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Dîwân Traduit et présenté par Louis Massignon



Husayn Mansur Hallâj

Dîwân

TRADUIT DE L’ARABE ET PRÉSENTÉ
PAR LOUIS MASSIGNON

Éditions du Seuil


Une première édition de cette traduction a paru aux
Cahiers du Sud en 1955 précédée d’une perspective
transhistorique sur la vie de Hallâj.

EN COUVERTURE :
Calligraphie arabe
de Blandine Furet

La loi du 11 mars 1957 interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal.


Note liminaire

Un diwân est une collection complète des œuvres poétiques d’un auteur, établie, en suivant généralement l’ordre des rimes (on sait que la rime est une découverte sémitique, simultanément effectuée en arabe et en hébreu), par un critique littéraire.

Nous donnons ici en traduction française la reconstitution du Diwân de Hallâj, telle que nous l’avons établie, dans son texte, en 1931'. L’édition de 1931 contenait, non seulement les pièces jugées authentiques, mais, placées à la suite, les pièces antérieures et postérieures à lui attribuées, les fragments anonymes anciens et les poèmes signés récents composés pour exprimer ses états d’âme.

La présente traduction ne donne que les pièces jugées authen­tiques.

Précisons, d’abord, que Hallâj — mystique nourri du Coran, qui condamne la prétention suspecte des poètes à une « inspiration » mensongère — ne se considérait pas comme un poète. Il avait reçu une formation, non seulement théologique, mais philosophique, sa terminologie apparentée à celle des shi'ites ismaéliens le prouve, et les rares pièces de vers qui parsèment ses écrits didactiques en prose sont des explications rimées, mnémotechniques. Contraire­ment aux mystiques contemporains, il évite, avec pudeur, de citer des vers d’amour profane pour les appliquer à l’amour divin, et Celui qu’il aime n’a pas de visage. Il a fallu une crise de ravisse­ments, assez brève, pour lui arracher les poèmes extatiques qui commentent les oraisons en prose assonancée, dans les Akhbâr al-Hallâj.

Hallâj, pourtant, classé parmi les poètes répertoriés dans le Dictionnaire des poètes d’Ibn Jamâ’a (m. 767/1365), est reconnu

I Journal asiatique, Paris, janvier-mars 1931.


DÎWÂN

comme tel par le grand poète philosophe Ma’arrî, et son style poétique a été apprécié par Baqlî, Jildakî, et Yâfi’î.

Et son Dîwân paraît avoir été compilé dès le XIe siècle, ainsi que les témoignages de Qushayri, de Hujwirî, et de Jawbarî nous induisent à le penser. Mais a-t-il jamais été complètement « disso­cié», comme un dîwân poétique normal, des textes en prose que ses vers commentaient?

A part le ms. Fatih 2650 ' (f. 100 à 106 a) et le ms. Koprülü 1620[1] [2] qui nous donnent, et uniquement, 23 + 7 pièces de vers de Hallâj — les manuscrits qui nous ont servi à reconstituer ce Dîwân al-Hallâj sont des textes mixtes, sortes de «chante-fables», desti­nés à des «récitals» presque dramatiques, où. dans chaque péri- cope, une oraison (ou un récit) en prose est « psychologiquement » commentée par un court poème.

Ces manuscrits représentent, croyons-nous, des refaçons suc­cessives d'un opuscule très ancien, rédigé, un an au plus après l'exécution de Hallâj, par son disciple Shâkir-b-Ahmad Baghdâdî, avant de répondre à son appel, et de se faire exécuter, pour lui, à son tour; pour perpétuer le mémorial de son maître dont tous les traités avaient été condamnés à être détruits. Cet opuscule, que Qushayri appelle Poèmes et Oraisons extatiques, et qu’il aperçut, relié en rouge, dans la bibliothèque de Sulamî à Nishapur, subit des retouches dogmatiques (pour les oraisons) et des retranche­ments (pour les poèmes condamnés) de la main de Nasrabadhî, puis du célèbre hanbalite Ibn Aqîl; pour être finalement édité par un traditionniste connu, mort à Alexandrie: A.T. Silafî (m. 576/ I 180), de qui Fakhr Fârisî, puis l’ordre des shàdhiliya le reçurent. Silafî était allé en Chirwan (Caucase) pour l’auditionner chez un prédicateur connu, Ibn al-Qassâs Mufaddid, qui l’avait croyons- nous «enrobé» de pièces non authentiques, désormais amalgamées à l’opuscule original, sous forme romancée de « Visites», Ziyârât faites par des amis à Hallâj en prison.

Ce récit d’encadrement, qualifié de Hikâyat (al-Kirmanî) est utilisé à partir du XIIIe siècle par des prédicateurs comme Fakhr


Fârisî (m. 622/1225) et Ibn Ghânim Maqdisî (m. 677/1278) en Égypte, à Jérusalem et à La Mecque; et il est à la base des séances extatiques données à la Zaouïa de Sidi Bono à Grenade, à proxi­mité du Palais royal, à la fin de la dynastie des Banu’l-Ahmar, parfois en présence de la Cour.

Nous avons enfin une dernière refaçon, franchement populaire, de ce récit hallagien, dans une courte Qissat Husayn al-Hallâj, vraisemblablement compilée au Qarâfa du Caire, dans le couvent kurde yézidi, ultra-hanbalite, de l’ordre des 'adawiya, sous Bibars l’Arbalétrier.

Voici donc le tableau (conjectural) de la formation, par «allu­vions» successives, de notre texte hallagien fondamental : pour les quatre-vingt-trois pièces traduites ici :

Io [Abr. : Dîw. (1914)] poèmes et oraisons extatiques — dîwân ash’âr wamunâjayât : opuscule de Shâkir, selon l’hypothèse de P. Kraus, ap. Akhb., p. 64 sq; retouché par Nasrabadhî, puis Ibn 'AqîL — Publié d’abord dans Quatre Textes..., Paris, 1914, 4e partie; réédité en 1936, avec l’aide de P. Kraus, sous le titre d'Akhbàr al-Hallâj. Ses 74 + 6 péricopes ont fourni au présent ouvrage vingt et un poèmes: vers 1-2 de la qasîda X, qasîda VI, muqatta’a nos 19, 20, 21, 22, 29, 30, 33, 37, 39, 42, 46, 49, 50, 55, 56, 58, 61, 65, 66, auxquels l’édition de 1936 a ajouté les n°s 61,44, 6, 68, et les vers 3-4 de la qasîda V. Il serait légitime d’y ajouter quatre pièces très hardies (qasîda I, nos 12, 52-53 (connus de Suhrawardî)), et quatre autres (qasîda II, III, IV, VII); total, trente-quatre pièces.

2° [Abr.: Taq.] «récit d’encadrement», Hikâya ou Taqyîd ( = «suite»), attribuable à Ibn al-Qassâs Mufaddid. Ajoutant aux numéros fournis par le premier opuscule, les nos (qasîda II, III, iv, v, vu, vin), ix; les muqatta’a nos 1-4, 5, 8, 9, 10, 11, (12), 15-16, 17, 25-27, 34, 35, 40, 41, 43, (44), 45, 47, 51, (52-53), 54, 57, (61), 63, 67, (68), 69; Yatîma nos 2, 3; total: vingt-huit pièceà.

3" [Abr. : Qissa] légende de Husayn al-Hallâj (Qissat Husayn al-Hallâj), contenant quarante-six poèmes hallagiens (dont quatre zajal populaires). La Qissa a été publiée dans le Donum natalicum H. S. Nyberg oblatum, Uppsala, 1954, p. 102-117, contenant toutes les proses, mais seulement quinze poèmes sur quarante-six


(la liste des quarante-six[III] est donnée p. 116-117). La Qissa conserve cinq pièces primitives des Akhbar. cinq additions de la Hikâya; annexe la Qasîda de Musfir Sabtî, un zajal connu de Jildaki. Analyse dans la Passion, t. Il, p. 467-76; extraits dans Recueil..., p 61-64

4° Enfin, nous avons recueilli dix poèmes de Hallâj incorporés dans les fragments en prose sauvés de la destruction; d’abord dans \esTawâsîn (sept numéros: les nos 10, 13, 14, 28, 38, 59, yatîma n" 6), puis grâce au philosophe mystique Daylami (trois numéros : qasîda vm bis, nos 16 bis. 42 bis). Et, en outre, des vers isolés, dans des sources imprévues (dans la Geniza, puits rituel de la synagogue caraïte du Vieux-Caire).

On remarquera, en comparant les nos 28 et 29, et les variantes du n" 57, que nous avons là une tradition textuelle indépendante du texte de base fondamental.

Nous renvoyons à l’édition de 1931 les lecteurs curieux des interférences de la pensée de Hallâj avec Sumnûn, Abû Firâs, 'A.Q. Hamadhani, Musfir Sabti (cf. c. p. 1 17, 1 19, 122, 139)2.

La légende hallagienne a provoqué, dans tout l’islam non arabe, en persan, en turc, en pashtu, en urdu, en bengali, la floraison de grands poèmes célébrant le «martyr mystique de l'islam». Il y a même, en persan, un Diwân de Mansûr Hallâj qui doit être, naturellement restitué à un auteur bien postérieur, de langue persane: Husayn Khwârizmi (m. 839/1435). Nous n’avons pas donné de références ici3 à cette immense et souvent magnifique littérature car elle est née de récits en prose, sur la vie et le supplice de Hallâj, traduits de l'arabe en persan un peu avant la «création», par Fariduddin 'Attâr et ses disciples, de l'étonnante œuvre halla­gienne centrée autour de la biographie de Hallâj qui clôt, de façon éblouissante, son Mémorial des Saints, Tadhkirat al-Awliyâ: dé­crivant un martyre dont les scènes pathétiques ont été représentées,


par le peintre de Herat, Behzad, dans une série de miniatures dont nous ne sommes pas encore arrivés à retrouver d’originaux. Le Mémorial de Attâr traduit de nombreuses sentences de Hallâj, en prose, mais ne traduit qu'une pièce de vers, Nadimi (n" 37). Quant à Rûzbehan Baqlî, son contemporain, il nous donne la traduction en persan de seize pièces poétiques de Hallâj (les sept pièces des Tawâsin. avec qasida III. 57 (v. 3), 15, n° 13 (p. 128), qasîda IX, 63, yatîma n° 8. 55, 5) — mais je n'ai retrouvé nulle part d’échos de cette traduction, par ailleurs pleine d’intérêt pour qui veut saisir le fond de la pensée poétique hallagienne, dégagée de la dure empreinte grammaticale arabe 1.

L. M.

1 Cf. La Vie et les Œuvres de Ruzbehan. Baqlî. ap Stud Oneniaha I Pedersen du ata. Copenhague. 1953, p. 236-249. Un mot de Kishi. rapproché d'un passage d'Ibn Khaldoun. permettrait de rattacher aux hallagiens du Khurâsàn l'origine du quatrain persan.

ABRÉVIATIONS (références)

Cor. = Coran

Pour les œuvres de Louis Massignon. reference est faite à la dernière édition :

Akhb. = Akhbàr al-Hallâj, 3' éd., Paris, 1957.

Dîw. = ici, p. 9, 1".

E. = Essai sur les origines du lexique technique de la mystique musulmane. 2e éd., Paris, 1954.

M.FK. = Mélanges Fuad Koprülü, Istanbul, 1953, p. 351- 368.

P. = La Passion de Hallâj. martyr mystique de l'Islam.

T éd. Gallimard, Paris, 1975, 4 vol.

Qissa = ici, p. 9, 3°. Cf. P., Il, p. 467-476.

QT = Quatre textes inédits, relatifs a la biographie d'al-

Hallâj, Geuthner, Paris, 1914.

Recueil = Recueil de textes inédits concernant 1’histoire de la mystique en pays d'Islam, Geuthner, Paris, 1929.

Riw. = Les Riwâyât d'al-Hallâj, P, III, p. 294-295, 344- 352.

Taq = ici, p. 9, 2°. Cf. P., Il, p. 464-467.

Taw. = Kitáb al-Tawasin d'al-Hallâj, Paris, 1913. Cf. P.,

III, p. 297-344.


Perspective transhistorique
sur la vie de Hallâj
[IV]

Hallâj (= Husayn-Ibn-Mansûr) naît en 244/857 environ, et meurt en 309/922. Quand sa mère devint enceinte de lui, elle fit vœu de l’offrir comme serviteur à des fuqarâ (religieux pauvres volontaires) (Qissa). Et elle le nomma Husayn, en souvenir du fils martyrisé de Fâtima, la fille bénie du Prophète. Il naît en Iran, en Fars, à Tûr, écart au N-E du bourg de Beïza. Beïza était un centre très arabisé, le grand grammairien arabe Sîbawayh y était né; c’était un petit camp sur la route militaire allant de Basra au Khurâsân, peuplé de clients hârithiya yéménites. Le père de Hal­lâj, probablement cardeur, s’en alla travailler dans le milieu textile s’étendant de Tustar jusqu'à Wâsit (sur le Tigre), ville de fondation arabe, où l’enfant acheva d'oublier la langue persane. Wâsit était une cité en majorité sunnite, de rite hanbalite (avec une minorité shi’ite extrémiste dans les campagnes, près des paysans araméens), centre d’une école renommée de lecteurs du Coran; l’enfant, jusqu'à douze ans, y apprit le Coran par cœur, et devint un hâfiz; mais, très vite, il rechercha le sens symbolique qui élève la prière de l’âme vers Dieu.

L’arabe, langue dont on n’écrit que les consonnes, où l’on ne peut vocaliser les finales tant qu’on n’a pas construit la phrase, force l’écolier à raisonner, le rend apte à exprimer des idées générales, et aussi à s’en persuader. Langue du Coran où Hallâj, dès l’enfance, chercha à goûter les réalités de la foi; elle sera la langue de ses effusions mystiques, quoique le parler de son terroir natal (sinon de ses parents) ait été un dialecte iranien. Pour le


musulman, l’arabe exprime la parole de Dieu sous une forme adéquate (le Coran est une récitation «incréée», ses consonnes isolées signifient des idées divines). Le croyant doit donc arriver à «intérioriser», à réaliser sa prière arabe. L’islam est avant tout témoignage (shaháda) formulant adoration du Dieu unique d’Abraham, du Miséricordieux ; Hallâj entrevit de bonne heure que le Tawhîd, la formule de cette adoration n’est réelle que quand c'est celle que Dieu prononce Lui-méme ( - Lâïh min al-azal». d’Ansari), celle du Témoin Étemel (shâhid al-qidam = l’Esprit). Il le dira bientôt: pour le croyant, l’invocation « au Nom de Dieu » doit devenir «Fiat» (= kun); «l’amour, c’est se tenir debout tout près du Bien-aimé, en se renonçant en entier et en se transformant en Sa configuration •>. Il semble donc qu’en priant en arabe, il ait déjà ressenti une première touche d’unification personnalisatrice, et ressenti, pour en souffrir sourdement, la jalousie désirante de Dieu. « Personne n’est plus jaloux que la Vérité Créatrice », dit un hadîth (là shakhs aghyar min al-Haqq). «C’est l’archer qui, de suite, tend son arc en visant Dieu, sans plus dévier qu’il ne L’ait atteint (de ses flèches). » «Celui qui considère ses œuvres perd de vue Celui-là pour qui il les œuvrait ; et celui qui considère Celui-là pour qui il les œuvrait perd de vue ses œuvres. »

Après avoir brusquement choisi et écouté, puis quitté Sahl, de Tustar, son premier maître en mystique, Hallâj, à vingt ans, s’en vient à Basra, où les hârithiya étaient liés avec les B. Muhallab azdites, pour recevoir l’habit monastique de sûfî, de la main de ’Amr Makkî. La communauté musulmane primitive a été fondée à Médine sous forme d’une fraternité spirituelle de croyants sup­plantant le clan et la famille. Être sùfi, c’est retrouver cette vie commune de compagnonnage dont le bien commun, la prière collective fait accéder ensemble à Dieu, par l’imitation de Mu­hammad, et aussi des autres prophètes (tendance universaliste). En même temps qu’il reçoit l’habit, Hallâj contracte mariage avec Umm al-Husayn, fille d’Abû Ya'qûb Aqta’ Basrî, mariage mono­game, foyer uni jusqu’au bout, d’au moins quatre enfants, trois fils et une fille, dont Hallâj, durant ses absences, assurera la subsis­tance grâce à son beau-frère, un Kamaba’î. Ce mariage, dont ’Amr Makkî fut jaloux, établit Hallâj à Basra, dans le quartier Tamim, clan B. Mujâshi’, dont les kamaba’iya, B. al’Amm, du Nahr Tira,


étaient <• clients- (majali); politiquement ralliés à la rébellion zaydite des Zanj (c'était le temps de la guerre servile), et particu­lièrement contaminés par l’hérésie shi'ite extrémiste (secrète) des Mukhammisa. Son entrée dans ce clan parait être à l'origine de sa réputation persistante de révolutionnaire (d'où sa première arresta­tion à Dîri), voire de conspirateur shi'ite. Hallâj gardera, certes, de ces accointances de clan de curieux ternies d'apparence shi'ite dans son apologétique, mais il ne cessa de vivre à Basra, dans sa famille, d’une vie ascétique fervente et toujours sunnite : il jeûnait chaque Ramadan intégralement, et le jour de la Fête (de clôture du jeûne), il s'habillait de noir <• car c'est l'habit qui convient à celui dont les œuvres sont réprouvées >• {Akhh. 24) : attitude d'âme bien curieuse, sorte de coquetterie d’humilité, avec Dieu.

Le conflit entre son directeur spirituel (Makki) et son beau-père (Aqta’) persistant, Hallâj, après avoir patienté un bon moment sur le conseil du célèbre sûfî Junayd qu’il était allé consulter à Bagdad, se lasse, et part pour La Mecque. Ce départ paraît avoir coïncidé avec l'écrasement de la rébellion zanj, confirmant Hallâj dans cette certitude que ce n’est pas par une guerre temporelle qu’on rétablit l’unité de la Communauté islamique, mais par les prières et sacrifi­ces de la vie ascétique. Il arrive à La Mecque pour son premierhajj (noter que le pèlerinage légal est la seule prescription canonique effectuable pour autrui) ; là, il fait vœu de demeurer un anf'umra) sur le parvis du temple, en état de jeûne et de silence perpétuels, à l’exemple de Maryam qui, selon le Coran, se prépara ainsi à la naissance du - Fiat - divin en elle. Attente savourée par une sorte de goût intérieur, cette khalwa, solitude dans le silence, aide à la formation d'une parole substantielle dans le cœur de l’ascète. « S'il était jeté un atome de ce que j’ai dans le cœur sur des montagnes, elles fondraient. » « Mon esprit s’est emmêlé à Son Esprit comme le musc avec l’ambre, comme le vin avec l’eau pure. » «Tu infonds la conscience personnelle dans mon cœur, comme les esprits s’in- fondent dans les corps.» «Nos consciences sont une seule Vierge... » «où seul l'Esprit de vérité pénètre». Paroles extatiques, locutions théopathiques, dont les sûfîs recherchaient la jouissance à part soi, mais dont ils interdisaient la répétition «à jeun», en public. Car le vice des sûfîs, c’est de garder close sur eux seuls la chambre de leur intimité avec Dieu (Hallâj au gibet sera interpellé


par le sûfi Shiblî lui criant le terrible verset coranique XV, 70, des gens de Sodome à Lot : « ne t’avions-nous pas interdit d’accueillir aucun hôte?»); car la Loi islamique maintient que la Déité reste inaccessible. Dès lors, ’Amr Makkî rompt avec son ancien disci­ple. De son côté, Hallâj s’astreint à une rude discipline d’obser­vance rituelle, choisissant entre les rites le plus dur (as'ab; par talfîq); des disciples viennent à lui, qu’il désigne en son poème - ashábí wakhillânî » ; c’est peut-être pour eux qu’il écrit ses vingt- sept Riwâyât, destinées à un public restreint d’ascètes, contenant des hadîth qudsî.

Revenu de La Mecque en Ahwâz, il commence sa première prédication publique, au grand scandale des sûfîs ; il rejette alors l'habit sûfi pour parler librement aux «gens du siècle», spéciale­ment aux scribes et publicains, public lettré, mais blasé et scepti­que. Quelques-uns, des sunnites d'origine araméenne et iranienne, ex-chrétiens sortis des écoles nestonennes de Deïr Qunnâ, et pro­mus vizirs à Bagdad (Qunna’iya: B. Wahb et B. Jarrâh) devien­nent et resteront prohallagiens ; d’autres, mu’tazilites et shi’ites, ces derniers gros fonctionnaires fiscaux (B. al-Furât, B. Naw- bakht), ameutent la foule contre Hallâj, l’accusent de truquages, de faux miracles (distributions de vivres, de numéraire aux pauvres). Ce début de l’apostolat hallagien auquel il devra son nom (Hallâj al-asrâr = cardeur du plus intime secret dans les consciences) est une méthode d’introspection mystique universaliste; il cherche et veut faire trouver Dieu par chacun au fond de son âme, entrant en otage dans la nécessité confessionnelle d’autrui; il s'abstient de critiquer les dénominations différenciant les groupes cultuels mo­nothéistes, par anti-qadansme (ce serait, dit-il, supposer que l’on se les choisit; Akhb. 45); il fait remonter à une Base, source des idées suprêmes, et de toute compréhension (préface • sayhûr » ) ; les formes des ntes ne sont qu'intermédiaires, il faut passer outre pour en goûter la réalité divine. Il use sans hésiter de la terminologie de ses adversaires, mu'tazilites (shukr, adl) comme shi’ites salma- niens ('ayn, mim, sin), pour la redresser et sublimer.

Rejeter le froc, déchirer le manteau rapiécé, c'est rompre la discipline de l’arcane, c'est se livrer nu en spectacle au soupçon et aux haines. «Quand Dieu prend un cœur, Il le vide de ce qui n’est pas Lui; quand II aime un serviteur. Il incite les autres à le


persécuter, pour que ce serviteur vienne se serrer contre Lui seul » (Akhb. 36). «Prétendre Le connaître, c'est de l’ignorance; persis­ter à Le servir, c'est de l'irrespect; s'interdire de Le combattre, c'est folie; se laisser endormir par Sa paix, c'est sottise» (Akhb. 14). « Puisse mon âme T'épargner de passer pour un juge injuste» (ici, M. 34). «Ne te laisse point surprendre par Dieu, et pourtant ne désespère pas de Lui ; ne convoite pas Son amour, et pourtant ne te résigne point à ne pas L'aimer; ne cherche point à L’affirmer, mais ne cède pas à Le nier (quand II disparaît); et surtout garde-toi de proclamer (de toi-même) Son unité» (Akhb. 41).

Comme tant de Basriens, il part en Khurâsân continuer sa prédication dans les colonies arabes de l'Iran oriental (Tâlaqân), prêchant dans les cités, séjournant aux frontières, dans les cou­vents fortifiés des volontaires pour la guerre sainte. Au bout de cinq ans, il revient en Ahwâz, et grâce à des protections officielles (le secrétaire d'État Hamd Qunna'î) il vient installer les siens à Bagdad, avec tout un groupe de notables d’Ahwâz (transfert de l’atelier de tissage impérial, dâr al-tiràz, tissant les voiles de la Ka’ba, de Tustar à Bagdad).

Puis c’est un second pèlerinage (avec quatre cents disciples) à La Mecque; où d’anciens amis, des sûfîs, l'accusent, non plus de charlatanisme, mais de sortilèges magiques, de magie blanche, de pactes avec les djinns.

Il repart pour un second grand voyage, encore plus loin, au-delà du domaine de l’intercession de Muhammad(shafa a), infidèles de l'Inde, manichéens et bouddhistes du Turkestan; arrivé par mer, il remonte l'Indus, va de Multan en Qashmir, et monte au N-E jusqu'à Turfan (Mâ Sîn) avec les caravanes ahwaziennes portant jusque-là les brocarts tissés au tirâz de Tustar, et rapportant à Bagdad le beau papier chine (dit de Ça-çéou) sur lequel les disci­ples de Hallâj copieront ses œuvres. Au-delà de la communauté musulmane, c'est à toute l'humanité qu'il pense, pour lui commu­niquer ce curieux désir de Dieu, patient et pudique, qui dès lors le caractérise ; entendant à Néhavend les trompettes du Jour de l’An, il avait dit : « Quand donc viendra notre Jour de l'An ? quand, mis au pilori, je serai proche de Dieu»; et treize ans plus tard, lors d’une mise au pilori qui dura trois jours, un disciple lui rappela


PERSPECTIVE TRANSHISTORIQUE SUR LA VIE DE HALLÂJ cette phrase, et ajouta ironiquement : « As-tu reçu tes étrennes ? — Oui, et tant, que j 'en suis confus, car je n’avais pas voulu me hâter vers ma joie» (Akhb. 22); on lui fera réciter en croix le verset coranique XLI1, 17 :« Ils crient qu’elle se hâte, ceux qui ne croient pas en l’Heure; mais ceux qui y croient l’attendent, avec une crainte amoureuse, car ils savent qu'elle est la Vérité. »

Il revient alors à La Mecque, pour son troisième et dernier pèlerinage. L’essentiel du hajj, c’est ’Arafât, et, là, l’offrande du sacrifice d’Abraham. A son pèlerinage d’adieu, au moment de l’ikmâl, le prophète Muhammad n’a pas épuisé en cette unique fête la signification salvatrice du hajj, qui doit déborder de pardon sanctifiant, au-delà de l’islam, sur tous. Les shi’ites, qui l’ont pressenti, placent, après et au-delà de l’ikmâl, la cérémonie du Ghadîr, où Muhammad aurait transféré le symbole d'intercession de la Ka’ba, cette Pierre Noire et muette, à une Pierre vivante, l’Imâm. Hallâj comprend que notre désir de Dieu doit détruire mentalement en nous l’image du Temple, pour trouver Celui qui l’a fondé, et détruire le temple de notre corps, pour rejoindre Celui qui y est venu parler aux hommes. Durant ce dernier pèlerinage, à Arafât (vers l’an 290/902), au moment de la Waqfa, où l'on crie les noms de tous ceux qu’on aime, pour qu’ils soient pardonnés, Hallâj, reprenant le cri rituel de la foule, >• labbayk ■■ (à Tes ordres), demande à Dieu qu'il l’appauvrisse encore davantage, le fasse méconnaître et exclure ; afin que ce soit Dieu seul qui Se remercie Lui-même à travers ses lèvres. On sait l'importance de la Waqfa, et de ses deux rak'a pour les pèlerins; selon le proverbe maghré­bin, ces deux brèves oraisons sont «ces deux colombes jumelles qui boivent une fois l'an et restent assoiffées toute l’année», car elles sont la prière d'offrande du sacrifice (tarif) pour tous les chers absents dont on prononce alors le nom. «On mène les victimes (— les agneaux) au sacrifice, mais moi, j’apporte le sacrifice de mes veines et de mon sang» (ici, M. 51).

