un quatrain de poète profane; improvise
pour échapper aux sanctions d'une invite obscène, à un prince, dans une orgie;
par Khali’, devant le prince Ibrahim al-Mahdî, disent Sûli (deus récits
contradictoires). Hamza Isfahàni et Râghib ; par Abu Nuwâs, devant le khalife
Amin, dit Abû Yûsuf Qazwini. Cette attribution n'est rien moins que sûre, car
tous ces critiques sont postérieurs ; et hostiles à al-Hallâj ; et la pièce,
qui ne figure ni dans le Dîwân de Khali’. ni dans celui
d’Abù Nuwâs là qui on attribuait les beaux vers de Khali' :
Aghâni, 2e edit., VI, 165). n'est pas citee par Ibn Muhalhil
dans ses Sariqât Abi Nuwâs (ms. Esc. 772. fol.
87-103: communication due à l'amitié d'Asin Palacios). Imitee par 'Attâr et Ibn
Sana al-Mulk. elle contient un quasi-blasphème que le mystique flamand
Ruusbroec (m. 1381 ). chose curieuse, a retrouve, de façon indépendante
(Recueil, loc. cit.)
Rime : fâ, mètre
: hazaj.
sayyaranî ’l~haqqu...
wathîqa
(1) Dieu m’a transporté
dans la réalité, grâce à un contrat, un pacte et une alliance. (2) Ce qui
atteste maintenant (en moi), c’est mon subconscient, sans ma personnalité
(créée); ici, c’est mon subconscient; là-bas, c’était le chemin.
COMMENTAIRE P 111. 310.
Rime ■ qâf, mètre
: mukhalla'
al-basit.
wahhidnî wâhidî... tarqu
(1) Unifie-moi, ô mon
Unique (en Toi), en me faisant vraiment confesser que Dieu est Un, par un acte
où aucun chemin ne serve de route! (2) Je suis Vérité en puissance, et comme la
Vérité en acte (al Haqqu) est son propre potentiel, que notre séparation
ne soit plus ! (3) Voici que s’illuminent des clartés rayonnantes, scintillant
avec les lueurs de la foudre !
COMMENTAIRE. P III. 72-73.
Tercet sur le Tawhîd, dont T authenticité est attestée par Ibn
Khafîf et Daqqâq. Il a été imité par Harawî à la fin des Manâzil
: Mâ wahhadal Wâhidâ min wâhidin... - Personne ne témoigne réellement du Dieu unique
"qu'il est unique"... - (cf. P III. 247). — Le ms. T de
Taq. (p.
54, l. 12-13 ; cf. M. p. 42) lit. au début du vers 2, Ana’l
Haqqu, insérant là. avec une anomalie métrique que tolérait notre
première édition, une mention du célèbre mot hallagien - je suis la Vérité - .
il faut lire Ana Haqqun - je suis Vérité en
puissance (non en acte) », — Quant à la vocalisation
wahhidnî du premier mot du tercet, elle est confirmée par Daqqâq. qui lit,
également à T impératif : hashisnî (allusion à Cor. XII,
51).
Rime : qâf, mètre
: khafîf.
rukûbu ’1-haqîqati...
tadiqqu
(1) Le raccordement de la
réalité à Dieu est œuvre divine, et le sens de cette expression est ténu à
saisir; (2) J’ai raccordé l’Existence à mon manque d’existence, mais mon cœur
ne sent pas fondre son endurcissement. (3) Questionnez-moi, ma réponse sera
claire, — la réalité divine détruit les frocs de sûfî (4) et annihile les
natures, en tuant les (cinq) sens, et cela est plus difficile à comprendre.
COMMENTAIRE P. Ill, 194
Rime : qâf, mètre : mutaqârib.
jubilat rûhuka... fatiq
(1) Ton Esprit s’est emmêlé à mon esprit, comme
l’ambre s’allie au musc odorant. (2) Que l’on Te touche, on me touche; ainsi,
Toi, c’est moi, plus de séparation.
COMMENTAIRE Ce beau distique porte
l'empreinte de Bashshâr, car Bashshâr a dit : ■ quand la colombe parle, un
attrait me tourmente de désir, et je ne puis maîtriser mes larmes, d'emotion .
oui. il y eut un temps ensemble, moi et elle, où (nous étions) comme le musc
avec l'ambre rose - (cf. M. FK . 357). — Cf. lâmiya,
ici.
M. 47.
Rime : qâf, mètre : ramai.
dakhaltu binâsûtî...
sidqi
(1) J’ai introduit mon humanité en Ta présence devant les hommes, et
si Tu n’étais pas ma déité, je serais sorti de la vérité.
(2) Car, si la science s’exprime en phrases pour guider, la langue de
l’au-delà n’a pas besoin de phrases. (3) Tu as apparu pour certains, Tu T’es
voilé pour d’autres, qui se sont égarés et perdus, et Tu T’es dérobé à Ta
création. (4) Mais Tu surgis pour les cœurs, à (’Occident, quelquefois, et
alors, pour les cœurs, Tu disparais à l’Orient.
COMMENTAIRE Taw.,p. 135
Rime : qàf, mètre : tawîl.
ittahadaTâshiqu... wâmiqi
(1) Les voici, donc unis,
le désiré avec le désirant Çâshiq), et séparés: le conjoui d’avec le
conjouissant (wâmiq) (2) Et appariés, ces deux pareils, dans une seule
pensée, qui les a fait sombrer dans l’eau trouble d’une conscience double.
COMMENTAIRE Distique récité par
Hallâj à l’annonce de la mort de deux amants inséparables, qu'il avait souvent
observés côte à côte, à la mosquée d’Ahwéiz, certainement péjoratif, puisqu’il
y a précellence de ’ishq, désir, sur
wimâq, conjouissance {inerte).
Rime : qâf, mètre : basît
fîka ma’nâ yad’û ..
tlayka
( I ) En toi, il y a une
idée qui attire à Toi les âmes, et un argument qui Te prouve par Toi-même. (2)
Moi, j’ai un cœur, qui a des yeux grands ouverts, sur Toi, et tout cela est
dans Ta main.
COMMENTAIRE. Le mot
ma'nâ. pour Dieu, est d'origine empédoclienne et shi'ite extrémiste.
Rime : kâf. mètre
: khafîf.
hammî bihi... ilayka
(1) Ma pensée pour lui (=
Ibn ’Atâ) est soupir après Toi, ô Toi vers qui vont nos allusions, (2) puisque
nos deux esprits sont liés l'un près de l’autre par l’amour, près de Toi et
face à Toi.
Rime : kâf, mètre : kâmil mudhayyal.
dunyâ tukhâdi’unî...
hâlahâ
(I) La vie mondaine m’a
cajolé comme si moi, j’ignorais ce qu’elle vaut. (2) Dieu nous interdit ce
qu’elle offre de défendu, et moi, je m’écarte même de ce qu’elle offre de
licite. (3) Elle m’a tendu sa main droite, je la lui ai repoussée, avec sa
gauche. (4) Il m’a paru qu’elle était dans le besoin, aussi lui ai-je laissé
tout son bien. (5) Quand donc me serais-je uni à elle, pour que je craigne sa
satiété?
COMMENTAIRE P I. 165 Rifa'i
l'attribuait à A/i (Witri, ms P. 6465. 237b).
Rime : lâm. mètre : nuijzul kârnil.
’alayka yâ nafsî...
waltakhallî
( 1 ) Ó mon âme, sache te
conforter! La gloire est dans l’ascèse et la retraite. (2) Songe à la clarté
qui s’abrite dans la niche de l’extase transfigurante. (3) Voici que ma part (=
mon âme) s’occupe d’une partie de sa Part (= Dieu), et que mon tout aspire au
Tout de mon tout !
Rime: lâm. mètre: mulhalla'
al-basit.
muzijat rûhuka... zulâli
(1) Ton Esprit s’est
emmêlé à mon esprit, tout ainsi que s’allie le vin avec l’eau pure. (2) Aussi
qu’une chose Te touche, elle me touche! Ainsi donc, Toi, c’est moi, en tout!
COMMENTAIRE P. Ill, 49, 362;
Taw,. 134;
cf. la qâfiya, supra. n" 41. C'est imité de Buhturi
(Dîw., p. 36; Râghib Muh., 246) :
'J'ai découvert que ton âme avec la mienne était
dans le même rapport de transparente sincérité que l'eau, avec le vin. - Et
Rashid al-Din (ms. P., 2324. 72b, I58b), puis A. Bistâmi
(manâhij al tawassul, Cple, 1299 n., ¡38) l'ont imité à leur tour.
Rime : lâm, mètre
: ramai.
ni'ma ’1-i’ânatu...
khilalih
( 1 ) Bénie soit la
Grâce, par ceux à qui elle vient, sortant du secret de Sa miséricorde, flambant
comme un éclair émané des franges de Ses attributs. (2) Tantôt cette Grâce fait
de moi un Sinaï, d'où je la regarde de haut, moi qui me suis abreuvé à ce qui
descend de ses cimes (3) Tantôt mon désert s’étend stérile, vrai désert de Tîh
( = désert de l'Exode) qu’ensable la marée d’une mer (Rouge) qui n’est que
dessèchement, du fond de son humidité. (4) Et le tout m’atteste que je Lui suis
total, mais je dois L’attester lointain, dans Sa réalité, sauf quand 11 se
particularise dans telle goutte de Ses rosées.
COMMtNTAlRL. Pièce plaçant la
vocation du mystique a l'union divine sous le Signe de Moïse, que l'islam ne
re< onnaît pas comme son législateur, mais venere comme le guide vers
l'extase (cf. le Buisson Ardent) , sujet traité plusieurs
fois par Hallâj. en prose et en vers (ici nus 2/. 5S) — Cor. XXIV.
43.
Rime : lâm. mètre
: bastt.
thalâthatu ahrufin...
kalâmu
(1) Trois lettres sans
point diacritique, puis deux pointées: et le discours s’interrompt là! (2) La
première (des pointées) désigne ceux qui la trouvent, et l’autre, pour chacun,
sert à dire «oui». (3) Quant aux (trois) autres lettres, c’est le mystère
nocturne, là où il n’est plus question de voyage, ni d’étape.
COMMENTAIRE. P. I. 333. Énigme
dont le mot est tawhid.
Rime : mim, mètre : wâfir.
tafakkartu fi
’1-adyâni... jammâ
(1) J’ai réfléchi sur les
dénominations confessionnelles, faisant effort pour les comprendre, et je les
considère comme un Principe unique à ramifications nombreuses. (2) Ne demande
donc pas à un homme d’adopter telle dénomination confessionnelle, car cela
l’écarterait du Principe fondamental, et certes, (3) c’est ce Principe lui-même
qui doit venir Le chercher, Lui en qui s’élucident toutes les grandeurs et
toutes les significations; et l’homme, alors, comprendra.
COMMENTAIRE Recueil,/» 58.
Rime : mim. mètre : tawîl.
yâ lâ’imî fi hawâhu...
lam talumi
(1) Ô toi qui me blâmes
de L'aimer, comme tu m'accables! Si tu voyais Qui je veux dire, tu ne me
blâmerais plus. (2) Les gens font le pèlerinage, moi je vais en pèlerinage
(spirituel) vers mon Hôte bien-aimé; s’ils offrent en sacrifice des agneaux,
moi j’offre mon cœur et mon sang ! (3) Il en est qui processionnent autour du
Temple, sans y être corporellement, car c’est en Dieu qu’ils processionnent,
et II les a dispensés du Haram !
COMMENTAIRE. P. I. 589-590.
Sur le vrai pèlerinage. Imité par Ibn al-Fârid (mîmiya,
v. 10)
et par Bûsirf (burda).
Rime : mîm, mètre : basit
bada ¡aka sirrun...
zalâmuhu
(1) Un secret
t’est montré, qui te fut si longtemps caché, une aurore se lève, et c’est toi
qui l’enténébrais encore. (2) C’est toi qui voiles à ton cœur l’intime de son
mystère, et si ce n’était toi, ton cœur ne serait pas scellé. .ji
Rime : mîm, mètre
: tawîl
haykalîyu ’1-jismi...
’alîm
(1) Typique quant à la coque, lumineux quant au noyau, étemel quant à
l’essence, doué de discernement et de science,
(2) l’homme (en mourant) rejoint par l’Esprit ceux en qui II réside,
tandis que son enveloppe subsiste, en terre, pourriture.
COMMENTAIRE Pièce
spiritualiste à saveur Ismaélienne : interpolée, ce qui est très remarquable,
dans le Dîwân d'un ennemi de Hallâj, le troisième
fondateur des Nusayris, Khasîbî (m. Alep, en 957 de notre ère;
Dîwân, ms. Manch., p. !20a), avec quelques variantes qui se retrouvent
dans le ms. M. du Taq. hallagien (cf. M. FK., 358). Imitée par
Nâbulsî (kashf, en neuf vers). P. III, 27.
Rime: mîm, mètre:
ramai.
qalbuka shay’un... zulamu
(1) Ton cœur contient,
.au-dedans, des Noms Tiens, que ni la lumière, ni les ténèbres ne connaissent
guère. (2) La lumière de Ton visage reste un mystère quand on l’aperçoit; là
est la générosité, la miséricorde et la noblesse. (3) Ecoute donc mon récit,
Bien-aimé, puisque ni la Tablette ni le Calame ne le sauraient comprendre.
ahi! ana, am anta?...
ithnayni!
[oraison pour demander
( I) « Ah ! 1
» : est-ce moi, est-ce Toi ? Cela ferait deux dieux. Loin de moi, loin de moi
la pensée d’affirmer «deux» ! (2) Il y a une ipséité tienne, au fond de mon
néant pour toujours, et mon tout, par-dessus toutes choses, s’équivoque d’un
double visage. (3) Où donc est Ton essence, hors de moi, pour que j’y voie
clair? Mais déjà mon essence s’élucide, au point qu’elle n’a plus de lieu. (4)
Et
DÎWÂN
où retrouver Ton visage,
objet de mon double attrait, au nadir1 de mon cœur ou au nadir de
mon œil? (5) Entre moi et Toi, il y a un «c'est moi» qui me tourmente, ah!
enlève par Ton «c’est Moi», mon «c’est moi» hors d’entre nous deux!
I L'image pupillaire.
a lâ abligh ahibbâ’î...
al-safîna
(1) Oui, va-t’en prévenir
mes amis que je me suis embarqué pour la haute mer, et que ma barque se brise!
(2) C’est dans l’instance suprême de la Croix que je mourrai ! Je ne veux plus
aller ni à La Mecque, ni à Médine.
COMMENTAIRE. Cette pièce
paradoxale a été commentée par Mursî (cf. Akhb., p. 141 du texte
arabe) : ■ qu est-ce que dîn sinon le moment ou
instance suprême ? Dieu a dit mâliki yawmi'Idîni, "souverain du Jour de
Justice " (Cor. !, 4). Ce mot veut dire simplement que Hallâj mourrait
crucifié, et c’est ce qui eut lieu. » — Le mot
satina, « barque », est aussi significatif, car sa valeur, en onirocritique.
équivaut à - croix - (salîb: Dînawari, qâdiri.ms. P., 2745-2O4b,
d’après Artémi- dore d’Éphèse); — cf. le proverbe nusayri - monte dans la
barque, et quitte la Cité- (madîna), auquel Hallâj
parait avoir ainsi pensé, ainsi qu’à la • barque - brisée par Khadir, et à la
petite cité (qarya : Nazareth, selon Qummî) qui refuse à Khadir l’hospitalité
dans Cor. XVIII, 71 sq. — Cf. M.FK., 359. Et Baghdad!, fanq, 35.
Rime • nûn, mètre
: wâfir.
ana man ahwâ... badanâ
PREMIÈRE RECENSION. — ( 1
) Ô toi qui poses des questions sur notre aventure; — si tu nous avais vus, tu
ne nous différencierais plus (2) je suis devenu Celui que j’aime, et Celui que
j’aime est devenu moi; — nous sommes deux esprits, infondus en un (seul) corps (3)
pour nous, depuis que nous sommes en confiance mutuelle, — les gens mettent
notre légende en proverbes — (4) lorsque tu m’as aperçu, tu L’as aperçu, — et
lorsque tu L’as aperçu, tu nous as aperçus (5) Son esprit est mon esprit, et
mon esprit Son esprit; — nous sommes deux esprits vivant en un (seul) corps.
COMMENTAIRE. P. Ill, 50. C'est
certainement la pièce la plus anciennement celebre de Hallâj, car elle eut. dès
le Xr siècle, deux recensions, l'une en deux, l'autre en cinq vers.
J'avais cru la recension longue une - dilution - postérieure, mais Daylami
(’atf, 122b) —cf. Fakhr Fârisi. (jamha, ms. Wèlieddin 1828, 41a)
—
la donne déjà, comme
Kalabadhi (ikhbâr. 264b, marge) : il y voit «
al-iftitân, al-fardâniya».
Hallâj parait s'y être inspiré d'un distique de
Bashshâr : - les soucis des humains les attachent à tant de choses, mais mon
seul souci ici-bas c'est l'amitié d'un être noble
(inâiid), — qui se poserait comme un Esprit entre deux corps dissociés ; nos
deux corporéitès seraient deux corps, mais leur Esprit serait Un- (le mot
-
mâjid- est ismaélien,
gébérien). Cf. M. FK., 359.
Cette pièce a été incriminée pour le mot
hulûl ■■ (infusion); et l'école des Wujûdiya l'a profondément
retouchée (voir l'édition du texte arabe du Dîwân,
p.
92); ajouter Ibn 'Arabi, tarjumân. chap. LUI, 2). Et même des
Shuhûdiya comme Semnanî l'ont critiquée. Mais Ghazâli l'a admirée et
commentée (ma- qsad. 61, 73; mishhât, 20) et Rûmî l'a traduite en persan dans
son Dîwân Shems-i-Tebriz. Et le philosophe Sadr Shirazî l'a
commentée (asfâr, 390).
Rime : nûn, mètre
: ramai.
SECONDE RECENSION. — ( 1
) Je suis devenu Celui que j’aime, et Celui que j'aime est devenu moi! — Nous
sommes deux esprits, infondus en un (seul) corps! — (2) Aussi, me voir, c'est
Le voir, et Le voir, c’est nous voir.
yâ ghâfilan,
lijahâlatî... wabayânî
(I) Ô insoucieux, par
ignorance de mon cas, allez-vous comprendre qui je suis et ce que j’expose ?
(2) Ma dévotion envers Dieu, ce sont six consonnes, dont deux portent des
points diacritiques.
(3) De ces consonnes, l’une est radicale, l’autre vocalisée î.
(4) Placez, maintenant, Valif avant la consonne qui devient la
seconde du mot, (5) et vous m’apercevrez, à la place de Moïse, debout, dans la
lumière, sur le Tûr (Sîna), si vous me devinez.
commentaire. P. 1, 333.
Énigme, dont le mot est nârnûsî (= [a]nà + Mûsâ) (contra
Machriq, XI, 880-881). Tûr, au cinquième vers, réfère à la fois au
Sinaï de
Moïse, et au Tûr (Beïza) où naquit Hallâj.
Rime : nûn, mètre
: kâmil.
khâtabanî 1-haqqu...
lisânî
(1) Dieu m’a parlé, du fond de mon cœur, et ma science s’est formée
sur mes lèvres. (2) Il m’a rapproché, moi qui étais loin de Lui; 11 m’a rendu
Son intime, et Son élu.
COMMENTAIRE. P. III. 311.
Rime : nûn, mètre : mukhalla' al-basît.
[kadhâ]’ jtabânî...
’arrafanî
( 1) Ainsi, Il m’a
choisi, rapproché, honoré, et le tout, en totalité, Il me l’a confié et fait
comprendre. (2) Il ne me reste plus rien, au cœur et dans les entrailles, par
où je ne L’appréhende et II ne m’appréhende.
Rime : n«n, mètre : basit
anta bayn al-shaghâfi... ajfânî
( 1) Tu es là, entre les
parois du cœur et le cœur, Tu T’en échappes, comme les larmes glissent, hors de
mes paupières. (2) Et Tu deviens la conscience personnelle au-dedans de mes
entrailles, comme les esprits s’infondent dans les corps. (3) Ah! rien d’immobile
ne se meut sans que Toi, Tu ne l’émeuves par un ressort secret. (4) Ô Croissant
qui Te montres dans ta perfection le quatorzième jour, ajoutant ainsi huit
et quatre au deux (de Ta réapparition).
COMMENTAIRE P. Ill, 50 (cf.
Ill, 102 ; et Nuseïris); Taw 133. Le vers / est
probablement inspiré d'un vers de 'Antara.
Le paradoxe du vers 4 est classique (Goldziher.
zahlspielerei, ap. ZDMG (1895).
49, 210-217).
Rime : nûn, mètre
: khafîf.
hammalta bilqalb...
al-budunu
( 1) Tu as donné à mon
cœur un fardeau que mon corps ne saurait porter, mais le cœur sait porter ce
qui fait défaillir les victimes mecquoises. (2) Ô, puissé-je être le plus
proche de ceux qui recourent à Toi, yeux, pour T’apercevoir, ou, du moins,
oreilles !
commentaire. P. III. 20 Sur
budun, cf. Nusayb. Aghàni, I, 372.