Revenu de La Mecque à Bagdad, Hallâj va exprimer le désir étonnant de mourir anathème, frappé par la Loi de l'islam, pour tous ( ■< malâmati« qui devient «fatà »), 11 installe chez lui une Ka’ba en réduction, il prie de nuit près des tombeaux (Ibn Hanbal), de jour, il commence, en pleine rue, dans la capitale, une séné de


discours inouïs: «Ô musulmans», crie-t-il dans les souks, durant une sorte d'extase jubilante, mais lucide, ■< sauvez-moi de Dieu... Il ne me reprend pas à moi-même, et il ne me rend pas non plus mon âme ; quelle coquetterie : c’est plus que je n’en puis suppor­ter» (Akhb. 38). Puis, voulant provoquer les fidèles à faire cesser ce scandale d’un homme qui ose se dire uni à la Déité, en le tuant, il leur crie, dans la mosquée-cathédrale d'al-Mansûr : « Dieu vous a rendu mon sang licite: tuez-moi... Il n'est pas au monde pour les musulmans de devoir plus urgent que ma mise à mort... (on ajoutera : soyez donc combattants pour la foi, et que je meure (de vous) martyr)» (Akhb. 50). «C’est dans la confession de la Croix que je mourrai... Tuez donc cette maudite (= sa personne)» (Akhb. 52).

L’émotion populaire causée par cette prédication ébranle égale­ment les milieux lettrés, du fait des opuscules à portée théologique que Hallâj devait avoir déjà écrits sur des sujets brûlants, discutés entre shi’ites, comme la prédestination de Muhammad et le carac­tère inachevé de sa mission prophétique. D’autre part, un juriste sunnite zahirite, Muhammad Ibn Dâwûd, qui était aussi un poète, théoricien du pur amour uraniste, et disait s’interdire toute satis­faction chamelle «afin de perpétuer le désir», ne pouvait tolérer les prétentions de Hallâj à une union mystique consommée avec Dieu; usant de ses fonctions d'assesseur au tribunal du grand-cadi de Bagdad, il dénonça Hallâj à la Cour, demandant pour lui condamnation à mort. Sa proposition, contresignée par d’autres, se heurta à l’opposition de l’autre assesseur, un canoniste shâfi’ite, Ibn Surayj, qui soutint qu'une telle inspiration mystique surclassait la juridiction des tribunaux de droit canon, ce qui sauva Hallâj. C’est à cette époque que l'école des grammairiens de Basra (Sirafî, et Fasawî), dans un récit hostile, fait prononcer par Hallâj une réplique célèbre, qui a suscité d'innombrables commentaires : arri­vant à la mosquée d’al-Mansûr, il fut interpellé par son ami Shiblî, mystique et poète, qui avait son cercle d’auditeurs sous la «cou­pole des poètes», et aurait répliqué, cachant à demi ses yeux sous sa manche, « Ana'l Haqq» = je suis la Vérité Créatrice = «mon je, c’est Dieu » : déclaration frôlant le blasphème, et commentée de suite par son beau quatrain : « vô sirra sirri... ô secret de mon âme. Toi qui sais tant T’amenuiser que Tu échappes à la prise de toute


imagination pour tout être...» Et voici un fragment d'oraison : « le parfum de Ton approche suffit à me faire mépriser toute la créa­tion, et l'enfer n’est rien au prix de mon vide quand Tu me désertes, pardonne aux créatures et non pas à moi, je ne conteste pas avec Toi pour moi-même, et ne Te réclame pas mon dû » (Akhb. 44).

Hallâj, par sa véhémence paradoxale, ravivait en bien des cœurs le désir d'une réforme morale de la Communauté musulmane, dans son chef et dans ses membres; et persuadait beaucoup de croyants de l’efficacité sociale des prières et conseils des saints, des Abdâi (piliers spirituels du monde) et de leur chef invisible du moment, le Témoin actuel, le Pôle. Nombre de hautes personnalités, selon Istakhri, virent alors en Hallâj ce chef invisible et inspiré; des secrétaires d’État, parents ou alliés de ’Alî Ibn Isa et de Hamd Qunna’î (comme Nu’mân, Dawlâbî, Ibn Abî’l Baghl, M. Ibn ’Abdalhamîd), des émirs (Hy. Ibn Hamdân, Nasr Qushûrî), des walis des amsâr (comme A.B. Mâdhara’yî, qui installera une pe­tite Ka’ba au Qarâfâ du Caire en 303), Nujh Tulûnî; et des samanides (Akh Su'lûk, Sîmjûr, Hy. Marrûdhî, Bal’amî, Qaraté- kin), des «mulûk» (= dahàqin : Sâwî, Madâ’inî), et des ashrâf hachémites (A.B. Rab’î, Haykal, Ahmad-b-’Abbâs Zaynabi). Ils entretenaient avec lui une correspondance de direction spirituelle lui ménageant sur la politique générale une incidence; c'est alors que Hallâj dut dédier à Hy. Ibn Hamdân, Nasr, et Ibn ’Isa ses opuscules sur la politique et les devoirs des vizirs. Il y avait alors, même parmi les ulémas, un désir général d'assainissement des rouages administratifs; on demandart un gouvernement sincère­ment musulman : un vizirat rendant la justice, surtout en matière fiscale (contre les abus pervers de fermiers généraux shi'ites, antidynastiques) ; et un khalifat conscient des responsabilités de sa charge devant Dieu; qui fasse agréer par Dieu les actes liturgiques de la Communauté muhammadienne (prière, hajj, jihâd). On es­pérait qu’Hallâj s’y emploierait, alors que Hallâj, pressentant une confiscation, amie ou ennemie, de sa liberté, aspirait à s’aller cacher au pays natal.

En 296/908, la conspiration réformatrice des sunnites «bien pensants» éclate, avec l’essai, pendant un seul jour, du khalifat «hanbalite barbahânte » d’Ibn al-Mu’tazz; et échoue, n’ayant pu se faire créditer en numéraire par les banquiers juifs de la Cour, complices des fermiers généraux shi'ites antidynastiques; Muqta- dir, le khalife enfant, est rétabli, avec un nouveau vizir, un techni­cien fiscal, un shi’ite, Ibn al-Furât. Les poursuites contre l'émir Hy. Ibn Hamdân, en fuite, découvrent Hallâj, son conseiller in­time : le vizir le fait surveiller, puis, à l'avortement d'un projet de vizirat sunnite (parti des Qunna'iya), lance un mandat d'arrêt contre les hallagiens; quatre sont arrêtés, Hallâj s'échappe, avec Karnaba'î; ils vont se cacher, en Ahwâz à Suse, cité hanbalite : auprès de la tombe du prophète Daniel, le supputateur des Derniers Temps. Au bout de trois ans d'enquêtes policières, dirigées par un traître, et soutenues par la haine d'un sunnite, Hâmid, fermier général de Wâsit, Hallâj est arrêté et ramené à Bagdad où son procès final commence, qui durera neuf ans.

Cette période finale est aussi l'épreuve cruciale de sa vocation. Voici sommairement l’enchaînement extérieur des faits; en 301/ 913, un nouveau vizir, Ibn 'Isa, un Qunna'î, dont un des secrétai­res d'État, Hamd Qunna’î, son cousin, est hallagien déclaré, fait avorter momentanément le procès, et soustrait le cas de Hallâj à la compétence du cadi conformément à la fatwâ shâfi ite d'Ibn Su- rayj ; ses disciples sont relâchés, et tout ce qu’obtiennent ses ennemis, c'est trois jours d'exposition au pilori, sous un écriteau mensonger •< agent qarmate » (imaginé par le préfet de police Mu nis Fahi, pour faire pièce au vizir). Interné au Palais, Hallâj est autorisé à prêcher aux détenus de droit commun, est introduit aussi près du khalife (il le guérit, fin 303, d'une crise fébrile, et >• ressus­cite » en 305 le perroquet omanien du prince héritier Râdî) ; jaloux, les mu'tazilites font circuler à la Cour un pamphlet d'Awârijî décrivant ses trucs et son «charlatanisme

Mais durant son second vizirat (304-306) le shi'ite Ibn al-Furât n'ose pas, à cause de la Reine Mère, rouvrir le procès. Hallâj peut rédiger en prison ses derniers ouvrages; un d'entre eux, sauvé en 309 par Ibn ' Atâ, le Tá Sin al-Azal, nous montre en son dernier état la pensée de Hallâj, réalisant petit à petit son offrande et son sacrifice. Son désir fondamental d'unifier les modes de l’adoration des hommes, en esprit et en vérité, se heurte, à travers la rivalité de Shalmaghâni à la Cour, à l'obstacle primordial, à l’hypocrite malice des hommes dont il sonde l’origine angélique dans cet


PERSPECTIVE TRANSHISTORIQUE SUR LA VIE DE HALLÀJ opuscule dont le titre complet est « La pureté préétemelle et la légitimité des prédications (de l'CJnité divine) quand on les re­tourne selon leurs significations réelles».

Deux êtres, dit-il, ont été prédestinés à témoigner que l’essence du Dieu Unique est inaccessible, Satan (= Iblîs) devant les anges au ciel, Muhammad devant les hommes sur terre ; hérauts, l’un de la pure nature angélique, l’autre de la pure nature humaine; et, ce faisant, l’un et l’autre se sont arrêtés à mi-chemin: leur attache­ment jaloux à l’idée pure d’une Déité simple, leur proclamation de la shahâda n’a pas pu indiquer qu’il fallait l’outrepasser pour s’unir pleinement à l’unifiante volonté de Dieu. Au covenant, Iblîs n’a pas voulu tolérer la pensée qu'un Dieu adorable assumerait la forme humiliée et matérielle d'Adam (préfigure, alors, du Juge). Au Mi’râj, à son ascension nocturne, Muhammad s’est arrêté au seuil de l’incendie divin sans oser « devenir» le Buisson Ardent de Moïse; et Hallâj, qui se substitue à lui par amour, l’exhorte à avancer, à pénétrer dans le feu du vouloir divin jusqu'à en mourir, comme le papillon mystique, et à se «consommer en son Objet» ; Muhammad acceptera un jour, il a restauré le pèlerinage, mais il reste à consommer l’islam, à ramener la qibla vers Jérusalem, à faire «rentrer la ’umra dans le hajj » ; si Muhammad a trouvé et laissé la Flamme de l’unité divine cernée, encerclée et défendue de toutes parts par la haie interdictive de la Loi. ce n’est que pour un temps; en attendant qu'un jour vienne où les prières et sacrifices des saints substitués à lui par amour l’outrepasseront angélique­ment à sa place, osant entrer en contestation avec le Miséricor­dieux pour obtenir enfin que l’islam s'achève en un rassemblement intégral de l’humanité pardonnée. En s'arrêtant ainsi, Iblîs a pro­voqué les péchés des hommes, et Muhammad a retardé l’heure de leur Jugement transfigurant qu'il avait mission d’annoncer. Et pourtant l'un, dans son dam de légalisme irrémissible, nous incite à outrepasser ce seuil de la suprême déréliction pour trouver l'Amour; et l'autre, par son retard à s'abandonner, mesure le temps de formation des saints dont il attend qu’ils le dépassent. L’un et l'autre jalonnent, comme deux bornes de la pure nature, le seuil que l'Esprit divin fait survoler aux têtes sanctifiées qu’il introduit dans l'Un par une ruse imprévisible et transnaturelle de l’amour.


Ce n’est pas que Hallâj compare le destin final d’Iblîs avec celui du Prophète; l’exclusion du héraut de la nature angélique (naturel­lement séparée de l’union mystique) doit contraster avec l’élection finale du héraut de la nature humaine (réservée à cette union). Satan, lui, à l’origine du monde, a refusé de s’unir à l’ordre divin l’invitant à se prosterner devant la forme de sa préfigure (Adam); obstiné dans sa volonté propre d’aimer telle quelle la Déité in­communicable, dans le quiétisme de sa contemplation fermée; obstiné à témoigner cette Déité selon sa nature angélique, sans oser consentir à la bonne nouvelle, à l’effusion si simple de l’humilité divine, à cette extase de l'Un, quand elle lui est préfigurée. «J’ai refusé, c’était pour Te proclamer saint. Mais voici qu’Adam, c’est Toi; et que le seul qui vous sépare, c’est Satan. » Séparer Dieu de la créature où II a dessein d’apparaître, c’est accepter en Dieu une contradiction; Satan, qui a prêché la Loi aux Anges, prêchera le péché aux hommes. Cette passion hautaine pour la splendeur de la Déité engendre en Satan un orgueil d’amant, jaloux, envieux, lui fait dualiser l’être ’, et haïr la nature humaine, devenant pour elle le prince de ce monde, le tentateur, qui lui suggère que le bon et le mauvais se valent, dans l’indifférence souveraine de la prescience divine, qu’il dit aimer pour Sa damnation. Ce paradoxe ainsi offert à l’islam d’un Satan, pur croyant monothéiste, ange qui se damne par amour pour l’honneur de la Déité incommunicable, n’était-ce pas précisément l’exemple que Hallâj avait suivi, homme désirant mourir sacrifié, anathème, excommunié ? Non, Hallâj resté fidèle à l’observance et à la morale, mourra anathème, se livrant nu à [’Esprit saint, tandis que Satan s’est dupé, drapé dans une attitude d’amant dédaigné, par un manque d'adhésion lucide et définitive au précepte divin (Baqlî).

Hallâj semble avoir publié le Tâ Sîn al-Azal à l'occasion d’une propagande qui se faisait depuis 306 à la Cour, émanant d’un shi’ite extrémiste, Shalmaghânî, arrivé à Bagdad avec le fermier général de Wâsit, Hâmid, qui, quoique sunnite, se confiait à lui pour toutes ses affaires importantes, parce que son gendre A. Hy. Ibn Bistârn, shi’ite, était le disciple inconditionné de

I N’v voulant pas être le troisième, alors que l’Amour n’est pas deux, mais trois en un

■ je suis l’amour, je suis ramant, je suis I aime (Ibn abi’l Khavr, quatrain n" 17, Ed Ethé)

Shalmaghânî. Ce dernier, conspirateur sombre et cruel, enseignait que la foi et l’impiété, la vertu et le vice, l'élection et la damnation formaient des paires antithétiques nécessaires, dont les deux ter­mes étaient également saints et agréables à Dieu. Shalmaghânî, qui fit exécuter en 311/924 des notables Qunna’iya (donc prohalla- giens), et fut forcément consulté par Hâmid lors de la condamna­tion de Hallâj, semble avoir suggéré certaines aggravations curieu­ses à son supplice.

Bagdad était alors, probablement, la plus grande métropole du monde civilisé, et c'est là sur un théâtre surexhaussé, comme pour Jeanne d’Arc, que le procès de l’amour divin fut plaidé, dans le décor fastueux de la Cour abbâsside, de 308/921 à 309/922.

La crise financière avait amené en 306/919 la formation d’un vizirat de coalition sunnite, où Hâmid, exacteur fiscal cynique, était flanqué d’Ibn ’Isa, physiocrate vertueux. Ibn ’Isa. vainqueur au début, avait fait prévaloir, grâce à un inventaire budgétaire de l’Empire resté justement célèbre, une détente des rigueurs fiscales ; Hâmid, contre-attaquant, avait appâté le khalife avec une spécula­tion odieuse sur les stocks de blé monopolisés; Ibn ’Isa riposte en fomentant une sédition populaire contre ce « pacte de famine » (où Nasr laisse les hanbalites agir). Les petits compagnonnages d’arti­sans, à Bagdad (comme à Basra, à La Mecque et à Mossoul précédemment), s’attaquent aux grossistes et aux entrepôts, ou­vrent les prisons (Hallâj aurait refusé de s’évader); Hâmid s’en va prudemment à Wâsit. Au bout de quelques semaines, il profite, pour rentrer à Bagdad, du retour du généralissime Mu’nis. Mu nis, qui vient de sauver l’Empire en Égypte, des fâtimites d’Occident, doit le défendre, en Iran, contre la menace des deïlemites d’Orient qui partagent les terres féodales et sont entrés dans Rayy : grâce à la défection du wali Akh Su’lûk, ex-adjoint de Mu’nis, toujours protégé par Nasr et par Ibn ’Isa. Hâmid expose à Mu’nis qu’il faut supprimer Akh Su’lûk, et, comme c’est un émir samanide, rompre avec le vizir samanide Bal’amî, un shâfi’ite prohallagien (qui refusera d'extrader les hallagiens en 309). Un tel revirement de politique exige un durcissement de la fiscalité; le khalife ne l’ac­cordera que s’il perd confiance en Ibn 'Isa et en Nasr.

Pour les ruiner tous deux et atteindre son but, Hâmid décide de faire rouvrir le procès de Hâllaj, leur protégé ; il réussit, grâce à un tiers: A.B. Ibn Mujâhid, chef respecté de la corporation des Lec­teurs du Coran, ami des sûfîs Ibn Sâlim et Shiblî, mais antihallagien : exaspéré par le « polythéisme » de la théorie de la déification des saints, il somme Ibn Isa, qu’il « dirige », de ne plus protéger Hallâj. Ibn ’Isa est dessaisi du procès de Hallâj ; et Nasr de la garde de sa personne; tous deux au profit de Hâmid.

Imprudemment, les hanbalites manifestent contre Hâmid, « prient contre » ce vizir dans les rues de Bagdad, tant pour protes­ter contre sa politique fiscale que pour sauver Hallâj (à l’instigation d’un des leurs, le hallagien Ibn ’Atâ). Puis, quand Ibn 'Isa, et son ami le vieil historien Tabarî désapprouvent le recours à l’émeute, les hanbalites s’en prennent à Tabarî, dont ils cernent la mai­son.

Le vizir Hâmid a gagné la partie; préposé au maintien de l'ordre, il lui est loisible de faire comparaître Ibn 'Atâ devant le tribunal qui n’arrivait pas à trouver de témoignage décisif contre Hallâj; Ibn 'Atâ dénie publiquement au vizir, vu ses exactions, le droit de juger la conduite d’«hommes vénérés», dont il approuve d’ailleurs la profession de foi ; Ibn ’Atâ, malmené, meurt des coups reçus; Hâmid peut combiner avec le cadi malikite, Abû ’Umar Hammâdî, connu pour ses complaisances envers les puissants de l’heure, le scénario de la sentence vouant Hallâj à la mort; en tirant argument des documents livrés par les Sulahâ, contenant notam­ment une «Lettre à Shàkir » (où Hallâj lui écrivait: «détruis la Ka’ba [V] pour la rebâtir (spirituellement) vivante et priante parmi les anges»), et de sa doctrine sur le remplacement votif du hajj pour l'assimiler aux insurgés Qarmates qui voulaient détruire le Temple de La Mecque. Le cadi hanafite Ibn Buhlûl refusant, son adjoint A. Hy. Ushnânî, homme de mœurs décriées, accepte de seconder Abû ’Umar.

En séance, le cadi Abû’Umar, pressé par le vizir, prononce la formule «il est licite de verser ton sang» (aucun shâfi'ite n’était venu à la séance); le syndic des témoins professionnels, 'A.A. Ibn Mukram, trouve parmi eux un nombre imposant de cosignataires, quatre-vingt-quatre, dit-on, en ajoutant aux membres du tribunal des canonistes et des qurrâ ; Ibn Mukram y gagnera la riche judi­cature in partibus du Caire.

Les deux jours suivants, le grand chambellan Nasr et la Reine Mère réagissent auprès du khalife, qui, pris de fièvre, contremande l’exécution; Hâmid agite alors devant Muqtadir le spectre d’une révolution sociale hallagienne, puis va s'entendre avec le généra­lissime Mu’nis pour perdre les deux protégés de son vieil ami Nasr: Akh Su’lûk et Hallâj.

Le lendemain, au sortir d’un grand festin offert à ses commen­saux en l’honneur de Mu’nis et de Nasr, le khalife Muqtadir signe, à la fois, la mise à mort de Hallâj, et la grâce de l’émir Yf. Ibn Abî’l Sâj, désigné (pour remplacer Akh Su’lûk, révoqué) comme wali de Rayy. A la requête de Mu’nis, qui s’acquitte ainsi, envers Ibn Abî’l Sâj, de la même dette d’honneur militaire qui tenait Nasr engagé (depuis dix-huit ans) envers Akh Su’lûk; envers deux rebelles qui, vainqueurs magnanimes, les avaient relâchés, l’un Nasr, l’autre Mu’nis, après les avoir capturés. Akh Su’lûk vaincu et tué en 311, Ibn Abî’l Sâj enverra sa tête au khalife, par l’inter­médiaire de Muflih, et à l’insu de Nasr, «pour ne pas contrister Nasr».

Le 23 dhû-l-qa’ada, des sonneries de trompettes annoncent que le vizir procède à une exécution capitale (dispositif aggravé sous une influence shi’ite) : il va remettre la personne de Hallâj au préfet de police Ibn 'Abdalsamad; des mesures policières sont concertées pour parer à l’émeute. Le soir, dans sa cellule, Hallâj s’exhorte au martyre, et prévoit sa résurrection glorieuse (prière notée par Ibr. Ibn Fâtik, et transmise l’année suivante au cadi Ibn al- Haddâd).

Le 24, à Bâb Khurâsân, sur le seuil de la préfecture de police de la rive ouest, « devant une foule innombrable, » Hallâj coiffé d’une tiare, est flagellé, intercis, exhibé, encore vivant, sur un gibet. Amis et ennemis ont le temps de l’y interpeller, tandis que des émeutiers incendient quelques boutiques. Ce n’est qu’à la venue de la nuit que l’autorisation khalifale (de règle) arriva, pour le coup de grâce ; on remit la décapitation au lendemain matin afin que le vizir assiste de jour à la lecture de la sentence. Hâmid, pour emporter l’adhésion du khalife à l'exécution, avait bien dit à Muqtadir: «si tu t’en trouves mal, après, tue-moi» ; mais des récits merveilleux s'étaient déjà propagés durant cette nuit dramatique; et il se peut très bien que Hâmid ait jugé prudent de dégager sa responsabilité (avec celle du khalife) et ait invité à haute voix les shuhûd, témoins cosignataires, massés devant le gibet, autour d’Ibn Mukram, re­présentants qualifiés de la Communauté musulmane, à crier; « C’est pour le salut de l'islam; que son sang retombe sur nos cous» (Tûzarî). Et la tête tomba, le tronc fut arrosé de pétrole et incinéré, les cendres jetées, du haut d'un minaret, dans le Tigre (27 mars 922). Allah akbar - , cria la foule, tandis qu'on suspen­dait sa tête à un écriteau.

De suite, des témoins rapportèrent avoir entendu du supplicié des paroles, novissima verba : « O mon Dieu, si Tu témoignes Ton amour à ceux qui Te font tort, pourquoi n'en témoignes-Tu pas à ceux à qui il est fait tort en Toi ? ■■ ; et, consommant le rite légal du Tawhîd islamique : « C'en est assez pour l'extatique, quand en lui son Unique est le seul à Se témoigner» (mot à mot: «ce qui compte, pour l'extatique, c'est que l'Unique le réduise à l'unité ■•). Ces mots, et d’autres, ressentis par des cœurs amis comme des réponses explicatrices, sont probablement de la plus stricte histori­cité ; elles réalisent le pressentiment de la prière de la dernière veillée; «Nous voici, nous Tes témoins...»

Cette exécution projette, tout autour de cette flambée finale, une clarté axiale sur les mobiles véritables des divers acteurs du procès, fixés par des incidents révélateurs des mentalités intimes.

Dans le groupe des ennemis, en tête, le vieux vizir Hàmid; sa longue carrière de fermier general l'avait habitué à considérer le versement de l'impôt au Trésor comme une ristourne arbitraire­ment prelevée par la Cour sur son propre fermage qu'il collectait avec une astuce joviale, pour en dépenser une bonne partie dans des festivités peu raffinées, avec une suite d'affranchis chamarrés qu'il rudoyait à l'occasion; aussi sa foi sunnite sommaire de gendarme goguenard l'avait braqué depuis longtemps contre Hal- làj, sa spiritualité, son ascétisme, ses sermons sur l'au-delà, et ses prétendus charismes; il ne voyait en lui qu'un affreux sorcier à abattre à tout prix ; et il y était précisément poussé par un confident que son gendre shi'itc lui avait procuré, Shalmaghâni, ce gnostique étrange et sombre, dissimulé et cruel, amoral, qui devait périr à son tour, treize ans plus tard, pour avoir osé assigner un rival


PERSPECTIVE TRANSHISTORIQUE SUR LA VIE DE HALLAJ encore pire, Ibn Rawh Nawbakhtî, à une ordalie. Mais une fois Hallâj abattu, sa sorcellerie pouvait encore nuire, et Hâmid, mé­fiant, entendait n’endosser que la mise à mort d’un rebelle, laissant les cadis seuls responsables, avec les shuhûd, de la légalité de la condamnation pour hérésie.

Puis le généralissime, Mu’nis, un eunuque grec d’origine, à peine moins âgé; il ne s'était pas prononcé jusque-là contre Hallâj protégé de son fils adoptif Hy. Ibn Hamdân, et de son ami le grand chambellan Nasr; mais ce vieux chef de guerre, avant tout préto­rien et mercenaire, voyait de plus en plus dans l’allégeance qu’il avait jurée au khalife Mu’tadid et à ses fils, donc à Muqtadir, une priorité de prébendier validant à l’avance toute extorsion de «dons gracieux» pour compléter sa solde et celle de ses officiers; il se mettait maintenant d’accord avec le vizir Hâmid, contre la politi­que d’Ibn ’Isa, contre ses ménagements financiers et diplomatiques qu'il avait jusque-là secondés ; puisqu’il fallait, contre Nasr, subs­tituer Ibn Abî'l Sâj à Akh Su’lûk comme émir militaire de Rayy, Mu’nis, d'ailleurs lié à Ibn Abî’l Sâj par sa parole, montre dure­ment sa force à Nasr et à la Reine Mère en abandonnant leur ami Hallâj à la haine féroce du vizir; c’est le début de sa rupture avec la Reine Mère, qui aboutira au coup d’État prétorien de 317/930; où, l’année même du sac de La Mecque par les Qarmates, il videra le Trésor.

Puis le cadi Abû 'Umar, ambitieux patient, élégant et subtil, qui arrivera lors de ce coup d’État au poste de grand cadi, son désir suprême; courtisan accompli, d’une aisance de manières magnifi­ques, qui restera légendaire, et curieusement épris de parfums, il savait se déjuger avec le plus déconcertant cynisme; il compensait l'imparfait outillage de son rite malikite en hadith et en qiyâs par le souci raffiné de la forme en casuistique canonique; il dut être très fier d’avoir enfin réussi, pour le «bien commun», à clore un procès aussi ardu par une solution aussi ingénieuse; servant, par surcroît, une fois de plus, une vengeance hiérarchique.

Enfin le faible et versatile souverain, Muqtadir, lassé de s’en­tendre rappeler ses responsabilités de khalife envers Dieu et envers son peuple, se détourne d’Ibn "Isa et de Hallâj ; incliné à douter de sa propre légitimité par des agents légitimistes shi’ites maîtres en imposture comme Husayn Ibn Rawh Nawbakhtî, ressaisi et en-


voûté par son ancien tuteur, son ex-vizir shi'ite, Ibn al-Furât, et par les pièces d’or qu’il fait miroiter devant lui dans une véritable séance de magnétisme, Muqtadir préfère céder aux instances d’un nègre vénal, l’eunuque-chef du harem, Abû Sâlih Muflih, un hanbalite comparse précisément payé par Muhassin, fils d’Ibn al-Furât, travaillant au troisième vizirat de son père; et rejeter les supplications maternelles, de la Reine Mère, l’adjurant de sauver Hallâj.