Rime : nûn, mètre : basît.
bayânu bayâni ’1-haqqi...
lisânuhu
(1) Le discours montrant (ce qu’est) Dieu, voilà ce que tu dois
devenir, et tu seras alors le langage exprimant tout discours.
(2) C’est par Dieu (même) que j’ai montré Dieu, à toi donc d’être
(aussi) le garant de quiconque montre Dieu. (3) Si tu montres Dieu dans Sa
réalité même (en devenant saint), Dieu s’exprimera (par toi), et tu posséderas
tout langage et ses aspects. (4) Si la caractéristique de Dieu est pour Dieu
explicite, pourquoi le lieu où elle se manifeste parmi les hommes ( =
toi-même) leur resterait-il caché ?
Rime: nûn, mètre:
tawil.
raqîbânî minnî
shâhidâni... tarânî
(1) J "ai deux
surveillants (mes oreilles) qui constatent que je l’aime, et j’en ai deux (mes
yeux) qui constatent que Tu me regardes. (2) Aucune pensée ne traverse mon
intime que Toi ; rien n’est dit, sinon Ton amour, par ma langue. (3) Visé-je à
l’est, Tu en es l’orient; à l’ouest, Tu es droit devant; (4) en haut, et Tu en
es l’au-dessus; en bas, et Tu es partout. (5) C’est Toi qui donnes à tout son
lieu, sans T’y localiser. Tu es dans tout le tout, sans être périssable. (6)
(Tu es) mon cœur et mon esprit, ma conscience et mon inspiration, et le rythme
de mon souffle, et le nœud de mon organisme.
commentaire Pièce suspecte
Abu Sa'id a traduit le vers 5 (H. Azâd, Roseraie, n° 7). Octain
parallèle d'ibn Dâwûd (Zahra, chap,
xix, p.
206); cf. Ibn Rajab. Kashf alkurba, ap.
majmû', 327 ; S b. Y Juhani, Fayd almaiik, 153).
Rime : nûn. mètre : tawîl.
’iija’ ilâ ’llahi... illâ
hû
(1)
Reviens à Dieu, car le terme, c’est Dieu, et, quoi que tu t’efforces, il n’y en
a pas d’autre que Huwa (Lui). (2) Lui, Il est avec ceux qui Le savent
signifié par le Mîm, le ’ Ayn et la Sainteté.
(3) Il s’exprime par les lèvres mêmes de ceux dont l’épellation est
nouée, pour ceux qui Lui parlent. (4) Si tu en doutes, médite le hadîth,
qui interdit d’en douter ! c’est Lui. (5) Et Mîm donne accès vers Lui (Huwa),
en haut et en bas, et le ’Ayn, de loin et de près.
COMMENTAIRE P I, 336-337;
III, 340, n. 2 Pièce fort intéressante, car elle réfère à la théorie
selmanienne des trois lettres : 'Ayn (qui désigne ’Alt).
Mîm (qui
désigne Muhammad) et Sîn ( - la Sainteté - : Selmân).
Cf. notre Salmân Pâk, Paris, 1933, p. 35-39;
trad. angl. Unwala, Bombay, 1955.
man râmahu bil ’aqli...
yalhuw
(1) Celui qui, ayant soif
de Dieu, prend la raison pour guide, elle le mène paître dans une perplexité où
elle le laisse s’agiter. (2) Ses états de conscience s’y fanent, dans
l’équivoque, et il se dit, perplexe: « Existe-t-Il ? »
COMMENTAIRE. Taw., 196; P. Hl, 71.
Sulami l'a commenté dans une sentence critiquée par Mursi (Sha’ráwí,
Lawâqih, 11, 17).
Rime : hâ, mètre
: sarC.
lastu bil tawhîdi...
as/huw
( 1 ) Non, je ne me fais
pas un jeu de mon « credo » ; et pourtant mon «je» (= heccéité) le néglige. (2)
Comment peut-il le négliger, s’en jouer? Ah! vraiment, mon «je», c’est Lui?
COMMENTAIRE P III, 71.
Rime • hâ, mètre : ntûjzu al-ramal.
yâ sirra sirrî,
tadiqqu... hayy
(1)0 conscience de ma
conscience, qui Te fais si ténue, que Tu échappes à l’imagination de toute
créature vivante! (2) Et qui, en même temps, et patente et cachée, transfigures
toute chose, par- devers toute chose! (3) Si je m’excusais, envers Toi, ce
serait (arguer) de mon ignorance (de Ton ubiquité), de l’énormité (coupable)
de mon doute (sur notre union), de l’excès de mon bégaiement (alors que Tu
m’as pris pour porte-parole). (4) Ô Toi, qui es la Réunion du tout, Tu ne m’es
plus «un autre», mais «moi- même»! Mais quelle excuse, alors, m’adressé-je, à
moi?
COMMENTAIRE P. Ill, 56. Pièce
célèbre, dont deux maîtres de la langue arabe Abû 'Ali Fârisi, et Abùl Alà Ma'arri
ont étudie, l'un la pensée intime, et l’autre la prosodie. Le grand théologien
ash'arite Fakhr Râzi a introduit les vers 1-2 dans son tafsîr
(commentaire
du Coran, t. I, 149). Shushtari en a peut-être imité le vers 4 dans son Qays et
Leila - (Recueil, 139). Cf. Schaeder, ap.
OLZ.. ¡927, 834 sq. ; P. Ill, 353 et Fakhr Fârisi, dalàlat al-mubtahij.
Rime : yâ, mètre
: mukhalla'
al-basit.
ismun ma’ al-khalqi...
ma’ânîhi
[contre la superstition
du - nom suprême » ]
( I) Un Nom, qui Le
rattache à Sa création : on l’a cherché, soupirant après Lui, afin de
connaître (par ce Nom), telle de Ses significations. (2) Mais on ne saurait
passer directement de Dieu à une cause créée, telle qu’elle manifeste
nécessairement Celui qui l’a manifestée.
COMMENTAIRE P II/. 110. Cité
par Fakhr Râzi. tafsîr kabîr, /. 149.
Rime : yâ, mètre
: basît.
YATÂMÀ
mithâluka fi ’aynî...
taghîbu?
Ton image est dans mon
œil, Ton mémorial sur mes lèvres, -— Ta demeure en mon cœur, mais où Te caches-Tu
donc?
Rime : bâ, mètre : tawil.
kafartu bidîni ’llahi...
qabîhu
J'ai renié le
culte dû à Dieu, et ce reniement m’était un devoir, — alors qu’il est pour les
musulmans un péché.
COMMf NTAlRt- Ce vers devait
terminer le n" 4/ des Akhbâr, commenté en arabe par
Su'd Kàzerûni fms. Londres 16 659), et en persan par Tabriz!
I bibliographie n" 1195).
Rime : hâ. mètre
: tawîl.
faqultu... hya
’1-shamsu... bu’du
Je leur dis: mes amis, Elle, c’est le soleil; sa
lumière — est proche, mais pour l’atteindre, qu’il y a loin!
COMMENTAIRE. Cf. Ibn Dáwúd.
Zahra, chap. XLVUI, p. 484 ; Mille et Une Nuits, Ed. Boulaq, 1279,
I, 447.
Rime : dâl, mètre : tawîl.
qad kuntu fi ni’mati...
batiri
J’avais été, dans
le bonheur d’aimer, exubérant; — et me voici atteint du châtiment de
l’exubérance.
NB. <■ Exubérant» (batiran)
est coranique (Cor. VIII, 49); d'où le toponyme égyptienNazlat al Batrân
(près Gîzé).
Rime : râ, mètre : munsarih.
shartu ’1-ma’ârifi...
muttali’i
La condition, pour
recevoir les dons de sagesse, c’est d’annihiler tout ce qui vient de toi, — vu
que le novice a au début un regard sans pénétration.
Rime : uvn. mètre : basît.
dhikmhu dhikrî .. illâ
ma’an?
Son mémento est mien, et mon mémento sien; —
comment, se souvenant à deux, pourrions-nous exister autrement qu'ensemble ?
Rime: ’avn, mètre: ramai
lâ tu’arrid binâ...
’ushshâqi
Ne t'attaque pas à Nous, regarde notre doigt, —
que Nous avons arde dans le sang des amants.
Rime : </<</, mètre : khafïf.
idhâ waswasati...
walkursi
Lorsque mon état
(mystique) est troublé par des funérailles ou des noces, —j'ai des visions de
l’enfer, du paradis, des Cieux et du Trône.
Rime : sin. mètre : rajaz
On a, sous le nom de
Hallâj, d'autres poèmes que ceux qui précèdent, les uns empruntés à des poètes
antérieurs, les autres à des poètes postérieurs, qui ont, assez souvent, pensé,
en les écrivant à exprimer la psychologie de Hallâj persécuté, souffrant, et
supplicié. On en trouvera la plupart dans les sections // et III de l'édition
des textes arabes publiée en 1931, à Paris, chez Geuthner. Nous n’en donnerons
ici que deux, qui posent le problème du langage •• théopathique • :
( 1 ) Je ne livre mon âme aux
tourments qui la font périr, que parce que je sais que c'est la mort qui la
fera revivre. (2) Un seul regard de Toi, ô ma demande, ô mon espoir, m’est plus
attrayant que ce bas monde et tous ses biens; (3) L’âme de l’amant, dans les
supplices, est endurante, parce que 1 c’est son
Tourmenteur, un jour, qui la guérira.
SOURCES : énumérées
dans l'éd. de 1931, p. 127; y ajouter: Jazâiri, zahr al-rabi, 188;
Ismaïl Haqqî, rûh al-bayàn, I, 139 (signalé amicalement
par Sherefettin
Yaltkaya, peu avant sa mort).
Rime : hâ ; mètre : basît.
I.
-Parce que» traduit l’arabe coranique -laallu- qui,
normalement, signifie «peut- être-, mais qui, selon les commentateurs du Coran,
depuis Muqâtil-b-Sulaymân Azdî (m 150/767), le maître de Shâfi’i, doit être,
puisqu'il s’agit de Dieu, traduit par - likay-, c'est-à-dire
«parce que» (cf. dans le grec évangélique -Hina-
et -Oti-,
«pour que», et ■ parce que • ; suivant la manière d’insérer Dieu dans le
temporel).