Dans le groupe des amis, le vice-vizir Ibn ’Isa, honnête, mais prudent opportuniste, veille à sa situation personnelle en cessant de protéger la vie de Hallâj; mais il lui garde sa sympathie, puisqu'il conserve un de ses opuscules dans une cassette, fait bon accueil à un hallagien, le chef des shuhûd du Caire, Ibn al-Haddâd, en 310, et brise en 312 la carrière d’Ibn Mukram, cadi du Caire, hostile à Ibn al-Haddâd, et ancien chef des shuhûd bagdadiens qui ont sur eux le sang de Hallâj.

Ensuite quelques personnages de second plan, spectateurs plus ou moins apitoyés des phases du supplice; 'Isâ Dinawarî (peut-être le père du hallagien Fâris), Abû’l ’Abbâs-b-’Abdal’azîz, le qârî "Atûfî, Qalânisî, le mu’tazilite Qannâd et surtout Ibrahim Ibn Fâtik Maqdisi, qui paraît bien avoir été incarcéré avec Hallâj, mais est présenté, dans la plus ancienne tradition sûfie, comme une sorte de sténographe impersonnel du martyr.

Un Hachémite, Haykal, dont on sait seulement qu’il aurait été supplicié aux côtés de Hallâj.

Enfin, trois témoins insignes de la sincérité religieuse de Hallâj dont l’influence historique sera capitale; d’abord deux amis inti­mes, Ibn 'Atâ et Shiblî, puis un disciple de la dernière heure, Ibn Khafîf.

D’Ibn ’Atâ, dont le désir d’être éprouvé, comme les prophètes, dans le creuset des souffrances avait été naguère exaucé, nous savons qu’il s'enhardit pour partager le sort de son ami qui lui avait écrit deux admirables lettres; le visitant en son cachot clandesti­nement, acceptant en dépôt ses manuscrits (qu'il dut confier à son propre légataire ' Alî Anmâtî), s'efforçant d’ameuter en sa faveur le petit peuple hanbalite, témoignant audacieusement devant le tribu­nal de leur commune foi en l’union mystique directe avec Dieu, source de tout charisme ; brutalisé alors par les gardes du vizir irrité de ses reproches, Ibn 'Atâ meurt des suites des coups reçus, quinze jours avant Hallâj, ayant ainsi précipité, et peut-être aggravé son supplice.

De Shiblî, noble Turc, ex-chambellan adjoint de Muwaffaq, nous savons que sa conversion à la règle de vie sûfîe l'avait amené (avec une crise politique en Égypte) à renoncer non seulement à son fief de Demawend, mais à ses études de droit malikite com­mencées dans sa jeunesse à Alexandrie — lorsque Hallâj lui apparut, à la grande mosquée de Bagdad, sous la - coupole des poètes ■> comme le héraut de la splendeur divine qui transfigure le visage et la voix. Dès lors, il s'était attaché à lui. non sans s'adonner à des comportements publics volontairement excentri­ques (<■ folie clairvoyante, mais chronique, tandis que celle d'Ibn 'Atà, momentanée, avait été inconsciente) qui lui permirent de ne pas être inculpé avec Hallâj; il le renia à demi aux deux procès, puis vint, le cœur bouleversé, assister à son supplice, entraîné par ceux qui le lapidaient (il lui aurait jeté une rose en signe de défi jaloux) ; cherchant à le comprendre au-delà de la mort, où il n'osait pas le rejoindre, il médita le mystère du sacrifice amoureux, et y initia désormais les novices sûfîs, à sa manière: leur confiant le martyre de Hallâj comme un joyau de beauté interdite — à cacher —, non comme un viatique d'immortalité à distribuer à tous.

D’Ibn Khafîf, encore un converti, d'une famille très en vue à Shiraz, on sait qu’il ne vit Hallâj qu’une fois, tout à la fin, dans sa prison, dans un état d'adhésion si plénière à la volonté divine qu'il revint convaincu pour toujours, en dépit des objections théologi­ques de ses confrères ash'arites (Bundâr). d'avoir vu là un « homme de Dieu •>.

Au palais, le grand chambellan Nasr Qushûrî, Grec converti devenu hanbalite, loyal et courageux serviteur de la famille impé­riale, était devenu hallagien avec toute sa maison; il le resta après la mort, osa prendre le deuil de ce supplicié, obtint du vizir, contre les conséquences légales d’une mise hors la loi, le maintien en leur qualité de musulmans et la mise en liberté de ses disciples, de son fils et de sa fille (qui put se marier). Et au fond du harem impérial, prenant jour sur les colonnades de dattiers dont elle avait fait incruster les troncs de teck et de cuivre, autour de l'étang d'étain massif de son jardin clos, le silence où se tut la Reine Mère Shaghab, d'origine grecque, elle aussi; c’est elle qui fit garder, durant toute une année, la tête de Hallâj au «trésor des têtes - du Palais, avant son envoi en Khurâsân; à elle doit remonter aussi, d'accord avec le shâhid Da'laj, le waqf permettant les visites pieuses au « maslib al-Hallâj ■, tout proche de la tombe de son frère, l’émir Gharîb al-Khâl.

Et au centre, suspendu et hors de soi, Hallâj lui-même, mani­festant à tous de sur le gibet cette nuit-là. dans une extase prolon­gée de son corps surpassant la mort, l’immortelle personnalité du Christ coranique, l’expressive effigie de l’« Esprit de Dieu », insai­sissable, « celui-là qu'ils n'ont pas tué, qu'ils n'ont pas crucifié... » (Cor. IV, 156); selon la riposte qui cingla dans l'obscurité le mu’tazilite A.H. Balkhî, et sera reprise, non sans choix, par Abû Hâmid Ghazâlî.

Plusieurs eurent des visions de guerre sainte : entre autres Zâhir Sarakhsi qui le vit passer dans une rue de Bagdad, à cheval; le visage voilé; chevalier tenant en main sa lance. Et Shâkir put assister, à Tâlaqân, à une insurrection pour la Justice; avant de rentrer à Bagdad, pour se faire tuer comme son ami.

Cette courbe de vie, que nous venons d’esquisser, avec les nœuds essentiels de ses péripéties dramatiques, jusqu'à la mort, nous pouvons en dresser un résumé schématique en recourant aux procédés graphiques de Galton et de Poyer. Déjà la vie familiale de Hallâj au foyer trois fois déplacé, d'Ahwâz, Wâsit, Basra, à Bagdad, monte droit, sans incurvation, avec la fidélité indémentie de sa femme unique et de ses quatre enfants, Sulaymân, Mansûr, Hamd, et une fille. Quant à sa vocation religieuse, ses trois pèlerinages, qui en sont les points de condensation, forment ali­gnement avec ses deux grands voyages apostoliques, et préparent la grande prédication bagdadienne, suivie des deux procès (avec le long entre-deux en prison) et du martyre. Des trois défaillances apparentes, le rejet du froc, après le premier pèlerinage, et la fuite à Suse (avant le premier procès) sont clairement axés sur sa ligne de vie, « ne dévient pas » dans sa passion pour l'unité et pour l’Un ; quant au cri anticipé révélant, bien au-dessus de tous les balbutie­ments sublimes de Bayézid Bistamî, l'union, (Ana'l Haqq). Suhrawardi d'Alep, suivi en cela par Nasir Tûsî, a admirablement montré qu’en le criant, Hallâj donnait volontairement à autrui « dispense plénière de verser son sang » ; et que ce cri attestait que Dieu avait exaucé sa fameuse prière : « Entre moi et Toi, il traîne un “ c’est moi ” qui me tourmente — ah, enlève, par Ton “ c’est Moi ”, mon “c’est moi ” (’inniyî) hors d’entre nous deux. »

Nous savons, par Bêrûnî, qu’il y eut des musulmans pour qui le jour de la mort de Hallâj se projeta de suite en ère sur le cycle liturgique; ils notèrent la durée de sa prison (huit ans, sept mois, huit jours), la valeur alphabétique (Maryam = Fâtir) de l'année 290/902 qui marqua sa vocation définitive; et la valeur (Tâ sîn) de l’année 309/922 qui marqua sa mort, et qui est le nombre corani­que du sommeil extatique des Sept Dormants. Mais s’il est vrai qu’un homme saint («tel qu’en lui-même enfin l’éternité le change») n’acquiert son visage définitif que posthume, nous de­vons essayer maintenant de résumer les étapes lentes et difficiles de la réincorporation graduelle, dans la conscience religieuse de la Communauté musulmane, de cet homme passionné de l’Unique, qui avait voulu mourir anathème pour que l’islam se consomme dans l’unité adoratrice de tous les hommes; réincorporation moins avancée que celle de Jeanne d’Arc à la France; réincorporation plus avancée que celle du Fils de Marie en Israël; dont elle est, toutes proportions gardées, la préfigure.

Les musulmans n’attribuent de validité qu'au témoignage oral, et ils se représentent précisément l’histoire vraie de leur Commu­nauté comme un tissu, où les chaînes parallèles et séparées des générations succédant aux Compagnons du prophète, sont traver­sées par des trames continues et perdurables, les lignes de trans­mission (isnûd) de la Tradition prophétique, dont ses témoins transmetteurs constituent de génération en génération les nœuds numérotés (depuis Muhammad). En particulier, la vie islamique d’une ville est caractérisée par la succession chronologique des témoins de la Tradition qui y enseignèrent. Nous pouvons donc figurer la « ré incorporation » graduelle de Hallâj dans la conscience que les cités de la Communauté islamique ont prise de son unité, par les lignes de transmission, de génération à génération, de ses maximes et de ses exemples; transmission que son excommunica­tion et son exécution rendaient spécifiquement interdite. Ces li­gnes, maintenues aux premiers siècles, non sans péril de mort, et enregistrées dans des textes, dessinent, pour Hallâj une survie culturelle profonde; bien plus réelle, socialement, que la célébrité littéraire de types comme « Alexandre» ou «César» (cf. Gundolf) chez nous, car le simple attrait esthétique n'y est presque pas intervenu (sauf chez Qannâd, Ma'arrî et Zahâwî).

La première ligne de transmission est celle de la sentence juridi­que d’Ibn Surayj; ce grand canoniste shâfi'ite avait fait avorter le premier procès de Hallâj par un déclinatoire de compétence, dé­clarant que son inspiration mystique (ilhàm) échappait à la juridic­tion des cadis à qui le discernement des esprits faisait défaut. Cette sentence fut enseignée au waqf Da'laj à Bagdad, et fidèlement transmise, de disciple en disciple, d’Ibn al-Haddâd (qui recueillit l'oraison hallagienne de la dernière veillée) à A.B. Quaffâl et à d’autres, notamment à l'historien Khatîb et à son ami (et protec­teur) le vizir Ibn al-Muslima, qui, en 437/1046, le jour même de son investiture par le khalife Qâyim, vint, à la tête du cortège officiel le conduisant à la mosquée-cathédrale de Mansùr, s'arrêter pour prier sur le tertre du gibet de Hallâj ; ex-shahid au tribunal canonique, le vizir attestait ainsi l’innocence d'un martyr dont ses confrères, cent vingt-quatre ans plus tôt, avaient réclamé la tête. Cette sentence d'ibn Surayj est encore classique aujourd'hui, pour la majorité, dans le rite shâfi’ite.

Une seconde ligne est celle des auteurs de «commentaires- (tafsîr) du Coran, qui acceptèrent d’expliquer des versets sacrés au moyen de maximes mystiques de Hallâj; depuis son ami Ibn 'Atâ, traditionniste, maître admis par les hanbalites, qui protesta publi­quement en faveur de Hallâj. infirmant ainsi l'unanimité fijma) que ses adversaires essayaient d'obtenir contre lui, parmi tous les ulémas musulmans du temps. Après Ibn'Atâ, cette «ligne - passe par Sulami, dont le tafsîr admis à Nishapur, fut mis au programme de l'université Nizamiya de Bagdad (Ibr. Nufaylî), et réédité par R. Baqli, qui se réimprime encore aux Indes; Hallâj y est discrè­tement désigne par son préSom seul, « al-Husayn .

Une troisième ligne formée à Bagdad, est celle des sùfis, amis secrets de Hallâj ; ils n'avouaient le vénérer qu'à des initiés, car ils le considéraient comme un saint damné par amour (damné sine die. selon les rêves d'Abbâsa Tûsi et d'Azâz; et dont la damnation durait encore, après trois cents ans, quand Ibn 'Arabi, et Shâdhili


PERSPECTIVE TRANSHISTORIQUE SUR LA VIE DE HALLÂJ s’aviseront de prier pour son pardon), et considéraient que « la Loi muhammadienne met à mort les saints», que la victime et le bourreau sont musulmans à égalité. Après Shiblî, Nasrabadhî, Ibn Abî’l-Khayr et Shaydhala, A.T. Silafî s’enhardit, publie \a.Hikâya de Sharwânî (où Shihâb Tûsî relèvera le miracle du sang); Khâjé Abdallah Ansari à Hérat, Yf. Hamadhanî et Hakîm Sana’î prépa­rent l’éclosion de l’épopée hallagienne du grand poète iranien ’Attâr.

’Attâr, dans sa grande épopée hallagienne, donne sa forme définitive à la sainteté musulmane de Hallâj, consommée dans un sacrifice guerrier, militant et mâle; Ibn Abî’l-Khayr avait déjà dit «mourir sur le gibet de Hallâj est le privilège des héros» ; ’Attâr montre avec quelle véhémence passionnée cet amant audacieux a «joué sa tête » pour conquérir le joyau de la Beauté divine de haute lutte; ce combattant héroïque que Dieu finit par tuer en combat singulier, à la guerre sainte, s’enduit le visage avec le sang qui goutte de ses membres mutilés, pour ne pas sembler pâlir. Et le cri suprême «je suis la Vérité», qu’il avait proféré, se répand hors de lui avec son sang qui coule, ruisselle sur le monde où tous les éléments libérés se déchaînent et entrent en tumulte, déchire le voile des idées, ressuscite les morts, et « carde l’univers » comme à la venue du Jugement dernier (cf. Cor. CI, 4).

Tel est le type de sainteté qu’exaltèrent alors, dans le peuple turc nouvellement converti, les poèmes de Yesewî, puis de Nesîmî, et la ritualisation symbolique du « gibet de Mansûr Hallâj » dans l’initiation à l’ordre des Bektâshis, diffusée chez les janissaires ottomans. En poésie turque, Hallâj reste le «saint par excellence», le crucifié (ou pendu) au visage incliné «comme la rose qui se penche». (Qasîda de Lâmi’î, dédiée à Soliman le Grand.) ’Attâr est aussi, avec ’A.Q. Hamadhanî, à l’origine de la dévotion des poètes de l’Iran, et des mystiques de l’Inde, pour Hallâj ; du sultan Hy. Bayqarâ, de Hérat, qui fit peindre toute sa vie par le célèbre Behzâd, et du sultan Husayn Shâh, du Bengale, qui autorisa le culte hallagien de « Satya Pir», au mystique Sèrmèd Qashanî, qui se fit martyriser comme lui, à Delhi, sous Aurengzeb. Cette lignée de témoignages passionnés, prise dans le dilemme sainteté-dam­nation, d'un romantisme intense, a engendré des légendes popu­laires sur le témoignage du sang, sur la fécondité des cendres de

DÍ WAV

Haliâj, jetées au fleuve, sanctifiant les novices qui s’y désaltèrent, faisant concevoir les vierges qui en boivent (la sœur de Haliâj, chez les kurdes yézidis, pour qui Haliâj est le saint du Jugement; l’origine des clans Qaraqirghiz, telle qu’elle se conte à Osh; la naissance du poète hallagien Nesîmî, d’Alep, telle qu’on la chante à Bukhara; Satya Pir en Bengale, Siti Jenar à Java). Déformation chamelle de cette vérité : que le sang des témoins est une semence spirituelle de confesseurs de la foi, qui assurent la résurgence perpétuelle du témoignage.

Úne quatrième ligne remonte à Ibn Khafîf, qui avait visité Haliâj en sa dernière prison; rentré à Shiraz, il constitua un dossier du pour et du contre, sur Haliâj, qu'lbn Bâkûyé et Mas’ûd Sijzî, grâce à une présentation apparemment réticente, réussirent à publier, et à faire transmettre régulièrement parmi les traditionnistes musul­mans (notamment les hanbalites de Damas) et parmi les historiens de l’islam (notamment Khatîb et Dhahabî). Par ailleurs, les disci­ples sûfîs d’Ibn Khafîf, dès Murshidî, vénéraient en secret Haliâj; ce qui aboutit, au XIIIe siècle, dans les milieux shiraziens, à la formulation d’un dhikr hallagien spécial (entraînement devenant machinal à l’extase artificielle) transmis de couvent à couvent, dans toutes les initiations mystiques depuis Tawusî, ’Ujaymî et S.M. Zabidî jusqu'aux Senoussis actuels.

Les premières écoles de théologiens qui posèrent explicitement le problème de la réincorporation possible de Haliâj à l'islam furent : les Sâlimiyas de Basra, qui admirent la légitimité de sa condamnation pour révélation (dans l'ivresse de l'extase) du secret même du Tawhîd islamique. Vint ensuite l’école ash'arite (dès Qushayri) qui posa qu’en faisant cela Haliâj s'était exprimé en pleine lucidité, s’était damné volontairement, attestant, par sa mélancolie d’amant délaissé, que la Déité est inaccessible; comme Satan, son modèle (Ahmad Ghazâlî). Ou que l’Etre du Créateur et l’être des créatures ne font qu’un, ce qui rend aussi dérisoire son dialogue d’amour avec Dieu (école Wujûdiya: Jbn ’Arabî).

Quelques années après sa mort, des philosophes musulmans indépendants, A. Z. Balkhî, A. S. Mantiqî, et Abû Hayyân Tawhîdî dégagèrent de la mystique hallagienne des percées méta­physiques valables; et A. H. Daylamî publia ses grands textes sur

PERSPECTIVE TRANSHISTORIQUE SUR LA VIE DE HALLÀJ l’Essentiel Désir (qui est Dieu), signala l'originalité de cette notion de 'Ishq, voisine, dit-il, de la philosophie présocratique (Empédo- cle, Héraclite), qui «lui valut un grand nombre de disciples». Après Ibn Sina, qui utilisa aussi la notion de Ishq, deux autres philosophes musulmans. Suhrawardî d’Alep, et Ibn Sab’în de Murcie (suivi par A. H. Shushtari) virent dans Hallâj un saint intercesseur, non contradictoire, du monothéisme primitif et uni­versel, supramusulman; à leur suite, méditant ses prières d'of­frande pour ses ennemis, pour tous les hommes, plusieurs virent en Hallâj un Pôle spirituel attirant l’islam vers l’unité finale: Najm Razî. N. Kîshî (professeur à la Nizamiya), Jalâl Rûmî, le philoso­phe Nasîr Tûsî, le vizir Rashid al-Dîn; tous contemporains de la désastreuse invasion mongole, et du sac de Bagdad. Le sac de Bagdad, pressenti par les shi’ites ismaéliens (cf. Lettre de Hasan Sabbah) comme une double vengeance divine, contre les ’Abbâs- sides, persécuteurs des Alides et bourreaux de Hallâj (un muqtadâ, lui, un témoin «donné », prédicateur du secret de l’année 290, où les fatimides avaient fondé leur Refuge à Ikjan, près de Sétif, sous le signe des Sept Dormants d’Éphèse : les sept piliers y sont encore en place; et mis à mort en l'année 309, celle de la «sortie de la Caverne d’Éphèse pour le Mahdî fâtimite instauré à Mahdiya), amena aussi les shi’ites duodecimals à associer Hallâj comme un annonciateur du Mahdî avec leurs imams, rejoignant ainsi leurs philosophes (Ishkavérî, Beha ’Amilî, Nûr Shûshtarî, Sadr Shirazî, Amir Damad); E. Cerulli (avec Arcadi Hannibal) a recueilli à Recht un ta’ziyé moderne sur Hallâj; cet Husayn substitué à Hu- sayn, à la « grande victime » offerte par Abraham sous la figure du bélier.

Enfin, il y eut à chaque époque, de façon isolée et sporadique, des musulmans convaincus que le supplice de Hallâj avait consommé sa sainteté par une grâce de salut, applicable à toute la Communauté et qu’il leur fallait la prêcher aux autres: Shâkir-b- Ahmad, auteur probable des Akhbar al-Hallâj, Fâris, Ibn ’Aqîl, ’A.Q. Kîlânî, le saint patron hanbalite de Bagdad, Rûzbehan Baqlî, le fervent commentateur de l’œuvre hallagienne; Fakhr Fârisî (l'adversaire de saint François d’Assise à Damiette devant Malik Kamil), certains shadhiliya, Mursî, Qûsî, Ghamrî, Sha’râwi, l'école des shuhûdiya, Semnânî; Makhdûmé Jahâniyân,


Gîsudirâz, A. Serhindî, Bêdil, tous cinq influents dans l'Inde; et même l’égyptien Khafâjî1.

En pays arabe, une légende populaire (Qissa), diffusée dès le XIIIe siècle en Syrie et en Égypte par l'ordre éphémère des 'Ada- wiya, prêchée alors à Damas et à La Mecque par le hanbalite Izz Ghânim Maqdisi, chantée à l’Albaycin de Grenade au XIVe siècle (Ibn Sîd Bono) perpétue humblement cette conviction. Hallâj est invoqué dans la dévotion privée, surtout en pays turc; notamment pour faire cesser les pleurs des petits enfants. Le cénotaphe qui lui a été érigé dès le XIe siècle à Bagdad est visité principalement par des hindous.

La flûte principale des concerts spirituels des Mewlewis, en Anatolie, nèy-è-Mansûr, lui est dédiée.

Dans les Futuwwetnamé, livres corporatifs initiatiques retouchés au XIVe siècle, d'origine selmanienne, Hallâj prit place, sous le nom de Mansûr, comme patron des cardeurs; qui l’invoquent encore aujourd'hui en pays turc [6] [7]. Où le • gibet de Mansûr» est le rite d'initiation des Qyzylbash; et des Bektashis (issus des Yese- wiya) : surtout en Albanie. Actuellement, quatre centres hallagiens subsistent: Osh (en Kirghizie); Maij Bhandar (Chittagong) et Shureshwara (Faridpur) en Pakistan oriental; chez les Ghudf (en Mauritanie).

Dans son Jiïwid Ncime, le poète philosophe Iqbâl (m. 1938). l’éponyme du Pakistan, a célébré, sous forme prométhéenne para­doxale et nietzschéenne, l’accès de Hallâj à la Suprême Personna­lité, en se damnant par amour. Hâfiz, le célèbre poète iranien, qui admirait en Hallâj - l'amoureux que la croix a tant attaché à son désir, lui devenant une telle consolation qu'il ne s'en détachera plus» a écrit aussi «jamais ne mourra celui-là dont le cœur vit de désir». La survie posthume de Hallâj en islam témoigne assez que Ide façon positive, l'amour crucifié est vie et résurrection. Hallâj professait qu’un seul coup d’œil amoureux de Dieu vers cette terre, et il y en aurait «trois par vingt minutes», attire plus près de Lui l’esprit d'un ami d’entre Ses amis ; que par cela même. Il élève à la place ainsi devenue vacante, un de Ses intimes, et fait miséricorde à soixante-dix mille de ceux qui professent de l’amitié pour l’ami qu'il a regardé en premier (Riw. 27). Sans insister sur l'aspect < apotropéen » de cet enchaînement d'assomptions, redisons-le, c’est par l’amitié sainte nouée entre des personnes déterminées, prédestinées, que se construit l’étemelle Communauté: pour qu'y apparaissent, modalisées en toute beauté et vérité, projetées des lignes de nos vies sur le cycle liturgique fondamental, les diverses formes d’intimité divinatrice réalisées dans le «grand dérange­ment» de nos souffrances et de nos œuvres — en union avec la volonté créatrice.

Il y aura une apparition divine axiale autour de laquelle clivera l’humanité comme un cristal selon ses axes: celle du Guide des croyants militants, celle du Juge du dernier jugement (en termes d’islam, du Qâyim, du Malik yawm al-dfn); suivant le hadîth de Shâfi’î («pas de Mahdî, si ce n’est Jésus»), Hallâj professe que Jésus sera aussi ce Juge ’, souverainement, qu’il édictera la Loi définitive en une irradiation divine, avec double intronisation, terrestre et céleste (Riw. 23).

De telles âmes amoureuses, qui ont reçu vocation de prier et souffrir pour tous (cf. la prière musulmane des abdâl, du'â bi'l salâh, inspirée par Khadir-Elias), continuent de grandir, et de faire grandir, en intercédant, après leur mort. Ni l’échec, ni la mort ne flétrissent pour toujours le bon vouloir inachevé d’âmes immortel­les, et l’avortement prétendu de leur passé défleuri ne les prive pas de pouvoir refleurir et fructifier enfin, chez les autres comme chez nous-mêmes. Notre finalité est plus que notre origine, Hallâj l'avait déjà remarqué (Sh. 177 : « Quoi de meilleur, l'origine, ou la fin? puisqu'elles ne confluent point, comment choisir entre elles deux? La fin n’est pas saveur, de préférence, mais réalisation»; Sh. 175 : « Ô mon Dieu, s’il me vient de la tristesse à considérer la préétemité, combien me console le Témoin de la Fin» = l'Esprit

1 Mais il paraît jumeler avec Jésus un mahdî mystique.


DÍWÁN

de sainteté); et Ibn ’Arabi a constate, sous forme paradoxale, en ses tajalliyàt, que nos prières ravivées par nos vœux, peuvent parfaire les œuvres abandonnées, l’immortalité inachevée de nos anciens, tout autant que celle de nos contemporains.

« Hallâj a réalisé le mythe du Calvaire . disait à une chrétienne, non sans ironie, un homme d’état turc. Mahmoud Mokhtar Katir- joglu, pour qui, comme pour la majorité de l'opinion musulmane, Jésus n'a pas pu souffrir, ni mourir en croix. Mais déjà, pour le chrétien, n'est-ce pas encore un mythe que le Calvaire, tant qu'il n'y devient pas, par la compassion, un assistant, un participant, un substitué.

Louis Massignon.


QASAI’D


labbayka, labbayka!... ma’nâ’î

[l’invocation du pèlerin
au seuil du territoire sacré]

(1) Me voici, me voici! ô mon secret, et ma confidence! Me voici, me voici ! ô mon but, et mon sens ! (2) Je T’appelle, ... non, c’est Toi qui m'appelles à Toi! Comment T’aurais-je invoqué « c’est Toi » (Cor. I, 4), si Tu ne m’avais susurré « c’est Moi »? (3) Ô essence de l'essence de mon existence, ô terme de mon dessein, ô Toi mon élocution, et mes énonciations, et mes balbutie­ments! (4) Ô tout de mon tout, ô mon ouïe et ma vue, ô ma totalité, ma composition et mes parts ! (5) Ô tout de mon tout, mais le tout d'un tout est une énigme, et c’est le tout de mon tout que j’obscurcis en voulant l'exprimer! (6) O Toi en qui s’était sus­pendu mon esprit, déjà mourant d'extase. Te voici devenu son gage dans ma détresse ! (7) Je pleure ma peine, sevré de ma patrie, par obéissance, et mes ennemis prennent part à mes lamenta­tions. (8) M'approché-je, que ma crainte m'éloigne, et je tremble d'un désir qui tient à fond mes entrailles. (9) Que ferai-je, avec cet Amant dont je suis épris, mon Seigneur! ma maladie a lassé mes médecins. (10) On me dit: « Guéris-t'en par Lui!» Mais je dis: «■Se guérit-on d'un mal par ce mai?» (11) Mon amour pour mon Seigneur m’a miné et consumé, comment me plaindrais-je à mon Seigneur de mon Seigneur? (12) Certes, je l'entrevois, et mon cœur Le connaît, mais rien ne saurait l'exprimer que mes clins d'œil. ( 13) Ah ! malheur à mon esprit à cause de mon esprit, hélas pour moi à cause de moi, je suis l'origine même de mon infortu­ne ! (14) Comme un naufragé dont seuls les doigts surnagent pour appeler à l’aide, en vaste mer. (15) Nul ne sait ce qui m’est advenu, sinon Celui qui s’est infondu dans mon cœur. (16) Ce­lui-là sait bien quel mal m'a atteint, et de Son vouloir il dépend que


DÎWÂN

je meure et revive' (17) Ó suprême demande, et espoir, ô mon Hôte, ô vie de mon esprit, ô ma foi et ma part d'ici-bas! (18) Dis-moi : •• Je fai racheté . ô mon ouie. ô ma vue ! Jusqu'où tant de délai, dans mon éloignement, si loin .’ (19) Quoique Tu Te caches à mes deux yeux dans l'invisible, mon cœur observe Ton lever, dans la distance, de loin.

commi M AIR I . Sur l'ensemble. voir P III. >0 5’ Celte pièce a fori e !' admira­tion d'un des plus violents adversaires de Huilât, Ibn a! Jasvzi. Le vers 2. tres past alien d'allure. a etc lommente par bukhr Fiïrisi. en sa Salvvat al-musàtir tins Wiheddm 1828. f 142 b) Le saint, immobilise par sa fonction d'obser- sarue. est pointant debout, dresse dans le monde l supérieur) du temoii;nai;e. du début a la fin. il lui arrive d'entrer dans des étals ambivalents. pris entre les des ou s traditionnels qu' il desire luci omphri, et d'autres devoir l supérieurs l dont l'attrait P entraîne, doit l'allusion de Huilât J1' T appelle... " Le sers 14 réfère u Cor WIV . 40 — Le mot ma'na. ■ tern (v. I ) est pris au sens fort, du shi isme cslrcmiste signification divine . Dieu en tant qu esphcation finale de toute those Piece irnitee par Abulburukàt Umasvi (Shattanasvfi. hahja. 215).

Rime al if. mètre : basît.


lil'ilmi ahlun... tarâtîbu

[réponse sur la réalité de la foi]

( I ) Pour la science, il y a des vocations; pour la foi, une progres­sion; et pour les sciences comme pour les savants, il y a des expériences; (2) La science, c'est donc deux sciences, celle qu'on rejette, et celle qu'on acquiert, et l'océan, c'est deux mers, l’une maniable, l'autre dangereuse; (3) et le temps, c’est deux jours, l'un néfaste, l'autre favorable; et le genre humain, c'est deux destins, l'un comblé, l'autre dépouillé. (4) Recueille donc en ton cœur ce que te dit un témoin probe, et considère, grâce à ton entendement, car le discernement est un don. (5) Pour moi. j'ai escaladé une cime sans avoir à poser le pied, cime dont la montée réserve, à d'autres qu'à moi, des périls. (6) Et j'ai traversé un océan, sans que mon pied le sonde; c'est mon esprit qui l'a traversé, c'est mon cœur qui l'a savouré. (7) Car son fond de gravier est de perle, inaccessible à nos mains, mais que la prise de nos pensées peut ravir. (8) Je m'en suis abreuvé sans bouche ouvrir, or c'est une eau (familière) dont les bouches ont déjà bu; (9) car mon Esprit, dès l'origine, en a eu soif, lorsque mon corps y trempa, avant que d'etre façonné. ( 10) Pour moi. l'orphe-

KA1MLNTAIRL Sur l'ensemble. i<»/r P III. 355-356. 362 l.e sers 3 a ete imite pur (Jabus. roi de Jurfan. dans une rá'iya celebre (W Jones. Poes. as. comm.. 1777. p. 278. if aussi Makki. Qût. /. 159). et les sers 6 et 10 par Ibn al-Fàrid (Khamriya, v. 30: Nazm al sulûk, v. 288-289).

H \ a plusieurs mots i oraniques : fitya ¡Cor. XVIII. 12: v. 12). ghirbîb iCor. A.Y.W. 25 . i. I3i

Rime : bà. mètre : ba.sit.


DÎWÂN

lin, j'ai un Père, en qui j’ai recours, et mon cœur, tant que ma vie durera, souffrira de ne pouvoir Le voir. (Il) Aveugle, je suis voyant; simple d'esprit, je suis sagace; et ces expressions mien­nes, si j'y tiens, peuvent s’intervertir. (12) Les preux (= Ahl al Kahf) savent ce que je sais, ce sont mes compagnons, car celui qui est doué de vertus s'associe des compagnons. ( 13) Leurs âmes ont été présentées les unes aux autres à l'origine (= au covenant) de l'humanité, puis elles ont lui, tomme le soleil ; alors que le temps, comme un sentier, s'enfonçait dans l’ombre de la montagne (= la caverne).


yâ mawdi'al nâziri... khâtiri

[réponse à shiblf]

(1)0 point de vue. d’où part mon regard; ô lieu d'insertion (en moi) de mon inspiration! (2) Ô ensemble du tout, dont le tout m'est plus cher que tout ou partie de moi-même ! (3) On voudrait que Tu compatisses à celui dont le cœur est saisi aux deux serres de l'oiseau; (4) épris, cperdu, assauvagi, il fuit d'un désert à un autre ; (5) il erre sans savoir où. et ses idées errent, comme la lueur tracée d'un éclair. (6) ou comme la brève conjecture, ténue, que l'on projette dans l'ombre du futur; (7) dans le flux de l'océan de la pensée, où elle est entraînée, par des grâces, de la toute-puis­sance divine

COMME.NTAIRh. Baqli l'a traduite, à la fin d'une réponse à Shibli sur la structure mentale, dans ses Shathiyât Ipubl. ap. £. 8B*. n" /68. teste arabe ap. ms. Kazan, p. 78). Jildaki v a vu une description alchimique. Le sixième hémistiche a etc repris par Ahmad Ibn Shuhavd.

Au vers 7. allusion à Cor. XXIV. 40.

Rime : ni. mètre : sari'.

sukûtun. thumma samtun.. ramsu

[sur les étapes,
dans la voie de l’ascèse]

(1) C’est le recueillement, puis le silence; puis l'aphasie et la connaissance; puis la découverte; puis la mise à nu. (2) Et c’est l’argile, puis le feu ; puis la clarté et le froid ; puis l’ombre ; puis le soleil. (3) Et c’est la rocaille, puis la plaine; puis le désert, et le fleuve; puis la crue; puis le dessèchement (passage de la mer Rouge). (4) Et c’est l’ivresse, puis le dégrisement; puis le désir, et l’approche; puis la jonction; puis la joie. (5) Et c'est l'étreinte, puis la détente; puis la disparition et la séparation; puis l’union; puis la calcination. (6) Et c’est la transe, puis le rappel; puis ¡’attraction et la conformation; puis l’apparition (divine); puis l’investiture (de l'élection). (7) Phrases (que tout cela), accessibles à ceux-là seuls pour qui tout ce bas monde ne vaut pas plus qu’un sou. (8) Et voix de derrière la porte, mais l’on sait que les conver­sations des hommes, dès que l’on se rapproche, s’assourdissent en un murmure. (9) Et la dernière idée qui se présente au fidèle, en arrivant à la barrière, c’est « mon lot > et ■■ mon moi •>. (10) Car les créatures sont serves de leurs inclinations, et la vérité, sur Dieu, quand on Le constate, c'est [qu’il est] saint[VIII]

man sârarûhu fa abdâ... ghashshâshâ

[critique sarcastique
de la discipline de l'arcane]

(I) Qui a reçu d’eux confidence, et puis a publié tout ce qu’ils tenaient caché, et n'a pas continué à revenir chez eux, n’est qu’un trompeur. (2) Si les âmes annonçaient ce qu'elles savent de secret, et tout ce qui a troublé leur raison, quelle perte! (3) Quand quelqu’un viole le secret de son Maître et Seigneur, on ne lui confie plus, sa vie durant, de secrets, (4) mais on le punit à cause de ses négligences, et on l'exile, hors de la familiarité, dans l'isolement. (5) Ils s’écartent de lui, messéant à leur voisinage, du moment qu’ils l’ont vu « exhumant » des secrets. (6) Celui à qui on a découvert un secret et le colporte, celui-là, comme moi, passe pour déséquilibré. (7) Eux, ce sont les initiés, faits pour la disci­pline de ('arcane, ils ne souffrent pas qu’on manque de pudeur. (8) Us ne tolèrent pas d’indiscrets dans leurs réunions, et ils n’aiment pas. là où il y a un voile, qu'on le dérange. (9) Ils n’admettent pas d'invité, étant jaloux de leur mystère; loin de vous, leur gloire, loin de vos actes! (10) Montrez-leur donc, chez eux, désormais et à toujours, pour eux, de la révérence.

COMMENTAIRE. C'est un des plus anciens témoignages à ce sujet Icf. Abû ' l-'Atâ- hiya, 185). et Ibn al-Jaw;i l'a critiquée pour cela. Sulami fvui Abu Ahmad b. Isa. Zakariyâ al-Hashasi. Muhammad b. Husayn al- Alawi m. 28II8V4; cf. P. H. J6I. n. 2) n'en nomme pas l'auteur (ba'dhum), dont Ibn 'Arabi (Muh , //. 3/6) fait un disciple de Dhû '!-Nûn; les autres sources la restituent a Hallâj : Ibn al-Sâ'i la lui fait dire en extase de lévitation.

Rime : shin, mètre : basit.

an’â ilaykâ nufûsan... qidami

[chant de mort]

(symbole du regret après l'extase)

( I ) Je Te crie : deuil ! pour les Ames, dont le témoin (temporaire = moi-même) s'en va, dans l'au-delà du lieu, rejoindre le Témoin même de l'Étemel! (2) Je Te crie: deuil! pour les Cœurs, si longtemps arrosés, en vain, des nuées de la révélation, où s'amasse en océans la sagesse ! (3) Je Te crie : deuil ! pour la Parole de Dieu, depuis le temps qu'elle se meurt, son souvenir n'est plus que néant dans notre imagination ! (4) Je Te crie : deuil ! pour les Démonstra­tions (inspirées), devant qui cèdent tous les discours d'orateurs, en fait de dialectique. (5) Je Te crie: deuil! pour les Allusions convergentes insinuées par les intelligences; d'elles toutes rien ne subsiste (dans les livres) que des ruines. (6) Je Te crie : deuil ! au nom de Ton amour, pour les Vertus (var. : les Mœurs) de la troupe, de ceux dont les montures furent dressées à obéir. (7) Eux tous sont déjà passés, (traversant le désert, sans y laisser) ni puits ni trace, passés comme la tribu de Ad et la cité, regrettée d'eux, d'iram ! (8) Et derrière eux. la foule abandonnée divague à tâtons, plus aveugle que les bêtes, plus aveugle même qu'un troupeau de chamelles.

COMMl Nr AlRl- Sui l'ensemble. von P 1. 620 622 (Jannad en fait une eeuvie dt Nûri.          Sida mi (tafsir. n" 160) et Harass i. ttès formellement, et tous les autres,

la restituent a Halla/. le cadi Ibn al-Haddad atieste qu'il la récita la nuit qui preceda son supplice, pour commenter sa deimeie prieie (Akhb 2), cf P 111. 562. n y — Fakhi Fan si (nasl, 68 a) a commente ainsi le vers 2 ■■ Fe veritable dhikr ne se trouve que’ dans le c aui < onsume par la i eahsation de la proximité et de Fexpatricment ou plus rien ne demeure que les attestations du Seigneur

Rime : mim. mètre : basit.

ashâra lahzî bi'ayni. . hammi

[l’envol de l'âme]

( I ) Mon regard, avec l'œil de la science, a dégagé le pur secret de ma méditation; (2) une Lueur a jailli, dans ma conscience, plus ténue que toute conception saisissable. (3) et j'ai plongé sous la vague de la mer de ma réflexion, m’y glissant comme se glisse une flèche. (4) Mon cœur voltigeait, emplumé de désir, juché sur les ailes de mon dessein. (5) montant vers Celui que, si l'on m'inter­roge, je masque sous des énigmes, sans Le nommer. (6) Au terme (de l'envol), ayant outrepassé toute limite, j'errais dans les plaines de la Proximité, (7) et. regardant alors dans un miroir d'eau, je ne pus voir au-delà des traits de mon visage. (8) Je m'avançai, pour faire ma soumission, vers Lui. tenu en laisse au poing de ma capitulation; (9) et déjà l'amour avait gravé de Lui, dans mon cœur, au fer chaud du désir, quelle empreinte! (10) Et l'intuition de ma personnalité me déserta, et je devenais si proche (de Lui) que j’oubliai mon nom.

COMMENTAIRE. Un manuscrit de Taq. II.) en fait la conclusum d'un expose hallayien sur 1'infirâd. Le ternie /ethnique ~ Lâïh ■■ Iv. 2), repris par Harawi. a etc condamne par Ihn Tasmiya. minhâj al-sunna, 3. p. 93-96 (</ Ihn al-qayim. madàrij. 3. p. 333 sq. ) < omme hulúli i ■■ Lueur divine ■■). — Imitée ¡usque dans ses rimes par Ibn 'Arabi (Diw., p. 2).

Rime: mint, mètre: mukhalla' al-basïl.

iam yabqa baynî... burhânu

[la preuve dérive de la présence]

(I) [Désormais], il n’y a plus, entre moi et Dieu, d’explication (intermédiaire), ni démonstration, ni miracles, pour me convain­cre. (2) Voici l’explicitation transfigurante des feux divins flam­bant (en moi), chatoyant comme une perle irrécusable! (3) La preuve est à Lui, de Lui, vers Lui, en Lui, le Témoin même du Réel dans une révélation se formulant. (4) La preuve est à Lui, de Lui, en Lui et pour Lui; en vérité, c'est Lui que nous y avons trouvé, comme une science en sa démonstration. (5) Qu’on ne déduise plus le Créateur de Son œuvre créée, vous tous, êtres contingents, vous n’attestez que les temps. (6) C’est là mon exis­tence, ma confession et ma conviction, c'est là l'unification (di­vine) de ma profession de foi et de ma croyance. (7) Ainsi s'ex­priment ceux qu'il isole en Lui-méme, les douant des dons de la sagesse, au-dedans et en public. (8) Telle est l’existentialisation consumante de ceux qu’il extasie, fils de l'apparentement, mes compagnons, mes amis !

COMMENTAIRE P IIP 72. [Ibn Jahdam] la presente comme la conclusion d'une sentence de Hallâj sur la mission prophétique de Muhammad. ■■ sans laquelle la preuve [du monothéisme] n aurait pas etc administrée à tout l'univers. ou les infidèles auraient pu espérer être preserves de P enfer -. Elle implique chez Hallâj une seríame formation philosophique, car il enumere au cinquième hémistiche les quatre causes aristotéliciennes (P. Kraus).

Rime : nùn, mètre : basil.

al-’ishqu fî azali... abdáhu

(1) Le Désir, dans la prééternité des préétemités, est l’Absolu, — en Lui, à Lui, de Lui, Il apparaît, en Lui, 11 a paru; (2) Le Désir n’est pas contingent, puisqu’il est l'attribut d’entre les attributs pour celui qu’il a tué et qu’il ressuscite (3) Ses attributs sont de Lui, en Lui, non pas choses créées, le créateur d’une chose est celui qui projette ses choses (4) Quand II a déclenché le début, son Désir a projeté un attribut dans ce qui commençait, et le Désir y a fait chatoyer son chatoiement (5) Le Lam avec l’Alif adjoint s’est composé, tous deux ont ainsi prédestiné « Un» (6) Par la différen-

COMMENTAIRE. Ce texte poétique, qui appartient à la toute première période littéraire de Hallàj. est précédé, dans Daylami. de la prose suivante qu'il a introduite ainsi : - Quant à celui qui a approfondi la question de l'Amour en soi. et s'est séparé de ses maîtres et de ses contemporains en l'exposant. c’est Husayn-b-Mansùr. Et voici le texte : " Husayn-b-Mansùr Hallàj a dit : "le Désir est te feu de la Lumière du Feu Primordial, comme la prééternité se colore de toute nuance, le Désir manifeste tout attribut; son essence s'enflamme à son essence, ses attributs scintillent de ses attributs. Il se réalise, traversant toutes les traverses de la preéternité aux post-éternites; sa source est l'Hléité (huwiya) surgie de THeccéité (anniya); F intérieur du dehors de Son essence est la realite de T Etre. et l’extérieur de l'intérieur de Ses attributs est la Forme parfaite, qui atteste la totalité en perfection. " Et il recita a ce sujet. (Apres avoir donne le texte de notre qasida VIII bis. Daylami ajoute ) : -En cette theorie. Husayn-b- Mansùr s’est isolé de tous les autres maîtres en ce qu’il a montre que le Désir est lin d'entre les attributs (divins) essentiels, de façon absolue. Tandis que tous les autres maîtres placent T unification de l’amant et de l'aimé lorsque l’amour s'achève par T extinction de l'amant dans l'aime, sans recourir (comme Hallàj) au couple de termes lâhût-nâsût (nature divine, nature humaine)...

Le mot final sur les ■■ humbles ■■ ( adhillâ) vient de Cor. III. //9

Rime : alif. mètre : basit.


DÍWÁN

ciation, ils sont deux, par leur réunion, mais leur seule différence c'est celle du serviteur et de son Seigneur. (7) Telles sont les réalités, le feu du Désir les enflamme au Réel, qu'elles en soient proches ou lointaines (8) Elles s'amenuisent, perdant leurs forces, plus elles deviennent cperdues d'amour. — et les forts, à mesure qu’ils s'éprennent, se font humbles

I. Ce dernier sers est comme une ebaushe de la parabole du papillon s amenuisant dans le Feu où il est venu s'enflammer- (Tuur/.r/n. II. 4).

de ¡'Etre, et ¡'extérieur de / intérieur de Ses attributs est la Forme parfaite, qui atteste la totalité eu perfection. " - Fl il récita a ce sujet.. (Après avoir donné le /< iZ< </< notie qusula \ III bis. Das lamí a/uutt I F n . < tic tluotic Husasnh Mansur s < si tsol< ,/< tous It s aunes maîtres en < <■ </« il a moulu que le D< sir est un M'entre les attributs Idivins) essentiels, de façon absolue. Tandis que tous les autres maîtres placent l'unification de l'amant et de l'aime lorsque l'amour s o< lu i <• put I i stim non de ! amant dans I aime. sans t tl oio o u omim Huilai i au couple île termes làhût-nâsût Inature divine, nature humaine) Le mot final sur les humbles - fadhillà) vient de Cor. 111. //9.

Rime : alif. mètre : bash


'ajibtu minka wa minni

( 1 ) Je m’étonne, et de Toi, et de moi, ó vœu de mon désir ! (2) Tu m'avais rapproché de Toi, au point que j’ai cru que ton «c’est Moi» était le mien. (3) Puis Tu T’es éclipsé dans l’extase, tant, qu’en Toi Tu m’as dispensé de moi-même, (4) ô mon bonheur, en cette vie, ô mon repos dans ma sépulture! (5) 11 n’est plus pour moi, fors que Toi, de liesse, car Tu es ma crainte comme ma confiance, (6) dans les jardins de Tes emblèmes est embrassée toute science, (7) et si j'ai encore un désir, c'est Toi qui es tout ce désir!

COMMENTAIRE. P ///, /84 h.! première ébauche de cette píete est un distique anonsme donne par Daylami (Atf, 48 b; apres la qasida VIH bis). vers T’ r vert lJr- waqqaftani fi maqâmin ■■ + vert 2b (ou hasabtu remplace zanantu). C'est la < ont lusion de remarques tur le voile qui tepare le C reateur de sa création, la recension primitive est donnée par K et Ibn Zayhdun, et ton amplification II.) semble bien postérieure. L'hémistiche /b derive de Fadl Raqqâshi ledit du Diwân d'Abu Nutvâs. .< ! ) ; /' hémistiche 2b a été repris par Nâbulsi (Kasht i et Ben'Alloua (Minah. J46). Imitée par Abu Madyan (tawaid sharita).

Rime : nûn. mètre : mujtathth.

uqtulûnî. yâ thiqâtî... marnât''

<■ tuez-moi donc,
mes féaux camarades... »

( I ) Tuez-moi donc, mes féaux camarades, c'est dans mon meurtre qu'est ma Vie! (2) Ma mort, c’est de (sur)vivre, et ma Vie, c'est de mourir! (3) Je sens que l’abolition de mon être est le plus noble don à me faire, (4) et ma survie tel que je suis le pire des torts. (5) Ma vie a dégoûté mon âme, parmi ces ruines croulantes. (6) tuez-moi donc, et brûlez-moi, dans ces os périssables; (7) ensuite, quand vous passerez près de mes restes, parmi les tombes aban­données, (8) vous trouverez le secret de mon Ami, dans les replis des [âmes] survivantes. (9) Je suis un patriarche, et du plus haut rang, (10) puis je me suis fait petit enfant, dans des girons de nourrices, (11) tout en reposant sous la dalle d’une tombe, dans des terres salines. (12) Ma mère a enfanté son père, voilà bien une merveille mienne, (13) et mes filles, que j’avais engendrées, sont devenues mes sœurs. ( 14) sans que ce soit dans l’ordre du temps, ni par le fait des adultères. [(15) Réunissez donc ensemble mes parcelles, les prélevant de corps cristallins, (16) d’air, de feu et d’eau pure, (17) ensemencez du tout une terre non irriguée. (18) puis irriguez-la en faisant circuler les coupes (19) des servantes verseuses, et des ruisseaux courants; (20) alors, au bout de sept jours, une plante parfaite germera.]

COMMENTAIRE. PI. 650-651 el NI. 370. Les deux premiers vers. d'une pure et authentique véhémence, sont a rétablir dans le texte primai] des Akhbâr al-Hallâj, nu 1, p. 8 (du texte arabe), à la ligne /9 (apres mâ turid), selon les témoignages convergents du ms. Pertsch 14138. du ms. M. de Taq. In" 5). de Semnani (ms. Oxf. 1446. f. 60a). de Kishi (ap. Nikpay. ms. P. afp. 61, f 424b • cf. Ibn Hindùshàh. p. 200). de S. Farghâni (muntahâ. 2. 30. cf. 1. 356), et de Maybu- dhi (fawâtih). Nikpay observe que Shams Kishi (m. 694/1294) -a fait une risâla en persan commentant la prière de Mansur Hallaj. Dieu l'ait en Sa miséricorde. qu'il a récitée lors de sa mise a mort — risâla qui est de toute beauté (der ghàyaté khôbi) ; et il (y) rapporte ces deu\ vers Idô bayt = quatrain) qui sont dans les Ash'âré Mansûr Hallâj..

Le calligraphe turc Hâjj Mehmet Nùr a exécuté, à la demande du Pr Burhan Toprak. une très belle inscription du premier vers (a Findikli).

Le mouvement stylise des vers 1-2 se retrouve dans Makki (Qùt, 2. 76-77)', il peut s'être inspiré d'un poème profane de Mu'ammal-b-Jamil Ibn Abi Hafsa (Sarrâj. masâri', 244, cf. Abu Nuwâs, Dîw. 33). Rùmi les a repris dans son Methnewi lliv. 3. 177. v. 10-12 : cf. Sari 'Abdallah, jassâhir. t. V. 433. 453). Fakhr Fârisi tjamha, 48b) remarque : «on a dit : ils mettent a prix les sangs. je réponds : là est la générosité, mon sang leur est licite, tant qu' il reste du sang dans mes veines , et c'est pourquoi il (= Hallâj) dit : " Uqtulûnî... ” »

Le vers 12 - ma mère a enfanté son père -. dévie ici dans un sens alchimique. est fort digne d'attention. H est peut-être de Hallâj, dans son sens primitif ismaêlien. ou ma mère ■■ (quand le sujet parlant porte le prénom de Husayn) c'est Fatima, la fille préférée du Prophète, dont le laqab Umm abihâ i KM, 158) ( littéralement - mère de son père ■■ ) n'est pas seulement une trace du matronymat (Robertson Smith), mais une prémonition que le Mahdi fâtimile s'appellera ■ Muhammad . et que le Juge du Jugement dernier rendra d'abord justice a Fatima mei onnue et douloureuse (cj. 'aqida halabiya des Nusayns. ms. Nieger. 23a). Ce vers 12 est commenté et amplifié par bien des sunnites mystiques. Ibn {Ja.syi. Ibn al-'Arif, Minyari(ap. Serhindi. t. 3. 48-49), Ibn Arabi. Sadr (Junau i. Mu'ayvad Janadi. Niyâzi Misrî, jusqu'à l'émir algérien Abdelkader (mawàqif. III. 60-61 ). H a etc attribue a Badr al-Din Ibn Si ma vena iNie holson. Studies, 113. n. I).

Rime: ta. mètre' majzu 'l-ramal.


yâ tâlamâ ghibna... qamar

[.sur l'invisibilité magique]

( I ) Ah ! que de fois nous nous sommes évades d'entre les formes visibles, grâce ¿i une simple goutte, brillante comme la lune, (2) |goutte| de sésame d'huile de sésame, avec des caractères (ins­crits) et du jasmin (lié) sur notre front. (3) Vous marchez, nous marchons et nous apercevons vos silhouettes, mais vous, vous ne nous voyez pas, gens arriérés.

I. Ct, Vard .sum.simi d’Ibn ‘Arabii Futùhàt)

(OMMIMAIRl ( 'e texte. sûrement apo<r\phe. nous tsf donne par Jawban. hsanî qm sur le se< reí dt\m dt /’ invisibilité maniquí. d \ u une qasida l'a/ Hallai dont /< < ommentaire ni'entraînerait trop loin, et dont voit i un 'melium l ai ipinii nhilion est longue. mais tel txtrati suffii a Íintelhxp ru e

Rime: râ. mètre : raja:

MUQATTA'AT


wa’ayyu "1-ardi... samâ’u

( I ) Quelle est donc la terre si vide de Toi pour qu’ils se redressent. Te recherchant dans les cieux? (2) Et Tu les vois, qui regardent vers Toi en apparence, mais ils ne T'aperçoivent pas, dans leur aveuglement.

COMMENTAIRE. Ebauche, au résumé, du vers 4 de la Tâ'iya (M.. n" 12). Imite par Bûsîrî (ms. P. 3154, 54b).