( I) J'ai étendu, vers le
Clément, misérablement, mes cinq doigts1 — Et une voix (humaine),
dans mon âme pudique 2 m a parlé de moi-même (2) Et cela à cause de
la Joie 1 en moi à Le commémorer — Pourtant, ce n'est pas à mes
pairs de se plaire parmi les humains4 (3) Mais c'est que cet espion
qu'il a en moi contre moi-même — S’en était allé, sur la brise de la Joie,
jusqu'au Verger de la Sainteté.
SOURCES: ms. Fâtih 2650, 101a
(X-I) ; Akhbàr, ms. Mossoul (29“), v. 1-2; ms.
Mazan' ms. Meshkât, 87° (Téhéran).
Rime : sin, mètre : tawil.
î Khamsî = allusion aux Cinq du Manteau.
2 Afin nafsin nafisati = mon
intime trésor.
QASlDA I
Taq. (L, fol. 323a, v
1-4, 6-12, 14, 13, 16-19; J, fol. 5a, v. 1-4, 6-10, 12, 11,
13, 15-19;T,p. 12-13, v. 1-13, 16-19;M,p. 24;K,p.
93, v. 1-4,6-13. 15, 16,
14, 18, 19; cf. ms. Berlin 3492, fol. 4Ia,
v. 1-4, 6-12, 14, 13, 16-19). Hûjwîri, Kashf. édit.
Zhukovski, p. 332, v. 1, 3, 4 (cf. ms. Paris suppl. pers. 1214, fol. I71b,
et Geniza.
v. 1-4). Ibn Kardabûs Tûzari, Iktifâ, ms. Ragragi, Rabat, v
1-4, 6-19. Ibn al-Jawzi, Narjis al-Qulúb. v.
1-3, 5-11. 13-19 Bahâ Amilî, Kashkûl, édit. 1329, p. 115, v.
1, 2, 11, 13 (cf. Khwansârî, Rawdât, II, p. 236). Nâbulsî, Hatk al-astâr,
v, 1-5.
QASlDA 11
Ms. Kôpr. 1620-1, v. 1-13. Taq..
ms. L fol. 327b, v. 1,2, 5, 6, 8, 7, 10, 11.
Fâtih 2650, 1032.
Corr. au texte de 1931 ap. M.
FK., 352.
QASlDA III
Ms Kôpr. 1620-IV, v. 1-7. Taq.
(L, fol. 325b, v. 1-5. 7, 6; K, p. 77, v 1-2; p 92. v. 1-3, 5-7).
Baqlî. Shathiyât. n" 164, v. 1-2; Jildakî, Ghâyat al-surûr. v.
1-7 (base). Fâtih 2650, 100 b
QASlDA IV
Yâfi’î, Mir’ât al-janân.
fol. 233b, v 1-10; Yâfi'î, Ta'rikh, fol.
2O3a, v. 1-10. Taq (ms. M. 26, v. 7-10, ms.
Kazan, p. 97), v. I, 3b + 2b. 7. Fâtih 2650, 101 a.
QASlDA V
Sulami, Usúl al-malâmativa.
fol. 67a, v. 1. 3-9 (base). Taq (ms. L, fol 323b.
v. 3. 4, 6, 9, 10; et foi. 332b, v. 1-2; K, p. 84, v. Ia
+ 3b, 5, 9, 2 vers aberrants, 10). Ibn al-Jawzi, Talbîs.
409. v. 6a + 3b. Jawbarî, Kashf.
fol. 12a, v. 6a + 3b, 4 (= Ibn al-Sâ'î, Mukhtasar,
75). Baqlî, Tafsîr. XVI-46, v Ia + 3b. 5a
+ 4b, 9; V-101, v. 4-9. ’Alî b Wahb Rabî’î, selon Shattanawfî, Bahja.
231, v. 6a + 3b. 5a + 4b, 9 ( =
Tâdhifi, Qalâïd, 94). Ibn 'Arabi, Futû- hàt.
II, 388, v. I, 5a + 4b, 9; Muhàdarât,
II, 316 Izz Maqdisî, Sharh hâl al-awlivâ. fol. 252a,
v. 6a + 3b, 4. Shaydhalâ, ms. Berl. 3087, 84: v. 6a,
3b, x, y, 10. Sibt Ibn al-Jawzi, mir'át
f. 67a, année 451 h.).
QASÍDA VI
Taq. (K. p. 13, v. I, 3, 6, 7, 8;
L, fol. 334a, v. 1,6, 7, 8; cf. ms. Berlin 3492, fol. 42b,
2 recensions = Berl. 1, v. 1, 3, 6, 7 ; Berl.2, v. 2, 3,
5, 4, 6). Qannád, ap. Sarráj, Luma’.
p. 248 (v. 5, 2, I, 3, 4, 6), 372 (v. 7). Sulamí, Ta'ríkh*. n"
XIV (v. I-8) ; Tafsír, inQur.. L, 36 (v. 2)'. Ibn Bâkûye, Bidâya,
Ie (v. 1-8; cf. édit. Dhahabí, ibid. =
Bâk.2). Qushayri, Lataîf. in Qur.,
XXII, 41 (v. 2). Ha- rawî, Tabaqât (Junayd, v. 2, 1).
qasIda vu
Ms. Kôpr. VI, v. 1-10. Taq.
(K, p. 75, v. 1,3, 2, 5, 4, 6, 8, 10; L, fol. 325b, v. 1-10), Fâtih
2650, 101 b.
QAS1DA VIII
Taq., ms. M, p. 47 (v. I, x, 5, 3,
6-8). Kalâbâdhî, Ta'arruf (publ. E, 13*, n" 15), commenté par
Suhrawardî Halabî (qui identifie le poète) et Qûnawî (cf. P., 363 b, 513 a), v.
1-4, 6-8. [Ibn Jahdam, Bahja], source commune d’Ibn Khamîs
Ka’bî (Manâqib)
et de Sha’râwî (Lawâqih), v. 1,3, 6, 2, 5, 8.
QASÍDA VIII bis
Daylami, ' atf,
48a, publ. Essai, 2' éd., p. 448-449; trad. ap. Mél. Jos. Maréchal,
1950, Bruxelles, t. Il, p. 276-277.
QASÍDA IX
Taq., ms. K, p. 84, v. Ia
+ 3b, 2 = Baqlî, Shath., ms. QA, fol. 153b
(trad, pers., v. Ia + 3b, 2). Qazwînî, 'Ajâib.
Ibn Taymiya (Jawâb sahíh, II, 175: v. 2). Hasan Tustarî (ap.
Sha’râwî, Lawâqih. II, 68) et Munawî(Kawâkib),
d’où dérivent Ibn’Aqila(iVusVta) et Bustany (Dâ’tra).
Ibn Zaghdùn (Qawânîn, 46-47), v. Ia + 3b,
2, 4, 5 = ms. Vienne, fol 13a. Sarrâj (Luma'.
361) donne les vers lb + 3b, 2, sans attribution
d’auteur. Taq., ms. L, fol. 326b, donne les
vers 1-7.
qasîda x
Elles sont données en détail
dans Dîwàn.
1931, p. 31-35. Depuis 1931, il faut ajouter : Ibn Ghânim Maqdisî (ms. Caire.
Tal'at, Adab 4393 : où la qasîda lui est attribuée ; ms. Wetzst. 2, 1109, 96b,
et Wezst. 2, 1757, 30a), Suhrawardî Halabî (alwâh imâdiya, ms. Berl.
409 153a), Najm Râzî (43b), Rashîd al-Dîn (360b),
Ibn ’Arabî (tuhfat al-safara, ms. P. 6614, 15b; Diwân,
éd. 1271, p. 409), Ishka- véri (mahbûb al-qulûb). Qissat Husayn al-Hallâj (ap. Donum Nat.
Nyberg. 1954, p. 110).
Dès le XIVe siècle,
Jildaki nous signale ainsi l’existence de cette qasîda: «cette qasîda est une
des premières qasida de Hallâj; elle est longue, elle a, dans ses expressions,
des faiblesses, telles qu’on en rencontre dans ses muqatta'ât- (. hâyat
al-surûr, 1. c,).
QASÎDA XI
Jawbari, Mukhtârfî kashf el-asrâr.
ms. Paris 4640, fol. 12b,etc.:v. l-2;lems. Es'ad 3888 est le seul à
donner le vers 3; le texte imprimé au Caire, 1302 H. (p. 20) les saute tous.
MUOATTAA I
Taq. (ms.
T, p. 5), v. 1-2; ’Uyûnî Baghdâdî, Fawâïd, v. 1-2. Abdelkader, mawâqif,
I, 46. .
MUQATTAA 2
Taq., ms. T, p. 10-11.
MUQATTA'A 3
Taq. (ms. L, fol. 329b,
v. 3-5). Ghazâlî, Ihyâ, IV, 222, v. 1-3. Baqlî, tafsîr
de XIII, 36, v. 3-6; Shathîyât. ms. QA, fol. 124, v. 4, 6.
Subkî; Tabaq., IV, 262, VI, 46. Ms. turc Vienne, 111-508,
fol. 12b, v. 1, 2, 4. Bahâ ’Amilî, Kashkûl,
97, v. 1-2. Ma'sûm ’Alî, Tarâïq, II, 171 (selon
Ibshayhî, Mustatraf, XXX, qui, dans un octain de Sari, insère
les v. 1, puis 4, 2). Sâwî, Hâshiya des Jalâlayn, IV, 152
(v. 1 et 4, attribués à Dasûqî). Abdulbéha (Paris, 12.xi. 1911).
MUQATTAA 4
Taq, ms. L, fol. 342a, v. 1-6; ms. T,
fol. 9, v. 1-6.
MUQATTA A 5
Taq., ms. T, p. 5, v. 1-2. Ibn
Bâkûyé, Bidâya, édit. Q.T.,
n“ 18 ( = Khatîb, Ta'rîkh; Ibn al-Jawzî, Muntazam,
Dhahabî, Ta'rîkh; et Kutubî, 'Uyûn),
v. 1-3. Daylamî, Tarjamal Ibn Khafîf, v. 1-2. Ibn al-Dâ’î, Tabsira,
p. 402, v. 1-3. Baqlî, Shathîyât. ms. QA, fol. 168a
(vocalisé), v. 1-2 ( = tafsîr, inQur., XII.31). Makîn, Majmu , v.
1-3. Hariri (ap. Ibn Taymiya, Majm. rasâïl wa masâil, édit.
1341 H., p. 62, 81), v. 1-2 Watwât, Ghurar, p. 129. v. 1-2 (copié
ap. Nukhbat
al-akhbâr, Bombay, 3.XI. 1887). Dâwûd Qaysârî, Sharh al-fusûs. fol.
263a, 27lb, v. 1-2. Ibn 'Ajîba, ’Iqâz,
156, v. 1 -3. Khuyyi, Sharh minhaj..., 6, 284. Ibn Taymiya, Jawâbsahîh,
2, 199.