Rime : al if. mètre : wâfir.

ilâ kam anta... lâ tarâhu

( I ) Jusqu'à quand, coulant dans la mer des péchés, te débattras-tu (en duel) contre Celui qui te voit sans que tu le voies ? (2) Je t’avais signalé une route, de la continence et de la piété, et ton acte est traîné à la remorque de ton penchant (3) Toi qui passes la nuit t'enfermant seul avec tes fautes, l’œil de Dieu est un témoin qui te regarde (4) désires-tu obtenir le pardon pour ce que tu as fauté, quand tu ne cherches pas à Lui plaire ? (5) Demande pardon avant ta mort, avant le Jour où le serviteur ira à la rencontre de ce que ses deux mains ont gagné (6) comment restes-tu satisfait de tes chutes et de tes péchés, tout en L'oubliant, Lui. le seul Unique'.’

COMMENTAIRE. Exhortation morale de style post-hallagien.

Rime alif. mètre : n'âfir.

kânat liqalbî ahwâun... ahwâya

( I ) 11 y avait, en mon cœur, bien des désirs, mais tous ont conflué, depuis que mon œil T'a vu. (2) Et qui j’enviais, m’a envié, moi que voici maître des créatures, maintenant que Tu es mon Maître. (3) Amis et ennemis, à cause de Toi, ne m’ont blâmé que par méconnaissance de mon angoisse. (4) J’ai laissé aux autres leur ■< ici-bas ■> et leur dévotion, pour ne plus m’adonner qu’à Toi, ma dévotion et mon « ici-bas ».

commentaire, fiac/li. fídhá 'Amili et Abdulbeha. seul.'., prensent I'attribution On peut comparer Abu b/ion'o. Diwàn. .<48. Attribue a Sandal llbn al-Jamt).

Rime : alif. mètre : basil.

idhâ dahamatka... rajâ

( I ) Si l'escadron des séparations t'assaille, et si la déception te crie «plus d’espérance», (2) prends de ta senestre le bouclier de la soumission, et de ta dextre serre l'épée des larmes. (3) En garde, garde-toi, méfie-toi du danger de la négligence cachée. (4) Et même si, dans l'ombre, l'abandon t'atteint, va de l’avant, à la clarté de la paix du cœur. (5) Dis à l'Ami : Vois mon abaissement; dispense-moi le pardon avant le jour de la Rencontre. (6) Au nom de l'Amour, ne t'en retourne pas, loin de l'Aimé, avant que ton désir n’en ait reçu le prix.

C0MM1NTAIR1-. Presentation versifier d'un theme allégorique -l'armure du croyant •. qui remonte a saint Paul tEph 6. 14-17, / Thess 5, fi) ; il a des répliques dans de vieux hadîth (P. Ill, 242, n. 7).

Rime : alif. mètre : mutaqârib.

subhâna man azhara... al-thâqibi

(1) Los à Celui dont l’Humanité à manifesté (aux Anges) le mystère de la gloire de Sa Divinité radieuse! (2) Et qui, depuis, s’est montré à Sa créature (humaine), ouvertement, sous la forme de quelqu’un « qui mange [IX] et qui boit >>. (3) Si bien que Sa créature a pu Le considérer de face, comme le clin d’œil va de la paupière à la paupière.

katabtu wa lam aktub... kitâbi

( I ) Je t'ai écrit, sans t'écrire. à toi. car j'ai écrit à mon Esprit, sans rédiger de lettre. (2) Parce que, l’Esprit (divin), rien ne peut Le séparer d'avec ceux qui L’aiment, comme le fait la conclusion qui clôt la missive. (3) Aussi toute lettre émanant de toi ramène ainsi, vers toi, sans renvoi d'aucune réponse. Sa réponse.

( OMMtNTMRt. Con< lu.ston poétique d'une lettre a son ami Ibn Ata IP. III. 354) sur un thème spiritualiste. a la fois hellénistique (Tasshidi. sadâqa. 79-80. //’’, l-IVl et ismaelien tStrothmann. G I I ./943. /24) Imitee par A P Bush et par Ismaïl-b Qulayya Maqdisi.

Rime : bâ. mètre : tau il.

urîduka, lâ urîduka... 'iqâbi

( I ) Je Te désire ; je ne Te désire pas pour la liesse (des Élus), non, * mais je Te désire pour ma damnation. (2) Tous les biens qui m’étaient nécessaires, oui, je les ai reçus, sauf Celui qui ferait exulter mon extase, en plein supplice!

COMMENTAIRE. Cf. P III. 128 Publice et commentée comme d'al-Hallâj par son ami Ibn 'Atü (Recueil,/,. 80. rC 3}. Attribuée à Bistàmipar Ibn al-'Arif (de façon hésitante: wa qîla), imite en cela par Ibn 'Arabi. Ibn al-Mar a l'attribuait a Râbi'a (Sharh al-irshâd, III, s. v° Dârib).

Rime : bâ, mètre : wâfîr.

kafâ hazanan... ghâ'ibu

(1)    C’est trop souffrir, pour moi, que devoir ainsi T’appeler sans cesse, comme si j’étais loin de Toi, ou si Toi. Tu étais absent.

(2)    Aussi je Te demande, à Toi, Ta grâce, sans plus de crainte, car je ne connais pas, avant moi, d’ascète ayant eu désir, et de Toi.

Commi NTAlRf . /.es deux premiers mots sont une expression classique (Yàqia. //.

640. édit. Wùstenfeld).

Rime : bâ. mètre tawil.

tala’at shamsun... ghurûbi

(1) L'aurore du bien-aimé s’est levée, de nuit; elle resplendit, e't n’aura pas de couchant. (2) Si l’aurore du jour se lève la nuit, l’aurore des cœurs ne saurait se coucher.

COMMENTAIRE. Commentaire d'une sentence recueillie par Shiblî (Taq., ms M /7. K et L)', Ibn 'Ajiba en a fait takhmîs ('Iqâz, 414).

Rime : bâ. mètre : khafîf.

ra’aytu rabbî .. qâla: anta!

(I) J’ai vu mon Seigneur avec l'œil du cœur, et Lui dis: «Qui es-Tu ? » Il me dit : « Toi ! » (2) Mais, pour Toi, le « où » n’a plus de lieu, le « où » n’est plus, quand il s’agit de Toi ! (3) Et il n’y a pas pour l’imagination d’image venant de Toi, qui lui permette d'ap procher où Tu es! (4) Puisque Tu es Celui qui embrasse tout lieu jusqu'au-delà du lieu, où donc es-Tu, Toi ?

COMMENTAIRE. P III, 318. Quatrain celebre, remanié ultérieurement au point d vue doctrinal (Kàshi. Tafsir [attribue à Ibn 'Arabi], I. 379). Ibn 'Arabi a imité I vers 2. et Ben'Alloua le vers 4b (Minah, 356) Un commentaire judéo-arabe d Cantique des Cantiques donne les vers !. 4\ 5b. Iraqi (lama'ât, ms. P. sp. 185i 7/b) donne le vers /a.

Rime: ta. mètre: mukhalla' al-basit.

lya habîbun azûru. lahzâti

1) J’ai à moi un Ami, je le visite dans les solitudes, présent, même ]uand il échappe aux regards. (2) Tu ne me verras pas Lui prêter ’oreille, pour percevoir son langage par bruit de paroles. (3) Ses paroles n’ont ni voyelles, ni élocution, ni rien de la mélodie des /oix. (4) Mais c’est comme si j’étais devenu l’interlocuteur de noi-même, communiquant par mon inspiration avec mon essence, m mon essence. (5) Présent, absent, proche, éloigné, insaisissable lux descriptions par qualités. (6) Il est plus proche que la conscience pour l’imagination, et plus intime que l’étincelle des nspirations.

COMMENTAIRE. Pièce imitée par Shushtarî (Ibn'Ajîba, 'Iqâz, 282) ; Qushayrî tarait faire allusion au vers 4 en son Tartib (Recueil, p. 89, l. 14). Trad, turque, ns P. sp. 188. 77a.

Rime tâ. mètre : khafîf.

sirru ’1-sarâïri matwîyun... bitiyyâti

(I) [Dieu], l’intime des consciences, se cache, laissant des traces intelligibles, du côté de l’horizon, sous des replis de lumière, (2) mais comment ? Le « comment » ne se devine que du dehors, tandis que le dedans du mystère, c’est à l’Essence divine pour Elle- même. (3) Les créatures s'égarent dans une nuit ténébreuse en (Te) cherchant, et ne perçoivent que des allusions. (4) C’est par la conjecture et l’imagination qu’elles se dirigent vers Dieu, et, tournées vers l’atmosphère, elles interpellent les cieux. (5) Or, le Seigneur est parmi elles, en chaque événement, dans tous leurs états, d’heure en heure. (6) Elles ne se retireraient pas de Lui, l’espace d’un clin d’œil, si elles savaient! Car Lui ne se retire pas d’elles, non, à aucun moment. (7) Et Son Type, parmi ses créatu­res, est reconnaissable pour l’initié, grâce à des miracles et à des signes [MS’],

COMMENTAIRE Pièce remarquable, empruntée par le missionnaire ismaeliet Mu ayyad Shiràzi en son diwân (ms. L. SOS), avec des variantes intentionnelle, (données ici entre crochets, et marquees MS, cf. M. FK.. 355). et un sept nom vers, très shi'ite.                                                                               3

Rime : tâ. mètre : basit.

famâ lî bu’dun... wâhidu

(1) Il n’est plus, pour moi, d’éloignement de Toi, depuis que j’ai constaté que rapprochement et éloignement (pour Toi) ne font qu’un. (2) Pour moi, si je suis délaissé, c’est encore une société pour moi que Ton délaissement; d’ailleurs, comment ce délaisse­ment s'opérerait-il, puisque l’Amour fait trouver! (3) Gloire à Toi ! Qui as tout prévu, en Ta perfection pure, pour que ce serviteur pieux (= moi) ne se prosterne devant nul autre que Toi !

COMMENTAIRE. Protestation - satanique - de l'arrioureux délaissé. Avant wâjidu il faut peut-être ponctuer al-hibbu, au lieu de al-hubbu, et traduire, audacieuse­ment : - comment ce délaissement s'opérerait-il. puisque l'Amant est maître du “Fiat"? • (al-wàjid = al-Mutà’. selon Ibn Arabi, futûhat, 4. 321). Cf. Shibli (ap. Nâmûs d’ibn al-Jawzî, 386. I. 11).

Rime : dâl. mètre : tawîl.

la talumnî fa T-lawm... wahîdu

(1)    Ne me blâme donc pas, le souci d’un blâme ne me touche guère, protège-moi plutôt, Seigneur, car me voici solitaire.

(2)    Autant Ta promesse, comme telle, tient bon, autant ma voca­tion, dès son principe, fut dure. (3) Que celui qui le veut note cette mienne déclaration: Lisez-la, et sachez que je suis un martyr!

COMMENTAIRE P III 331 ; plaintes d'Iblîs.

Rime : daï. mètre : khafîf.

qad tasabbartu... fûwâdî (deux pièces)

(1) J’ai essayé de prendre patience, mais mon cœur peut-il patien­ter, privé de son centre ? (2) Ton Esprit s’est peu à peu mêlé à mon Esprit, faisant alterner rapprochements et délaissements. (3) Et maintenant je suis Toi-même, Ton existence c’est la mienne, et c’est aussi mon vouloir. — (4) Vous avez dominé mon cœur et j’ai erré dans tous les ouadis (5) Mon cœur s’est serré, j’ai perdu le sommeil (6) je suis exilé, seul : combien de temps durera ma solitude.

COMMENTAIRE V. 1-3 v 4-6: mujtathth

Rime : dâl, mètre : majzû ’l-ramal.

yâ shâhidan ghâïban... mawjûdu

(1) Ô témoin splendide *, quoique Tu Te caches en Ton invisibi­lité, si Ta personne s’est cachée, Ton mémorial subsiste (2) Se priver de Toi a de funestes conséquences, quoique le renoncement, en tout soit loué (3) quiconque s’approche de Toi reçoit tout Bien, quiconque s’éloigne de Toi se sent attristé, vaincu.

I. Théorie du shàhid (valeur testimoniale de la beauté) ■ cf Mél. Joseph Maréchal. I. c . 277, 289.

Rime : dâl, mètre : basît.

haqîqatul-haqqi mustanîr... khabîr

(1) La réalité de Dieu, comme un éclaireur, sait pousser un cri d’alarme, présage d’un événement sûr. (2) La réalité de Dieu s’est démasquée, et le sort de qui la recherchait est d’être angoissé.

COMMENTAIRE. P. Ill, 194 (cf. aussi P III. 361. n. 10. pour une imitation d'Abû Nuwâs au vers 2b). Vers 2 repris par M. b. 'Ali Sûdi.

Rime : râ, mètre : mukhalla’ al-basit.

anta ’1-muwallihu lî... dhikarî

(1) C’est Toi, mon ravisseur, ce n’est pas l’oraison qui m’a ravi! Loin de mon cœur l’idée de tenir à mon oraison ! (2) L’oraison est la perle médiane (d’un gorgerin orfévré) qui Te dérobe à mes yeux, dès que ma pensée s’en laisse ceindre par mon attention.

COMMENTAIRE P. Ill, 129. Commenté par Suhrawardi Halabi. Imité par Ibn nl-Fârid, fa’iya, 4b.

Rime : râ, mètre : basit.

mawâjîdu haqqin... akâbiri

(1)    Les états d’extase divine, c’est Dieu qui les provoque tout entiers, quoique la sagacité des maîtres défaille à le comprendre.

(2)    L’extase, c’est une incitation, puis un regard (de Dieu) qui croît et flambe dans les consciences. (3) Lorsque Dieu, ainsi, vient habiter la conscience, celle-ci, doublant d'acuité, permet alors aux voyants d’y observer trois phases : (4) celle où la conscience est encore extérieure à l’essence de l’extase; celle où elle devient spectatrice étonnée; (5) celle où la ligature du sommet de la conscience s’opère; et alors elle se tourne vers une Face dont le regard la ravit à tout autre spectacle.

COMMENTAIRE. P. III, 58, n. 4. Cf. Q. 1 . IV, p. 56*. Trud. turque (ms. P. sp. 188, I27b).

Rime : râ, mètre : tawîl.

idhâ balagha ’1-sabbu... dhikri

PREMIÈRE RECENSION. (1) Quand l’amant arrive au plein élan de la générosité, et qu’il est distrait de l’union avec l’Ami par l’ivresse (de prier), (2) alors il doit constater ce dont sa passion le prend à témoin: prier devient, pour les amoureux, de l’impiété.

SECONDE RECENSION. ( 1) Quand l’amant arrive au plein élan de la générosité, et qu'il oublie l’invoqué à force d’invocations, (2) alors on a réalisé ce que la passion rend évident: prier devient, pour les sages, de l’impiété.

commentaire.. P. Ill, 128-129. Commentaire de Akhb. 48 (if. Q. T . IV. p. 77*). La seconde recension a été visiblement retouchée par l'école d'Ibn 'Arabi.

Rime : râ, mètre : tawîl.

’aqdul nubuwwati... tâmûri

(1) Le pacte de la mission prophétique est comme un flambeau de la lumière (divine), dont le point d'attache (fixe) est caché dans l’enfeu [au-dedans] du couvent (= du cœur). (2) Par Dieu, le souffle de l’Esprit (incréé) insuffle, dans mon cœur (khaladî), une pensée: celle-là qu'Israfîl soufflera dans la Trompette. (3) Dès qu’il se transfigure ainsi devant ma nature pour me parler, j’aper­çois Moïse, en personne, sur le Sinaï.

COMMENTAIRE. P. /, 330. Commentaire de Akhb. 10 (cf. Cor XXIV, 35).

Rime : râ, mètre : basît.

li anwâri núri ’1-dîni... asrâru

(I) Pour les lueurs de la lumière religieuse, il est, parmi la créa­tion, des foyers, et pour le Secret (divin) se gardent, en l’intime des cœurs discrets, des consciences (vierges). (2) Et pour leur existence, au fond des êtres, réside l’être d'un Existentiateur, Qui s’est réservé mon cœur, l’avise et l’élit. (3) Considère, avec l’œil de l’intellect, ce que je te décris, car l’intellect a ses aptitudes, pour entendre, saisir et voir.

COMMENTAIRE. P /. J3/. Commente Akhb. (cf. P II!. 26. n. 5). Imité et dilue par Suhrawardi.

Rime : râ, mètre : tawil.

sakanta qalbî wa fîhi... ’1-jâru

(1) Tu habites là, dans mon cœur, où résident, venant de Toi, des secrets. Bienvenu sois-Tu, pour cette demeure! Bienvenu, plus encore, pour qui l’avoisine! (2) Car, en dedans, nul n’y est plus que Toi-même, suprême secret que j’y devine. Ah ! regarde de Tes propres yeux, dans la maison y a-t-il encore un intrus[X] ? (3) Nuit du délaissement, qu'elle tombe, maintenant, lente ou brève, qu’im­porte, si c’est bien lui, mon Ami, l’espoir qu’elle y fait veiller, avec le ressouvenir! (4) Me voici consentant, si Tu veux, à ma mort, désormais, cher meurtrier, ce que fixe Ton choix, cela, je le choisis.


MI 'Q ATTA 'A 24

al-hubbu mâ dâma maktuman... hazari

(1) L’amour, tant qu'il se cache, se juge en grand péril, et tu ne prends confiance que si tu vas frôler le risque (2) Et l’amour n’embaume-t-il pas davantage tant que le souffle des calomnies le répand, tel le Feu : qui ne sert à rien, tant qu’il couve dedans la pierre (3) Et maintenant que le geôlier arrive, que les policiers s'attroupent et que le dénonciateur 1 leur a « donné » mon nom (4) j’en viens à désirer que mon âme soit dispensée de Ton amour; comme si je pouvais réussir à me dispenser de Toi, ô mon ouïe [11] [12], et ma vue.


ghibta wamâ ghibta... surûri

(1) Tu m’as quitté? Non, Tu n’as pas quitté ma conscience, dont Tu es devenu la joie et l'allégresse. (2) Et la séparation tombe, d’elle-même, en lambeaux, et l’état d’abandon me redevient pré­sence, (3) et, dans le fond mystérieux de ma pensée. Tu subsistes, plus avant que l’imagination dans ma conscience. (4) De jour Tu m’es, en vérité, le compagnon, et dans l'obscurité, l’interlocuteur (ami).

COMMENTAIRE. Le dernier hémistiche a été imité par Tawhidi (Sadàqa, p. 7).

Rime: râ. mètre: mukhalla' al-hasît.

yâ shamsa ! yâ badra !... wa nâru !

( 1 ) Ô soleil, ô lune, ô nycthémère ! Tu es, pour nous, et le paradis, et l’enfer! (2) [Placer] la notion d’éviter le peché, en Toi, serait pécher, et la notion de la honte, en Toi, serait avilir! (3) Puisque déjà, pour Toi, des amoureux ont perdu toute retenue, que dire de Toi, qui n’en as aucune?

commentaire. Comparer P, ///. 255. Recueil./? /.<*< et 149. /. 9 sq.

Rime: râ. mètre: mukhallii al-basit.

ahruf un arba’a bihâ hâma... wafikri

( 1) Il y a quatre consonnes dont mon cœur est épris éperdument, et où s’abîment mes pensées et ma réflexion : (2) un A, qui « attire » les créatures vers l’acte créateur; un L, qui m’inflige le blâme [que je mérite], (3) un autre L, qui me blâme encore plus; enfin un H ’, qui me fait divaguer; as-tu compris?

I. H = huwa de Cor. CXII. I (abrégé en • hu » extatique, dans les dhikr et les épitaphes).

COMMENTAIRE. Énigme sur le nom divin ■’Allah-, imitée par Ahmad G hardi i, puis par Shushtarî. Ibn 'Ajîba y a ajouté un quatrième vers.

Rime : râ, mètre : khafîf.

juhûdî laka taqdîsu (deux recensions)

[comment Satan
a refusé d'adorer Adam]

PREMIÈRE RECENSION. (1) Je renie (Ton ordre), mais c’est afin que Ta sainteté soit proclamée, et ma raison (désaxée) danse (en rond) autour de Toi! (2) Qu'est-ce, Adam? Rien, sinon Toi-même. Il n’est d’Adam que Toi, et celui qui a posé (absurdement) une différence entre vous deux, c’est Iblîs.

SECONDE RECENSION. (1) Ma folie, c’est de vouloir Te proclamer saint, et ma pensée danse (en rond) autour de Toi ! (2) Déjà l’Amant m’a fait délirer, avec Son œil qui s’arque de désir (yar. : qui dévore). (3) Le guide de l’amour nous avait bien avertis ’, que s'approcher de Dieu nous livre à l'équivoque. (4) Il n’est d’Adam que Toi, et celui qui a posé (absurdement) une différence (entre vous deux), c’est Iblîs.

hawaytu bikullî... fî nafsî

(1) J’ai étreint, de tout mon être, tout Ton amour, ô ma Sainteté ! Tu me mets à nu, tant, que je sens que c’est Toi en moi! (2) Je retourne mon cœur parmi tout ce qui n’est pas Toi, mais je ne vois plus rien qu’effarouchement, de moi à eux, et familiarité, de Toi en eux ! (3) Ah ! me voici, dans la prison de la vie, environné des humains; arrache-moi donc, vers Toi, hors de la prison!

commentaire P I 331-332. Cf. Psalm., CXL1 8.

Rime: sin, mètre: tawil.

wallahi ma tala’at... bi anfâsî

(1)Ô Dieu, que le soleil soit à l’aurore ou au couchant, Ton amour adhère à mon souffle. (2) M’isolant avec des amis pour causer, c’est de Toi que je leur parle. (3) Te remémorant, dans la tristesse ou la joie, c’est Toi, dans mon cœur, qui fais le lien de mes phantasmes. (4) Quand je voulais m’abreuver pour étancher ma soif, c’est Toi dont je voyais l’ombre dans la coupe. (5) Et si je pouvais aller à Toi, je T’arriverais, rampant sur mon visage ou marchant sur la tête1

COMMENTAIRE, ¿e vers 5 provient d'un distique d'Ibn Dâwûd (Zahra, XIII, p. 154). Les vers 6-7. rajoutes dans Haskafî, sont calqués sur Abu Nuwâs (Dîw. 375-376). V. 5 imité par Ibn al-Fârid (Fâ’iya, v. 30).

Rime : sin. mètre : basît.

yâ nasîm al-rîhi... illâ ’atashâ

( I ) Ô souffle de la brise, va, et dis au Faon : aller à l’aiguade ne fait que m’altérer! (2) (Qu’il vienne), ce mien Ami, dont l’amour est dans mon cœur: et, s’il veut, qu’il foule ma joue en marchant! (3) Son Esprit est mon esprit, et mon esprit Son Esprit; qu’il veuille, et je veux ; que je veuille, Il veut !

COMMENTAIRE P. III. 370 (sur l'exégèse alchimique de ces vers). Le vers 2baété imité par Ibn al-Fârid (Fâ’iya, v. 32), et le vers 3 par le poète profane Ahmad-b- Kulayb Anda lust.

Rime : shin, mètre : ramal.

’ajibtu likullî .. ardí

( 1 ) Je me suis demandé : comment mon tout pourrait-il porter ma Part, elle est si lourde, la terre ne pourrait plus me porter; (2) Ah, dût-Elle s’étendre sur toute la largeur de la création pour se repo­ser, — ma Part, avec toute l’étendue de la création, restera prise dans mon étreinte [XIII] !

ma ziltu atfûw... wa’nhattu

(1) Je ne cessais de nager sur les mers de l’amour, montant avec la vague, puis redescendant; (2) tantôt la vague me soutenait, et tantôt j’enfonçais; (3) enfin l’amour m’emporta jusque-là (en haute mer) où il n’y a plus de rivage. (4) Alors je criai : « Ô Toi, dont je ne saurais proférer le Nom, ni choquer jamais la réserve, (5) puisse mon âme T’éviter que Tu deviennes un juge injuste, car ce n’est pas cela que stipulait notre pacte ! »

COMMENTAIRE. «Ne pas nommer » : règle de précaution shî'ite (pour /’imâm) et udhrite (pour l'aimé). Cf. ici qasída n° VII ; et Cor. XII, 52.

Rime : tâ, mètre : sari'.

makânukâ min qalbî... mawdi’u

(1) Ta place, dans mon cœur, c’est mon cœur tout entier, rien d’autre que Toi n’y a de place; (2) mon esprit Te retient entre ma peau et mes os, regarde, si je Te perdais, comment ferais-je? (3) Quand j’essaye de cacher qui j’aime, mon subconscient le manifeste par les larmes que je cachais.

Rime: 'ayn, mètre : tawîl.

idhâ dhakartuka... awjâ'u

(I) Penser à Toi me tourmente du désir de Te voir, T’oublier me fait pleurer et souffrir; (2) me voici tout entier devenu cœurs T’implorant pour souffrir d’amour, et voici que les douleurs s’an­noncent !

Rime : 'ayn mètre : basit.

nadîmî ghayru mansûbin... al-hayfi

(1)   Celui qui me convie, et qui ne peut passer pour me léser,

(2)    m'a fait boire à la coupe dont 11 a bu : tel l’Hôte traitant un convive. (3) Puis, la coupe ayant circulé. Il a fait apporter le cuir (du supplice) et le glaive. (4) Ainsi advient à qui boit le Vin, avec le Dragon (zodiacal), en Été.

NB Trois des rimes reprises up. Muhsin Amili, Lawà’tj al ashjân, p. 145.

COMMENTAIRE P. /. 632, 635-638 ; III, 36! ; Recueil, 65. Quatrain célèbre, que Hulwûni (Akhb. /6) met dans la bouche d'al-Hallàj. dansant, en extase de jubilation, sur le chemin du supplice. Des critiques y ont vu un quatrain de poète profane; improvise pour échapper aux sanctions d'une invite obscène, à un prince, dans une orgie; par Khali’, devant le prince Ibrahim al-Mahdî, disent Sûli (deus récits contradictoires). Hamza Isfahàni et Râghib ; par Abu Nuwâs, devant le khalife Amin, dit Abû Yûsuf Qazwini. Cette attribution n'est rien moins que sûre, car tous ces critiques sont postérieurs ; et hostiles à al-Hallâj ; et la pièce, qui ne figure ni dans le Dîwân de Khali’. ni dans celui d’Abù Nuwâs là qui on attribuait les beaux vers de Khali' : Aghâni, 2e edit., VI, 165). n'est pas citee par Ibn Muhalhil dans ses Sariqât Abi Nuwâs (ms. Esc. 772. fol. 87-103: communication due à l'amitié d'Asin Palacios). Imitee par 'Attâr et Ibn Sana al-Mulk. elle contient un quasi-blasphème que le mystique flamand Ruusbroec (m. 1381 ). chose curieuse, a retrouve, de façon indépendante (Recueil, loc. cit.)

Rime : fâ, mètre : hazaj.

sayyaranî ’l~haqqu... wathîqa

(1) Dieu m’a transporté dans la réalité, grâce à un contrat, un pacte et une alliance. (2) Ce qui atteste maintenant (en moi), c’est mon subconscient, sans ma personnalité (créée); ici, c’est mon sub­conscient; là-bas, c’était le chemin.