MUQATTA A 6
Ces trois vers sont donnés ap. Taq.
(ms. L, fol. 128b). Khargûshî. Tahdhîb. fol.
278b, d’après 'Umar b. Rufâ’il, viâ Ahmad
b. ’Abdallah Harrashî, à La Mecque. Ibn Jahdam, Bahja
(selon Khatio, Ta'rîkh, et Ibn Khamis, Manâqib). Geniza.
II. Sarràj, Masârï, 319. Yâfi’î, Mir ât.
Shaydhalâ, ms. Berl. 3083, 201. Ishkavérî.
MUQATTA A 7
Ibn 'Atâ, dans Khuldî, Hikâyât (Recueil,
lac. cit.). Ibn al-’Arif, Mahâsin at-ma- jâlis.
ms. Berlin, 2834, fol. 150a et 155a. Ibn ’Arabî, Fut.,
I, 782; II, 452, 682, 732; IV, 204. Qaysari, Sharh al-fusûs,
fol. 203b. Qushayri, Latâïf (in Qur., XLIV,
7), pour le vers 2.
MUQATTA A 8
Ibn 'Atâ, Tafsîr
(de Qur.,
III, 188; désignant l’auteur, encore vivant, sous la périphrase ba’dhum) =
Sulamî, Haqâîq (E 28*. n” 20) au même verset. Khargûshî,
Tahdhîb.
fol. 162b Taq. (ms. L, fol. 326b; 332b;
K, 83) et Jildakî, Ghâyat al-surûr, restituent formellement le
distique à Hallâj.
MUQATTA A 9
Nasrâbâdhî (ap.
Sulamî, Haqâîq, in Qur., vi,
76), v. 2. Taq. (ms. K, 74, et L, fol. 325a).
Khargûshî, loe. cit . fol. 15a, et Qushayri, Latâïf
(in Qur..
xxv, 61-62), v. 2. Hamadhânî, Takmila. Ibn Bâdis, fol. 8b.
Ibn ’Ajîba (loe. cit.) attribue le distique, avec
trois autres vers, à Dhû ’1-Nûn. Ibn Abbâd, Sharh hikam 'Ataiya,
I, 68.
MUQATTA'A 10
Tawásín. V-11, v. 1-4. Hûjwîri, Kashf,
édit. Zhukovski, 317, v. 5, 7, Suhra- wardî Baghdâdî, Bustân,
XXVI, v. 1. Taq.. ms. L, fol. 341b, v. 5 (dans
une pièce différente) M. 43. Ibn al-’Arif, Mahâsin,
fol. 159a, v. 1,4, 2, 3, 5-6, .r. Qaysâri, Hujub,
fol. 205b = Nâbulsî, Hatk, v. 1,4, 3, 5. Ibn Ajîba, Iqâz.
46: v. 1, 4, 2, 3, 8, 5 [qu’il attribue à ’Alî],
MUQATTA'A 11
Taq., ms. M 41, K 100, v. lba,
2, 3, 5, 6, 4; ms. L, fol. 323a, v. 1-6; ms. Berl., fol. 41a,
v. 1-3, 5, 6. Abû Sa'd Qaylawî (ap. Shattanawfî, Bahja,
161), v 1-6.
MUQATTA'A 12
Taq., ms. L, fol. 327b, v
1-6; M 25, K 95, v. 5-6 Nâbulsî, Hatk, v. 3-5.
MUQATTA'A 13
Tawásín, VI-12 (ms. L, et recension Baqlî, ap.
édit., p. 44-45).
MUQATTA'A 14
Tawásín, Vl-29 (ms. L seulement: édit., p. 54-55).
MUQATTA'A 15-16
Ibn Arabî, Fut..
III, 132: v. 2. Taq., ms. K, 81, v. 1-2; ms. L, fol. 326a,
v. 1-3, et fol. 342a, v 4-6 (de mètre mujlathth)
; ms. T, p. 10. v. 1-3.
MUQATTA'A 16 BIS
Sadaqa-b-Ali Zâhid, Dhayl ta'rîkh Ibn
al-Najjâr, ms. Paris 2131, f. 22a (comm. M.
Jawâd).
MUQATTA'A 17
Taq., ms. M 25, K 96. Sulamî, Haqàiq
(in Qur.,
x, 35). Geniza, n° IX.
MUQATTA'A 18
Kalâbâdhî, Ta'arruf
(édité ap. E, p 17*).
MUQATTA'A 19
Taq.. ms. T, p. 33 (qui prouve que
ces vers, commentant la première partie de Akhb.
36. récit dû à Ibn Fâris, doivent y être intercalés à la fin de la ligne 7 ; la
suite étant un récit indépendant dû à Ahmad b. al-Qâsim al-Zâhid). L, 334b;
J, lb-2a, et K, 39. Sulamî, Tabaqàt
(probablement d'après Ibn Ghâlib; d’où Ibn Khamîs, Manâqib,
et Sha’râwî, Lawaqih. et Harawî Tabaqât
pour le vers 1). Hayât Harrâni (ap. Shattanawfî, Bahja,
181). Ibn Fadl Allah 'Umari, Masálik.
MUQATTA'A 20
Taq.. ms. S, 12; L, 338b;
T, 37, et K, 50 (lre recension). ’Ali Hariri (ap. Ibn
Taymiya, Majm. rasâïl wa masâïl, Caire, 1341, p. 64, 105, qui
donne seul ia deuxième recension, avec un commentaire).
MUQATTAA 21
Taq., ms. L, fol. 336a;
J, 3a; S, 9, M, 31 et K, 24.
MUQATTA A 22
Taq., ms. J, fol. 4a, et
ms. L, fol. 338a.
MUQATTA A 23
Geniza, VII, v. 1-4. Ms. Es’ad
1437, fol. 97a, v. 1-3.
MUQATTA A 24
Ms. Koprülü 1620-2 (corrigé
suivant ms. Fatih 2650).
MUQATTA’A 25
Taq.. ms. K, 96, v. 1-2, 3a-4b;
ms. L, fol. 327b; M, 25, v. la-2b, 3, 4. Geniza, n°
XI, v. 1-3.
MUQATTA A 26
Taq., ms. L, fol. 325a; Geniza,
n° 1 ; Ibn Luyûn.
MUQATTA A 27
Ibn Kardabûs Tûzari, Iktifâ. Taq,
ms. L, fol. 322b, 325b; ms. K, 76-77. Ibn 'Atallah, Latâïf,
II, 214. Ali Burhânî, Zuhra Mudîya, fol. 180 (au fol. 182,
pastiche de ce tercet par Burhânî). Jumaylî, p. 7. Ibn 'Ajîba, loc. cit., y
ajoute un vers.
MUQATTA A 28-29
Première recension: Tawâsîn,
VI-10 (éd. 1913, p. 43, selon Baqlî); Qushayrî, Latâïf,
XV, 42 (= Taw., p. xvn) et XXIII, 99 (= Recueil,
89); Alûsî, Nashwa, 77 (d’après Kawrânî). — Seconde recension: Dîw.,
n° 18 (= Taw., p. xvi): J, fol. 3a, v. 1-3; L,
fol. 336b, v. 1-3; T, p. 21, v. 1-4.
MUQATTA A 30
Akhb. 38 = Taq.,
ms. J, fol. 4a; K, p. 43; M, 38; L, fol. 338a; T, p. 34;
ms.
Jumaylî, p. 4.
MUQATTA A 31
Hûjwîrî, Kashf,
édit. Zhukovski, 535: v. I, 3, 2, 4, 5 (sans nom d’auteur); Bâïqarâ, 'Ushshâq,
vol. 64b, v. 1-5 (avec traduction persane); Rida Qulî, Riyâd, n“
9; v. 1, 3, 2, 4; Haskafî, Fatâwâ al-sûfïya, v. la-3b,
2, 3a-lb, 4-7. Fakhr Fârisî, Jamha,
43a (v. 1).
MUQATTA A 32
Jildakî, Ghâya,
v. 1-3. Le vers 3 est cité par Tawhîdî (Sadâqa, 24),
d’après un commentaire d'A. S. Mantiqî sur Aristote (comparer ici n° 57, vers
5), Râghib (Muhâdarât, 271) et Ibn ’Arabî (Fut.,
IV, 413); les vers 1-3 par Jaiâl Rûmî (Methnewi, livre
III, § 177, v. 10-12; cf. Anqirawî, il, 11); les vers 2a-3a-2b
par le manuscrit Jumaylî (p. 9), le vers 3a par le poète turc Rùhî (m.
1014/1605;
Hammer, G.O.D., III,
136).
MUQATTA'A 33
Akhb. I I = Taq., ms. K,
p. 25; M, p. 28; J, fol. 3a; L, fol. 336b.
MUQATTA'A 34
Taq , ms. K, 96, L, fol. 327b;
ms. Kopr. 1620, n° V; ms. Jumaylî, p. 7 (v. 1, 3. 4).
MUQATTA'A 35
Taq., ms. L, fol. 342b ; Sarrâj,
Luma'.
335 (v. 1 ) ; Baqlí. Shathiyát, ms. Sh. ’All. fol. 169 (v. 1).
Tawhîdî, Ishârât (ms. Zah., f. 1 10b) donne seul
les trois vers.
MUQATTA'A 36
Khwâfî, ms. Es'ad, 1437, fol.
97a ; ms. Caire, main 178, fol. 83b. Ahmad Ghazalî, Tajrid,
éd. p. 28.
MUQATTA'A 37
Akhb. 16 = Taq..
ms. J, fol. 3b; K, p. 8 (v. 1-4); L, fol. 337a; T, v.
1-2; Sulamî, Haqâïq. in Qur., XLll, 17 ( = E, p.
59*) ; Ibn Bâkûyé ( = Q. T.. p. 34*, 35*); Qushayri, Latâïf,
in Qur.,
xxvm, 30); Ibn Khamis, loe. cit.; Tûzarî, Iktifâ.
Râghib, Muhâdarât, 226a; Y. Qazwînî, ap.
Ibn al-Jawzî, Muntazam ; Baqlî, tafsîr
in Qur.,
vu, 155; ms. Geniza, IV; ’Attâr, Tadhkira,
II, 142; G. al-Makîn, ms Paris, ar. 295, fol. 47a; Ibn Tiqtaqâ, Fakhrí;
D. Qaysari, Hu- jub, fol. 203b, v. 3a-4;
Sha’râwî, Kibrît, p. 251-252; Munâwî, Kawâkib ;
Kâzim Dujaylî (cf. Recueil, p. 244: planche alors placée
sur la tombe). Fakhr Fârisî, f. 48b.