COMMENTAIRE P 111. 310.

Rime ■ qâf, mètre : mukhalla' al-basit.

wahhidnî wâhidî... tarqu

(1) Unifie-moi, ô mon Unique (en Toi), en me faisant vraiment confesser que Dieu est Un, par un acte où aucun chemin ne serve de route! (2) Je suis Vérité en puissance, et comme la Vérité en acte (al Haqqu) est son propre potentiel, que notre séparation ne soit plus ! (3) Voici que s’illuminent des clartés rayonnantes, scin­tillant avec les lueurs de la foudre !

COMMENTAIRE. P III. 72-73. Tercet sur le Tawhîd, dont T authenticité est attestée par Ibn Khafîf et Daqqâq. Il a été imité par Harawî à la fin des Manâzil : Mâ wahhadal Wâhidâ min wâhidin... - Personne ne témoigne réellement du Dieu unique "qu'il est unique"... - (cf. P III. 247). — Le ms. T de Taq. (p. 54, l. 12-13 ; cf. M. p. 42) lit. au début du vers 2, Ana’l Haqqu, insérant là. avec une anomalie métrique que tolérait notre première édition, une mention du célèbre mot hallagien - je suis la Vérité - . il faut lire Ana Haqqun - je suis Vérité en puissance (non en acte) », — Quant à la vocalisation wahhidnî du premier mot du tercet, elle est confirmée par Daqqâq. qui lit, également à T impératif : hashisnî (allusion à Cor. XII, 51).

Rime : qâf, mètre : khafîf.

rukûbu ’1-haqîqati... tadiqqu

(1) Le raccordement de la réalité à Dieu est œuvre divine, et le sens de cette expression est ténu à saisir; (2) J’ai raccordé l’Exis­tence à mon manque d’existence, mais mon cœur ne sent pas fondre son endurcissement. (3) Questionnez-moi, ma réponse sera claire, — la réalité divine détruit les frocs de sûfî (4) et annihile les natures, en tuant les (cinq) sens, et cela est plus difficile à comprendre.

COMMENTAIRE P. Ill, 194

Rime : qâf, mètre : mutaqârib.

jubilat rûhuka... fatiq

(1) Ton Esprit s’est emmêlé à mon esprit, comme l’ambre s’allie au musc odorant. (2) Que l’on Te touche, on me touche; ainsi, Toi, c’est moi, plus de séparation.

COMMENTAIRE Ce beau distique porte l'empreinte de Bashshâr, car Bashshâr a dit : ■ quand la colombe parle, un attrait me tourmente de désir, et je ne puis maîtriser mes larmes, d'emotion . oui. il y eut un temps ensemble, moi et elle, où (nous étions) comme le musc avec l'ambre rose - (cf. M. FK . 357). — Cf. lâmiya, ici. M. 47.

Rime : qâf, mètre : ramai.

dakhaltu binâsûtî... sidqi

(1)    J’ai introduit mon humanité en Ta présence devant les hom­mes, et si Tu n’étais pas ma déité, je serais sorti de la vérité.

(2)    Car, si la science s’exprime en phrases pour guider, la langue de l’au-delà n’a pas besoin de phrases. (3) Tu as apparu pour certains, Tu T’es voilé pour d’autres, qui se sont égarés et perdus, et Tu T’es dérobé à Ta création. (4) Mais Tu surgis pour les cœurs, à (’Occident, quelquefois, et alors, pour les cœurs, Tu disparais à l’Orient.

COMMENTAIRE Taw.,p. 135

Rime : qàf, mètre : tawîl.

ittahadaTâshiqu... wâmiqi

(1) Les voici, donc unis, le désiré avec le désirant Çâshiq), et séparés: le conjoui d’avec le conjouissant (wâmiq) (2) Et appa­riés, ces deux pareils, dans une seule pensée, qui les a fait sombrer dans l’eau trouble d’une conscience double.

COMMENTAIRE Distique récité par Hallâj à l’annonce de la mort de deux amants inséparables, qu'il avait souvent observés côte à côte, à la mosquée d’Ahwéiz, certainement péjoratif, puisqu’il y a précellence de ’ishq, désir, sur wimâq, conjouissance {inerte).

Rime : qâf, mètre : basît

fîka ma’nâ yad’û .. tlayka

( I ) En toi, il y a une idée qui attire à Toi les âmes, et un argument qui Te prouve par Toi-même. (2) Moi, j’ai un cœur, qui a des yeux grands ouverts, sur Toi, et tout cela est dans Ta main.

COMMENTAIRE. Le mot ma'nâ. pour Dieu, est d'origine empédoclienne et shi'ite extrémiste.

Rime : kâf. mètre : khafîf.

hammî bihi... ilayka

(1) Ma pensée pour lui (= Ibn ’Atâ) est soupir après Toi, ô Toi vers qui vont nos allusions, (2) puisque nos deux esprits sont liés l'un près de l’autre par l’amour, près de Toi et face à Toi.

Rime : kâf, mètre : kâmil mudhayyal.

dunyâ tukhâdi’unî... hâlahâ

(I) La vie mondaine m’a cajolé comme si moi, j’ignorais ce qu’elle vaut. (2) Dieu nous interdit ce qu’elle offre de défendu, et moi, je m’écarte même de ce qu’elle offre de licite. (3) Elle m’a tendu sa main droite, je la lui ai repoussée, avec sa gauche. (4) Il m’a paru qu’elle était dans le besoin, aussi lui ai-je laissé tout son bien. (5) Quand donc me serais-je uni à elle, pour que je craigne sa satiété?

COMMENTAIRE P I. 165 Rifa'i l'attribuait à A/i (Witri, ms P. 6465. 237b).

Rime : lâm. mètre : nuijzul kârnil.

’alayka yâ nafsî... waltakhallî

( 1 ) Ó mon âme, sache te conforter! La gloire est dans l’ascèse et la retraite. (2) Songe à la clarté qui s’abrite dans la niche de l’extase transfigurante. (3) Voici que ma part (= mon âme) s’oc­cupe d’une partie de sa Part (= Dieu), et que mon tout aspire au Tout de mon tout !

Rime: lâm. mètre: mulhalla' al-basit.

muzijat rûhuka... zulâli

(1) Ton Esprit s’est emmêlé à mon esprit, tout ainsi que s’allie le vin avec l’eau pure. (2) Aussi qu’une chose Te touche, elle me touche! Ainsi donc, Toi, c’est moi, en tout!

COMMENTAIRE P. Ill, 49, 362; Taw,. 134; cf. la qâfiya, supra. n" 41. C'est imité de Buhturi (Dîw., p. 36; Râghib Muh., 246) :

'J'ai découvert que ton âme avec la mienne était dans le même rapport de transparente sincérité que l'eau, avec le vin. - Et Rashid al-Din (ms. P., 2324. 72b, I58b), puis A. Bistâmi (manâhij al tawassul, Cple, 1299 n., ¡38) l'ont imité à leur tour.

Rime : lâm, mètre : ramai.

ni'ma ’1-i’ânatu... khilalih

( 1 ) Bénie soit la Grâce, par ceux à qui elle vient, sortant du secret de Sa miséricorde, flambant comme un éclair émané des franges de Ses attributs. (2) Tantôt cette Grâce fait de moi un Sinaï, d'où je la regarde de haut, moi qui me suis abreuvé à ce qui descend de ses cimes (3) Tantôt mon désert s’étend stérile, vrai désert de Tîh ( = désert de l'Exode) qu’ensable la marée d’une mer (Rouge) qui n’est que dessèchement, du fond de son humidité. (4) Et le tout m’atteste que je Lui suis total, mais je dois L’attester lointain, dans Sa réalité, sauf quand 11 se particularise dans telle goutte de Ses rosées.

COMMtNTAlRL. Pièce plaçant la vocation du mystique a l'union divine sous le Signe de Moïse, que l'islam ne re< onnaît pas comme son législateur, mais venere comme le guide vers l'extase (cf. le Buisson Ardent) , sujet traité plusieurs fois par Hallâj. en prose et en vers (ici nus 2/. 5S) — Cor. XXIV. 43.

Rime : lâm. mètre : bastt.

thalâthatu ahrufin... kalâmu

(1) Trois lettres sans point diacritique, puis deux pointées: et le discours s’interrompt là! (2) La première (des pointées) désigne ceux qui la trouvent, et l’autre, pour chacun, sert à dire «oui». (3) Quant aux (trois) autres lettres, c’est le mystère nocturne, là où il n’est plus question de voyage, ni d’étape.

COMMENTAIRE. P. I. 333. Énigme dont le mot est tawhid.

Rime : mim, mètre : wâfir.

tafakkartu fi ’1-adyâni... jammâ

(1) J’ai réfléchi sur les dénominations confessionnelles, faisant effort pour les comprendre, et je les considère comme un Principe unique à ramifications nombreuses. (2) Ne demande donc pas à un homme d’adopter telle dénomination confessionnelle, car cela l’écarterait du Principe fondamental, et certes, (3) c’est ce Principe lui-même qui doit venir Le chercher, Lui en qui s’élucident toutes les grandeurs et toutes les significations; et l’homme, alors, com­prendra.

COMMENTAIRE Recueil,/» 58.

Rime : mim. mètre : tawîl.

yâ lâ’imî fi hawâhu... lam talumi

(1) Ô toi qui me blâmes de L'aimer, comme tu m'accables! Si tu voyais Qui je veux dire, tu ne me blâmerais plus. (2) Les gens font le pèlerinage, moi je vais en pèlerinage (spirituel) vers mon Hôte bien-aimé; s’ils offrent en sacrifice des agneaux, moi j’offre mon cœur et mon sang ! (3) Il en est qui processionnent autour du Temple, sans y être corporellement, car c’est en Dieu qu’ils pro­cessionnent, et II les a dispensés du Haram !

COMMENTAIRE. P. I. 589-590. Sur le vrai pèlerinage. Imité par Ibn al-Fârid (mîmiya, v. 10) et par Bûsirf (burda).

Rime : mîm, mètre : basit

bada ¡aka sirrun... zalâmuhu

(1) Un secret t’est montré, qui te fut si longtemps caché, une aurore se lève, et c’est toi qui l’enténébrais encore. (2) C’est toi qui voiles à ton cœur l’intime de son mystère, et si ce n’était toi, ton cœur ne serait pas scellé.           .ji

Rime : mîm, mètre : tawîl

haykalîyu ’1-jismi... ’alîm

(1)    Typique quant à la coque, lumineux quant au noyau, étemel quant à l’essence, doué de discernement et de science,

(2)    l’homme (en mourant) rejoint par l’Esprit ceux en qui II réside, tandis que son enveloppe subsiste, en terre, pourriture.

COMMENTAIRE Pièce spiritualiste à saveur Ismaélienne : interpolée, ce qui est très remarquable, dans le Dîwân d'un ennemi de Hallâj, le troisième fondateur des Nusayris, Khasîbî (m. Alep, en 957 de notre ère; Dîwân, ms. Manch., p. !20a), avec quelques variantes qui se retrouvent dans le ms. M. du Taq. hallagien (cf. M. FK., 358). Imitée par Nâbulsî (kashf, en neuf vers). P. III, 27.

Rime: mîm, mètre: ramai.


qalbuka shay’un... zulamu

(1) Ton cœur contient, .au-dedans, des Noms Tiens, que ni la lumière, ni les ténèbres ne connaissent guère. (2) La lumière de Ton visage reste un mystère quand on l’aperçoit; là est la généro­sité, la miséricorde et la noblesse. (3) Ecoute donc mon récit, Bien-aimé, puisque ni la Tablette ni le Calame ne le sauraient comprendre.


ahi! ana, am anta?... ithnayni!

[oraison pour demander

à être délivré de son hecceité]

( I) « Ah ! 1 » : est-ce moi, est-ce Toi ? Cela ferait deux dieux. Loin de moi, loin de moi la pensée d’affirmer «deux» ! (2) Il y a une ipséité tienne, au fond de mon néant pour toujours, et mon tout, par-dessus toutes choses, s’équivoque d’un double visage. (3) Où donc est Ton essence, hors de moi, pour que j’y voie clair? Mais déjà mon essence s’élucide, au point qu’elle n’a plus de lieu. (4) Et


DÎWÂN

où retrouver Ton visage, objet de mon double attrait, au nadir1 de mon cœur ou au nadir de mon œil? (5) Entre moi et Toi, il y a un «c'est moi» qui me tourmente, ah! enlève par Ton «c’est Moi», mon «c’est moi» hors d’entre nous deux!

I L'image pupillaire.


a lâ abligh ahibbâ’î... al-safîna

(1) Oui, va-t’en prévenir mes amis que je me suis embarqué pour la haute mer, et que ma barque se brise! (2) C’est dans l’instance suprême de la Croix que je mourrai ! Je ne veux plus aller ni à La Mecque, ni à Médine.

COMMENTAIRE. Cette pièce paradoxale a été commentée par Mursî (cf. Akhb., p. 141 du texte arabe) : ■ qu est-ce que dîn sinon le moment ou instance suprême ? Dieu a dit mâliki yawmi'Idîni, "souverain du Jour de Justice " (Cor. !, 4). Ce mot veut dire simplement que Hallâj mourrait crucifié, et c’est ce qui eut lieu. » — Le mot satina, « barque », est aussi significatif, car sa valeur, en onirocritique. équivaut à - croix - (salîb: Dînawari, qâdiri.ms. P., 2745-2O4b, d’après Artémi- dore d’Éphèse); — cf. le proverbe nusayri - monte dans la barque, et quitte la Cité- (madîna), auquel Hallâj parait avoir ainsi pensé, ainsi qu’à la • barque - brisée par Khadir, et à la petite cité (qarya : Nazareth, selon Qummî) qui refuse à Khadir l’hospitalité dans Cor. XVIII, 71 sq. — Cf. M.FK., 359. Et Baghdad!, fanq, 35.

Rime • nûn, mètre : wâfir.

ana man ahwâ... badanâ

PREMIÈRE RECENSION. — ( 1 ) Ô toi qui poses des questions sur notre aventure; — si tu nous avais vus, tu ne nous différencierais plus (2) je suis devenu Celui que j’aime, et Celui que j’aime est devenu moi; — nous sommes deux esprits, infondus en un (seul) corps (3) pour nous, depuis que nous sommes en confiance mu­tuelle, — les gens mettent notre légende en proverbes — (4) lors­que tu m’as aperçu, tu L’as aperçu, — et lorsque tu L’as aperçu, tu nous as aperçus (5) Son esprit est mon esprit, et mon esprit Son esprit; — nous sommes deux esprits vivant en un (seul) corps.

COMMENTAIRE. P. Ill, 50. C'est certainement la pièce la plus anciennement celebre de Hallâj, car elle eut. dès le Xr siècle, deux recensions, l'une en deux, l'autre en cinq vers. J'avais cru la recension longue une - dilution - postérieure, mais Daylami (’atf, 122b) —cf. Fakhr Fârisi. (jamha, ms. Wèlieddin 1828, 41a)

    la donne déjà, comme Kalabadhi (ikhbâr. 264b, marge) : il y voit « al-iftitân, al-fardâniya».

Hallâj parait s'y être inspiré d'un distique de Bashshâr : - les soucis des humains les attachent à tant de choses, mais mon seul souci ici-bas c'est l'amitié d'un être noble (inâiid), — qui se poserait comme un Esprit entre deux corps dissociés ; nos deux corporéitès seraient deux corps, mais leur Esprit serait Un- (le mot

-      mâjid- est ismaélien, gébérien). Cf. M. FK., 359.

Cette pièce a été incriminée pour le mot hulûl ■■ (infusion); et l'école des Wujûdiya l'a profondément retouchée (voir l'édition du texte arabe du Dîwân, p. 92); ajouter Ibn 'Arabi, tarjumân. chap. LUI, 2). Et même des Shuhûdiya comme Semnanî l'ont critiquée. Mais Ghazâli l'a admirée et commentée (ma- qsad. 61, 73; mishhât, 20) et Rûmî l'a traduite en persan dans son Dîwân Shems-i-Tebriz. Et le philosophe Sadr Shirazî l'a commentée (asfâr, 390).

Rime : nûn, mètre : ramai.


SECONDE RECENSION. — ( 1 ) Je suis devenu Celui que j’aime, et Celui que j'aime est devenu moi! — Nous sommes deux esprits, infondus en un (seul) corps! — (2) Aussi, me voir, c'est Le voir, et Le voir, c’est nous voir.


yâ ghâfilan, lijahâlatî... wabayânî

(I) Ô insoucieux, par ignorance de mon cas, allez-vous compren­dre qui je suis et ce que j’expose ? (2) Ma dévotion envers Dieu, ce sont six consonnes, dont deux portent des points diacritiques.

(3)    De ces consonnes, l’une est radicale, l’autre vocalisée î.

(4)    Placez, maintenant, Valif avant la consonne qui devient la seconde du mot, (5) et vous m’apercevrez, à la place de Moïse, debout, dans la lumière, sur le Tûr (Sîna), si vous me devinez.

commentaire. P. 1, 333. Énigme, dont le mot est nârnûsî (= [a]nà + Mûsâ) (contra Machriq, XI, 880-881). Tûr, au cinquième vers, réfère à la fois au Sinaï de Moïse, et au Tûr (Beïza) où naquit Hallâj.

Rime : nûn, mètre : kâmil.

khâtabanî 1-haqqu... lisânî

(1)    Dieu m’a parlé, du fond de mon cœur, et ma science s’est formée sur mes lèvres. (2) Il m’a rapproché, moi qui étais loin de Lui; 11 m’a rendu Son intime, et Son élu.

COMMENTAIRE. P. III. 311.

Rime : nûn, mètre : mukhalla' al-basît.

[kadhâ]’ jtabânî... ’arrafanî

( 1) Ainsi, Il m’a choisi, rapproché, honoré, et le tout, en totalité, Il me l’a confié et fait comprendre. (2) Il ne me reste plus rien, au cœur et dans les entrailles, par où je ne L’appréhende et II ne m’appréhende.

Rime : n«n, mètre : basit
anta bayn al-shaghâfi... ajfânî

( 1) Tu es là, entre les parois du cœur et le cœur, Tu T’en échappes, comme les larmes glissent, hors de mes paupières. (2) Et Tu deviens la conscience personnelle au-dedans de mes entrailles, comme les esprits s’infondent dans les corps. (3) Ah! rien d’im­mobile ne se meut sans que Toi, Tu ne l’émeuves par un ressort secret. (4) Ô Croissant qui Te montres dans ta perfection le qua­torzième jour, ajoutant ainsi huit et quatre au deux (de Ta réappa­rition).

COMMENTAIRE P. Ill, 50 (cf. Ill, 102 ; et Nuseïris); Taw 133. Le vers / est probablement inspiré d'un vers de 'Antara.

Le paradoxe du vers 4 est classique (Goldziher. zahlspielerei, ap. ZDMG (1895).

49, 210-217).

Rime : nûn, mètre : khafîf.

hammalta bilqalb... al-budunu

( 1) Tu as donné à mon cœur un fardeau que mon corps ne saurait porter, mais le cœur sait porter ce qui fait défaillir les victimes mecquoises. (2) Ô, puissé-je être le plus proche de ceux qui recourent à Toi, yeux, pour T’apercevoir, ou, du moins, oreilles !

commentaire. P. III. 20 Sur budun, cf. Nusayb. Aghàni, I, 372.

Rime : nûn, mètre : basît.

bayânu bayâni ’1-haqqi... lisânuhu

(1)    Le discours montrant (ce qu’est) Dieu, voilà ce que tu dois devenir, et tu seras alors le langage exprimant tout discours.

(2)    C’est par Dieu (même) que j’ai montré Dieu, à toi donc d’être (aussi) le garant de quiconque montre Dieu. (3) Si tu montres Dieu dans Sa réalité même (en devenant saint), Dieu s’exprimera (par toi), et tu posséderas tout langage et ses aspects. (4) Si la caracté­ristique de Dieu est pour Dieu explicite, pourquoi le lieu où elle se manifeste parmi les hommes ( = toi-même) leur resterait-il caché ?

Rime: nûn, mètre: tawil.

raqîbânî minnî shâhidâni... tarânî

(1) J "ai deux surveillants (mes oreilles) qui constatent que je l’aime, et j’en ai deux (mes yeux) qui constatent que Tu me regardes. (2) Aucune pensée ne traverse mon intime que Toi ; rien n’est dit, sinon Ton amour, par ma langue. (3) Visé-je à l’est, Tu en es l’orient; à l’ouest, Tu es droit devant; (4) en haut, et Tu en es l’au-dessus; en bas, et Tu es partout. (5) C’est Toi qui donnes à tout son lieu, sans T’y localiser. Tu es dans tout le tout, sans être périssable. (6) (Tu es) mon cœur et mon esprit, ma conscience et mon inspiration, et le rythme de mon souffle, et le nœud de mon organisme.

commentaire Pièce suspecte Abu Sa'id a traduit le vers 5 (H. Azâd, Roseraie, n° 7). Octain parallèle d'ibn Dâwûd (Zahra, chap, xix, p. 206); cf. Ibn Rajab. Kashf alkurba, ap. majmû', 327 ; S b. Y Juhani, Fayd almaiik, 153).

Rime : nûn. mètre : tawîl.

’iija’ ilâ ’llahi... illâ hû

(1) Reviens à Dieu, car le terme, c’est Dieu, et, quoi que tu t’efforces, il n’y en a pas d’autre que Huwa (Lui). (2) Lui, Il est avec ceux qui Le savent signifié par le Mîm, le ’ Ayn et la Sainteté.

(3)    Il s’exprime par les lèvres mêmes de ceux dont l’épellation est nouée, pour ceux qui Lui parlent. (4) Si tu en doutes, médite le hadîth, qui interdit d’en douter ! c’est Lui. (5) Et Mîm donne accès vers Lui (Huwa), en haut et en bas, et le ’Ayn, de loin et de près.

COMMENTAIRE P I, 336-337; III, 340, n. 2 Pièce fort intéressante, car elle réfère à la théorie selmanienne des trois lettres : 'Ayn (qui désigne ’Alt). Mîm (qui désigne Muhammad) et Sîn ( - la Sainteté - : Selmân). Cf. notre Salmân Pâk, Paris, 1933, p. 35-39; trad. angl. Unwala, Bombay, 1955.

man râmahu bil ’aqli... yalhuw

(1) Celui qui, ayant soif de Dieu, prend la raison pour guide, elle le mène paître dans une perplexité où elle le laisse s’agiter. (2) Ses états de conscience s’y fanent, dans l’équivoque, et il se dit, perplexe: « Existe-t-Il ? »

COMMENTAIRE. Taw., 196; P. Hl, 71. Sulami l'a commenté dans une sentence critiquée par Mursi (Sha’ráwí, Lawâqih, 11, 17).

Rime : hâ, mètre : sarC.

lastu bil tawhîdi... as/huw

( 1 ) Non, je ne me fais pas un jeu de mon « credo » ; et pourtant mon «je» (= heccéité) le néglige. (2) Comment peut-il le négliger, s’en jouer? Ah! vraiment, mon «je», c’est Lui?

COMMENTAIRE P III, 71.

Rime • hâ, mètre : ntûjzu al-ramal.

yâ sirra sirrî, tadiqqu... hayy

(1)0 conscience de ma conscience, qui Te fais si ténue, que Tu échappes à l’imagination de toute créature vivante! (2) Et qui, en même temps, et patente et cachée, transfigures toute chose, par- devers toute chose! (3) Si je m’excusais, envers Toi, ce serait (arguer) de mon ignorance (de Ton ubiquité), de l’énormité (cou­pable) de mon doute (sur notre union), de l’excès de mon bégaie­ment (alors que Tu m’as pris pour porte-parole). (4) Ô Toi, qui es la Réunion du tout, Tu ne m’es plus «un autre», mais «moi- même»! Mais quelle excuse, alors, m’adressé-je, à moi?

COMMENTAIRE P. Ill, 56. Pièce célèbre, dont deux maîtres de la langue arabe Abû 'Ali Fârisi, et Abùl Alà Ma'arri ont étudie, l'un la pensée intime, et l’autre la prosodie. Le grand théologien ash'arite Fakhr Râzi a introduit les vers 1-2 dans son tafsîr (commentaire du Coran, t. I, 149). Shushtari en a peut-être imité le vers 4 dans son Qays et Leila - (Recueil, 139). Cf. Schaeder, ap. OLZ.. ¡927, 834 sq. ; P. Ill, 353 et Fakhr Fârisi, dalàlat al-mubtahij.

Rime : yâ, mètre : mukhalla' al-basit.

ismun ma’ al-khalqi... ma’ânîhi

[contre la superstition
du - nom suprême » ]

( I) Un Nom, qui Le rattache à Sa création : on l’a cherché, soupi­rant après Lui, afin de connaître (par ce Nom), telle de Ses significations. (2) Mais on ne saurait passer directement de Dieu à une cause créée, telle qu’elle manifeste nécessairement Celui qui l’a manifestée.

COMMENTAIRE P II/. 110. Cité par Fakhr Râzi. tafsîr kabîr, /. 149.

Rime : yâ, mètre : basît.


YATÂMÀ


mithâluka fi ’aynî... taghîbu?

Ton image est dans mon œil, Ton mémorial sur mes lèvres, -— Ta demeure en mon cœur, mais où Te caches-Tu donc?

Rime : bâ, mètre : tawil.

kafartu bidîni ’llahi... qabîhu

J'ai renié le culte dû à Dieu, et ce reniement m’était un devoir, — alors qu’il est pour les musulmans un péché.

COMMf NTAlRt- Ce vers devait terminer le n" 4/ des Akhbâr, commenté en arabe par Su'd Kàzerûni fms. Londres 16 659), et en persan par Tabriz! I bibliographie n" 1195).

Rime : hâ. mètre : tawîl.

faqultu... hya ’1-shamsu... bu’du

Je leur dis: mes amis, Elle, c’est le soleil; sa lumière — est proche, mais pour l’atteindre, qu’il y a loin!

COMMENTAIRE. Cf. Ibn Dáwúd. Zahra, chap. XLVUI, p. 484 ; Mille et Une Nuits, Ed. Boulaq, 1279, I, 447.

Rime : dâl, mètre : tawîl.

qad kuntu fi ni’mati... batiri

J’avais été, dans le bonheur d’aimer, exubérant; — et me voici atteint du châtiment de l’exubérance.

NB. <■ Exubérant» (batiran) est coranique (Cor. VIII, 49); d'où le toponyme égyptienNazlat al Batrân (près Gîzé).

Rime : râ, mètre : munsarih.

shartu ’1-ma’ârifi... muttali’i

La condition, pour recevoir les dons de sagesse, c’est d’annihiler tout ce qui vient de toi, — vu que le novice a au début un regard sans pénétration.

Rime : uvn. mètre : basît.

dhikmhu dhikrî .. illâ ma’an?

Son mémento est mien, et mon mémento sien; — comment, se souvenant à deux, pourrions-nous exister autrement qu'ensemble ?

Rime: ’avn, mètre: ramai

lâ tu’arrid binâ... ’ushshâqi

Ne t'attaque pas à Nous, regarde notre doigt, — que Nous avons arde dans le sang des amants.