MUQATTA'A 38
Tawásin, III, § 11 (édit., p.
24; traduction persane Baqlî); Sârî ’Abdallah, Jawâhir,
V, 120.
MUQATTA'A 39
Akhb. 74 (ms. T, p. 54, 1. 12-13),
v. 2, d'après Ibn Fâtik; Harawî, Tabaqât (publ. ap. Taw..
p. 138), d’après Ibn Bâkûyé (deux recensions: d’Ibn Khafif, v. 1-3, et d’Alî
Daqqâq, v. 1, seul différent); Sarrâj, Luma'. 346 (=
Baqlî, Qudsiya, fol. 174a), v. 3, 1.
MUQATTA'A 40
Taq., ms. K, p. 95; M, p. 46, v. 1-4; Ms. Geniza,
VII.
MUQATTA'A 41
Abû Hâtim Tabari, cf. Mél. Félix Grat.
1946: isnàd,
v" 115. Watwât, Ghurar, 286. Taq.,
ms. L, fol. 329a.
MUQATTA'A 42
Akhb. 53 = Taq.,
ms. K, p. 61 ; L, fol. 340a; T, p. 45 «à l’Orient[XIV] ».
MUQATTAA 42 BIS
Daylamî, 'atf,
73b, ap. E. 2* éd., p. 449; etMél. J. Maréchal, 2,
279.
MUQATTA A 43
Taq., K, p. 81 ; L, foi. 326a
(v. 2); Kôpr. n” VIII; Fâtih 2650.
MUQATTA A 44
Taq., ms. K,p. 92 (publ. Recueil,
p. 60) : lettre à un ami, Ibn ’Atâ. Akhbâr, 110.
MUQATTA A 45
Qannâd, Hikâyât,
ap. Khatîb, Ta'rîkh Baghdâd (édit. Recueil,
72: v. 1,2, 4), Sam’ânî et Safadî, Wâfî, sect. XI (cf. Recueil.
255, v. 1,2, 4, 3). Taq., ms. K, p. 99, v. 1-5. Ibn Kajj, selon
Qazwînî, Ajâïb, v. 1,2, 3, 5, 4. Râghib, Muhàda- rât,
197. Ibn Fadlallâh, Masàlik (d’après Jabalí), v. 1,2, 4.
MUQATTA A 4«
Akhb. 55 = Taq..
ms. K, p. 63, v. 1,3; L, fol. 340a, v. 1-3; T, p. 47, v. 1-3;
M, 14, v 1, 3.
MUQATTA A 47
Taq., ms. L, fol. 329a;
Abû Hâtim Tabari, ap. Khatîb, Ta'rîkh Baghdad (=
Watwât, Ghurar. 286).
MUQATTA A 48
Ms. Geniza,
n° X — ms. Fâtih 2650, 101a (corrections publ. dans M.FK.,
358).
MUQATTA A 49
Akhb. 39 = Taq.,
ms. J, p. 4b; K, p. 44; M, p. 38; T, p. 44. 'Abdalqâhir Baghdad), Farq,
249 (v. I).
MUQATTA A 50
Akhb. 45 = Taq.,
ms. T, p. 39.
MUQATTA A 51
Taq., ms. L, fol. 325a
(v. 1-3). Ibn ’Arabî, Futûhât, chap. LXlx = I, p. 498 (v. 2b;
cf. les dhakhâïr, sur III, 3), et Muhâdarât,
II, 152 (v. 2a. Ibn Rajab, Lataïf, 298
(v. 2),
MUQATTA A 52
Suhrawardî Halabî (ap.
Shahrazûri; Dawwânî, Bustán). Ibn al-Qayîm, Madârij, II,
114; III, 140. Ibn ’Ajîba, Tqâz, 345 (avec les trois vers
qu’Ibn al-’Arif y a ajoutés). H. Mustawfî, Nuzhat,
107 (six vers aussi).
MUQATTA'A 53
Taq., ms. M, p. 47; Suhrawardî
Halabî (Alwâh, ms Berl., 153a;ap. Dawwânî, Bustân).
Nâgûri, Tawâlï, fol. 252b, v. 1. Munâwî, Kawâkib.
Ibn ’Aqîla, Ta'rîkh. Cor. XXXVI, 78.
MUQATTA A 54
Taq., ms. L, fol. 328b.
Qushayri, Latàif (réf. deest),
3e vers. Attribué à Ali b. Sahl Dînawari (+ Caire, 941 de notre ère)
par Shaydhalâ (ms. Berl., 3082, 163).
MUQATTA'A 55
Akhb. 50 = Taq.,
ms. L, fol. 339b, v. 1-4; K, p. 58, 1-5; T, p. 43, 1, 3-4. ’A. Q.
Hamadhânî,Zubda (ms. I.O. 445, fol. 64b-65a,
v. 1-5; ms. Paris, suppl. pers. 1356, fol. 80a, v. 1-3, 5). Baqlî, Shath.
(ms. QA, fol. 164a, ms. Shahid ’Ali, fol. 136: trad, pers., v. lb-5).
Anqirawi, Sherh-i-methnewi, I, 6: v. 1 et 5. Sâri
'Abdallah, Jawàhir, t. IV, p. 102, v. 1-5. Majm. Vienne (turc
III, 508a, fol. 13a, v. 1-2). Ridâ Qulî, Riyàd.
n° 8. Nâbulsî, Hatk. v. 1,2, 5. Ibn 'Arabî, Tuhfat al safara,
ms. P. 6614, 24a; M. H. Sebzévari, Sharh al Jawshan.
3, 329. ’Irâqî, Lama’ât, 66a.
Cinquième vers commenté ap. :
’A. Q. Hamadhânî, Shakwâ, ms. Berl. 2076, fol. 42 a;
Najm Râzî, Mirsâd, ms. Paris 1082, fol. 64a.’Alî
Hariri (ap. Ibn Taymiya, Majm. ras. wa mas.,
62, 82). Nasîr Tûsî, Awsâf, V, § 6. ’Afîf Tilimsânî, Sharh al-mawâqif,
§kibryâ. Râshid al-Dîn, Latâïf,
fol. 320a. D. Qay- sâri, Sharh al-fusûs. ms.
Caire, fol. 272b. M. D. Fânî, Sharh, ms. I.
O. 1922, fol. 207a. Sadr Shîrâzi, Asfâr,
p. 26. Gümüshkhânî, Jâmï, p. 244. Le -Haft Bab •
ismaélien le fait dire à Ibn Sabâ brûlé vif. Ishkavéri, Mahbûb.
Baqli, Tafsir, I, 416, Mantiq,
39b.
MUQATTA'A 56
Akhbàr, p. 94 (texte fr.); p.
81 et 141 (texte arabe); Taq., ms. K, p. 60; T, p. 44. H.
Nâgûri, Tawâli', ms. Calc. E 126, 21 1, vers 1. Sha'râwî, Latâïf.
2. 84.
MUQATTA'A 57
Sarrâj, Luma’.
361, 384: v. Ia, 2a, lb, 2b
(attribués à ba' duhum). Kalâbâdhî, Akhb.,
ms. Paris 5855, fol. 264a : v. 1 (attribué à ba d ashâbinâ).
Ghazâlî, Mishkât, p. 24, et Baqlî, Tafsir
(in Our.,
v. 59) restituent formellement le distique à Hallâj. Ibn 'Arabî, Fut.,
II, 372, 433; IV, 160. 444, 502; Dhakhâïr, LUI (sur v. 2). Qazwînî,
'Ajâïb,
II, 110. Ms. Vienne, turc. III-5O8, fol. llb. Taq.,
ms. K, v. 2-4 de la longue recension d'Ibn Yazdânyâr; ms. M, 41, v. 2-4 (in fine d'Akhb.,
n° 44).
MUQATTA’A 58
Akhb. 40 =Taq.,
ms. J, fol. 4b; M, p. 39; K, p. 44; L, fol. 338a. Bistâmî
cite le vers 1 à la fin de ses Fawâïh (cf. Dasûqî, ap.
Sha'râwî, Lawâqih, I, 180).
MUQATTA'A 59
Tawâsin, III, § 12 (édit., p.
24: traduction persane de Baqlî). Sâri 'Abdallah, Jawáhir,
t. V, p. 120 (texte arabe). Hurayfish Makkî, Rawd fâiq,
233 (ibid.).
Maqdisi, Tawwâbin, ms. P. 1384, f. 136a
(+ 2 vers).
MUQATTA'A 60
Conservée uniquement up. Geniza,
n° VII, en caractères hébraïques (Hirschfeld, ap. J.Q.R.,
1903, p. 176).
MUOATTA'A 61
Akhb. 3 bis = Taq.,
ms. J. fol. Io; L, fol. 336a; M. 45 ; Berl., fol. 43a.
Sulamî, Tabaqût. Harawî, Tabaqât.
Jâmî. Nafahât,
174. Lâri, Hàshiya, ms. Paris, fol. 45b. Shaydhalâ,
ms 3082, 159.
MUQATTA'A 62
Fâris (ap.
Sulamî, Haqâïq, in Qur . XXXIII,
72 = E., p. 56*, n° 131); ms.
Taqawî
MUQATTA A 63
Taq., ms. K, p 82; L, fol. 326b; T,
p. 10. Baqlî, Shathíyát, ms Sh. 'A, p 126 (v. 2a, 3a).
Shaydhalâ, ms. Bed. 3082, 162.
MUQATTA A 64
Ibn al-Jawzî, Narjis al-qulûb
(deux manuscrits).
MUQATTA A 65
Akhb. 46 = Taq.,
ms. K, p. 54; L, fol. 339a; S. p. 13; T, p. 40. Fakhr Fârisî, Jamba,
41a (v. 1 et 4).
MUQATTA A 66
Akhb. 62 = Taq.,
ms. M, p. 43; K, p. 72, v. Ia; cf. ms. L, fol. 327b.
Kalâbâ- dhî, Ta'arruf ( — E., p. 13*). Jâmî, Naqsh.
fol. 1 10b. Ms. Kôpr., n° VII. Akh- bâr,
n° 62; Fâtih 2650, 101b.
MUQATTA A 67
Taq., ms. L, fol. 342a.
MUQATTA A 68
Abû ’ Alî Fârisî, selon Ibn
al-Qârih, Risàla, édit. Muqtabas.
V-9 (1910), 551, et Abû 'l-’Alâ Ma'arri, Ghufràn (édit.
Caire, 1907, 150, et édit. Nicholson, J.R.A.S., 1902,
834). Maqdisi (Ps. Balkhî), Bad'. Il, 90. Sarrâj, Luma . 354
(v. 1-2). Taq., ms. K, p. 95; ms. T, p 13-17 (avec un long
commentaire) concluant ainsi: «quelle excuse
T'adresser pour ce que Toi, Tu as fait? Tu es ¡'Être véritable, je n'existe
pas: c'est Ton acte qui me traverse par contrainte et par force. Ce n’est donc
pas un acte que mon excuse, vu l’ejrcèi de mon bégaiement
et de mon erreur. Raffermis donc mon intention, et confère-lui de vouloir. »
MUQATTA A 69
Taq., ms. L, fol. 327a; K, p. 87.
YAT1MA I
Ibn’ al-’Arif, Mahàsin,
ms. Berl. 2834, fol 163b (2 vers); ms Es’ad, 1437. Ibn'Arabî, Fut.,
II. 362. Ibn Taymiya, Jawàb sahih. Il, 175. Mar’î, fol 55b.
Attribué à Shiblî par Saffûri (Nuzha, I, 55). Turkumânî, Luma .
I63b.
YAT1MA 2
Akhb. 66 = Taq.,
Ms. M., p. 28; ms. K. p 16; M, p. 28 (Recueil, p.
59); ms. Berl. pers. n° 14, fol. 180b, in fine
n" 38. A. Q. Hamadhânî, Zubda, ms. Paris, suppl. pers. 1356,
fol 68a. Sârî ’Abdallah, Jawàhir, II, 345 (à Junayd), IV,
102. Ms. Londres 16.659, fol. 560b; ms. Walî al-Dîn 2061. fol. 163b;
Ridâ Qulî, Riyâd, n° 10. Yâr 'Alî, Lamahât, 97*.
YAT'WA 3
Akhb. 51 = Taq ,ms.
L, fol. 339b; S, p 13; K. p 59; T, p 44 Attribué par Munawî à
Bûshanji.
YATtMA 4
Sulamî, Haqàiq (in Qur..
XXXIX, 23: selon Fâris) = E., p. 58*.
YATtMA 5
Kalâbâdhî, Ta'arruf
(nü 52, ap. E, p. 20*). Imité par Rudhabari (Sarrâj, Luma’, 249).
YATfMA 6
Tawâsin, VI-15 (ms. L, et recension Baqlî, édit.,
p. 47).
YATtMA 7
Ibn Yazdânyâr, ms. Caire, fol.
12a. (Cf. Subkî, 4, 64). Fakhr Fârisî a repris cette image Uamha.
42b), en inversant les rôles. Baqlî l'a reprise aussi (voir St. Or. Pedersen,
p. 238).
YATtMA 8
H-b-M-b-Habîb Naysabûri, 'uqalâ'l majânîn,
152; Baqlî, Mantiq. 39b.
INDEX
83 pièces hallagiennes
reçues dans la présente traduction
et 8 vers isolés
1 labbayka, labbayka! .. ma'nâ'î! 41
2 lU'ilmi ahlun... tarâtîbu. 43
3. yâ mawdi’al nâzri... khâtiri. 45
4. sukûtun, thumma samtun... ramsu. 46
5 man sârarûhu fa abdâ...
ghashshâshâ. 47
6, an'â ilaykâ nufûsan... qidami. 48
7 ashâra lahzî bi’ayni... hammi. 49
8. lam yabqa baynî... burhânu. 50
8 bis. al-'ishqufî azali... abdâhu. 51
9. 'ajibtu tninka wa minni. 53
10. uqtulûnî, yâ thiqâtî... mamâti! 54
11. yâ tâlamâ ghibna... qamar. 56
71 mucatta’a:
1.
wa’ayyu
’l-ardi... samâ'u. 59
2 lia kam anta... lâ tarâhu. 60
3 kânat liqalbî ahwâun... ahwâya. 61
4.
idhâ
dahamatka... rajâ. 62
5
subhâna
rnan azhara... al-thâqibi. 63
6. katabtu wa lam aktub... kitâbi. 64
7. urîduka, lâ uriduka... iqâbi. 65
8. kafâ hazanan... ghâ'ibu. 66
9. tala’at shamsun ghurùbi. 67
10. ra’aytu Rabbi .. qála : anta! 68
11. lya habibun azûru... lahzáti. 69
12. stmt ’l-sarâïri matwiyun... bitiyyáti. 70
13
famâ
lí bu’dun... wâhidu. 71
14.
la
talumní fa l-lawm... wahidu. 72
15-16. qad tasabbartu...
fûwâdî (deux pièces). 73
16
bis. yâ
sháhidan gháíban... mawjûdu. 74
17 haqíqatul-Haqqi
mustanir... khabír. 75
18. anta 'l-muwallihu
H... dhikarí. 76
i 9. mawájidu
Haqqin... akábiri. 7 7
20. idhá balagha 'l-sabbu... dhikri. 78
21. aqdul nubuwwati... támúri. 79
22. li anwári núri 'l-dini... asráru. 80
23. sakanta qalbi wa fihi... 'l-járu. 81
24. al-hubbu má dáma maktuman... hazari. 82
25. ghibta wamá ghibta... surúri. 83
26. yá shamsa! yá badra!... wa náru! 84
27. ahruf un arba'a bihá háma... wafikrí. 85
28-29. juhûdî laka taqdisu
(deux recensions). 86
30. hawaytu bikullî... fî nafsí. 87
3 I. wallahi ma
tala’at... bi anfâsi. 88
32. yá nasim al-ríhi... illa’ atashâ. 89
33. ajibtu likulli... ardi. 90
34 má ziltu atfúw... wa'nhattu. 91
35. makânukâ min qalbî... mawdi’u. 92
36. idkd dhakartuka... awjàu. 93
37. nadimí ghayru mansûbin... al-hayfî. 94
38. sayyarani 'l-Haqqu... wathîqa. 95
39. wahhidni Wâhidi... tarqu. 96
40. rukûbu ’l-haqîqati... tadiqqu. 97
41 jub’lat rûhuka... fatiq. 98
42. dakhaltu binâsùti... sidqi. 99
42 bis. ittahada l'âshiqu... wâmiqi. 100
43. fîka ma ná yad'û... ilayka. 101
45. dunyâ tukhâdi’ uni... hâlahâ. 103
46. 'alayka yá nafsi... waltakhalli. 104
47. muzijat rûhuka... zulâli. 105
48. ni’ma 'l-i'ânatu... khilalih. 106
49. thalàthatu ahrufin... kalámu. 107
50. tafakkartufî'l-adyâni... jammâ. 108
51. yá lá'imí fi hawûhu... lam talumi. 109
52. badá laka sirrun... zalámuhu. 1 10
53. haykaliyu 'l-jismi... ’alïm. Ill
54. qalbuka shay'un... zulamu. I 12
55. ahi! ana, am Anta?... ithnayni! 113
56. a lá abligh ahibbá’i... al-sajïna. I 15
57. ana man ahwá... badana. I 16
58. yá gháfdan, lijahálatí... wabayáni. 118
59. khátabaní 'l-Haqqu... lisáni. 119
60. [kadhá]’ jtabáni... arrafani. 120
61 anta bayn al-shagháfi... ajfáni. 121
62. hammalta bilqalb... al-budunu. 122
63. bayánu bayánt l-Haqqi... lisánuhu. 123
64 raqîbânî minnî shâhidâni.
. tarânî. 124
65. ’irja' ilâ 'Llahi... illâ Hû. 125
66. man râmahu bil ’aqli... yalhuw. 126
67. lastu bil tawhîdi... aslhuw. 127
68. yâ sirra sirrî, tadiqqu...hayy. 128
69. ismun ma’ al-khalqi... ma' ânîhi. 129
8
YATÎMA (VERS ISOLÉS):
1. mithâlukafi 'aynî... taghîbu? 133
2 kafartu bidîni 'Llahi... qabîhu, 134
3. faqultu... hya 'l-shamsu... bu’du. 135
4. qad kunlu fi ni’mati... batiri. 136
5 shartu
'l-ma’ârifi... muttali’i. 137
6. dhikruhu dhikrî... illâ ma’an? 138
índex ii
Noms des poètes cités
Xbdelkadcr (l’émir), 55, 145.
Xbu Madyan, 53.
Abû ’l-’Atâhiya, 10, 47.
Abû Nuwâs, 53, 54, 61, 75, 88, 94.
A.bû Sa’îd, 124.
\ghânî (Kitâb al-), 122.
Alî, 103, 146.
Amilî (Bahâ), 61.
Amilî (Muhsin), 94.
Ansan (Khâjé Abdallah), 33.
Antara, 121.
Attâr, 33, 94.
i, voir Ibn.
;hdâdî (’A. W ), 115.
lâ Zuhayr, 81.
hshâr, 98, 116.
âmî (A. Y.), 65, 86. 105.
ituri, 105.
hanjî, 152.
tî, 64.
îrî, 59, 109.
Dasûqî, 145, 150.
Dhû 1-Nûn, 47, 146.
Dînawari, 149.
Fakhr
Fârisî, 8, 35, 42, 48, 54, 116, 147, 151, 152.
Ghazâlî (Abû Hâmid), 116, 150.
Ghazâlî (Ahmad), 85.
Hâfiz, 36, 113.
Harawî
(= Ansâri), 48 49, 96, 144, 150.
Hurayfish Makkî, 43, 55.
Ibn Abî Hafsa, 55.
Ibn
Abî-i-Khayr (= Abû Sa’îd), 22, 33.
Ibn Ajîba, 63, 67, 69, 85, 145, 146.
Ibn ’Alioua, 53, 63, 68.
Ibn
’Arabî, 32, 38, 47, 49, 55, 63, 65, 68, 71, 78, 116, 146, 149,
Ibn al-'Arîf, 55, 65, 145, 146, 149,
151.
Ibn Bâdis, 146.
Ibn
Dâwûd al-Zâhiri, 36, 88, 124, 135.
Ibn
al-Fârid, 43, 76, 83, 88, 89, 109, 113.
Ibn Kulayb, 83.
Ibn Muhalhil, 94.
Ibn al-Qârih Halabî, 36, 151.
Ibn Sab’în, 90.
Ibn Sanâ al-Mulk, 94.
Ibn Shuhayd, 45.
Ibn Simawnâ, 55.
Ibn Yazdânyâr, 150, 152.
Iqbâl, 36.
’Irâqî, 68.
Janadî (Muayyad al-Dîn),55, 86.
Jildakî, 8, 10, 45, 144. 145.
Junayd, 14.
KhaK' (Ibn al-Dahhâk), 94.
K^asibi, 111.
Khwârizmî (Husayn), 10.
Ma’arri (Abû'l-’Alâ), 8, 36, 128.
Maqdisî
(Ibn Ghânim), 9, 36, 143, 144.