Rime : </<</, mètre : khafïf.

idhâ waswasati... walkursi

Lorsque mon état (mystique) est troublé par des funérailles ou des noces, —j'ai des visions de l’enfer, du paradis, des Cieux et du Trône.

Rime : sin. mètre : rajaz


Annexes au Dîwcin

On a, sous le nom de Hallâj, d'autres poèmes que ceux qui précèdent, les uns empruntés à des poètes antérieurs, les autres à des poètes postérieurs, qui ont, assez souvent, pensé, en les écrivant à exprimer la psychologie de Hallâj persé­cuté, souffrant, et supplicié. On en trouvera la plupart dans les sections // et III de l'édition des textes arabes publiée en 1931, à Paris, chez Geuthner. Nous n’en donnerons ici que deux, qui posent le problème du langage •• théopathique • :

lam uslimi’lnafsa... yuhyiha

( 1 ) Je ne livre mon âme aux tourments qui la font périr, que parce que je sais que c'est la mort qui la fera revivre. (2) Un seul regard de Toi, ô ma demande, ô mon espoir, m’est plus attrayant que ce bas monde et tous ses biens; (3) L’âme de l’amant, dans les supplices, est endurante, parce que 1 c’est son Tourmenteur, un jour, qui la guérira.

SOURCES : énumérées dans l'éd. de 1931, p. 127; y ajouter: Jazâiri, zahr al-rabi, 188; Ismaïl Haqqî, rûh al-bayàn, I, 139 (signalé amicalement par Sherefettin

Yaltkaya, peu avant sa mort).

Rime : hâ ; mètre : basît.

I. -Parce que» traduit l’arabe coranique -laallu- qui, normalement, signifie «peut- être-, mais qui, selon les commentateurs du Coran, depuis Muqâtil-b-Sulaymân Azdî (m 150/767), le maître de Shâfi’i, doit être, puisqu'il s’agit de Dieu, traduit par - likay-, c'est-à-dire «parce que» (cf. dans le grec évangélique -Hina- et -Oti-, «pour que», et ■ parce que • ; suivant la manière d’insérer Dieu dans le temporel).

madadtu ila’lrahmani... nafsi

( I) J'ai étendu, vers le Clément, misérablement, mes cinq doigts1 — Et une voix (humaine), dans mon âme pudique 2 m a parlé de moi-même (2) Et cela à cause de la Joie 1 en moi à Le commémorer — Pourtant, ce n'est pas à mes pairs de se plaire parmi les humains4 (3) Mais c'est que cet espion qu'il a en moi contre moi-même — S’en était allé, sur la brise de la Joie, jusqu'au Verger de la Sainteté.

SOURCES: ms. Fâtih 2650, 101a (X-I) ; Akhbàr, ms. Mossoul (29“), v. 1-2; ms.

Mazan' ms. Meshkât, 87° (Téhéran).

Rime : sin, mètre : tawil.

î Khamsî = allusion aux Cinq du Manteau.

2 Afin nafsin nafisati = mon intime trésor.

3.    F : uns; M : qurb.

4.    Vocaliser : ins.


Sources

QASlDA I

Taq. (L, fol. 323a, v 1-4, 6-12, 14, 13, 16-19; J, fol. 5a, v. 1-4, 6-10, 12, 11,

13,    15-19;T,p. 12-13, v. 1-13, 16-19;M,p. 24;K,p. 93, v. 1-4,6-13. 15, 16,

14,     18, 19; cf. ms. Berlin 3492, fol. 4Ia, v. 1-4, 6-12, 14, 13, 16-19). Hûjwîri, Kashf. édit. Zhukovski, p. 332, v. 1, 3, 4 (cf. ms. Paris suppl. pers. 1214, fol. I71b, et Geniza. v. 1-4). Ibn Kardabûs Tûzari, Iktifâ, ms. Ragragi, Rabat, v 1-4, 6-19. Ibn al-Jawzi, Narjis al-Qulúb. v. 1-3, 5-11. 13-19 Bahâ Amilî, Kashkûl, édit. 1329, p. 115, v. 1, 2, 11, 13 (cf. Khwansârî, Rawdât, II, p. 236). Nâbulsî, Hatk al-astâr, v, 1-5.

QASlDA 11

Ms. Kôpr. 1620-1, v. 1-13. Taq.. ms. L fol. 327b, v. 1,2, 5, 6, 8, 7, 10, 11.

Fâtih 2650, 1032.

Corr. au texte de 1931 ap. M. FK., 352.

QASlDA III

Ms Kôpr. 1620-IV, v. 1-7. Taq. (L, fol. 325b, v. 1-5. 7, 6; K, p. 77, v 1-2; p 92. v. 1-3, 5-7). Baqlî. Shathiyât. n" 164, v. 1-2; Jildakî, Ghâyat al-surûr. v. 1-7 (base). Fâtih 2650, 100 b

QASlDA IV

Yâfi’î, Mir’ât al-janân. fol. 233b, v 1-10; Yâfi'î, Ta'rikh, fol. 2O3a, v. 1-10. Taq (ms. M. 26, v. 7-10, ms. Kazan, p. 97), v. I, 3b + 2b. 7. Fâtih 2650, 101 a.

QASlDA V

Sulami, Usúl al-malâmativa. fol. 67a, v. 1. 3-9 (base). Taq (ms. L, fol 323b. v. 3. 4, 6, 9, 10; et foi. 332b, v. 1-2; K, p. 84, v. Ia + 3b, 5, 9, 2 vers aberrants, 10). Ibn al-Jawzi, Talbîs. 409. v. 6a + 3b. Jawbarî, Kashf. fol. 12a, v. 6a + 3b, 4 (= Ibn al-Sâ'î, Mukhtasar, 75). Baqlî, Tafsîr. XVI-46, v Ia + 3b. 5a + 4b, 9; V-101, v. 4-9. ’Alî b Wahb Rabî’î, selon Shattanawfî, Bahja. 231, v. 6a + 3b. 5a + 4b, 9 ( = Tâdhifi, Qalâïd, 94). Ibn 'Arabi, Futû- hàt. II, 388, v. I, 5a + 4b, 9; Muhàdarât, II, 316 Izz Maqdisî, Sharh hâl al-awlivâ. fol. 252a, v. 6a + 3b, 4. Shaydhalâ, ms. Berl. 3087, 84: v. 6a, 3b, x, y, 10. Sibt Ibn al-Jawzi, mir'át f. 67a, année 451 h.).

QASÍDA VI

Taq. (K. p. 13, v. I, 3, 6, 7, 8; L, fol. 334a, v. 1,6, 7, 8; cf. ms. Berlin 3492, fol. 42b, 2 recensions = Berl. 1, v. 1, 3, 6, 7 ; Berl.2, v. 2, 3, 5, 4, 6). Qannád, ap. Sarráj, Luma’. p. 248 (v. 5, 2, I, 3, 4, 6), 372 (v. 7). Sulamí, Ta'ríkh*. n" XIV (v. I-8) ; Tafsír, inQur.. L, 36 (v. 2)'. Ibn Bâkûye, Bidâya, Ie (v. 1-8; cf. édit. Dhahabí, ibid. = Bâk.2). Qushayri, Lataîf. in Qur., XXII, 41 (v. 2). Ha- rawî, Tabaqât (Junayd, v. 2, 1).

qasIda vu

Ms. Kôpr. VI, v. 1-10. Taq. (K, p. 75, v. 1,3, 2, 5, 4, 6, 8, 10; L, fol. 325b, v. 1-10), Fâtih 2650, 101 b.

QAS1DA VIII

Taq., ms. M, p. 47 (v. I, x, 5, 3, 6-8). Kalâbâdhî, Ta'arruf (publ. E, 13*, n" 15), commenté par Suhrawardî Halabî (qui identifie le poète) et Qûnawî (cf. P., 363 b, 513 a), v. 1-4, 6-8. [Ibn Jahdam, Bahja], source commune d’Ibn Khamîs Ka’bî (Manâqib) et de Sha’râwî (Lawâqih), v. 1,3, 6, 2, 5, 8.

QASÍDA VIII bis

Daylami, ' atf, 48a, publ. Essai, 2' éd., p. 448-449; trad. ap. Mél. Jos. Maré­chal, 1950, Bruxelles, t. Il, p. 276-277.

QASÍDA IX

Taq., ms. K, p. 84, v. Ia + 3b, 2 = Baqlî, Shath., ms. QA, fol. 153b (trad, pers., v. Ia + 3b, 2). Qazwînî, 'Ajâib. Ibn Taymiya (Jawâb sahíh, II, 175: v. 2). Hasan Tustarî (ap. Sha’râwî, Lawâqih. II, 68) et Munawî(Kawâkib), d’où dérivent Ibn’Aqila(iVusVta) et Bustany (Dâ’tra). Ibn Zaghdùn (Qawânîn, 46-47), v. Ia + 3b, 2, 4, 5 = ms. Vienne, fol 13a. Sarrâj (Luma'. 361) donne les vers lb + 3b, 2, sans attribution d’auteur. Taq., ms. L, fol. 326b, donne les vers 1-7.

qasîda x

Elles sont données en détail dans Dîwàn. 1931, p. 31-35. Depuis 1931, il faut ajouter : Ibn Ghânim Maqdisî (ms. Caire. Tal'at, Adab 4393 : où la qasîda lui est attribuée ; ms. Wetzst. 2, 1109, 96b, et Wezst. 2, 1757, 30a), Suhrawardî Halabî (alwâh imâdiya, ms. Berl. 409 153a), Najm Râzî (43b), Rashîd al-Dîn (360b), Ibn ’Arabî (tuhfat al-safara, ms. P. 6614, 15b; Diwân, éd. 1271, p. 409), Ishka- véri (mahbûb al-qulûb). Qissat Husayn al-Hallâj (ap. Donum Nat. Nyberg. 1954, p. 110).

Dès le XIVe siècle, Jildaki nous signale ainsi l’existence de cette qasîda: «cette qasîda est une des premières qasida de Hallâj; elle est longue, elle a, dans ses expressions, des faiblesses, telles qu’on en rencontre dans ses muqatta'ât- (. hâyat al-surûr, 1. c,).

QASÎDA XI

Jawbari, Mukhtârfî kashf el-asrâr. ms. Paris 4640, fol. 12b,etc.:v. l-2;lems. Es'ad 3888 est le seul à donner le vers 3; le texte imprimé au Caire, 1302 H. (p. 20) les saute tous.

MUOATTAA I

Taq. (ms. T, p. 5), v. 1-2; ’Uyûnî Baghdâdî, Fawâïd, v. 1-2. Abdelkader, mawâqif, I, 46.                                  .

MUQATTAA 2

Taq., ms. T, p. 10-11.

MUQATTA'A 3

Taq. (ms. L, fol. 329b, v. 3-5). Ghazâlî, Ihyâ, IV, 222, v. 1-3. Baqlî, tafsîr de XIII, 36, v. 3-6; Shathîyât. ms. QA, fol. 124, v. 4, 6. Subkî; Tabaq., IV, 262, VI, 46. Ms. turc Vienne, 111-508, fol. 12b, v. 1, 2, 4. Bahâ ’Amilî, Kashkûl, 97, v. 1-2. Ma'sûm ’Alî, Tarâïq, II, 171 (selon Ibshayhî, Mustatraf, XXX, qui, dans un octain de Sari, insère les v. 1, puis 4, 2). Sâwî, Hâshiya des Jalâlayn, IV, 152 (v. 1 et 4, attribués à Dasûqî). Abdulbéha (Paris, 12.xi. 1911).

MUQATTAA 4

Taq, ms. L, fol. 342a, v. 1-6; ms. T, fol. 9, v. 1-6.

MUQATTA A 5

Taq., ms. T, p. 5, v. 1-2. Ibn Bâkûyé, Bidâya, édit. Q.T., n“ 18 ( = Khatîb, Ta'rîkh; Ibn al-Jawzî, Muntazam, Dhahabî, Ta'rîkh; et Kutubî, 'Uyûn), v. 1-3. Daylamî, Tarjamal Ibn Khafîf, v. 1-2. Ibn al-Dâ’î, Tabsira, p. 402, v. 1-3. Baqlî, Shathîyât. ms. QA, fol. 168a (vocalisé), v. 1-2 ( = tafsîr, inQur., XII.31). Makîn, Majmu , v. 1-3. Hariri (ap. Ibn Taymiya, Majm. rasâïl wa masâil, édit. 1341 H., p. 62, 81), v. 1-2 Watwât, Ghurar, p. 129. v. 1-2 (copié ap. Nukhbat al-akhbâr, Bombay, 3.XI. 1887). Dâwûd Qaysârî, Sharh al-fusûs. fol. 263a, 27lb, v. 1-2. Ibn 'Ajîba, ’Iqâz, 156, v. 1 -3. Khuyyi, Sharh minhaj..., 6, 284. Ibn Taymiya, Jawâbsahîh, 2, 199.

MUQATTA A 6

Ces trois vers sont donnés ap. Taq. (ms. L, fol. 128b). Khargûshî. Tahdhîb. fol. 278b, d’après 'Umar b. Rufâ’il, viâ Ahmad b. ’Abdallah Harrashî, à La Mecque. Ibn Jahdam, Bahja (selon Khatio, Ta'rîkh, et Ibn Khamis, Manâqib). Geniza. II. Sarràj, Masârï, 319. Yâfi’î, Mir ât. Shaydhalâ, ms. Berl. 3083, 201. Ishkavérî.

MUQATTA A 7

Ibn 'Atâ, dans Khuldî, Hikâyât (Recueil, lac. cit.). Ibn al-’Arif, Mahâsin at-ma- jâlis. ms. Berlin, 2834, fol. 150a et 155a. Ibn ’Arabî, Fut., I, 782; II, 452, 682, 732; IV, 204. Qaysari, Sharh al-fusûs, fol. 203b. Qushayri, Latâïf (in Qur., XLIV, 7), pour le vers 2.

MUQATTA A 8

Ibn 'Atâ, Tafsîr (de Qur., III, 188; désignant l’auteur, encore vivant, sous la périphrase ba’dhum) = Sulamî, Haqâîq (E 28*. n” 20) au même verset. Khar­gûshî, Tahdhîb. fol. 162b Taq. (ms. L, fol. 326b; 332b; K, 83) et Jildakî, Ghâyat al-surûr, restituent formellement le distique à Hallâj.

MUQATTA A 9

Nasrâbâdhî (ap. Sulamî, Haqâîq, in Qur., vi, 76), v. 2. Taq. (ms. K, 74, et L, fol. 325a). Khargûshî, loe. cit . fol. 15a, et Qushayri, Latâïf (in Qur.. xxv, 61-62), v. 2. Hamadhânî, Takmila. Ibn Bâdis, fol. 8b. Ibn ’Ajîba (loe. cit.) attribue le distique, avec trois autres vers, à Dhû ’1-Nûn. Ibn Abbâd, Sharh hikam 'Ataiya, I, 68.

MUQATTA'A 10

Tawásín. V-11, v. 1-4. Hûjwîri, Kashf, édit. Zhukovski, 317, v. 5, 7, Suhra- wardî Baghdâdî, Bustân, XXVI, v. 1. Taq.. ms. L, fol. 341b, v. 5 (dans une pièce différente) M. 43. Ibn al-’Arif, Mahâsin, fol. 159a, v. 1,4, 2, 3, 5-6, .r. Qaysâri, Hujub, fol. 205b = Nâbulsî, Hatk, v. 1,4, 3, 5. Ibn Ajîba, Iqâz. 46: v. 1, 4, 2, 3, 8, 5 [qu’il attribue à ’Alî],

MUQATTA'A 11

Taq., ms. M 41, K 100, v. lba, 2, 3, 5, 6, 4; ms. L, fol. 323a, v. 1-6; ms. Berl., fol. 41a, v. 1-3, 5, 6. Abû Sa'd Qaylawî (ap. Shattanawfî, Bahja, 161), v 1-6.

MUQATTA'A 12

Taq., ms. L, fol. 327b, v 1-6; M 25, K 95, v. 5-6 Nâbulsî, Hatk, v. 3-5.

MUQATTA'A 13

Tawásín, VI-12 (ms. L, et recension Baqlî, ap. édit., p. 44-45).

MUQATTA'A 14

Tawásín, Vl-29 (ms. L seulement: édit., p. 54-55).

MUQATTA'A 15-16

Ibn Arabî, Fut.. III, 132: v. 2. Taq., ms. K, 81, v. 1-2; ms. L, fol. 326a, v. 1-3, et fol. 342a, v 4-6 (de mètre mujlathth) ; ms. T, p. 10. v. 1-3.

MUQATTA'A 16 BIS

Sadaqa-b-Ali Zâhid, Dhayl ta'rîkh Ibn al-Najjâr, ms. Paris 2131, f. 22a (comm. M. Jawâd).

MUQATTA'A 17

Taq., ms. M 25, K 96. Sulamî, Haqàiq (in Qur., x, 35). Geniza, n° IX.

MUQATTA'A 18

Kalâbâdhî, Ta'arruf (édité ap. E, p 17*).

MUQATTA'A 19

Taq.. ms. T, p. 33 (qui prouve que ces vers, commentant la première partie de Akhb. 36. récit dû à Ibn Fâris, doivent y être intercalés à la fin de la ligne 7 ; la suite étant un récit indépendant dû à Ahmad b. al-Qâsim al-Zâhid). L, 334b; J, lb-2a, et K, 39. Sulamî, Tabaqàt (probablement d'après Ibn Ghâlib; d’où Ibn Khamîs, Manâqib, et Sha’râwî, Lawaqih. et Harawî Tabaqât pour le vers 1). Hayât Harrâni (ap. Shattanawfî, Bahja, 181). Ibn Fadl Allah 'Umari, Masálik.

MUQATTA'A 20

Taq.. ms. S, 12; L, 338b; T, 37, et K, 50 (lre recension). ’Ali Hariri (ap. Ibn Taymiya, Majm. rasâïl wa masâïl, Caire, 1341, p. 64, 105, qui donne seul ia deuxième recension, avec un commentaire).

MUQATTAA 21

Taq., ms. L, fol. 336a; J, 3a; S, 9, M, 31 et K, 24.

MUQATTA A 22

Taq., ms. J, fol. 4a, et ms. L, fol. 338a.

MUQATTA A 23

Geniza, VII, v. 1-4. Ms. Es’ad 1437, fol. 97a, v. 1-3.

MUQATTA A 24

Ms. Koprülü 1620-2 (corrigé suivant ms. Fatih 2650).

MUQATTA’A 25

Taq.. ms. K, 96, v. 1-2, 3a-4b; ms. L, fol. 327b; M, 25, v. la-2b, 3, 4. Geniza, n° XI, v. 1-3.

MUQATTA A 26

Taq., ms. L, fol. 325a; Geniza, n° 1 ; Ibn Luyûn.

MUQATTA A 27

Ibn Kardabûs Tûzari, Iktifâ. Taq, ms. L, fol. 322b, 325b; ms. K, 76-77. Ibn 'Atallah, Latâïf, II, 214. Ali Burhânî, Zuhra Mudîya, fol. 180 (au fol. 182, pastiche de ce tercet par Burhânî). Jumaylî, p. 7. Ibn 'Ajîba, loc. cit., y ajoute un vers.

MUQATTA A 28-29

Première recension: Tawâsîn, VI-10 (éd. 1913, p. 43, selon Baqlî); Qushayrî, Latâïf, XV, 42 (= Taw., p. xvn) et XXIII, 99 (= Recueil, 89); Alûsî, Nashwa, 77 (d’après Kawrânî). — Seconde recension: Dîw., n° 18 (= Taw., p. xvi): J, fol. 3a, v. 1-3; L, fol. 336b, v. 1-3; T, p. 21, v. 1-4.

MUQATTA A 30

Akhb. 38 = Taq., ms. J, fol. 4a; K, p. 43; M, 38; L, fol. 338a; T, p. 34; ms.

Jumaylî, p. 4.

MUQATTA A 31

Hûjwîrî, Kashf, édit. Zhukovski, 535: v. I, 3, 2, 4, 5 (sans nom d’auteur); Bâïqarâ, 'Ushshâq, vol. 64b, v. 1-5 (avec traduction persane); Rida Qulî, Riyâd, n“ 9; v. 1, 3, 2, 4; Haskafî, Fatâwâ al-sûfïya, v. la-3b, 2, 3a-lb, 4-7. Fakhr Fârisî, Jamha, 43a (v. 1).

MUQATTA A 32

Jildakî, Ghâya, v. 1-3. Le vers 3 est cité par Tawhîdî (Sadâqa, 24), d’après un commentaire d'A. S. Mantiqî sur Aristote (comparer ici n° 57, vers 5), Râghib (Muhâdarât, 271) et Ibn ’Arabî (Fut., IV, 413); les vers 1-3 par Jaiâl Rûmî (Methnewi, livre III, § 177, v. 10-12; cf. Anqirawî, il, 11); les vers 2a-3a-2b par le manuscrit Jumaylî (p. 9), le vers 3a par le poète turc Rùhî (m. 1014/1605;

Hammer, G.O.D., III, 136).

MUQATTA'A 33

Akhb. I I = Taq., ms. K, p. 25; M, p. 28; J, fol. 3a; L, fol. 336b.

MUQATTA'A 34

Taq , ms. K, 96, L, fol. 327b; ms. Kopr. 1620, n° V; ms. Jumaylî, p. 7 (v. 1, 3. 4).

MUQATTA'A 35

Taq., ms. L, fol. 342b ; Sarrâj, Luma'. 335 (v. 1 ) ; Baqlí. Shathiyát, ms. Sh. ’All. fol. 169 (v. 1). Tawhîdî, Ishârât (ms. Zah., f. 1 10b) donne seul les trois vers.

MUQATTA'A 36

Khwâfî, ms. Es'ad, 1437, fol. 97a ; ms. Caire, main 178, fol. 83b. Ahmad Ghazalî, Tajrid, éd. p. 28.

MUQATTA'A 37

Akhb. 16 = Taq.. ms. J, fol. 3b; K, p. 8 (v. 1-4); L, fol. 337a; T, v. 1-2; Sulamî, Haqâïq. in Qur., XLll, 17 ( = E, p. 59*) ; Ibn Bâkûyé ( = Q. T.. p. 34*, 35*); Qushayri, Latâïf, in Qur., xxvm, 30); Ibn Khamis, loe. cit.; Tûzarî, Iktifâ. Râghib, Muhâdarât, 226a; Y. Qazwînî, ap. Ibn al-Jawzî, Muntazam ; Baqlî, tafsîr in Qur., vu, 155; ms. Geniza, IV; ’Attâr, Tadhkira, II, 142; G. al-Makîn, ms Paris, ar. 295, fol. 47a; Ibn Tiqtaqâ, Fakhrí; D. Qaysari, Hu- jub, fol. 203b, v. 3a-4; Sha’râwî, Kibrît, p. 251-252; Munâwî, Kawâkib ; Kâzim Dujaylî (cf. Recueil, p. 244: planche alors placée sur la tombe). Fakhr Fârisî, f. 48b.

MUQATTA'A 38

Tawásin, III, § 11 (édit., p. 24; traduction persane Baqlî); Sârî ’Abdallah, Jawâhir, V, 120.

MUQATTA'A 39

Akhb. 74 (ms. T, p. 54, 1. 12-13), v. 2, d'après Ibn Fâtik; Harawî, Tabaqât (publ. ap. Taw.. p. 138), d’après Ibn Bâkûyé (deux recensions: d’Ibn Khafif, v. 1-3, et d’Alî Daqqâq, v. 1, seul différent); Sarrâj, Luma'. 346 (= Baqlî, Qudsiya, fol. 174a), v. 3, 1.

MUQATTA'A 40

Taq., ms. K, p. 95; M, p. 46, v. 1-4; Ms. Geniza, VII.

MUQATTA'A 41

Abû Hâtim Tabari, cf. Mél. Félix Grat. 1946: isnàd, v" 115. Watwât, Ghurar, 286. Taq., ms. L, fol. 329a.

MUQATTA'A 42

Akhb. 53 = Taq., ms. K, p. 61 ; L, fol. 340a; T, p. 45 «à l’Orient[XIV] ».

MUQATTAA 42 BIS

Daylamî, 'atf, 73b, ap. E. 2* éd., p. 449; etMél. J. Maréchal, 2, 279.

MUQATTA A 43

Taq., K, p. 81 ; L, foi. 326a (v. 2); Kôpr. n” VIII; Fâtih 2650.

MUQATTA A 44

Taq., ms. K,p. 92 (publ. Recueil, p. 60) : lettre à un ami, Ibn ’Atâ. Akhbâr, 110.

MUQATTA A 45

Qannâd, Hikâyât, ap. Khatîb, Ta'rîkh Baghdâd (édit. Recueil, 72: v. 1,2, 4), Sam’ânî et Safadî, Wâfî, sect. XI (cf. Recueil. 255, v. 1,2, 4, 3). Taq., ms. K, p. 99, v. 1-5. Ibn Kajj, selon Qazwînî, Ajâïb, v. 1,2, 3, 5, 4. Râghib, Muhàda- rât, 197. Ibn Fadlallâh, Masàlik (d’après Jabalí), v. 1,2, 4.

MUQATTA A 4«

Akhb. 55 = Taq.. ms. K, p. 63, v. 1,3; L, fol. 340a, v. 1-3; T, p. 47, v. 1-3;

M, 14, v 1, 3.

MUQATTA A 47

Taq., ms. L, fol. 329a; Abû Hâtim Tabari, ap. Khatîb, Ta'rîkh Baghdad (= Watwât, Ghurar. 286).

MUQATTA A 48

Ms. Geniza, n° X — ms. Fâtih 2650, 101a (corrections publ. dans M.FK., 358).

MUQATTA A 49

Akhb. 39 = Taq., ms. J, p. 4b; K, p. 44; M, p. 38; T, p. 44. 'Abdalqâhir Baghdad), Farq, 249 (v. I).

MUQATTA A 50

Akhb. 45 = Taq., ms. T, p. 39.

MUQATTA A 51

Taq., ms. L, fol. 325a (v. 1-3). Ibn ’Arabî, Futûhât, chap. LXlx = I, p. 498 (v. 2b; cf. les dhakhâïr, sur III, 3), et Muhâdarât, II, 152 (v. 2a. Ibn Rajab, Lataïf, 298 (v. 2),

MUQATTA A 52

Suhrawardî Halabî (ap. Shahrazûri; Dawwânî, Bustán). Ibn al-Qayîm, Madârij, II, 114; III, 140. Ibn ’Ajîba, Tqâz, 345 (avec les trois vers qu’Ibn al-’Arif y a ajoutés). H. Mustawfî, Nuzhat, 107 (six vers aussi).

MUQATTA'A 53

Taq., ms. M, p. 47; Suhrawardî Halabî (Alwâh, ms Berl., 153a;ap. Dawwânî, Bustân). Nâgûri, Tawâlï, fol. 252b, v. 1. Munâwî, Kawâkib. Ibn ’Aqîla, Ta'rîkh. Cor. XXXVI, 78.

MUQATTA A 54

Taq., ms. L, fol. 328b. Qushayri, Latàif (réf. deest), 3e vers. Attribué à Ali b. Sahl Dînawari (+ Caire, 941 de notre ère) par Shaydhalâ (ms. Berl., 3082, 163).