Maqdisi (Ism.), 64.
Misri (= Dhû ’1-Nûn), 47, 146.
Misri (Niyâzî), 55.
Mutanabbî, 82.
Mu'ayyad Shîrâzî, 70.
Nâbulsî, 53, 111, 143, 146, 150.
Nûri (a. Hy), 48.
Nusayb, 122.
Qabûs Jurjânî, 43.
Qâdirî (Abû'l-Barakat), 42.
Qannâd, 48.
Qaylawî, 146.
Qunawî (Sadr), 55.
Râbi'a, 65 81
Râghib Isfahânî, 105
Raqqâshî, 53.
Rashid al-Dîn, 105, 113.
Rifâ'î, 103.
Rûdhabân, 152.
Rûhî, 147.
Rûmî
(Jalâl al-Dîn), 35, 55, 116, 148.
Ruusbroec, 94.
Semnânî ('Alâ al-Dawla), 54, 116.
Sandal, 61.
Sari Saqatî, 145.
Sarrâj (a. S.), 151.
Shiblî, 18, 29, 45, 67, 71, 15).
Shushtarî (’Ali), 69, 85, 128.
Sûdî, 75.
Suhrawardî, 35, 76, 80, 113, 149.
Tawhîdî, (a. Hayyân), 34, 83, 148.
Tilimsânî ( Afîf al-Dîn), 82, 113.
Versets coraniques cités
IMPRIMERIE BRODARD ET
TAUPIN À LA FLÈCHE
DÉPÔT LÉGAL FÉVRIER 1992. N° 14655 (1 1
3OF-5)
Dîwân
Un dîwân est une collection complète des œuvres
poétiques d'un auteur. Le Dîwân de Hallâj a été établi dans son texte en 1931
par Louis Massignon. La présente édition donne toutes les pièces jugées
authentiques de l’édition de 1931, auxquelles Louis Massignon, connaisseur
incontesté de Hallâj, a ajouté une biographie du saint, né en Iran vers 857 et
décapité à Bagdad en 922, après un procès de neuf ans qui aura été l’épreuve
cruciale de sa vocation. Si Hallâj, l’un des plus grands et le plus célèbre
mystique de l’Islam, ne se considérait pas d'abord comme poète, son Dîwân
demeure comme un des plus beaux joyaux de la poésie mystique universelle.
« Ton image est dans mon œil, Ton mémorial sur
mes lèvres, Ta demeure en mon cœur, mais où Te caches-Tu donc ? »
Traduit de l’arabe et présenté par Louis
Massignon
Seuil. 27 r. Jacob, Paris 6
ISBN 2.02.014655.X / lmp. en
France 2.92
I. «Avertis» réfère à -
m adna- (Cor. LVI1, 9).
COMMENTAIRE. Cf.
P.III. 327; ce petit poème a deux recensions, dont les divergences sont
importantes . la première, des Tawâsin, représente la doctrine
hallagienne selon Wâsiti ( = Hàshimi'.’ cf. le fragment n° 5 Dârà Shikûh ;
ap. Recueil, 159); la seconde, du Dîwân. l'interprète selon Fâris
(cf. fragm. ap. Baqli, tafsîr de Qur., //. 32 = E., 77* *.
et Tav. ,, p. XI). La première a été retouchée dans un sens
maniste et reprise par Muayyad Janadi (ms. Vienne, turc III, 508, fol. 1 lb;
et Sâwî, Hâshiya, III, 152):
• Qu'est-ce qu'Adam dans
TEtre, et qu'est-ce qu'Iblîs 9 Qu'est-ce que le trône de Salomon et
que Bilqis ? Tout est allusion, à Toi, qui y es visé ; ô Toi qui. pour les
coeurs. es un fer magnétique... • — Cf. aussi distique attribué à Bistami (Ibn
abilhadîd, sharh, I. 35). — Le tahwîs est la danse de guerre tournoyante des
Bédouins.
Rime : sin, mètre
: hazaj.
I. Sur cet emploi de -
ah!-, petit cri étranglé du « Fiat-, cf. Tawâsîn. 4. 11 ,
5, 2; 9. 3. C'est un des noms suprêmes de Dieu (Sâri Saqati), un Nom exorcisant
(Le 4, v. 32 sq.}.
COMMENTAIRE. Voir P.
III. 55, Akhb., p. 77-80 (du texte arabe) et Q. T.. IV. p. 80*
*-8l* (n° 2). où l'on trouvera le texte intégral des remarques de Suhrawardi
Halabi (- il a rendu licite aux autres de verser son sang »), Nasîr Tûsi (- ce
vers est une prière, et Dieu l'a exaucée, en lui faisant dire : Je suis la
Vérité ■■). ' Afîf Tilimsâni. Rdshid al-Dîn, Sadr Shirâzt. et surtout Ibn
Taymiya (trois sens possibles; le premier impie, le second excusable,
le troisième véridique): sur le vers 5. Les manuscrits alors connus
faisaient du poème la conclusion de Dîw., n°52. Les manuscrits K et T.
trouvés depuis 1914, et plus complets en cet endroit, prouvent que ces cinq
vers sont à transposer tout à la fin de Akhb. 50 (récit d'ibn '
Abdalghani), dont la dernière ligne, coupée de façon abrupte, est à compléter
par ce court dialogue-ci ;
• Et je lui dis :
"Comment est donc la route qui mène à Dieu ? — H n'est de route qu'entre
deux, et ici, avec moi, il n'y a plus personne. ” Je lui dis : "Explique!
— Celui qui ne saisit pas nos allusions ne saurait être guidé par nos
explications. " Et il récita... »
Hàfîz a imité le vers 5 à
la fin de son ghazal n" CCXXVHl (cf. son LXXXI-2 avec le vers I).
Ibn al-Fârid a fait
allusion au vers 5 (yuzâhimunî) dans son Nazm al-sulûk, vers 208.
Rime : nûn, mètre
: basît.
[1] Qasida IV, III. 1V (2' recension : courte), n™ 34. 48, 66. qas. V,
Vil. x1, 43, x2. x3, x*. qas. II. x5,
x‘, x7, x" x’. x10, x11, 24, x12,
x13, x14 (= Diw. p 123 en bas).
[2] Qas II, n" 24, qas IV (2' recension: courte). III. 34, qas.
Vil, 66.
[III] Quatre poèmes spéciaux à la Qissa
sont donnes dans l'édition de 1931. p. 125 (n° 6), 128 (nos 14-15),
129 (n° 17). Aucun n’est traduit ici.
2. Pour Abûl‘
Atâhiya, /. < p 113; pour Shushtari, p 134, et notre étude ap. Mél.
William Marçais. 1950, p. 251-276.
Pour les isnàd hallagiens, voir leur répertoire
détaillé ap Mél. Félix Grai, 1946, p. 385-420
3. Cf. L'Œuvre
hallagienne d’Altar. ap. Rev. ét. isl.. 1946. p. I 17-144 ; et La
Légende de Hallacé Mansur en pays lures, id.. !. c.. p. 67-1 15 (voir P.,
II, 382-406 et II. 240-288).
[IV] Ce texte est repris, avec des additions, du texte persan publié à
Kabul à cent exemplaires par MAR Ferhadî en 1951 , d'après un texte français
plus bref paru dans Dieu Vivant à Paris en 1946. cahier IV
[V] De ton corps (cf Mt 26. 61)
[6] 11 y eut aussi une chaîne
continue d'adversaires chez les Lecteurs du Coran et giammainens (Ibn Mujâhid,
basaui, Ibn al-Qành, Ma'am), chez les juristes zahintes (Ibn Dâwùd. Ibn Hazm.
Ibn Dihya). et chez des ash'antes (Baqillànt, Abû Ishaq IsfaramL Juwaynî) pour
eux Hallâj est un d-ajjal . un antichrist annonciateur du Jugement Inversement
les Yezidis voient en Hallâj le septième Ange qui • cardera le monde
[7] Ln mai 1940. une femme turque, vatiunant sur la guerre mondiale a
Istanbul, déclarait les hommes vont être punis, le Cardeui iHallâji va
volatiliser le monde iRc\ ét. isl.. 1946, p. 100 et P. IL 272, n. 2).
[VIII] Le ms Fâtih 2650 (f 101 a) donne une recension, sans
changement au v, 7. mais qui s'échelonne ainsi: v. I (recueillement, silence
murmure — science, extase, calcination). •i 3 (marée, fleuve,
grève — nuit. aube, soleil).
COMMl NTAIRh. Sur l'ensemble. voir P.
Ill, 3>f>. Allusions lorunic/ues au vers 3 (Cor. XX, 79) et au vers 8
(Cor. XX, 107).
Rime : sîn. mètre : wâfîr.
[IX] «Qui mange» réfère à Cor. V, 79, et à ’Isa-b-Maryam.
commentaire Cf. P III. 113. Selon le Taq. ( Ara b. Yazúl Qaz*ini), Bundárlbn al-Husayn
Shirazi (m. 353/964) en condamnait les deux premiers vers.
Daylamî et Ibn Bákúye attribuent ce takfîr à Ibn Khafif lui-même.
Ibn 'Arabi, selon Ibn 'Ajiba ('Iqâz, /56) et Ben 'Alloua ont imité le
vers l (Minah, 60). .Semnani critique ce tercet célèbre, que le manuel
nusayri de Hamàh admet. Far^hâni l'attribue à Nüri. Ces vers terminent l'abhar
al-'ashiqin de Rùzbehan Baqlî.
Rime : bû, mètre : sari'.
[X] Le mot «intrus» réfère à Cor. LXX1, 27.
COMMENTAIRE. Le sens
est clair : il y a, au vers I. une allusion au mot de Râbi'a : al-jâr,
thumma 'l-dàr. jouant sur un proverbe connu, pris dans un autre sens (E,
194). Bahâ 'uldin Zuhayr a dilué ce quatrain en dix vers (Dîw.p. 55 ; cf. 53,
61).
Rime : râ, mètre : basît.
[12] «Ô mon ouïe... » réfère
au hadith al-taqarrub bit nawâfil.
COMMENTAIRE. Theme de Fiimour qui
s'expose au perd: traite après lui, par Mutanabbi ■ «u ahla 'lhawa ma
shakka. . ■■ . et par Afïf Tdimsanî ■■ wa asda- qu'lhubhi ma jallat brhi
'Ituhamu .
[XIII] Allusion à Cor. XXXIX. 67.
commentaire P /. 335. Même idée dans le titre du K ba d al Wâhid, dlbn Sab'în.
Rime : dâd, mètre : tawil.
[XIV] Signe du Jugement dernier: miracle
annonçant la Qâyim shi’ite.
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