MUQATTA'A 55

Akhb. 50 = Taq., ms. L, fol. 339b, v. 1-4; K, p. 58, 1-5; T, p. 43, 1, 3-4. ’A. Q. Hamadhânî,Zubda (ms. I.O. 445, fol. 64b-65a, v. 1-5; ms. Paris, suppl. pers. 1356, fol. 80a, v. 1-3, 5). Baqlî, Shath. (ms. QA, fol. 164a, ms. Shahid ’Ali, fol. 136: trad, pers., v. lb-5). Anqirawi, Sherh-i-methnewi, I, 6: v. 1 et 5. Sâri 'Abdallah, Jawàhir, t. IV, p. 102, v. 1-5. Majm. Vienne (turc III, 508a, fol. 13a, v. 1-2). Ridâ Qulî, Riyàd. n° 8. Nâbulsî, Hatk. v. 1,2, 5. Ibn 'Arabî, Tuhfat al safara, ms. P. 6614, 24a; M. H. Sebzévari, Sharh al Jawshan. 3, 329. ’Irâqî, Lama’ât, 66a.

Cinquième vers commenté ap. : ’A. Q. Hamadhânî, Shakwâ, ms. Berl. 2076, fol. 42 a; Najm Râzî, Mirsâd, ms. Paris 1082, fol. 64a.’Alî Hariri (ap. Ibn Taymiya, Majm. ras. wa mas., 62, 82). Nasîr Tûsî, Awsâf, V, § 6. ’Afîf Tilimsânî, Sharh al-mawâqif, §kibryâ. Râshid al-Dîn, Latâïf, fol. 320a. D. Qay- sâri, Sharh al-fusûs. ms. Caire, fol. 272b. M. D. Fânî, Sharh, ms. I. O. 1922, fol. 207a. Sadr Shîrâzi, Asfâr, p. 26. Gümüshkhânî, Jâmï, p. 244. Le -Haft Bab • ismaélien le fait dire à Ibn Sabâ brûlé vif. Ishkavéri, Mahbûb. Baqli, Tafsir, I, 416, Mantiq, 39b.

MUQATTA'A 56

Akhbàr, p. 94 (texte fr.); p. 81 et 141 (texte arabe); Taq., ms. K, p. 60; T, p. 44. H. Nâgûri, Tawâli', ms. Calc. E 126, 21 1, vers 1. Sha'râwî, Latâïf. 2. 84.

MUQATTA'A 57

Sarrâj, Luma’. 361, 384: v. Ia, 2a, lb, 2b (attribués à ba' duhum). Kalâbâdhî, Akhb., ms. Paris 5855, fol. 264a : v. 1 (attribué à ba d ashâbinâ). Ghazâlî, Mishkât, p. 24, et Baqlî, Tafsir (in Our., v. 59) restituent formellement le distique à Hallâj. Ibn 'Arabî, Fut., II, 372, 433; IV, 160. 444, 502; Dhakhâïr, LUI (sur v. 2). Qazwînî, 'Ajâïb, II, 110. Ms. Vienne, turc. III-5O8, fol. llb. Taq., ms. K, v. 2-4 de la longue recension d'Ibn Yazdânyâr; ms. M, 41, v. 2-4 (in fine d'Akhb., n° 44).

MUQATTA’A 58

Akhb. 40 =Taq., ms. J, fol. 4b; M, p. 39; K, p. 44; L, fol. 338a. Bistâmî cite le vers 1 à la fin de ses Fawâïh (cf. Dasûqî, ap. Sha'râwî, Lawâqih, I, 180).

MUQATTA'A 59

Tawâsin, III, § 12 (édit., p. 24: traduction persane de Baqlî). Sâri 'Abdallah, Jawáhir, t. V, p. 120 (texte arabe). Hurayfish Makkî, Rawd fâiq, 233 (ibid.). Maqdisi, Tawwâbin, ms. P. 1384, f. 136a (+ 2 vers).

MUQATTA'A 60

Conservée uniquement up. Geniza, n° VII, en caractères hébraïques (Hirschfeld, ap. J.Q.R., 1903, p. 176).

MUOATTA'A 61

Akhb. 3 bis = Taq., ms. J. fol. Io; L, fol. 336a; M. 45 ; Berl., fol. 43a. Sulamî, Tabaqût. Harawî, Tabaqât. Jâmî. Nafahât, 174. Lâri, Hàshiya, ms. Paris, fol. 45b. Shaydhalâ, ms 3082, 159.

MUQATTA'A 62

Fâris (ap. Sulamî, Haqâïq, in Qur . XXXIII, 72 = E., p. 56*, n° 131); ms.

Taqawî

MUQATTA A 63

Taq., ms. K, p 82; L, fol. 326b; T, p. 10. Baqlî, Shathíyát, ms Sh. 'A, p 126 (v. 2a, 3a). Shaydhalâ, ms. Bed. 3082, 162.

MUQATTA A 64

Ibn al-Jawzî, Narjis al-qulûb (deux manuscrits).

MUQATTA A 65

Akhb. 46 = Taq., ms. K, p. 54; L, fol. 339a; S. p. 13; T, p. 40. Fakhr Fârisî, Jamba, 41a (v. 1 et 4).

MUQATTA A 66

Akhb. 62 = Taq., ms. M, p. 43; K, p. 72, v. Ia; cf. ms. L, fol. 327b. Kalâbâ- dhî, Ta'arruf ( — E., p. 13*). Jâmî, Naqsh. fol. 1 10b. Ms. Kôpr., n° VII. Akh- bâr, n° 62; Fâtih 2650, 101b.

MUQATTA A 67

Taq., ms. L, fol. 342a.

MUQATTA A 68

Abû ’ Alî Fârisî, selon Ibn al-Qârih, Risàla, édit. Muqtabas. V-9 (1910), 551, et Abû 'l-’Alâ Ma'arri, Ghufràn (édit. Caire, 1907, 150, et édit. Nicholson, J.R.A.S., 1902, 834). Maqdisi (Ps. Balkhî), Bad'. Il, 90. Sarrâj, Luma . 354 (v. 1-2). Taq., ms. K, p. 95; ms. T, p 13-17 (avec un long commentaire) concluant ainsi: «quelle excuse T'adresser pour ce que Toi, Tu as fait? Tu es ¡'Être véritable, je n'existe pas: c'est Ton acte qui me traverse par contrainte et par force. Ce n’est donc pas un acte que mon excuse, vu l’ejrcèi de mon bégaiement et de mon erreur. Raffermis donc mon intention, et confère-lui de vouloir. »

MUQATTA A 69

Taq., ms. L, fol. 327a; K, p. 87.

YAT1MA I

Ibn’ al-’Arif, Mahàsin, ms. Berl. 2834, fol 163b (2 vers); ms Es’ad, 1437. Ibn'Arabî, Fut., II. 362. Ibn Taymiya, Jawàb sahih. Il, 175. Mar’î, fol 55b. Attribué à Shiblî par Saffûri (Nuzha, I, 55). Turkumânî, Luma . I63b.

YAT1MA 2

Akhb. 66 = Taq., Ms. M., p. 28; ms. K. p 16; M, p. 28 (Recueil, p. 59); ms. Berl. pers. n° 14, fol. 180b, in fine n" 38. A. Q. Hamadhânî, Zubda, ms. Paris, suppl. pers. 1356, fol 68a. Sârî ’Abdallah, Jawàhir, II, 345 (à Junayd), IV, 102. Ms. Londres 16.659, fol. 560b; ms. Walî al-Dîn 2061. fol. 163b; Ridâ Qulî, Riyâd, n° 10. Yâr 'Alî, Lamahât, 97*.

YAT'WA 3

Akhb. 51 = Taq ,ms. L, fol. 339b; S, p 13; K. p 59; T, p 44 Attribué par Munawî à Bûshanji.

YATtMA 4

Sulamî, Haqàiq (in Qur.. XXXIX, 23: selon Fâris) = E., p. 58*.

YATtMA 5

Kalâbâdhî, Ta'arruf (nü 52, ap. E, p. 20*). Imité par Rudhabari (Sarrâj, Luma’, 249).

YATfMA 6

Tawâsin, VI-15 (ms. L, et recension Baqlî, édit., p. 47).

YATtMA 7

Ibn Yazdânyâr, ms. Caire, fol. 12a. (Cf. Subkî, 4, 64). Fakhr Fârisî a repris cette image Uamha. 42b), en inversant les rôles. Baqlî l'a reprise aussi (voir St. Or. Pedersen, p. 238).

YATtMA 8

H-b-M-b-Habîb Naysabûri, 'uqalâ'l majânîn, 152; Baqlî, Mantiq. 39b.


INDEX


Index i

83 pièces hallagiennes
reçues dans la présente traduction
et 8 vers isolés

1     2 QASÎDA :

1     labbayka, labbayka! .. ma'nâ'î!   41

2      lU'ilmi ahlun... tarâtîbu.         43

3.      yâ mawdi’al nâzri... khâtiri.   45

4.      sukûtun, thumma samtun... ramsu.        46

5 man sârarûhu fa abdâ... ghashshâshâ.    47

6,     an'â ilaykâ nufûsan... qidami. 48

7     ashâra lahzî bi’ayni... hammi. 49

8.     lam yabqa baynî... burhânu.   50

8     bis. al-'ishqufî azali... abdâhu. 51

9.      'ajibtu tninka wa minni.          53

10.     uqtulûnî, yâ thiqâtî... mamâti! 54

11.     yâ tâlamâ ghibna... qamar.     56

71 mucatta’a:

1. wa’ayyu ’l-ardi... samâ'u.      59

2     lia kam anta... lâ tarâhu.       60

3     kânat liqalbî ahwâun... ahwâya. 61

4. idhâ dahamatka... rajâ.          62

5 subhâna rnan azhara... al-thâqibi.          63

6.      katabtu wa lam aktub... kitâbi. 64

7.      urîduka, lâ uriduka... iqâbi.  65

8.      kafâ hazanan... ghâ'ibu.        66

9.      tala’at shamsun ghurùbi.      67

10.     ra’aytu Rabbi .. qála : anta! 68

11.     lya habibun azûru... lahzáti. 69

12.     stmt ’l-sarâïri matwiyun... bitiyyáti.      70

13 famâ lí bu’dun... wâhidu.       71

14. la talumní fa l-lawm... wahidu. 72

15-16. qad tasabbartu... fûwâdî (deux pièces). 73

16 bis. yâ sháhidan gháíban... mawjûdu.    74

17 haqíqatul-Haqqi mustanir... khabír. 75

18. anta 'l-muwallihu H... dhikarí.        76

i 9. mawájidu Haqqin... akábiri.   7 7

20.      idhá balagha 'l-sabbu... dhikri.       78

21.      aqdul nubuwwati... támúri.     79

22.      li anwári núri 'l-dini... asráru. 80

23.      sakanta qalbi wa fihi... 'l-járu. 81

24.      al-hubbu má dáma maktuman... hazari.     82

25.      ghibta wamá ghibta... surúri. 83

26.      yá shamsa! yá badra!... wa náru!   84

27.      ahruf un arba'a bihá háma... wafikrí.         85

28-29. juhûdî laka taqdisu (deux recensions). 86

30. hawaytu bikullî... fî nafsí.      87

3     I.  wallahi ma tala’at... bi anfâsi.      88

32.      yá nasim al-ríhi... illa’ atashâ. 89

33.      ajibtu likulli... ardi.                90

34  má ziltu atfúw... wa'nhattu.    91

35.      makânukâ min qalbî... mawdi’u.     92

36.      idkd dhakartuka... awjàu.      93

37.      nadimí ghayru mansûbin... al-hayfî.          94

38.      sayyarani 'l-Haqqu... wathîqa. 95

39.      wahhidni Wâhidi... tarqu.      96

40.      rukûbu ’l-haqîqati... tadiqqu. 97

41     jub’lat rûhuka... fatiq.            98

42.      dakhaltu binâsùti... sidqi.      99

42      bis. ittahada l'âshiqu... wâmiqi.       100

43.      fîka ma ná yad'û... ilayka.   101

44.      hammi bihi... ilayka.            102

45.      dunyâ tukhâdi’ uni... hâlahâ. 103

46.      'alayka yá nafsi... waltakhalli. 104

47.      muzijat rûhuka... zulâli.       105

48.      ni’ma 'l-i'ânatu... khilalih.   106

49.      thalàthatu ahrufin... kalámu. 107

50.      tafakkartufî'l-adyâni... jammâ. 108

51.      yá lá'imí fi hawûhu... lam talumi.   109

52.      badá laka sirrun... zalámuhu. 1 10

53.      haykaliyu 'l-jismi... ’alïm.      Ill

54.      qalbuka shay'un... zulamu.  I 12

55.      ahi! ana, am Anta?... ithnayni! 113

56.      a lá abligh ahibbá’i... al-sajïna.     I 15

57.      ana man ahwá... badana.    I 16

58.      yá gháfdan, lijahálatí... wabayáni. 118

59.      khátabaní 'l-Haqqu... lisáni. 119

60.      [kadhá]’ jtabáni... arrafani. 120

61 anta bayn al-shagháfi... ajfáni. 121

62.      hammalta bilqalb... al-budunu. 122

63.      bayánu bayánt l-Haqqi... lisánuhu. 123

64 raqîbânî minnî shâhidâni. . tarânî.     124

65.      ’irja' ilâ 'Llahi... illâ Hû.       125

66.      man râmahu bil ’aqli... yalhuw.         126

67.      lastu bil tawhîdi... aslhuw.     127

68.      yâ sirra sirrî, tadiqqu...hayy. 128

69.      ismun ma’ al-khalqi... ma' ânîhi.       129

8 YATÎMA (VERS ISOLÉS):

1. mithâlukafi 'aynî... taghîbu?   133

2 kafartu bidîni 'Llahi... qabîhu, 134

3.      faqultu... hya 'l-shamsu... bu’du.        135

4.      qad kunlu fi ni’mati... batiri. 136

5 shartu 'l-ma’ârifi... muttali’i.  137

6.      dhikruhu dhikrî... illâ ma’an? 138

7.      lâ tu'arrid binâ... 'ushshâqi.  139

8.      idhâ waswasati... walkursi.   140


índex ii

Noms des poètes cités


 

 

 

 

 


Xbdelkadcr (l’émir), 55, 145.

Xbu Madyan, 53.

Abû ’l-’Atâhiya, 10, 47.

Abû Nuwâs, 53, 54, 61, 75, 88, 94.

A.bû Sa’îd, 124.

\ghânî (Kitâb al-), 122.

Alî, 103, 146.

Amilî (Bahâ), 61.

Amilî (Muhsin), 94.

Ansan (Khâjé Abdallah), 33.

Antara, 121.

Attâr, 33, 94.

i, voir Ibn.

;hdâdî (’A. W ), 115.

lâ Zuhayr, 81.

hshâr, 98, 116.

âmî (A. Y.), 65, 86. 105.

ituri, 105.

hanjî, 152.

tî, 64.

îrî, 59, 109.

Dasûqî, 145, 150.

Dhû 1-Nûn, 47, 146.

Dînawari, 149.

Fakhr Fârisî, 8, 35, 42, 48, 54, 116, 147, 151, 152.

Ghazâlî (Abû Hâmid), 116, 150.

Ghazâlî (Ahmad), 85.

Hâfiz, 36, 113.

Harawî (= Ansâri), 48 49, 96, 144, 150.

Hurayfish Makkî, 43, 55.

Ibn Abî Hafsa, 55.

Ibn Abî-i-Khayr (= Abû Sa’îd), 22, 33.

Ibn Ajîba, 63, 67, 69, 85, 145, 146.

Ibn ’Alioua, 53, 63, 68.

Ibn ’Arabî, 32, 38, 47, 49, 55, 63, 65, 68, 71, 78, 116, 146, 149,

150,     151.

Ibn al-'Arîf, 55, 65, 145, 146, 149,

151.

Ibn Bâdis, 146.

Ibn Dâwûd al-Zâhiri, 36, 88, 124, 135.

Ibn al-Fârid, 43, 76, 83, 88, 89, 109, 113.

Ibn Kulayb, 83.

Ibn Muhalhil, 94.

Ibn al-Qârih Halabî, 36, 151.

Ibn Sab’în, 90.

Ibn Sanâ al-Mulk, 94.

Ibn Shuhayd, 45.

Ibn Simawnâ, 55.

Ibn Yazdânyâr, 150, 152.

Iqbâl, 36.

’Irâqî, 68.

Janadî (Muayyad al-Dîn),55, 86.

Jildakî, 8, 10, 45, 144. 145.

Junayd, 14.

KhaK' (Ibn al-Dahhâk), 94.

K^asibi, 111.

Khwârizmî (Husayn), 10.

Ma’arri (Abû'l-’Alâ), 8, 36, 128.

Maqdisî (Ibn Ghânim), 9, 36, 143, 144.

Maqdisi (Ism.), 64.

Misri (= Dhû ’1-Nûn), 47, 146.

Misri (Niyâzî), 55.

Mutanabbî, 82.

Mu'ayyad Shîrâzî, 70.

Nâbulsî, 53, 111, 143, 146, 150.

Nûri (a. Hy), 48.

Nusayb, 122.

Qabûs Jurjânî, 43.

Qâdirî (Abû'l-Barakat), 42.

Qannâd, 48.

Qaylawî, 146.

Qunawî (Sadr), 55.

Râbi'a, 65 81

Râghib Isfahânî, 105

Raqqâshî, 53.

Rashid al-Dîn, 105, 113.

Rifâ'î, 103.

Rûdhabân, 152.

Rûhî, 147.

Rûmî (Jalâl al-Dîn), 35, 55, 116, 148.

Ruusbroec, 94.

Semnânî ('Alâ al-Dawla), 54, 116.

Sandal, 61.

Sari Saqatî, 145.

Sarrâj (a. S.), 151.

Shiblî, 18, 29, 45, 67, 71, 15).

Shushtarî (’Ali), 69, 85, 128.

Sûdî, 75.

Suhrawardî, 35, 76, 80, 113, 149.

Tawhîdî, (a. Hayyân), 34, 83, 148.

Tilimsânî ( Afîf al-Dîn), 82, 113.



Index ni

Versets coraniques cités


 



IMPRIMERIE BRODARD ET TAUPIN À LA FLÈCHE
DÉPÔT LÉGAL FÉVRIER
1992. 14655 (1 1 3OF-5)


Dîwân

Un dîwân est une collection complète des œuvres poé­tiques d'un auteur. Le Dîwân de Hallâj a été établi dans son texte en 1931 par Louis Massignon. La présente édi­tion donne toutes les pièces jugées authentiques de l’édi­tion de 1931, auxquelles Louis Massignon, connaisseur incontesté de Hallâj, a ajouté une biographie du saint, né en Iran vers 857 et décapité à Bagdad en 922, après un procès de neuf ans qui aura été l’épreuve cruciale de sa vocation. Si Hallâj, l’un des plus grands et le plus célèbre mystique de l’Islam, ne se considérait pas d'abord comme poète, son Dîwân demeure comme un des plus beaux joyaux de la poésie mystique universelle.

« Ton image est dans mon œil, Ton mémorial sur mes lèvres, Ta demeure en mon cœur, mais où Te caches-Tu donc ? »

 

Traduit de l’arabe et présenté par Louis Massignon

Seuil. 27 r. Jacob, Paris 6

ISBN 2.02.014655.X / lmp. en France 2.92


I. «Avertis» réfère à - m adna- (Cor. LVI1, 9).

COMMENTAIRE. Cf. P.III. 327; ce petit poème a deux recensions, dont les divergences sont importantes . la première, des Tawâsin, représente la doctrine hallagienne selon Wâsiti ( = Hàshimi'.’ cf. le fragment n° 5 Dârà Shikûh ; ap. Recueil, 159); la seconde, du Dîwân. l'interprète selon Fâris (cf. fragm. ap. Baqli, tafsîr de Qur., //. 32 = E., 77* *. et Tav. ,, p. XI). La première a été retouchée dans un sens maniste et reprise par Muayyad Janadi (ms. Vienne, turc III, 508, fol. 1 lb; et Sâwî, Hâshiya, III, 152):

• Qu'est-ce qu'Adam dans TEtre, et qu'est-ce qu'Iblîs 9 Qu'est-ce que le trône de Salomon et que Bilqis ? Tout est allusion, à Toi, qui y es visé ; ô Toi qui. pour les coeurs. es un fer magnétique... • — Cf. aussi distique attribué à Bistami (Ibn abilhadîd, sharh, I. 35). — Le tahwîs est la danse de guerre tournoyante des Bédouins.

Rime : sin, mètre : hazaj.

I. Sur cet emploi de - ah!-, petit cri étranglé du « Fiat-, cf. Tawâsîn. 4. 11 , 5, 2; 9. 3. C'est un des noms suprêmes de Dieu (Sâri Saqati), un Nom exorcisant (Le 4, v. 32 sq.}.

COMMENTAIRE. Voir P. III. 55, Akhb., p. 77-80 (du texte arabe) et Q. T.. IV. p. 80* *-8l* (n° 2). où l'on trouvera le texte intégral des remarques de Suhrawardi Halabi (- il a rendu licite aux autres de verser son sang »), Nasîr Tûsi (- ce vers est une prière, et Dieu l'a exaucée, en lui faisant dire : Je suis la Vérité ■■). ' Afîf Tilimsâni. Rdshid al-Dîn, Sadr Shirâzt. et surtout Ibn Taymiya (trois sens possi­bles; le premier impie, le second excusable, le troisième véridique): sur le vers 5. Les manuscrits alors connus faisaient du poème la conclusion de Dîw., n°52. Les manuscrits K et T. trouvés depuis 1914, et plus complets en cet endroit, prouvent que ces cinq vers sont à transposer tout à la fin de Akhb. 50 (récit d'ibn ' Abdalghani), dont la dernière ligne, coupée de façon abrupte, est à compléter par ce court dialogue-ci ;

• Et je lui dis : "Comment est donc la route qui mène à Dieu ? — H n'est de route qu'entre deux, et ici, avec moi, il n'y a plus personne. ” Je lui dis : "Explique! — Celui qui ne saisit pas nos allusions ne saurait être guidé par nos explications. " Et il récita... »

Hàfîz a imité le vers 5 à la fin de son ghazal n" CCXXVHl (cf. son LXXXI-2 avec le vers I).

Ibn al-Fârid a fait allusion au vers 5 (yuzâhimunî) dans son Nazm al-sulûk, vers 208.

Rime : nûn, mètre : basît.



[1] Qasida IV, III. 1V (2' recension : courte), n™ 34. 48, 66. qas. V, Vil. x1, 43, x2. x3, x*. qas. II. x5, x‘, x7, x" x’. x10, x11, 24, x12, x13, x14 (= Diw. p 123 en bas).

[2] Qas II, n" 24, qas IV (2' recension: courte). III. 34, qas. Vil, 66.

[III] Quatre poèmes spéciaux à la Qissa sont donnes dans l'édition de 1931. p. 125 (n° 6), 128 (nos 14-15), 129 (n° 17). Aucun n’est traduit ici.

2.  Pour Abûl‘ Atâhiya, /. < p 113; pour Shushtari, p 134, et notre étude ap. Mél. William Marçais. 1950, p. 251-276.

Pour les isnàd hallagiens, voir leur répertoire détaillé ap Mél. Félix Grai, 1946, p. 385-420

3.  Cf. L'Œuvre hallagienne d’Altar. ap. Rev. ét. isl.. 1946. p. I 17-144 ; et La Légende de Hallacé Mansur en pays lures, id.. !. c.. p. 67-1 15 (voir P., II, 382-406 et II. 240-288).

[IV] Ce texte est repris, avec des additions, du texte persan publié à Kabul à cent exemplaires par MAR Ferhadî en 1951 , d'après un texte français plus bref paru dans Dieu Vivant à Paris en 1946. cahier IV

[V] De ton corps (cf Mt 26. 61)

[6] 11 y eut aussi une chaîne continue d'adversaires chez les Lecteurs du Coran et giammainens (Ibn Mujâhid, basaui, Ibn al-Qành, Ma'am), chez les juristes zahintes (Ibn Dâwùd. Ibn Hazm. Ibn Dihya). et chez des ash'antes (Baqillànt, Abû Ishaq IsfaramL Juwaynî) pour eux Hallâj est un d-ajjal . un antichrist annonciateur du Jugement Inversement les Yezidis voient en Hallâj le septième Ange qui • cardera le monde

[7] Ln mai 1940. une femme turque, vatiunant sur la guerre mondiale a Istanbul, déclarait les hommes vont être punis, le Cardeui iHallâji va volatiliser le monde iRc\ ét. isl.. 1946, p. 100 et P. IL 272, n. 2).

[VIII] Le ms Fâtih 2650 (f 101 a) donne une recension, sans changement au v, 7. mais qui s'échelonne ainsi: v. I (recueillement, silence murmure — science, extase, calcination). •i 3 (marée, fleuve, grève — nuit. aube, soleil).

COMMl NTAIRh. Sur l'ensemble. voir P. Ill, 3>f>. Allusions lorunic/ues au vers 3 (Cor. XX, 79) et au vers 8 (Cor. XX, 107).

Rime : sîn. mètre : wâfîr.

[IX] «Qui mange» réfère à Cor. V, 79, et à ’Isa-b-Maryam.

commentaire Cf. P III. 113. Selon le Taq. ( Ara b. Yazúl Qaz*ini), Bundárlbn al-Husayn Shirazi (m. 353/964) en condamnait les deux premiers vers.

Daylamî et Ibn Bákúye attribuent ce takfîr à Ibn Khafif lui-même. Ibn 'Arabi, selon Ibn 'Ajiba ('Iqâz, /56) et Ben 'Alloua ont imité le vers l (Minah, 60). .Semnani critique ce tercet célèbre, que le manuel nusayri de Hamàh admet. Far^hâni l'attribue à Nüri. Ces vers terminent l'abhar al-'ashiqin de Rùzbehan Baqlî.

Rime : bû, mètre : sari'.

[X] Le mot «intrus» réfère à Cor. LXX1, 27.

COMMENTAIRE. Le sens est clair : il y a, au vers I. une allusion au mot de Râbi'a : al-jâr, thumma 'l-dàr. jouant sur un proverbe connu, pris dans un autre sens (E, 194). Bahâ 'uldin Zuhayr a dilué ce quatrain en dix vers (Dîw.p. 55 ; cf. 53, 61).

Rime : râ, mètre : basît.

1. Sâhib al-khabar est l'indicateur professionnel.

[12] «Ô mon ouïe... » réfère au hadith al-taqarrub bit nawâfil.

COMMENTAIRE. Theme de Fiimour qui s'expose au perd: traite après lui, par Mutanabbi ■ «u ahla 'lhawa ma shakka. . ■■ . et par Afïf Tdimsanî ■■ wa asda- qu'lhubhi ma jallat brhi 'Ituhamu .

[XIII] Allusion à Cor. XXXIX. 67.

commentaire P /. 335. Même idée dans le titre du K ba d al Wâhid, dlbn Sab'în.

Rime : dâd, mètre : tawil.

[XIV] Signe du Jugement dernier: miracle annonçant la Qâyim shi’ite.

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